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3,54

sur 1018 notes
Il y a quelque chose d'un peu masochiste à se lancer dans un Carrère dont les oeuvres amènent toujours quelque chose de troublant, de douloureux, de dérangeant.
J'ai retrouvé dans celui-là, pourtant plus ancien, le même sentiment de malaise croissant que dans « l'Adversaire », ce même glissement progressif et inéluctable d'une situation apparemment stable, installée, bourgeoise, vers des recoins obscurs de l'âme, qui se mettent peu à peu à résonner sur nos propres zones de vide et foutent franchement la trouille.
Ainsi de ce personnage archétypal du type à qui rien ne peut arriver, architecte, parisien, bien marié, belle situation, dont la vie va pourtant partir en vrille quand il va se raser la moustache et que personne ne s'en rendra compte. Ni sa femme, qui lui affirme qu'il n'en a jamais porté. Ni ses amis, qu'il n'a peut-être jamais eus.
Le doute, la paranoïa s'installent, il tombe dedans et le lecteur avec. Tout vacille, jusqu'aux fondements de son existence, les solides briques sur lesquelles reposent sa vie se délitent et pire, s'évaporent. Effroi vertigineux quand tout ce qui lui paraissait être disparaît, entraînant son être dans le néant…
Il va me falloir un petit moment à me remettre de ce roman flippant et fascinant.
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Le sujet abordé par Emmanuel Carrère m'a fait sourire, car il n'est effectivement pas rare que lorsqu'un homme supprime sa moustache, on se demande ce qui a changé chez lui sans pour autant s'apercevoir que c'est cet élément de sa physionomie qui lui fait défaut. Dans ce récit, c'est bien pire, et dès le début, je me suis sentie admirative de l'écriture d'Emmanuel Carrère qui part de trois fois rien pour donner naissance à un écrit de plus de cent pages, moi qui parfois me demande comment on fait pour se documenter quand on écrit un roman, la réponse ici est claire : on laisse divaguer sa pensée, on y ajoute une peu d'effet papillon et la magie opère.

Si l'idée de départ m'a fait sourire, je m'attendais à quelque chose de beaucoup moins dense. Et j'ai vraiment peiné en lisant ce roman, j'ai trouvé le sujet de départ complètement dilué et le récit est devenu dans mon esprit, un beau baratin, bien écrit certes, Emmanuel Carrère maîtrisant sans aucun doute, la pratique de la langue de Molière, mais trop éparpillé : l'auteur avait-il besoin de décrire le scénario du film que l'épouse du héros a regardé en l'attendant ? Et ce n'est qu'un exemple. L'auteur m'a donné à maintes reprises, l'impression de dévier, de sauter du coq à l'âne, de se répéter, de s'écouter écrire. J'avoue humblement avoir passé quelques pages parce que je trouvais cette lecture interminable.

La fin est surprenante et ne cadre pas avec l'ambiance du récit.

Lecture bien mitigée donc, je le regrette.
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Lorsque, comme moi dans ce cas, on a vu le film avant de lire le livre dont ce dernier est tiré, il est difficile d'extraire de son esprit le visage des acteurs superposé à celui des personnages du roman. C'est donc avec Vincent Lindon en tête que j'ai redécouvert avec plaisir cette histoire simple et brillante. le trouble de la lecture était encore accentué par le fait que je n'arrivais pas moi-même à me souvenir du visage de Vincent Lindon avec une moustache, tant on a l'habitude de le voir glabre.

L'idée est donc toute simple et géniale. Un jour, un homme décide de raser sa moustache pour s'amuser et pour surprendre son entourage, sa femme, ses amis. Personne ne remarque rien et ne réagit, ce qu'il prend à son tour pour une blague organisée à ses dépens. La blague tourne court et l'homme s'enfonce dans une forme aiguë de paranoïa. le récit est construit de telle façon qu'on ne sait qui a raison. Les indices s'effacent, on ne sait si c'est l'homme qui les détruits lui-même, si c'est sa femme qui les dissimule et veut ainsi le rendre fou où s'ils n'ont tout simplement jamais existé. Sa vie elle-même a-t-elle existé et ses proches sont-ils des êtres réels ?

Emmanuel Carrère construit son livre un peu comme un roman psychologique, il touche presque à la science-fiction et nous force à réfléchir par l'absurde sur la condition humaine et le principe de réalité. Une réalité tout à fait relative qui peut être déniée par le simple regard des autres.

5 septembre 2012
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Mais quelle histoire démente !
Un matin, un homme se rase la moustache. Sa femme ne s'aperçoit de rien. A ses questions étonnées, elle répond qu'il n'a jamais porté de moustache.
Qui ment ? Qui est fou ?
Au fil des pages on est emporté dans une spirale hallucinante, obsédante et angoissante où le narrateur craint de sombrer dans la folie (et le lecteur avec). Pour sûr il tombe dans la paranoïa.
Je ne sais pas trop quoi en penser. c‘est fatigant un roman pareil.
L'écriture est belle, descriptive, cinématographique, mais l'histoire vraiment tordue.
De plus,la fin inattendue fait encore plus perdre les pédales et n'apporte pas de réponses.
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« La Moustache » commence et se termine par un coup de rasoir. Tout un programme, n'est-ce-pas ? le présupposé de départ est pourtant très simple, presque amusant dans son absurdité. Un soir, un homme décide de raser la moustache qu'il porte depuis dix ans, espérant ainsi prendre par surprise et amuser son épouse et ses amis. Une petite plaisanterie innocente a priori tout à fait dépourvue de conséquences. Problème : personne ne semble noter la disparition de ladite moustache. Aux questions répétées du personnage principal, tous apportent la même réponse extravagante : il n'a jamais porté de moustache de sa vie. Et la farce tourne à l'aigre… D'abord oscillant entre l'agacement et l'amusement, le personnage principal se laisse progressivement gagner par l'inquiétude. A l'inquiétude succède la peur. A la peur, la paranoïa.

Ni thriller, ni policier, ni fantastique, « La Moustache » est un roman à part, un de ceux qui vous prend à la gorge, fait monter dans votre oesophage une angoisse diffuse, indéfinie. Ce malaise est accentué par le style employé par l'auteur, très précis, très détaillé et rapportant chaque action de ses protagonistes avec une méticulosité presque maniaque. Dès le début du roman, on s'identifie facilement au personnage principal, on partage sa peur et sa confusion, le sentiment de trahison grandissant qu'il développe vis-à-vis de ses proches, mais cette identification même devient rapidement source de crainte. le doute s'installe progressivement : que se passe-t-il exactement ? Une farce sinistre ? Un complot ? Une distorsion improbable de la réalité ? Ou l'explication la plus vraisemblable et la plus terrifiante de toutes : la démence, la vraie, celle qui vous coupe des autres, vous ronge de l'intérieur, démence d'autant plus glaçante qu'elle s'appuie sur un comportement et un raisonnement rationnels.

« La Moustache » n'est pas un roman agréable à lire (et, comme l'affirmait une critique précédente, indubitablement pas un livre à terminer en mangeant. Aux trois quarts du bouquin, je caressais vaguement l'idée de regarder l'adaptation filmée avec Vincent Lindon et puis… ben non, peut-être pas, tout compte fait), mais tout de même un excellent roman. Il m'a marquée durablement et le malaise causé par la lecture a perduré longtemps après la dernière page tournée.
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Ca commence comme un vaudeville : le héros se rase la moustache pour surprendre sa femme et son entourage, et personne ne s'en aperçoit... ils prétendent même qu'il n'a jamais eu de moustache !

Mais ensuite, ça devient autrement plus dérangeant qu'un vaudeville : si personne ne ment ou ne joue la comédie, c'est qu'il y a un problème bien plus grave chez le héros ou autour de lui. Et il va s'enfoncer dans la spirale de la paranoïa et de la folie.

Grande fan de Carrère, j'ai retrouvé ici sa façon particulière de mêler au récit des considérations annexes, ainsi que son style pour décrire l'intimité d'un couple. Même s'il réussit fort bien à décrire l'enfer, j'ai quand même senti que c'était une oeuvre de jeune, moins aboutie que ses dernières.

Challenge Multi-Défis - item 46 : Un roman dont le personnage principal porte la barbe ou la moustache
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Un court roman mais très dense en émotion! Ah la moustache!!! Un homme qui prend tout le plaisir de raser ses moustaches un beau matin esperant surprendre tout d'abord sa femme, ensuite ses collègues de bureau, puis après des tiers personnes qui peuvent bien se rappeler de sa moustache mais il n'en est rien, car, tout le monde se rappele qu'il n'avait jamais eu de moustache. Alors qu'est ce qu'il avait rasé, lui, alors que les poils sont encore là dans la poubelle? ...
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Ma première impression a été très bizarre, mal à l'aise dans la lecture de la première partie, et écoeurée par la crudité des dernières lignes. le début m'a beaucoup plu avec une situation banale, bien réaliste et l'irruption d'un grain de sable qui fait basculer le récit vers du fantastique. le lecteur se place du côté du héros, parce qu'Emmanuel Carrère, même s'il écrit à la troisième personne, nous fait tout voir du point de vue de son héros. On pense qu'on est dans un récit du genre du Nez de Gogol. Il faut dire qu'anatomiquement la moustache n'en est pas loin ! Et puis au fur et à mesure que la situation prend de l'ampleur, que le héros se demande alternativement s'il est fou, victime d'une blague, victime d'un complot, on se pose les mêmes questions que lui, et on ressent un certain malaise avec lui, repérant les mêmes failles de raisonnement, dans un sens, puis dans l'autre. le héros se demande si cette histoire ne va pas finir par le rendre fou, il faut dire que, dans une spirale infernale, il perd pied physiquement (manque de sommeil), psychologiquement (relations avec sa femme) et professionnellement (il ne va plus bosser). le lecteur n'est pas encore à la moitié qu'il se demande comment cette histoire peut finir. Mais il n'y a pas trente six solutions, et lorsque le héros fuit Paris, dès la première escale, avec la disparition de l'Espagne de la carte du monde, c'est plié, le personnage est fou. Ensuite j'ai trouvé le récit de son séjour à Hong-Kong un peu longuet, en particulier les passages d'un hôtel à un autre. Par contre les trajets répétés en bac d'une rive à l'autre sont une très bonne idée, remettant un peu d'humour alors que la situation en a de moins en moins. Quand à la chute, elle est décevante, mais surtout d'une rare violence, crue, hard, physiquement écoeurante. Bref, je n'ai pas spécialement aimé, mais quelque part, je trouve qu'Emmanuel Carrère a une sacrée plume, et je regrette qu'il n'écrive plus de fictions !
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Toutes proportions gardées, je serais tentée de comparer ce roman d'Emmanuel Carrère à Truismes, de Marie Darrieussecq.

Pourquoi ?

Comme Marie Darrieussecq dans Truismes, l'auteur réussit le pari d'élaborer une histoire autour d'une situation de départ confinant à l'absurde. Ici, le personnage central s'est-il ou non rasé la moustache ?

Je poursuivrais ma comparaison en parlant de l'écriture précise et méticuleuse, qui s'attache à chaque geste, chaque pensée, jusqu'aux élucubrations les plus folles.

Enfin, le glissement progressif et inéluctable d'un protagoniste dont l'existence jusque là « normale » se dérègle et « part en vrille ». Un personnage central qui se retrouve isolé dans sa « folie » et en vient à douter de tout et de tous, à l'instar du lecteur qui n'a d'autre possibilité que d'appréhender la « réalité » à travers le regard de cet homme en perte de repères. le doute s'installe pour ne pas nous lâcher, et nous refermons le livre sans véritablement savoir « le fin mot de l'histoire ».

Les situations diffèrent tout de même, dans la mesure où dans Truismes il est beaucoup question de métamorphoses physiques et le personnage (féminin) a malgré tout certaines formes d'« interactions sociales », alors que les divagations du héros d'Emmanuel Carrère le coupent totalement de ses proches.

La moustache est un roman original, déroutant et dérangeant, habilement construit.

En avez-vous déjà entendu parler ? Il a été adapté au cinéma en 2005 par Emmanuel Carrère lui-même, qui a choisi Vincent Lindon pour interpréter le rôle.
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Dans cette histoire fantastique, un homme décide de raser sa moustache. Ni sa femme, ni ses amis ne s'en aperçoivent. Ce qui commence par un canular tourne rapidement à la folie. Est-ce un complot ? Est-il paranoïaque ? J'ai été prise de malaise - où Emmanuel Carrère veut-il emmener son lecteur. Un vrai coup de poing donné de main de maître.
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