Musée est un roman graphique en noir et blanc dont la toile de fond est le
Musée d'Orsay. Si vous connaissez déjà
Christophe Chabouté, vous ne serez peut-être pas surpris, sinon il faut savoir que les 50 premières pages environ sont sans bulles. Suivent quelques pages avec un peu de texte et finalement une alternance de pages « muettes » et de pages avec bulles, sans qu'il y ait jamais beaucoup de texte.
Le roman s'ouvre sur 2ou 3 pages de postures d'hommes et de femmes d'âges variés : certains prennent des photos ou dessinent, d'autres regardent quelque chose de plus ou moins loin, semblent s'interroger voire être carrément perplexes. Ce qui m‘a frappée, c'est le sérieux de leurs visages, l'absence de joie. Ce n'est qu'à partir de la page 8 que le lecteur découvre ce qu'ils sont en train de regarder : des oeuvres d'art. On y reconnaît des peintures célèbres et aussi des sculptures qui vont ensuite se mêler aux visiteurs dans les mêmes vignettes.
Très vite arrive l'heure de la fermeture du
musée et de la tombée de la nuit. Plusieurs pages (un peu trop nombreuses à mon goût) de
musée vide où il ne se passe rien à l'exception de l'ombre d'un homme qui passe, un tableau sous le bras, et d'un chien qui court partout. On les retrouve ensuite dehors. Idem la nuit suivante. Qui est-ce ? le lecteur se pose quelques questions, y compris le lendemain lors du retour des visiteurs avec un gros plan sur leurs pieds dans des postures différentes. Est-ce pour montrer leur attitude face à l'art ?
A partir de la page 45, le
musée semble se peupler la nuit mais cela reste confus. le lecteur finira par comprendre que les oeuvres d'art profitent de la nuit pour prendre vie, se déplacer, discuter, vivre des histoires d'amour par exemple, et également commenter ce que disent et font les visiteurs dans la journée. C'est rarement élogieux : en effet les quelques bulles de discours des visiteurs montrent un public très divers : profane, sophistiqué voir prétentieux, ou juste en proie à l'émotion.
Les oeuvres s'interrogent sur les appareils qu'utilisent les visiteurs (la technologie contemporaine comme le téléphone portable, les commodités modernes comme les toilettes et les voitures…). Ce sont des passages drôles que j'ai beaucoup aimés, car les personnages de pierre ou de toile ne comprennent pas du tout de quoi il s‘agit ni à quoi ça sert. Ils ressemblent à des enfants qui découvrent le monde et se posent des questions qui peuvent parfois nous sembler saugrenues vu le lieu mais qui sont amenées par les oeuvres d'art, les sculptures notamment, telles que par exemple « A quoi ça sert le zizi ? ». Ils se racontent des histoires, comme s'ils étaient au café du coin, jasent sur les uns et les autres, par exemple à propos du portait de
Berthe Morisot qui passe ses nuits à regarder par la fenêtre un promeneur et son chien. Serait-elle amoureuse ?
Les nuits succèdent aux jours et inversement, ce que j'ai trouvé par moments répétitif voire inutile (page 112 par exemple) ; ou encore pages 182 à 188 où l'on voit simplement des visiteurs de dos regarder des oeuvres sans qu'il se passe quoi que ce soit.. L'idée de départ de donner vie aux tableaux et sculptures est très intéressante et originale mais je reste convaincue qu'elle aurait pu gagner en force avec quelques coupures.
Chabouté a parsemé son ouvrage de critiques sur des sujets aussi variés que l'invisibilité des gardiens de
musée, le comportement individualiste et déplacé de certains visiteurs et enfants, les selfies, le désintérêt pour l'art, etc…J'aurais attendu davantage de la critique des ados vissés à leurs smartphones, elle aurait pu être approfondie vu le nombre de pages du roman. Page 120, le professeur aurait pu aller plus loin dans sa tentative pour intéresser le jeune à l'art. Peut-être Chabouté veut-il laisser le lecteur tirer ses propres conclusions.
Je remercie néanmoins Babelio et les Editions Vents d'Ouest de m'avoir permis de lire ce roman dont certaines pages m'ont beaucoup plu. Je rappelle à ceux qui suivent mes lectures que je ne suis pas amateure de bande dessinée en général et suis donc assez exigeante. Trop peut-être ? A vous de voir. J'ai préféré
Un peu de bois et d'acier qui m'avait permis de découvrir Ch.
Chabouté. Bonne lecture.