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EAN : 978B008DUMEK8
(01/01/1886)
3.33/5   3 notes
Résumé :
Au delà : Ce volume, publié au lendemain de sa mort par Philippe Godet, sélectionne cinquante poésies sur les 175 écrites par Alice de Chambrier. Classées par ordre chronologique, elles retracent son parcours de poète depuis ses dix-huit ans jusqu’à son décès. Si la mort est omniprésente dans ce recueil, ces poèmes, souvent inspirés de sujets du quotidien, traduisent aussi l’aspiration d’Alice de Chambrier vers un « Au-delà » de sa condition de jeune fille d’un mili... >Voir plus
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
L’INACCESSIBLE.

L’homme n’atteint jamais à l’idéal qu’il rêve ;
C’est en vain qu’ici-bas il cherche à le saisir ;
Il ne peut y toucher, malgré tout son désir,
Et devant lui, toujours, il le voit qui s’élève.

Ainsi que Prométhée, à la terre fixé,
Rongé par le désir qui le poursuit sans cesse,
Il voit, le cœur rempli d’une immense tristesse,
Flotter devant ses yeux son rêve inexaucé.

Il ne peut le rejoindre et briser son entrave,
Il ne peut échapper au châtiment cruel,
Et, se sentant créé pour l’espace du ciel,
Il se trouve ici-bas lié comme un esclave.

Et le jour suit la nuit, la nuit succède au jour,
Le temps, d’un pas léger, fuit sans laisser de trace…
Mais jamais l’homme encore, oubliant sa disgrâce,
N’a rompu ses liens et chassé le vautour.

Il n’a pu s’affranchir des tristesses amères,
Il n’a pu s’élever jusqu’au vague infini,
Et ne rejoint jamais, hélas ! pauvre banni,
Le vol capricieux et doux de ses chimères.

7 février 1882.
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L’INCONNU.

Hélas ! c’est donc ainsi que toute chose passe !
Chaque jour qui s’enfuit n’est jamais racheté,
Et le temps qui s’en va sans laisser nulle trace
Nous porte lentement jusqu’à l’éternité.

Mais nul ne connaît l’heure où la course s’achève.
Alcyons fugitifs sur l’écume des flots,
Nous allons, poursuivis par un semblable rêve,
Mêlant la joie aux pleurs et le rire aux sanglots.

L’avenir devant nous paraît riant ou sombre,
Mais le but qu’il présente est le même pour tous ;
Dans les clartés du jour ou dans l’horreur de l’ombre,
Le trépas se tient là, prêt à fondre sur nous.

Il ne faut qu’un signal pour ouvrir une tombe,
Il ne faut qu’un instant pour fermer un cercueil ;
Par un ordre inconnu l’étoile oscille et tombe :
Un mot venu du ciel met un pays en deuil.

Atome intelligent dans l’immense matière,
Grain de sable perdu sous l’espace du ciel,
Être étrange et divers, fait d’ombre et de lumière,
L’homme est né pour mourir et se sent immortel.

Il se demeure, hélas ! une énigme à lui-même,
Et, quel que soit le Dieu que son âme invoqua,
Il n’a pu jusqu’ici, sondant le grand problème,
Triomphant et joyeux, s’écrier : Eurêka !

Où donc la vie humaine a-t-elle pris sa source ?
Vers quel but inconnu son cours est-il poussé ?
Vers d’autres univers portons-nous notre course ?
L’avenir sera-t-il l’image du passé ?

Mystère de la vie, ô grand pourquoi des choses !
Arche immense d’un pont sur les siècles construit,
Et dont les deux piliers, les effets et les causes,
Plongent l’un dans le vague et l’autre dans la nuit.

Bevaix, 25 octobre 1881-15 avril 1882.
– 58
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PLAISIR D’ENFANT


Sitôt que ma leçon se trouvait terminée,
J’allais au bord du lac achever ma journée
Et rire avec le flot qui bondissait joyeux ;
Et sur le sable d’or de la riante grève,
Je m’endormais parfois pour écouter en rêve
La sereine chanson du lac harmonieux.

Ou bien je regardais passer les longs nuages
Semblant un vol puissant de beaux cygnes sauvages
Guidés par le hasard vers un but inconnu,
Tandis qu’autour de moi les grandes sauterelles,
En étoilant le sol du reflet de leurs ailes,
Volaient avec un bruit étrange et continu.

Puis, lasse de songer si longtemps sans rien faire,
Je cherchais quelque jeu qui pût me satisfaire :
Sur les flots clairs et purs comme des cristaux bleus,
Je faisais naviguer une flotte tremblante
De barques en papier, et l’onde scintillante
Les portait doucement au loin vers d’autres lieux.

Et, souvent, sur le pont du navire fragile
J’écrivais, d’une main encor bien inhabile,
Quelques mots enfantins, et posais quelques fleurs
Sur l’arrière incliné des mignonnes nacelles,
— Pesantes cargaisons pour leurs coques si frêles —
Puis, les voyant partir, j’essuyais quelques pleurs.

Mes regards les suivaient sur l’ondoyante plaine :
Je pensais que bien loin, sur la terre lointaine
Où mes pauvres bateaux aborderaient un jour,
Ils trouveraient quelqu’un sur le nouveau rivage,
Qui se demanderait d’où venait ce message,
Et, qui sait ? m’enverrait une flotte à son tour !

Quel était l’inconnu qui ferait cette chose ?
Je ne le savais pas, mais pourtant je suppose
Que je parais son front d’un nimbe radieux :
Ce serait un seigneur, une fée adorable,
Une belle princesse assise sur le sable…
Et je sentais mon cœur tressaillir anxieux.

Et tous les jours suivants, pleine de confiance,
J’attendais la réponse avec impatience…
Mais, hélas ! mon bateau n’est jamais revenu,
Et je cherchais en vain, dans l’éloignement vague,
Espérant chaque jour voir enfin sur la vague,
Mes vaisseaux revenant du pays inconnu !

Jeux naïfs de l’enfance !… Il se peut qu’on en rie !
Mais j’aime l’infini, j’aime la rêverie
Qui mêle au terre à terre un peu de merveilleux ;
J’aime à quitter souvent l’existence réelle,
Fût-ce, comme autrefois, pour suivre une nacelle
Qui vacille et se perd sur le flot onduleux.

31 mars 1882.



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L’ÉNIGME


J’AIME à sonder l’azur, à poursuivre un nuage
Qui vole dans les airs comme un cygne sauvage
Regagnant vers le soir son nid dans les ajoncs ;
Mon regard l’accompagne, et je vais sur sa trace
Jusqu’à ce qu’il s’arrête et lentement s’efface
Dans Le rayonnement des vastes horizons.

Je contemple pensif l’étoile vagabonde
Qui, d’un cours inconstant, s’en va de monde en monde
Et passe tour à tour du nadir au zénith :
Je pense que, bien loin, au delà de la nue
Dans une sphère étrange, à la terre inconnue,
Il est peut-être un point où l’univers finit.

Ce mystère du ciel me tourmente sans trêve,
Et de ces régions où mon regard s’élève
Mon cœur voudrait toujours sonder l’immensité ;
Il cherche le secret que dérobe l’espace...
Mais qu’il suive dans l’ombre un astre d’or qui passe
Ou se perde, rêveur, parmi l’obscurité,

Il ne déchiffre point ce problème insondable ;
L’énigme qu’il poursuit demeure insaisissable,
Et la voûte d’azur ne se déchire pas ;
Et le grand infini, sphinx couronné d’étoiles,
Reste couvert toujours d’impénétrables voiles,
Et ne rencontre point d’Œdipes ici-bas.
2 février 1882.

p.150-151
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LORSQUE LE SOIR DESCEND.

Lorsque le soir descend, j’aime entendre les vagues
Expirer sur la grève avec des sanglots vagues,
Tandis qu’un rayon pâle égaré dans les cieux
Mêle son reflet clair au bleu triste des ondes
Et brode un ourlet d’or sur les nappes profondes
Qui jettent leur chanson dans l’air silencieux.

J’aime entendre le vent qui s’irrite ou qui pleure
Et qui parle dans l’ombre aux branches qu’il effleure
D’un baiser qui les fait frémir et s’agiter ;
J’aime écouter, pensif, la voix subtile et douce
D’un insecte azuré qui dit aux brins de mousse
Ce que nul être humain ne saurait répéter.

J’aime entendre le chant limpide de la source
Qui sur un lit de sable accélère sa course
Et s’enfuit vers un but qu’elle ne connaît pas.
J’aime entendre le cri superbe du tonnerre,
Lorsque du haut du ciel il s’adresse à la terre
Qui l’écoute soumise et tremble à ses éclats.

J’aime écouter, la nuit, tout seul devant l’espace.
Le doux bruissement du silence qui passe
Et la vague chanson qui s’échappe du ciel,
Mystiques entretiens des sphères suspendues,
Comme des lampes d’or, aux mornes étendues
Où le froid et la nuit ont leur règne éternel.

Oh ! que l’homme apprendrait de choses merveilleuses
S’il percevait le sens des voix mystérieuses
Qu’il entend s’élever à chacun de ses pas !
Mais cet hymne sacré que chante la nature
Est pour l’esprit humain d’une essence trop pure ;
Il peut le pressentir, il ne le comprend pas.

12 janvier 1882.

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