Comme un cheval fourbu

Un roman noir, noir de chez noir ! Pourtant, aucun meurtre, aucune enquête criminelle, pas de sang, rien que la mort qui vient, au fil des 229 pages de ce roman foisonnant qui ne laissera aucun lecteur indemne. Sur son lit d'hôpital, Jacques Morançon, dans un coma avancé après un terrible accident sur la route Marseille-Cassis, revoit sa vie de prof chahuté, de père insatisfait, d'amant bafoué, sa vie qu'il croit avoir ratée et n'a jamais eu le courage de recommencer sur des bases plus sereines. Son cerveau travaille inlassablement au cours de sa lente agonie, mais personne ne l'entend, personne ne capte son regard et les signaux qu'il envoie désespérément à ses proches, ses collègues, ses amis, venus pour un dernier adieu. S'il avait pu faire cette confession avant, bien des drames auraient été évités. Jean Contrucci joue sur tous les ressorts du bon polar, qu'il maîtrise parfaitement, pour cette plongée dans les tréfonds d'une âme en perdition...

Un professeur de lycée se réveille quelque peu du coma où il se trouve et des souvenirs remontent de sa mémoire : ses élèves qui l'insultent, sa fille qui veut quitter le toit paternel, une autre fille pianiste célèbre, son épouse effacée, et aussi l'accident dont les détails n'apparaissent que peu à peu au fil des chapitres.
C'est bien écrit, dans un crescendo qui finit par emballer, mais pourquoi avoir choisi un personnage principal aussi peu sympathique : le vrai réac moralisateur aux principes bien établis. du coup toutes les situations manquent de nuances : il y a les bons et les méchants, et certaines scènes en deviennent cocasses, comme l' « écart » du prof avec une jeune collègue, obsédée sexuelle, très « dans le vent » . Et les circonstances qui ont amené l'accident perdent beaucoup de vraisemblance.

Très dérangeante lecture que ce récit d'un homme qui sur son lit d'hôpital est coupé du monde mais réfléchit à sa vie. Rien n'échappe au regard aiguisé de l'auteur...