Vivre après l'inceste : Haïr ou pardonner ?

Ce livre était une belle promesse, non tenue. Épargnez-vous.
C'est une épreuve à lire en tant que victime quand on voit l'imprécision, l'expérience érigée en expertise sans se baser sur aucune donnée scientifiques (car oui, il existe des études scientifiques sur le sujet) et des erreurs dans les termes et les tournures de phrases qui font bondir, d'autant plus venant d'un autoproclamé expert et continuant de perpétuer de fausses croyances dangereuses sur le sujet.

Le récit de la victime en première partie est éclairant et juste. Chaque parcours de vie étant différent aux suites d'agressions pédocriminelles (incestueuse ou non) le témoignage de cette femme et son parcours sont une voix de plus dans la lutte contre les violences. Sa progression est inspirante. Merci madame.

Par contre ensuite c'est festival :
- dès la préface Monsieur Cyrulnik parle d' "adulte soumis à sa pulsion" en p 8, rappelons que des adultes, avec une psyché d'adulte, ne sont soumis à rien qu'à leur décision. Aucune PULSION toute puissante ne soumets les humains à imposer leur désirs sexuels sur d'autres êtres humains. Les pédocriminels, incestueux ou non, agissent, ils ne sont pas soumis à je ne sais quelle force supérieure pulsionnelle. Ils et elles font un choix, celui d'imposer une sexualité d'adulte à des enfants. Point de soumission du côté de l'adulte donc.


- " elle a été contrainte à des fellations mais il n'y a pas eu de rapports sexuels pénétratifs" question de Bernard Geidel affligeante et aucune correction de Roland Coutanceau. P105
Le livre est fait pour expliquer et énoncer les bases des agressions sexuelles et on ne corrige même pas cette idée préconçue affligeante que la pénétration orale n'est pas une pénétration.
Rappelons donc la loi : "Le viol est défini par le Code pénal (article 222-23) comme tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise. C'est un crime passible de la cour d'assises.
On distingue le viol des autres agressions sexuelles à travers l'existence d'un acte de pénétration qui peut être vaginale, anale ou buccale. Cet acte peut être réalisé aussi bien avec une partie du corps (sexe, doigt...) qu'avec un objet."
Donc quand un expert ne recadre pas une énormité pareille dans une question, on laisse prospérer l'idée que les fellations forcées ne sont pas des viols. FAUX !

Et l'auteur de continuer dans l'aberration en p109 "Que son père touche, pénètre avec le doigt, sans la violer" minimisation d'un viol. Pénétrer avec le doigt est UN VIOL ! Relire le texte de loi du dessus.

Ensuite vient tout un passage sur "L'inceste frère-soeur n'est pas du même ordre que l'inceste père-fille. Son retentissement est souvent moindre" en p 118 qui ne se base sur aucune statistique, aucun fait scientifiquement prouvé, on va devoir le croire sur parole ce bon vieux docteur.

Ajouter des relents misogynes de "tirer son coup", "une femme qui se donne facilement" donc une femme qui a envie de sexe se "donne facilement" ? mais enfin sérieusement quoi ?!
Des relents douteux d'homophobie "pourquoi on devient homosexuel" ? En tout cas celle-ci est rangée dans les "désordres sexuels" p126.
bonjour 2019, on ne DEVIENT PAS homosexuel et ça n'a rien d'un désordre.
vous aurez le parfait outil de perpétuation de la culture du viol et de l'expertise paternaliste d'un soignant (aïe) de victimes.

on doit croire sur parole que l'inceste père-fille est plus grave que les autres, on doit croire sur parole que les pères incesteux ne sont pas, par ailleurs, attirés par d'autres enfants, on doit croire sur parole que les figures d'autorité autre que le père sont moins inquiétantes. Bref c'est un ramassis de croyances, absolument pas étayées des chiffres, d'autres sources - livres et études - sur le sujet.

Je n'ai jamais brulé un livre mais pour celui-ci je crois que je vais faire une exception -