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3,08

sur 1136 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
La narratrice écrit ce texte alors qu'elle est en situation d'urgence. Elle ressent le besoin de coucher sur le papier l'expérience qu'elle vit depuis plusieurs mois. le lecteur sent que c'est difficile, elle semble en danger et dans l'incapacité physique et intellectuelle de mener son projet à bien.
C'est que la narratrice est en phase d'évolution vers l'état de cochon, de porc, de truie.
C'est sur un ton a priori naïf qu'elle nous raconte la progression de sa transformation.
Le thème essentiel de ce court roman est la condition féminine. L'autrice en passe toutes les facettes au crible : le corps de la femme ne lui appartient pas, il est la cible des hommes qui se transforment en prédateurs. Cela s'exprime tant dans le monde du travail que dans le domaine privé. La femme existe pour donner du plaisir aux hommes et assurer leur confort domestique. Marie Darrieussecq évoque la dépendance financière, l'interdiction d'avoir du plaisir sexuel, la maltraitance gynécologique, l'hostilité sociétale à l'avortement, etc. (je ne vais quand même pas tout vous raconter).
Alors qu'elle devient ce que l'on a fait d'elle, une cochonne, la narratrice explore des mondes interdits et décrit l'harmonie à se sentir au diapason de son corps.
Vous avez compris, ce roman est tout sauf un truisme, il est un pavé dans la mare, écrit au milieu des années 1990, bien avant la révolte Metoo et les revendications féministes actuelles.
Mais Marie Darrieussecq ne s'arrête pas là. Elle place son héroïne dans une temporalité de science-fiction ( ??), celle de la prise de pouvoir de l'extrême droite et de la mise en place d'une dictature visant notamment à se débarrasser des minorités. La violence et la négligence faites à la nature n'échappent pas à sa vision globale du 3e millénaire.
Bien que publié au rayon littérature blanche, ce roman est une vraie dystopie, permettant à l'autrice de taper fort sur un monde pas si imaginaire que ça.
Le titre dit tout par son inverse : distorsion de la vérité, fondamentalité du propos, cynisme assumé par la voix ingénue de son personnage. On notera également un magnifique jeu de mots (ça y est, vous l'avez ?).
Ce livre fourmille de trouvailles sous forme d'analogies, chaque mot compte dans ces quelques 160 pages que le lecteur reçoit en pleine face tel un uppercut.
Marie Darrieussecq brosse le portrait décadent de notre société et par contraste avec la candeur de la narratrice, le propos est glaçant. D'autant plus que 25 ans après la parution, le roman est d'une terrible actualité, la réalité s'approchant dangereusement de sa fiction.
Je vous fais la grâce de vous épargner le paragraphe sur le style de l'autrice qui est impeccable, incisif, ciselé et percutant.
C'est un roman d'une intelligence féroce, d'une grande richesse, j'ai pleuré de rire, à moins que ce ne soit de consternation devant une analyse aussi fine du devenir pathétique de notre société.
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Miam miam … je me suis régalé ! J'ai trouvé que tout était bon, comme dans le cochon. Car je me suis beaucoup amusé à la lecture des péripéties de notre héroïne : rien ne lui est soustrait et le pire lui échoit : se transformer en truie. Et bien sûr, c'est une vraie cochonne dans sa manière de s'alimenter ou de pratiquer le coït. On peut donc lire ce livre comme une grosse farce …
Mais pas seulement … C'est aussi une critique des hommes et de la société en général : les hommes ne pensent qu'au sexe ou à s'entretuer … Et notre narratrice n'est que l'objet du désir balloté dans un flot de sperme et de sang. C'est ainsi une sorte de conte philosophique à la Candide. En ligne de mire, on a également la description d'une société totalitaire à la manière d'Orwell comme dans 1984 mais surtout dans la Ferme des animaux. Edgar le président dictateur n'a pas à rougir devant Big Brother. Mais c'est aussi un beau conte tout court où un loup-garou tombe fou amoureux d'une femme truie et se retrouvent en diner romantique avec un menu constitué pour l'une de pizza et pour l'autre du livreur.
Avec de tels ingrédients, il ne nous reste qu'à magner dignement le pinceau à soie de porc pour dépeindre ce joli cloaque sans s'embourber dans des truismes trop évidents. Et heureusement, ce n‘est pas écrit à la truelle, it's truie ! Et cochon qui s'en dédie…
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Avec Truismes, Marie Darrieussecq n'est pas entrée en littérature par la petite porte. C'est plutôt à grands coups de canif dans la littérature du réel, si chère au théoricien littéraire Jacques Dubois, qu'elle débarque.

Une femme, la narratrice, se métamorphose petit à petit en truie. La pauvre finira par perdre son travail, son amoureux et connaîtra une série d'épisodes incongrus. Puis, une rencontre favorable avec Yvan, le loup-garou, apaisera notre héroïne qui désormais passe de femme à truie et vice versa par la simple volonté.

Les vieux de la vieille y verront un conte ou une longue métaphore filée sur la différence ou encore sur la condition de la femme. Mais Darrieussecq est maligne et voit la littérature avec un grand L, une littérature qui transgresse les genres et leur rend hommage. Un joli clin d'oeil à la littérature fantastique.
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J'avais déjà entendu parler de ce roman célèbre et j'en connaissais déjà la prémisse improbable : l'histoire d'une femme qui se transforme en truie! Mais j'ai été étonnée de découvrir qu'il s'agit en fait d'une dystopie, et donc d'une critique sociale, à saveur politique et féministe. On se retrouve donc quelque part à la confluence de "La métamorphose" de Kafka, de "La ferme des animaux" de Georges Orwell et de "La servante écarlate" de Margaret Atwood.

C'est un roman qui a marqué la littérature française, et j'ai pu aisément comprendre pourquoi. Dès le départ, j'ai vraiment été captivée par la voix de la narratrice. le décalage entre sa naïveté et les abus qu'elle subit pourrait être drôle s'il n'était pas aussi malaisant. Il faut le dire : l'intérêt que ce livre suscite a quelque chose de la fascination morbide et du voyeurisme malsain. le sexe et le racisme sont racontés sans fard, dans cet univers qui dépeint de façon presque parodique les inégalités sociales et les privilèges des hommes blancs – et ce, en 1998!

Toute l'histoire et sa violence peuvent sembler complètement absurdes et gratuites au premier abord, mais lorsqu'on s'y attarde, on découvre qu'elles sont en fait lourdes de sens... À force de se faire traiter comme de la viande, la protagoniste en devient! Mais ironiquement, c'est ce qui l'éloigne du rôle féminin de beauté et de soumission que la société a voulu lui attribuer : elle prend du poids, des poils lui poussent sur le corps et, surtout, elle devient "cochonne", c'est-à-dire qu'elle commence à exprimer ses propres désirs au lieu de se contenter de satisfaire ceux des autres. Et sortir du moule imposé n'est jamais sans conséquences...

C'est un roman très dur, mais en même temps tellement fantaisiste qu'il est difficile d'être réellement choqué. C'est plutôt une fable, une fable très tordue mais fascinante. J'en ressors avec l'impression diffuse et quelque peu troublante d'avoir été roulée dans la boue... et d'avoir aimé ça!
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Ce livre est très particulier.
Une histoire fantastique mais qui se passe dans un monde auquel on s'identifie rapidement.
Par le truchement du fantastique, cette femme qui se transforme petit à petit en cochon, l'auteur nous livre une critique acerbe de notre société matérialiste, des rapports hiérarchiques et sociaux à travers le regard naïf de son personnage.
C'est très drôle et ironique, même un peu cynique et j'aime la façon dont l'auteur enrobe tout ça de douceur et d'angélisme pour faire passer la pilule.
Très bon moment de lecture surtout parce que l'auteur dont c'est le premier roman se permet toutes les fantaisies.
Ce n'est peut-être pas son roman le mieux écrit mais c'est le plus jouissif et n'est-ce pas le plus important,
l'impertinence et le plaisir?
En tout cas le plaisir fut partagé.
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Je me rappelle avoir lu ce livre pour la première fois au temps du lycée dans le cadre d'un cours sur la littérature française contemporaine. La prof s'était fait taper sur les doigts pour nous avoir fait lire du Houellebecq, mais également le premier livre de Marie Darrieussecq. Petite levée de boucliers des parents et rappel à l'ordre de notre enseignante qui selon moi avait fait un choix dans les lectures conseillées assez osé, mais qui comptait parmi les plus intéressants de toute ma scolarité.


J'ai adoré « Truisme ». Il s'agit d'un livre détonnant qui se lit tout seul et traite de la femme, la femme objet, objet de désir, objet sexuel. L'écriture est à la fois légère, faussement naïve, "midinette" si j'ose dire. J'ai été marquée par son style à la fois très « fleuri » et décadent : l'art de raconter des trucs « cochons » avec l'air de ne pas y toucher.


Je pense qu'il y a beaucoup d'interprétations possibles. L'ouvrage de Darrieussecq est finalement court mais complexe et questionne le lecteur :

"Truisme" questionne tout en subtilité le statut de la femme moderne dans un monde hyper-sexualisé et hypocrite.
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Je venais juste de finir "À la recherche du temps perdu", totalement illuminé par le génie d'un écrivain et son chef-d'oeuvre, quand j'ai tenté de lire Truisme. Mais, ébloui par les rayons d'un soleil qui trace des sillons de langage dont on ne peut plus s'extraire, le renouveau littéraire m'évoquait une certaine répugnance. L'orgueil bouffi de ces auteurs qui considèrent l'adjectif comme une insulte et l'adverbe comme une abomination, ne pouvait qu'irriter une logique qui me poussait à rechercher dans l'écriture une émotion. C'est-à-dire de l'art.
Alors, pourquoi ce choix de lecture ?
Il y avait dans le nom de l'auteur, Darrieussecq, une assonance en écho avec celui du hameau où était né mon père… et mort peu de temps après - ceux qui ont lu Ménino comprendront - qui ne pouvait qu'éveiller dans mon inconscient une certaine empathie. Voyez comment vont les choses !
C'est aussi le titre qui m'avait intrigué. Sa dualité, sous la plume d'une Normalienne Supérieure, ne pouvait pas être fortuit. Si trop de culture tue la fantaisie, il devait bien y avoir une raison à ce choix, une élasticité dans la sémantique qui éveillait ma curiosité à fleur de peau.
Que pouvait-il donc se passer "d'hyper-véridique" dans un "assertion mensongère". Car, comme chacun le sait, il n'est pas possible qu'une femme se transforme en truie, sinon dans le fantasme des têtes orageuses. Que pouvait bien cacher cette métamorphose peu ragoûtante. Voilà donc l'état d'esprit rebelle qui présidait au moment où j'ai commencé à lire le texte.

Et là, les bras m'en sont tombés. Pas de lassitude ou de dépit, comme je m'y attendais, mais d'émerveillement. Je venais de découvrir un monde extraordinaire.
Je n'arriverai certainement pas à vous transmettre mon ressenti à la lecture de ce roman, il opère par magie et reste incommunicable. Comment voulez-vous expliquer le plaisir de l'amour physique à ceux qui ne l'ont jamais vécu. Vous direz : "il exagère". Pourtant la difficulté est bien de cet ordre : une jouissance littéraire !
Je dirais que c'est une leçon d'élégance, un renvoi (aux deux sens du terme) vers cette exigence épouvantable des hommes qui condamnent les femmes dans le confinement d'un contexte de séduction et d'asservissement sexuel. Ce ne sera que justice pour elle de les transformer en petits cochons, en ayant la noblesse de ne pas exiger d'eux-mêmes une telle métamorphose, mais par le sacrifice initiatique d'une mutation d'elle-même en miroir : une truie. Ainsi, restons attentifs et surveillons bien notre arrière-train : en cas d'une petite queue en tire-bouchon… il faudra craindre la contamination.
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Quel enfer ce bouquin...et pourtant, je lui attribue sans hésiter les 5 étoiles que mérite ce coup de coeur !! Marie Darrieussecq m'intrigue. Comment peut-on en venir à écrire un livre d'une puissance telle en traitant un sujet absurde (et en même temps si réel) ? Comment parvenir à écrire l'histoire d'une femme, belle, adulée de tous et qui progressivement grossit, se déforme jusqu'à devenir truie, et susciter le dégoût de tous ses précédents adorateurs ? le rejet, l'âme soeur retrouvée...un parcours complètement loufoque et qui pourtant parlera à bon nombre d'entre nous. Pour moi une prouesse d'écrivaine !
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Un style simple, presque frais, raconté avec naïveté par la narratrice, dans une société proche de la nôtre,  si ce n'est que ses dérives sont accentuées.
Jeune femme qui vient de se faire engager dans une chaîne de parfumerie en échange d'une fellation, elle est heureuse de gagner un peu d'argent, pour participer aux frais du ménage qu'elle forme avec Honoré. Son métier consiste en massages, dont les spéciaux, ce qui lui permettra de conserver son poste, même si elle n'est pas toujours correctement payée,  mais ils sont tous si contents d'elle! Il faut dire que ces derniers temps  elle a pris du poids, sa peau rebondie et son humeur au beau fixe assurent son succès professionnel. Mais la métamorphose s'accentue, et ce qui rendait les hommes si cochons en la voyant se transforme en dégoût au fur et à mesure qu'elle se rapproche de la truie...elle oscillera ensuite entre la forme humaine et animale, et sera confrontée à l'évolution de la société, de par l'arrivée au pouvoir d'un certain Edgar..
On est entre le conte ( très noir) , la dystopie, le fantastique..et le ton faussement candide met en avant le fait que l'explosion de la féminité est tolérée tant qu'elle rentre dans les cadres imposés par la masculinité. La narratrice inspire petit à petit le dégoût dans une société perdue dans la luxure, sexiste et raciste, et qui vire au régime totalitaire. En changeant d'état, elle doit assumer ses pulsions animales, dans un monde qui se révèle finalement  beaucoup plus bestial qu'elle ne le sera jamais.
La fable est cruelle, ( les horreurs énoncées platement m'ont parfois évoqué la plume de Claire Castillon), elle sera dérangeante pour certains, pour moi, la relecture m'a confortée dans l'envie de découvrir d'autres romans de l'auteure.
Lien : https://instagram.com/danygi..
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Vous avez envie d'un roman métaphorique ? Essayez, si ce n'est déjà fait, Truismes de Marie Darrieusecq, où une jeune femme se transforme peu à peu en cochon, une fable drôle et grinçante sur les rapports hommes/femmes et la place de la femme dans la société, qui se lit d'une traite.
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