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EAN : 9782251448459
400 pages
Les Belles Lettres (19/09/2018)
4.25/5   4 notes
Résumé :
Michel De Jaeghere est journaliste. Chargé de suivre l’information religieuse, il est envoyé à l’automne 1996 à Rome pour y « couvrir » la mort de Jean-Paul II, qu’on annonce imminente, et le conclave où sera désigné son successeur. Les rumeurs sont contradictoires, les papabile poussent leurs pions, mais Jean-Paul II ne meurt pas ! Désœuvré, l’envoyé spécial explore le Vatican, les ruines de la Rome antique, les musées, multiplie les rencontres avec vaticanistes, p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Le lecteur curieux, en ouvrant ce livre, sera comblé. Non seulement ce "Journal romain" est une des plus belles évocations contemporaines de Rome que je connaisse, mais le voyage auquel nous convie l'auteur est aussi temporel, car nous rencontrerons Enée, Romulus, Michel-Ange, Jules II ou Jean-Paul II, et tous ceux qui se firent un nom à Rome des origines mythiques à nos jours (ou presque, nous sommes en 1996, au moment où l'on s'attend à la mort de Jean-Paul II). Enfin, nous ferons avec l'auteur un troisième voyage à travers la littérature française, qui possède ce genre à part du "Voyage à Rome" : Montaigne, Retz, le président De Brosses, Chateaubriand, Stendhal (surtout lui, il accompagne l'auteur dans toutes ses promenades) etc..., jusqu'à Yourcenar et Montherlant.

Trois voyages en un, voilà de quoi effrayer le lecteur que l'érudition (ou seulement le savoir) ennuie. Mais érudition et savoir ne sont ennuyeux qu'à l'état de mort clinique, comme objets empoussiérés de musée. L'auteur n'étale pas une vaine science, il est trop intelligent pour cela : il sait distinguer entre le présent et l'actualité (l'actualité est ce que les journalistes ignares choisissent dans le présent pour en parler, condamnant le reste à l'oubli ou pire, au patrimoine). A Rome, l'auteur nous fait ressentir le présent dans sa totalité : à savoir la vie de chaque jour imprégnée de passé, de beauté, de culture. Comme à Rome, le passé est vivant et participe au présent (chez les gens cultivés), il n'a rien de périmé, mais donne de la profondeur à l'actualité et au monde. Cette synthèse des temps est tournée vers l'avenir, à savoir vers les inquiétudes qu'inspire le sort de l'église et de la civilisation européenne qu'elle a créée, n'en déplaise aux eurocrates bruxellois. Cette angoisse de l'avenir donne beaucoup d'intensité aux pages du livre.

Enfin, imprégné de bonnes lettres et de culture, l'auteur écrit plutôt bien (malgré des distractions) : il s'inscrit là aussi dans la lignée de Stendhal, le promeneur de Rome, et de tous ceux qui l'ont précédé et suivi. Il écrit bien parce qu'il a su créer en lui la synthèse du passé, la littérature française, et du présent, sa propre créativité. A l'école de Stendhal encore, il nous épargne dans ce "journal sans moi" les étalages d'intimités, de ressentis vertueux et de sincères sottises qu'on pourrait craindre de trouver dans un journal intime.

Le lecteur se promènera dans ce livre comme dans un beau et profond paysage, et oubliera les parkings, les éoliennes, les banlieues de la littérature française, ou plutôt de la production française de livres. Michel de Jaeghere n'est pas l'un de ces ânes publiés et encensés dans les médias par d'autres ânes.
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Simplement magnifique,
Magnifiquement érudite,
Érudition évocatrice,
Évocation superbement écrite,
Écriture documentée et simple.

Ce ne sont pas les superlatifs qui manquent pour qualifier cette promenade dans la Cité Éternelle
Comme le dit lui même l'auteur : "Sans doute fallait-il que Carthage soit détruite. Rome faillit l'être, elle aussi : par les Gaulois en 390 av. J.-C, par les Goths en 410 de notre ère, par les Vandales en 455, en 1527 par les mercenaires de Charles Quint.
En 547, le goth Totila avait chassé toute la population romaine hors de l'enceinte de ses murs. Il n'aurait, de la ville, pas laissé pierre sur pierre sans la lettre que lui adressa alors son adversaire, le général byzantin Bélisaire, qui le convainquit de n'en rien faire :
« Attenter aux monuments de cette ville, lui écrivit-il, serait de ta part une injure aux hommes de tous les temps, puisque cela reviendrait à ôter à ceux du passé le témoignage de leur mérite, et à priver ceux de l'avenir de l'occasion de s'émerveiller. »

Et à la lecture des pages de ce livre on a souvent l'occasion de s'émerveiller....

Rome est le symbole du début de l'expansion d'une civilisation qui, sublimant l'héritage de l'Empire romain et de la Grèce dans le creuset de cette foi nouvelle, a inspiré les écrivains, les peintres, les sculpteurs, les architectes, marqué de son empreinte l'action des aventuriers, des soldats et des rois.

L'auteur de nous rappeler que Chateaubriand, Stendhal, Zola se sont essayés tour à tour, avec un bonheur inégal, à sonder ce mystère.
Ils y ont été arrêtés par le triomphalisme de la pompe romaine :
le marbre, l'or, l'encens ;
le faste des inscriptions qui font des papes les héritiers des empereurs romains ;
la concentration inouïe de richesses, de génie, de talents qui ont transformé la cité du Vatican en un immense musée, en comparaison duquel les palais de nos rois apparaissent comme de sympathiques gentilhommières, ceux des empereurs de Chine comme autant de décors de théâtre en plein air ;
la rencontre de Pinturicchio, Botticelli, Piero della Francesca, Pérugin, Bramante, Raphaël, Michel-Ange, Borromini, Bernin ;
la possession des plus beaux marbres de la statuaire gréco-romaine ;
la réunion des manuscrits les plus précieux de la littérature antique ;
la collection des secrets les plus jalousement gardés de l'histoire diplomatique.

Car c'est bien de tout cela dont il est question ici. Michel de Jaghaere nous invite à son tour à une découverte, sa découverte, qui se fait à chaque fois différente selon la sensibilité de l'Ecrivain. Et c'est un très belle réussite. Une très belle mise en perspective de la Rome de l'Antiquité, de la Rome papale, de la Rome d'hier et de la Rome d'aujourd'hui.

Mention particulière aux 16 octobre, 18 octobre et 21 octobre.

16 octobre : ou l'auteur nous rappelle que "les Musées du Vatican sont nés d'une découverte, et d'un éblouissement. le 14 janvier 1506, Jules II fut avisé que venait d'être mis au jour dans une vigne, sur la colline de l'Esquilin, une sculpture antique qui dépassait en beauté tout ce qu'on n'avait jamais vu sous le ciel" : le Laocoon qui fera une entrée triomphale dans le cortile du Belvédère.
18 octobre : la bibliothèque du Vatican, dont l'auteur nous explique que ce n'est pas ce lieu si obscur et secret que l'on veut bien le croire ou le penser ;
21 octobre : pour les chambres de Raphaël où l'auteur nous livre des secrets et des. Détails qui échappent aux plus fins observateurs.

Un très beau portrait à la hauteur de cette ville qui aura traversé les siècles et ne finira pas de nous émerveiller, bien loin de la prophétie de Malachie.... Roma Æterna.


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critiques presse (1)
LeFigaro
12 octobre 2018
Une escapade littéraire et érudite qui vous fait entrer dans les mystères de la ville éternelle.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Rien n’est tout à fait vrai dans les Promenades dans Rome. Stendhal les avait ouvertes en nous avisant qu’il avait été six fois à Rome, et il n’y était allé que quatre. Il date son premier séjour de 1802, et il n’avait poussé, en 1801, que jusqu’à Florence ; il avait regagné la France l’année suivante, sans s’aventurer plus au sud ; il ne visiterait Rome que dix ans plus tard, en 1811. Ce changement de date lui était, simplement, nécessaire pour raconter que suspect, comme Français, aux autorités de la Rome pontificale (nos troupes y avaient proclamé, en 1798, la République, et en avaient expulsé le pape Pie VI avant d’en être elles-mêmes chassées par les Bourbons de Naples), il y avait été continûment suivi par deux argousins auxquels il avait fini par donner amicalement du vin à boire, et qui lui avaient, par reconnaissance, baisé la main en lui disant adieu.

Il prétend avoir peint ses tableaux sur le motif, noté les conversations sur le vif, rédigé le récit de ses découvertes et de ses aventures le soir même de ses courses. Il avait écrit en réalité tout son livre à Paris : même les pages où il semble rapporter, heure par heure, les échos du conclave qui s’était achevé, le 31 mars 1829, avec l’élection de Pie VIII.

Tout est faux, et pourtant, tout est plus vrai que nature : éclatant de couleurs et palpitant de vie. La Rome qu’il décrit superpose, entremêle les antiquités, les musées et les champs de fouilles, les temples païens et les basiliques dédiées aux martyrs, les palais ruisselant de marbre et les catacombes éclairées à la bougie, les somptueuses liturgies pontificales et les chefs-d’œuvre de la Renaissance, les jeux de l’amour et de la mort de l’histoire et de la légende, et les crimes passionnels du bout de la rue. On y entend le cri des marchands de légumes et le chant des castrats de la chapelle Sixtine ; on pénètre dans quelques-uns des plus inaccessibles des palais construits par les familles de la noblesse « noire », on y rencontre des cardinaux à l’ambition féroce et au goût exquis, on se raconte, entre deux sorbets, l’histoire de crimes spectaculaires et de complots subtils. On visite l’atelier de Canova, on berce ses soirées avec les longs récitatifs des cantatrices. On flâne dans une ville dont la réunion de splendeurs, palais, jardins, églises, peintures, sculptures, a fait une œuvre d’art à part entière, une polyphonie créatrice. On retrouve, d’un monument à l’autre, Michel-Ange, Raphaël, Caravage comme de vieux amis. On s’irrite de voir décliner leur art sous le pinceau de leurs disciples. On mesure la soif de pouvoir sans limite de quelques hommes d’Église, en même temps que la vigueur, l’énergie d’un peuple qui n’a rien oublié de sa grandeur et de son caractère en perdant la puissance qu’ils lui avaient value.

(INCIPIT)
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Au Panthéon.
Tout ce que l’Antiquité a légué à la Renaissance et à l’Europe baroque se trouve ici, ou presque, des courbes sublimes de la voûte aux niches à portique, du jeu des marbres polychromes à la douceur de la lumière zénithale qui nimbe les tombes et les autels de son linceul de soie. C’est ici qu’il faut s’arrêter pour lire et relire encore la divine musique de Marguerite Yourcenar, prêtant sa voix à l’empereur Hadrien :

J’avais corrigé moi-même les plans trop timides de l’architecte Apollodore. Utilisant les arts de la Grèce comme une simple ornementation, un luxe ajouté, j’étais remonté pour la structure même de l’édifice aux temps primitifs et fabuleux de Rome, aux temples ronds de l’Étrurie antique. J’avais voulu que ce sanctuaire de tous les dieux reproduisît la forme du globe terrestre et de la sphère stellaire, du globe où se renferment toutes les semences du feu éternel, de la sphère creuse qui contient tout. C’était aussi la forme de ces huttes ancestrales où la fumée des plus anciens foyers humains s’échappait par un orifice au faîte. La coupole, construite d’une lave dure et légère, qui semblait participer encore au mouvement ascendant des flammes, communiquait avec le ciel par un grand trou alternativement noir et bleu. Ce temple ouvert et secret était conçu comme un cadran solaire. Les heures tournaient en rond sur ces cadrans polis par les artisans grecs ; le disque du jour y resterait suspendu comme un bouclier d’or ; la pluie formerait sur le pavement une flaque pure ; la prière s’échapperait comme une fumée vers le vide où nous mettons les dieux (Mémoires d’Hadrien).
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(Stendhal à Rome).
A Rome, Stendhal est placé devant un dilemme. Le libéral, en lui, exècre le gouvernement des prêtres, la théocratie pontificale, en quoi il voit un éteignoir des Lumières, un conservatoire des superstitions les plus anachroniques, une tyrannie dogmatique, ennemie de la liberté créatrice. (...) Le dévot qui tient à Rome la place qu'occupe en France l'honnête homme ne peut être à ses yeux qu'un cynique ou un imbécile. (...)
Le problème est qu'il lui a bien fallu admettre que cette ville noire, dont chaque soutane semble couvrir un Tartuffe, a réuni entre ses murs plus de beautés, de chefs-d'oeuvre, de palais, de jardins, d'églises, de tableaux, de fresques, de sculptures qu'on n'ait vus jusqu'ici sous le ciel et qu'on ne verra jamais à Boston ou à Philadelphie ; que ses papes ont été, au Moyen-Age, à la Renaissance, les plus fabuleux des mécènes (...) L'Italie offre à Stendhal ce que Delacroix trouve au même moment au Maroc : une Antiquité vivante. (...) Tout son livre [Promenades dans Rome] est traversé par cette contradiction : en lui, le préjugé libéral inspecte avec commisération le dernier débris de l'ancien monde. Mais le romantique s'exalte de le voir si brillant, si pétulant de vie. (...). Comme si, au moment même où il déchirait à belles dents les ridicules d'une société d'Ancien Régime, ses marques d'honneur, ses privilèges, ses hiérarchies, Stendhal mesurait tout ce qu'en les détruisant, nous avions nous-mêmes perdu.

pp. 175-176
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(Les appartements d'Alexandre VI Borgia).
Visitant l'appartement pontifical lors de sa descente en Italie, Charles VIII l'avait jugé plus beau qu'aucun décor qu'il n'ait jamais vu jusqu'alors. Alexandre VI a désormais trop mauvaise réputation sans doute pour qu'on estimât qu'il suffirait pourtant à combler l'attente des visiteurs du Palais. On a installé dans l'appartement un musée d'art religieux contemporain. Il y a là de quoi perdre plus sûrement la foi qu'en lisant le détail des orgies pontificales dans le journal de Burckhart, le maître des cérémonies du pape Borgia. Les horreurs prédominent, comme cette crucifixion d'un vieillard en imperméable et chapeau mou. Une sculpture en bois représente Paul VI. C'est un portrait psychologique d'une sévérité à côté de laquelle la figure d'Alexandre VI semble avoir, sur les murs, la bienveillance d'un portrait de Cour. La tête est minuscule, comme perdue sous la mitre ; les mains sont démesurément grandies ; elles croyaient tenir la colombe de la paix : elles l'ont laissé s'envoler. Le regard effrayé évoque un Pinocchio qui aurait oublié l'adresse de la maison où l'attendent Gepetto, le chat Figaro et Cléo, le poisson rouge.

p. 250
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(Réunions d'Assise et prières universelles pour la paix).
Il est vain de prétendre que le sentiment religieux a poussé à la guerre toujours et partout dans l'histoire, comme aiment à le proclamer les anticléricaux. Les religions ont fait partie des passions sur lesquelles s'est greffée parfois la violence de la nature humaine (...) Elles n'en sont pas la source : elles n'en ont été que le vecteur, le prétexte. Il est tout aussi imbécile d'affirmer qu'il y aurait en elles, par essence, un principe de paix. Tout dépend de ce que les adeptes des unes et des autres professent du dessein de leur Dieu, de leurs divinités. Des sentiments qu'ils leur prêtent. (...) Baal était, à Carthage, avide de chair humaine. Il eût été préférable, pour ceux qui furent sacrifiés, que les Carthaginois eussent été athées.

p. 149
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