J'ai découvert
Virginie Despentes avec la trilogie
Vernon Subutex dont je suis déjà à la deuxième lecture tellement j'ai apprécié cet univers, peinture des moeurs de notre époque, véritable « Comédie humaine » moderne.
Avec
Apocalypse Bébé, je retrouve avec infiniment de plaisir une marque, une écriture qui allie qualité et réalisme, poésie et truculence, un style qui m'embarque immédiatement.
Une intrigue très simple, point de départ et fil rouge : une adolescente a fugué et un binôme d'enquêtrices privées part sur sa piste. Ce livre est un road-movie entre Paris et Barcelone, mené tambour battant par un duo improbable, deux femmes que tout oppose, aux trousses d'une enfant perdue. Valentine est une adolescente mal dans sa vie et dans sa peau qui accumule les prises de risques ; Lucie est une jeune détective privée, hétéro, qui fait son travail consciencieusement et mène sa vie du mieux qu'elle peut… Déjà, dans
Vernon Subutex, le personnage de « la hyène » m'avait fascinée : quel bonheur de la revoir ici avec ses excès, sa libido, ses postures lesbiennes et féministes… !
Le développement de l'intrigue est prétexte à d'innombrables digressions et polyphonie de points de vue. Seule Lucie s'exprime à la première personne et fédère l'ensemble sous son JE, prenant les lecteurs sous son aile, non pas protectrice car elle est souvent aussi perplexe que nous mais, du moins, présence rassurante et fil conducteur. C'est à ce personnage que l'on s'identifie, à ses ressentis que l'on se raccroche. Les changements de focalisations donnent une vision panoramique de l'histoire de Valentine et nous entrainent inexorablement vers un final percutant.
Virgine Despentes dépeint toute une société, la nôtre, et pousse ses illustrations jusque dans des retranchements que nous ne voyons pas venir ; c'est à la fois réaliste, vraisemblable et drôlement flippant. Encore une fois, c'est magistral.
J'avais choisi la version audio, lue par
Nadège Piton, une véritable performeuse dans les registres du cabaret burlesque et de la satire politique. Elle prête sa voix à des émissions d'Arte et des documentaires. Sa lecture ici est parfaite, jamais dans le sur-jeu, en accord avec l'ambiance du livre : une vraie réussite.
Ma LAL (liste à lire) vient de s'étoffer de toute l'oeuvre de
Virginie Despentes.