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EAN : 9782364180536
130 pages
L’Amourier éditions, 2019 (11/03/2019)
4/5   1 notes
Résumé :
Ces textes se sont invités à mes marches en solitaire, écrit Michel Diaz dans son avant-propos. Marches entreprises sans contrainte, mais dans une inattendue et urgente nécessité, et qui, de soi à soi, finalement, se révèle être un lent retour. Avec un autre visage. Les marches de Michel Diaz l'arrachent toujours à ce qu'il y a d'orienté, de connu dans les déplacements, dans les simples promenades. L'auteur dit être pris, en marchant, dans un rythme qui ouvre l'air ... >Voir plus
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
CE QUI GOUVERNE LE SILENCE


Extrait 1

     Le mot est, dans l’eau ronde du puits, ce jus noir de voyelles que vient froisser, comme un caillou, la chute des consonnes.
     Au seuil du souffle, à l’orée de tout bruit, quelque chose soudain se déplace, furtif, que l’on ignorait être là, ou qu’on croyait perdu.
     Et la parole devient geste, s’étire dans l’effort hélicoïdal de s’arracher à sa matrice, s’anime, marche, épouse l’or du jour, s’aventure au-devant de la nuit qu’elle brave, au-delà de ses ombres.
     C’est l’heure d’engranger le bois, les moissons récoltées avant la venue de l’hiver.
     Avant que la parole se dégrade, crispée dans son manteau de givre, ou se recroqueville dans le paysage, arbuste mal nourri de sécheresse, olivier mal inscrit dans le ciel, que le soleil colère parce qu’il a su étirer devant lui quelques rameaux qui saignent et peinent horriblement.
     Il nous faudrait combler tant de distance encore !
     On s’avance alors, tâtonnant, dans un champ de paroles, tout l’alphabet autour du cou, pesante et inutile cartouchière, comme dans un champ de bataille après la défaite.
     À la lumière des étoiles, on reconnaît ses morts.
     Et on se sent mourir aussi, à chaque mot que l’on arrache.
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     Au nord se brise le tranchant de la vague…


     Extrait 2

     Au nord se brise le tranchant de la vague écumeuse. Du silex à fleur d'eau, un bouillonnement d’écueils ensablés.
     Fusion du ciel et de la mer. Le vent fait son travail, soulage les creux des vagues, la pointe des roches mordues par le sel de la soif.
     Des vagues de lait se succèdent. La chair meurtrie des côtes porte les cicatrices de leur effroyable labeur. Quel en est le sens pour les flots qui continûment la harcèlent ?

     Je suis ici sans pouvoir bouger ni guérir, lourd du plomb d’un secret qui ne se révèle jamais, seulement sidéré par la clarté du jour.
     Près de moi, la mer, plus riche que tous les autres langages. À elle seule, tous les mots, toutes les chansons, toutes les larmes et tous les cris !

     La roche vivante reçoit dans son lit la vivante rumeur de l’insaisissable, et sa peau visqueuse n’est plus qu’une plaie, effilée et grinçante.

     Comment peut-elle, la mer, en son impermanence, semer autant d’écume sur les îles inertes de ma peau et gaspiller un si grand souffle pour nous soulager du malheur de ce que l’on soupçonne, et peut-être jalouse, de l’éternel ?
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     En bas, monticules et dunes…


     Extrait 3

     En bas, monticules et dunes.
     Le creux des roches, orné de muscles, s’ouvre sur le vide du ciel. Engendrement furieux de lichens et de schyzopodes. Un seul geste allié à un seul mouvement : glisser ses doigts dans l’eau stagnante où se fond l’azur du silence, se pencher vers plus d’inconnu, jusqu’à toucher le fond de son regard.
     Dans les trouées pleines de bave, les cheveux des oscillaires balayent le visage.
     Des poissons font le tour du rocher gris qui s’endort, les araignées de mer s’échappent des cages enfouies dans le sable brun et secouent leurs ailes velues.

     Chuintement de la marée montante. Lenteur de l’air où l’on se défait doucement de l’inconsolable douceur d’appartenir au temps. Je me tapis en profondeur et j’écoute le souffle rond de la mer qui sourit, à la surface, aux marins disparus. Ceux-là qui, dérivant dans les courants tranquilles, n’auront jamais que cette sépulture et cet horizon de paix sans limite.
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     De la mer, on peut voir la coquille…


     Extrait 1

     De la mer, on peut voir la coquille ronde des vagues et, de la houle qui les porte, à fleur de râle, l’épiderme rugueux raboté par le souffle du vent.
     Du haut de la falaise on peut compter, à sa surface, les miroirs, croquis et tatouages éphémères continuellement réinventés par les rayons obliques du soleil.
     L’air est si bleu, si lent le ciel, que mouettes et goélands se fanent en plein vol, au sommet de l’instant qu’on a cru arrêter.
     Appas de jour, doigts de lumière, lèvres d’écume, plaques d’azur étalé sur une poitrine qui, à coups lents, respire comme quelqu’un se tient aux portes du sommeil.

     Dans cet entre-deux de conscience, on saisit le corps mal¬léable d’un temps qui s’abandonne, on laisse son baiser s’imprimer sur nos lèvres, sans rien atteindre de sa vérité ni de son intime substance.
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CE QUI GOUVERNE LE SILENCE


Extrait 2

     On avance, de mot en mot, à travers les pages du livre, celui-là qui s’écrit à mesure, comme on erre parmi les tombes.
     Stèles gravées de mots inertes. Pierres de lune sèches que l’on arrose, en vain, de son crachat et de l’aigre sueur de son front.
     La pierre est phrase encore, à l’angle où s’écorchent les doigts. Où l’on peut adosser sa fatigue. Hommage à qui nous prête encore son épaule ! Mais combien de pierres mal transcrites la mort emportera dans son giron de femme enceinte ?
     Que nous restera-t-il alors à déchiffrer quand, du plain-chant du monde, il ne demeurera qu’un silence de neige et pas de place pour un mot de plus ?
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