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sur 859 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Mors ontologica. La mort de l'esprit. C'est de la Substance Mort que s'injectent les drogués des années 1990, dans une Amérique à la fois dystopique et pourtant très réaliste imaginée par Philip K. Dick. Prise à forte dose, la Substance M peut provoquer une dissociation entre les deux hémisphères du cerveau, et les mettre en concurrence pour ainsi anéantir l'identité du consommateur. Dès les premières pages, le lecteur rencontre Jerry Fabin, qui imagine avoir des poux géants qui lui courent sur la tête. Jerry a des amis qui s'éloignent progressivement de lui : Charles Freck, Ernie Luckman, Jim Barris et Bob Arctor. Que dire à un homme qui passe ses journées sous la douche pour chasser des poux qu'il n'a pas ?

Substance Mort a été salué comme l'un des meilleurs romans de Philip K. Dick. Ce que l'on peut dire avec certitude, c'est que Substance Mort est un grand roman. L'un de ceux qui, une fois la dernière page lue, laisse une impression étrange au lecteur, persuadé qu'il est d'avoir pris - avec plaisir - un grand coup littéraire dans l'estomac. Substance Mort est un grand roman parce qu'il parle des drogués plus que de la drogue, parce que son caractère dystopique cache une critique sociale et donc, in fine, politique, parce que, tout en reprenant les thèmes chers à Philip K. Dick (la définition de l'identité, la définition de la réalité), il est une oeuvre toute personnelle que Dick dédie à ses amis que la drogue a emportés. S'il y a bien ce souffle délirant qui parcourt habituellement les oeuvres de Dick, on découvre, notamment dans la dernière partie du roman, une mélancolie désespérée rarement lue chez cet auteur de génie, disparu en 1982.

Dickien, le roman l'est, assurément. Quoi de plus schizophrénique qu'un membre de la brigade des Stups, Fred, chargé de surveillé un dénommé Bob Arctor, qui n'est autre que lui-même ? Fred, l'invisible policier, caché par son complet brouillé (un vêtement qui dissimule l'apparence physique véritable de son porteur), zyeute donc, grâce à des holocaméras, son double Bob Arctor, un drogué, dealer à ses heures, qui vit avec deux comparses assez barrés eux aussi, Ernie Luckman et Jim Barris. Il y a, au début du roman, une sorte d'ambiance bon enfant entre ces trois zigues un peu paumés mais intelligents, bien que l'on sente que les choses tourneront vite à la parano. Dans leur entourage rôde également Donna Hawthorne, une jolie jeune femme, dealeuse elle aussi, dont est secrètement amoureux Bob Arctor.

La parano, Arctor et Barris tomberont assez vite dedans. A vrai dire, Barris suspecte que leur bicoque misérable soit surveillée et Arctor, lui, se demande qui en veut à sa vie lorsqu'il s'aperçoit que sa voiture a été sabotée et que son casque virtuel l'a été aussi. Bientôt, Dick commence à brouiller les pistes et à faire de Fred et d'Arctor deux personnages distincts, signe que la Substance M commence à attaquer sérieusement le seul cerveau que Fred et Arctor ont en commun. On voit aussi que Barris et que Donna jouent, eux aussi, double jeu sans être double je, et que les Stups hésitent à mettre Fred sur la touche, lui qui est, aussi, visiblement un consommateur de Substance M. Dick fait donc du Dick, malmenant le lecteur sur le terrain de la réalité et sur celui de l'identité, aidé en cela par des notions de photographie dans lesquelles, parfois, le reflet n'est pas exactement son origine. Qui pourrait dire ainsi qui de Fred ou d'Arctor est le vrai ? Et le vrai qui ? Fred est-il un drogué qui joue aux Stups ? Ou Arctor est-il un Stup qui a infiltré des junkies ? Ce qu'il y a d'insidieux là-dedans, c'est que la drogue n'est pas une idée de science-fiction, un procédé commode pour interroger nos démons ; elle est une réalité pour des millions de consommateurs qui, pour les plus touchés, voient donc leur réalité sérieusement troublée.

C'est en abordant justement ce thème de la drogue et de ses effets purement négatifs sur l'esprit humain que Dick abandonne, ou presque, la science-fiction. Bien-sûr, le roman possède ce côté dystopique, propre à certaines oeuvres de Dick, mais est-ce vraiment de la dystopie ? La toile de fond de l'intrigue, c'est-à-dire l'implication de l'Etat dans la culture de la Substance M, porte en elle la critique d'un Etat qui a longtemps été volontairement passif dans la lutte contre la drogue. La critique est aussi sociale lorsqu'elle porte sur les straights, ces gens bien sous tous rapports, qui vivent loin des junkies pour lesquels ils sont autant des aimants que des repoussoirs. Mais Dick, ainsi qu'il l'explique, n'a pas voulu faire de roman moral. Ni bien, ni mal : seulement la vie, ses questions, ses problèmes et ses solutions, même imparfaites, même dangereuses. Philip K. Dick aborde dans ce roman un thème tout à fait personnel et l'on ressent une grande mélancolie à la lecture de ces lignes. La fin du roman, particulièrement, est bouleversante, lorsque la mors ontologica fait son effet. L'homme est multiple par nature ; l'homme occidental croit qu'il n'est qu'Un. Et lorsqu'il s'essaie à certains échappatoires, il arrive même qu'il ne devienne rien. Mors ontologica. La mort de l'être.
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Substance Mort est un roman de SF de Philip K. Dick qui s'avère très personnel. L'auteur évoque l'univers de la drogue et de la toxicomanie en s'inspirant d'une période particulièrement sombre de sa vie, durant laquelle il a été confronté de très prés à la drogue et ses ravages.
À travers le point de vue de Fred, un agent des stupéfiants chargé d'enquêter sur un certain Bob Arctor, qui n'est autre que sa couverture lorsqu'il se trouve parmi les junkies, l'auteur décrit la violence et le délitement des corps et des esprits provoqués par la drogue.
Ce roman m'a touché, et je pense qu'il fera partie de mes préférés de l'auteur.
Chronique complète et détaillée sur le blog.
Lien : https://leschroniquesduchron..
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Philip K. Dick est un personnage vraiment à part dans la science-fiction. Il aurait vécu au XIXème siècle, il aurait eu l'âme d'un Baudelaire opiomane, ou de ces écrivains qui dissèquent les vicissitudes de l'âme humaine. Car oui, l'âme humaine est remplie de tourments et de changements. L'âme humaine est loin de la stabilité.
Car encore une fois, c'est des interrogations métaphysiques qui viennent se greffer sur un roman de science-fiction qui n'a en soi rien de banal. Il est clair que Philip K. Dick est un auteur majestueux, qui possède des dons d'écriture et d'invention remarquable, mais qui possède en outre une capacité à glisser de la philosophie partout. Ce roman est encore une fois la démonstration magistrale de cet auteur pourri de talent.

Ce qui est fascinant, c'est qu'après plusieurs histoires de Philipe K Dick, je retrouve encore cette inventivité débordante que j'avais déjà notée dans ses autres ouvrages. Je pourrais juste lui reprocher l'absence de personnages féminins, la plupart des romans n'en contenant véritablement qu'un seul, mais dans un grand rôle, ce roman ne fait pas exception. Pour le reste, nous retrouvons des personnages torturés, qui se posent de multiples questions et qui sont toujours dans le doute quant à ce qu'ils vivent, ce qu'ils sont et quel est le vrai autour d'eux. Là encore, nous retrouvons des thématiques liées à la drogue, mais plus directement encore que celles du dieu venu du Centaure, puisque c'est vraiment l'infiltration des milieux de la drogue par la police qui est au coeur du livre.
Et s'ajoute également la thématique autour de la double personnalité, puisque le policier infiltré commence à avoir des problèmes entre ses deux vies mêlées, tout en parlant également du moment où la drogue rend les camés flippés. Quand la drogue t'as eu, comme elle en a eu d'autre …

Ce serait impossible de décrire tous les sujets du livre, tant il y en a, entre univers de la drogue et vies ratés, amour et haine, personnages en tout genre, ajouts de science-fiction et univers policier ... Mais le plus impressionnant à mon avis, et encore une fois, c'est la façon dont Philip K. Dick nous sort un final en beauté. Comprenez par là qu'il va non seulement vous remettre en cause ce que vous saviez auparavant, vous dévoiler quelque chose que vous ne pensiez pas, mais se permettre en sus, par une phrase presque anodine, vous glisser une réflexion morale et profonde sur la drogue, bien loin des clichés qu'on pourrait avoir. En soi, la fin m'a rappelé un autre livre (que je ne citerais pas pour ne pas vous spoiler ce magnifique twist) et j'ai été sur le cul au niveau de la réflexion, mais surtout quand j'ai compris le véritable titre du livre (qui devient, du coup, un titre sujet à de nombreuses interprétations).
Dois-je vraiment finir en disant à quel point l'histoire est impeccable, en suivant ce pauvre policier qui se perd dans sa vie et bientôt dans sa tête à devoir se poursuivre lui-même et à essayer de ne pas finir fou ? Ce serait en rajouter pour pas grand-chose.

Dans les livres de cet auteur, je placerais Substance Mort dans le haut du panier, et même dans le top 3 directement. de ce que j'ai lu, on y retrouve le foisonnement d'interrogation et de sujets que j'affectionne tant, l'histoire qui tient la route d'un bout à l'autre et qui sait se jouer de nous en prenant des directions que l'on ne voudrait pas voir prises. Mais la réalité est cruelle, comme nous la rappelle la dédicace finale, et le monde de la drogue est bien plus dur qu'on ne voudrait nous le faire croire. Surtout quand on songe à ce qui est dit à la fin. Une façon de boucler la boucle qui est glaçante mais tellement ouverte aux interrogations. Un must-have à lire. Pour l'instant, je le considère dans mon coeur comme l'un des meilleurs de Philip K. Dick, et je pense bien ne pas finir là-dessus avec cet auteur. J'aborde seulement les grands ouvrages de lui, et je crois que je vais plonger le plus profond possible. Lisez-le, lisez-le, lisez-le. Ce sont les trois seuls conseils que je peux vous donner à son propos.
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Philip K Dick était il drogué ?
Totalement défoncé oui. Dans les années 70, il a un peu goûté de tout et s'est bien rincé la boite à comprenette. Son expérience de Junkie lui a donné matière pour son livre le plus personnel et le plus cruel. Ce roman, Dick le dédie à ses anciens amis toxicomanes, morts ou gardant de cette époque des séquelles à vie. Il s'agit donc d'un livre très personnel, très dur, qui met en scène une Amérique peut-être pas si lointaine. Une Amérique où tout est sécurisé et contrôlé par les autorités, mais où la drogue règne en maîtresse. Parce que contrairement aux autres drogues, la substance M est bon marché… Mais ses effets sont bien plus désastreux que les autres.
C'est étrange que Dick dédie ce livre à ses anciens amis toxicos car le livre montre précisément qu'il n'y pas d'amis dans ce milieu (comme le montre TRAINSPOTTING itou) et qu'il n'y a que le shoot qui compte.
C'est un livre dérangeant et totalement dépourvu de romantisme lié à la consommation de drogue, on est à l'époque en pleine descente, Timothy Leary, LES PORTES DE LA PERCEPTION d'Aldous Huxley sous le bras, ne fascine plus autant. Et Dick nous montre que LSD et cie te transforme surtout le cervelet en porridge.
Ce roman sera le dernier valable de Dick, il se fourvoiera après dans des livres mystiques fumeux avec une intelligence extra terrestre qui le contacterai, comme il l'assurera le plus sérieusement du monde devant un public médusé à Metz. Dick aura vécu le plus souvent non pas dans l'indigence mais dans la gêne et n'aura atteint le rang de culte (je n'aime pas trop ce terme, m'enfin j'imagine que là il se justifie) qu'après sa mort. En tout état de cause, il aura bouleversé la SF.
Lien : https://micmacbibliotheque.b..
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La Substance Mort est une drogue dure comme les autres, elle vous crame le cerveau, s'achète plus ou moins sous le manteau selon les quartier, elle rends les gens accros…mais elle est bon marché contrairement aux autre drogues dures.

Bob Arctor partage sa maison avec deux autres toxicos, Barris et Luckman. Leur quotidien consiste a bricoler des trucs, se shooter, et s'approvisionner auprès de Donna, la copine de Bob.

Fred est un agent des stups. Il est toujours en complet brouillé, qui est un dispositifs pour préserver l'anonymat des agents. Quiconque regarde un agent en complet brouillé verra une multitude de silhouettes de succèder à la place de l'agent.

La prochaine mission de Fred, c'est d'espionner Bob Arctor, suspecté d'être un toxico. Il a été dénoncé par un de ses proches.

Là ou cà se complique, c'est que Fred est Bob Arctor. Comme Arctor est à moitié dingue à cause de la Substance Mort, il va falloir jouer serré pour ne pas se faire prendre.

De plus, la voiture d'Arctor a eu les freins sectionnés, il a failli y passer, et il soupçonne Barris d'y être pour quelque chose…Son job d'agent des stups va lui permettre d'espionner ses colocataires grâce aux caméra cachés dans la maison.

Mais gérer ses deux identités n'est pas évident, et il doit faire son rapport sur Arctor et Donna à son chef…et surtout il ne sais pas à qui il peut encore faire confiance.

« Substance Mort » est le plus personnel des romans de Dick, et peut être le plus dur aussi. La lecture de Substance Mort n'est pas agréable, sans doute parce que ce n'est pas un roman de SF: mis à part l'artifice du complet brouillé, c'est l'époque actuelle que Dick dépeint. Dick a connu nombre de junkies au début des années 70, il en a vu mourir beaucoup et les autres sont internés. Lui même a suivi une cure de désintoxication, et son but en écrivant ce roman était de sensibiliser les gens au fléau de la drogue, et de rendre hommage à tout ses amis qui sont disparus. La situation était critique dans les années 70, elle l'est toujours de nos jours, et comment sera-t-elle si une drogue bon marché du genre de la Substance Mort fait son apparition ?
Lien : http://www.bibliazzy.com/sub..
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Fred est flic dans une société vaguement futuriste. Mais il est aussi junkie et infiltré dans un réseau de drogués sous un "costume brouillé". Un jour, il est amené à enquêter sur lui-même.
Un des grands romans dickien, véritable plongée dans l'univers de la drogue et de la paranoïa, en grande partie fondée sur la propre expérience de Dick.
Fred doit à la fois vivre sa vie de policier et celle de Robert Arctor (acteur ?), le camé. Et il en vient dans un véritable moment de cauchemar à s'observer sur les bandes vidéos de surveillance.
A l'image de ces vêtements brouillés qui permettent de troubler l'identité, chacun cherche qui est qui, où se situe le vrai, la réalité, qui a raison. Au final, les différentes réalités viennent s'enchevêtrer.
Dick dénonce les autorités et le système qui veut que les bourreaux, créateurs de cette "substance mort", cette "Mors ontologica", soient également les "sauveurs".
La note de l'auteur qui conclue le roman laisse deviner de quel malaise il découle.
Richard Linklater a tiré du roman un film, "A scanner darkly", en 2006, à l'animation surprenante, qui toutefois ne possède pas la puissance et ne transcrit pas la douleur du livre.
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J'ai commencé Philip K Dick jeune, par Ubik, j'ai sombré dedans avec le désespoir du drogué. J'ai voulu regarder l'ensemble des adaptation cinématographique du Maître (du haut château), je dois pas être loin du compte. Et comme bon junky j'ai lu d'autre livre. Je dois avouer que Substance mort est une petite pépite (a faire fondre dans une cuillère). On retrouve le thème phare de l'auteur : la schizophrénie. On se perd dans la psyché des personnages principaux. Une fois le livre ouvert, les images dans les yeux, on est bien. Quand c'est fini, le manque se fait sentir...
Heureusement il y a une adaptation de Richard Linklater avec
Keanu Reeves, Robert Downey Jr., Woody Harrelson, Winona Ryder, Rory Cochrane... bah moi ce film m'a plu !
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Beau, émouvant ,, triste, touchant, marbré,
Effroi-yant Même !!
Cependant,

La plus personnelle des histoires est toujours celle qu'on a survécu.
Philippe K. DICK. ET SON ROMAN.
Dialogue ping-pong constatations mystiques et Monologues aussi effrayants
Que Ré-flé-chissants ;

SUBSTANCE trop véridique et SES Zombies-amis qui s'en A-brutissant ;
L'HISTOIRE D'UNE génération sacrifiée sur l'autel de l'Amusant ;
E-NFin une vraie autobiographique ; POIGNANT !
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Une plongée merveilleusement exécutée dans le monde psychotique de la drogue dure. Une critique parfaite de l'hypocrisie sociale et politique sur le sujet. Je ne me lasse pas du talent de cet auteur même s'il faut être capable de faire face à toute la noirceur de sa représentation d'un monde qui tourne en boucle, se détruit lui-même dans le jeu des intérêts contradictoires. le génie, le travail aussi, naissent dans le terreau nécessaire de la souffrance.
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Un plongeon authentique dans le monde des toxicos. C'est encore une fois une grande prouesse d'écriture que réalise Philip K. Dick et qui sera repris au cinéma sous le nom original A Scanner Darkly, un film américain réalisé par Richard Linklater, sorti en 2006.

Intense et précis, on a du mal à le lâcher !
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