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3,72

sur 4234 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
°°° Rentrée littéraire 2019 #31 °°°

C'est l'histoire d'une vie, celle de Paul Hansen, emprisonné à Montréal, qui déroule ses souvenirs des années 1950 aux années 2000, du Toulouse de sa mère au Jutland natal de son père danois, en passant par le Canada algonquin de la femme de sa vie.

Ceux qui suivent et aiment Jean-Paul Dubois aimeront ce roman, c'est mon cas ; les autres découvriront un univers humain et touchant, des personnages pittoresques, des phrases ciselées et profondes.

Le monde de Dubois est tragique, violent, la vie y est injuste ( décès prématurés, les 6m² d'une cellule, la solitude ) mais le burlesque n'est jamais loin. On sourit beaucoup en découvrant la formidable ronde des personnages qui entourent Paul : son père pasteur qui perd la foi, sa mère soixante-huitarde qui se bat pour que Gorge profonde soit diffusé dans son petit cinéma d'art et d'essai, son épouse Wimona qui pilote un aéroplane. Et surtout, le truculent Horton, son compagnon de cellule, Hells Angel incarcéré pour meurtre, un homme et demi qui tombe dans les pommes lorsqu'on tente de lui couper les cheveux.

L'humour comme antidote à la dureté de la vie, la tendresse humaine aussi. Durant 20 ans, Paul a été surintendant d'une résidence, homme à tout faire, gardien d'immeuble, un travail qui laisse peu de temps mais qu'il a pratiqué avec bienveillance, dans le respect des autres, toujours prêt à aimer les âmes seules, à aider les mamies en détresse.

Jusqu'au jour où tout bascule. Jean-Paul Dubois dévoile assez tard dans le récit les raisons de l'incarcération de Paul. C'est là que le roman bascule aussi dans une ambiance très mélancolique qu'on a lu monter crescendo. C'est là que le roman prend une ampleur presque philosophique. Cet immeuble devient la métaphore de notre monde actuel. Il ne faut pas grand-chose, juste l'arrivée d'un gestionnaire manipulateur et autoritaire, pour que la douceur de vivre en communauté disparaisse, remplacée par un monde arbitraire, bureaucratique, quasi totalitaire.

Paul n'est pas de ce monde-là. Il ne le sera jamais. L'auteur compose ainsi un magnifique portrait qui exalte l'aspiration à la liberté, qui sublime le refus de se soumettre à autre chose qu'une éthique personnelle fait de droiture. Paul est seul mais digne. Il trouve la consolation dans un dialogue très vivace avec les fantômes de son passé qu'il convoque le plus qu'il peut.

Ce livre fait du bien et rassure dans le flot des désillusions. Il est pourtant fort mélancolique et narre l'histoire d'une chute, mais ce qu'on retient, c'est la bienveillance humaniste, la tendresse humaine dont fait montre Jean-Paul Dubois à l'égard de ses personnages. Il m'a fait du bien, souvent rire ... même si je lui préfère l'indépassable Une Vie française. Merci Monsieur Dubois.
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D'un roman à l'autre, les personnages de Jean Paul Dubois partagent le même génome et l'auteur cueille ses histoires dans le même marronnier.
Ses doubles se prénomment presque toujours Paul. Il est difficile de vous dire à quoi ils ressemblent car les descriptions n'esquissent que les reflets de leurs ombres. Un effet miroir. Si l'auteur ne décrit pas l'emballage, on devine toujours chez les « Paul » de bonnes bouilles de victime, plus locataires que propriétaires de leur existence, plus fatalistes que révolutionnaires aux poings levés.
Le héros de « Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon » ressemble trait pour trait... de crayon à ce portrait-robot.
Paul a un père danois, pasteur exilé au Canada pour prêcher à proximité d'un gisement d'amiante à ciel ouvert et qui joua les derniers deniers du culte dans les champs de course. Un personnage très bien construit qui perd la foi et se réfugie dans le hasard pour continuer à croire en quelque chose.
Paul a une mère qui ne risquait pas une overdose d'instinct maternel. Elle exploita un cinéma d'art et d'essai à Toulouse et y programma dans les années 70 « Gorge Profonde ». Une liberté artistique incompatible avec les principes moraux et religieux du mari. Les fidèles s'indignèrent et la belle devint infidèle.
Chez Jean Paul Dubois, les héritages familiaux sont lourds à porter, comme un tatouage de jeunesse au milieu du front. Point d'inné, que de l'acquis, souvent bien mal. La question de la déliquescence du couple traverse l'oeuvre de l'écrivain. L'usure du temps et des sentiments.
Paul n'a pas bénéficié de circonstances atténuantes et il a le temps de nous raconter ses joies, ses peines et l'acharnement du destin car il purge une peine de deux ans de prison à Montréal pour des faits de violence.
Entre deux souvenirs, il nous livre le quotidien de la cellule qu'il partage avec Horton, un Hells Angels imprévisible qui attend son procès pour meurtre, réfractaire au bon sens et phobique aux rongeurs.
En prison, les heures ne manquent pas pour raconter et se raconter des histoires. du pain béni pour cet auteur qui ne découpe jamais la vie de ses héros en tranches, préférant les accompagner de la naissance au trépas.
le récit alterne des scènes assez désopilantes qui se passent entre les quatre murs de la cellule et le fil de la vie pré-carcérale de Paul, une corde raide qu'il traversa comme un funambule apatride et aveugle, sans filet de sécurité.
Suite à la séparation de ses parents et après avoir suivi son père au Canada, Paul fut pendant longtemps le super intendant d'une résidence de standing, concierge dévoué qui réparait aussi bien les robinets que les âmes des pensionnaires. Il fut aussi l'heureux mari d'une pilote d'avion, femme de caractère au sang Algonquin.
L'élection d'un nouveau président de syndic, un « cost killer » Trumpisé, plus affamé de rendement que de bons sentiments, allait précipiter la fin des beaux jours et conduire Paul à la case Prison.
Le récit ne sombre jamais dans la tragédie grâce à l'humour un peu « smart » et distancié de l'auteur qui possède le don d'enchanter le désenchantement de ses personnages. de la langueur, mais point de longueurs dans ce texte dont la lecture est aussi douce et fluide que celle du titre.
Chez Jean-Paul Dubois, les romans disposent de deux adresses postales : L'une à Toulouse (ville natale de l'auteur, et de l'auteur du présent billet, soyons chauvin) et une en Amérique, mais il ajoute des lieux insolites qui sont un prétexte à dénoncer les injustices du destin et celles des hommes (l'exploitation de l'amiante au mépris des alertes sanitaires, l'emprisonnement de la victime et non du bourreau).
Jean Paul Dubois est un écrivain dont l'univers ressemble à celui de Ian Mac Ewan et s'il creuse toujours le même sillon, j'adore fréquenter son exploitation.



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Jean-Paul Dubois n'oublie jamais d'ironiser gentiment sur les malheurs qui s'abattent inévitablement sur l'homme. Ainsi son héros mélancolique et un brin caustique, Paul Hansen, de sa prison où il purge une peine pour on ne sait quel crime (on le découvre par la suite) raconte que, fils d'un pasteur danois et d'une mère toulousaine propriétaire d'un cinéma d'art et d'essai, s'il a eu des moments de bonheur dans sa vie professionnelle et familiale, il a aussi subi des coups du sort et est resté l'enfant marqué par la mésalliance fondamentale de ses parents.

Des aléas de vie et des discordances qui sont le lot de tous les personnages du livre, mais surtout de Paul — si proche de Jean-Paul Dubois, semble-t-il — qui dresse un constat désabusé mais néanmoins affectif et indulgent sur ses proches et sur le monde qui l'entoure. Humanité qu'il se garde de juger, même s’il n’est pas dupe de l’abîme de bassesse de certains, convaincu que chacun s'efforce d'être au monde avec une foi fluctuant au gré des doutes et désillusions (ce qui pourrait, en y réfléchissant bien, constituer le sel de l'existence).

" Il suffit de prêter son attention et son regard pour comprendre que nous faisons tous partie d’une gigantesque symphonie qui, chaque matin, dans une étincelante cacophonie, improvise sa survie. "
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4 novembre 2008, alors que les États-Unis célèbrent l'élection de Barack Obama, Paul Hansen, lui, est incarcéré à la prison de Bordeaux, à Montréal. Deux ans qu'il croupit en prison et neuf mois qu'il cohabite avec Patrick Horton, un Hells Angel, à l'humeur changeante, incarcéré pour meurtre (dont, évidemment, il est innocent). Dès que celui-ci apprend les raisons de l'enfermement de Paul, il cherche à en savoir plus sur l'homme. Une occasion pour Paul de se souvenir et se rappeler à lui ses morts tant aimés : son père, Johannes, pasteur danois; sa femme, Winona, mi-Indienne, mi-Irlandaise; son chien, Nouk...

Paul Hansen est en prison. Son motif d'incarcération, on l'apprend bien plus tard. Et ce n'est pas là l'essentiel de ce roman mais bien la vie de ce Paul Hansen. de sa naissance à Toulouse en 1955 à son boulot de superintendant à L'excelior en passant par son enfance auprès d'un pasteur danois et d'une mère, propriétaire d'un cinéma, féministe, sa découverte du Danemark et du Canada ou encore sa rencontre avec Winona, pilote hors-pair qui deviendra sa femme, l'on prend un réel plaisir à découvrir Paul. Un homme très attachant, empreint d'humanité, infiniment dévoué à son travail et aux habitants de L'Excelsior. Et une vie faite, inévitablement, de hauts et de bas, avec ses petits bonheurs et ses grands chagrins. Outre Paul, l'on se délecte de l'humour ravageur de Patrick Horton, un compagnon de cellule pour le moins inoubliable. Jean-Paul Dubois nous offre un roman d'une grande finesse, tendrement désespéré et tristement beau.
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D'habitude, j'aime pas les titres à rallonge.
D'habitude, j'aime pas les Goncourt.
D'habitude, j'aime pas qu'un auteur soit tellement cossard qu'il appelle tous ses héros Paul.
D'habitude, j'aime pas les habitudes.
J'ai donc aimé ce Dubois, CQFD.

C'est l'histoire d'un mec, il a pas eu d'bol.
Sinon, il serait pas en prison, même si on le sait tous, elles sont blindées d'innocents.
C'est donc là que végète Paul (quelle surprise) en compagnie de son pote de chambrée un brin sociopathe, Horton.
La taule, c'est long. Pesant, aussi, mais unanimement interminable.
Ça laisse beaucoup de temps aux méninges pour turbiner, encore et encore. Et puis ça occupe.
Paul se souvient. D'où il vient, tout en subissant les frasques journalières d'un coturne à l'imprévisibilité du colon comme du physique aussi soudaine que violente.
Guide de survie en milieu carcéral : sur les Harley, tu ne t'étaleras point, surtout si t'y entraves que dalle.

Jean-Paul Dubois, pour moi, c'est à ce jour La Succession, et basta.
Lorsqu'on garde un souvenir éclatant d'une lecture récente, on y retourne sans trop se poser de questions, prix machin ou pas prix trucmuche.

Ce Paul Hansen m'a enchanté. Attristé également.
Écartelé entre une mère passionnée, éprise de cinéma et de liberté, et un père pasteur, un peu moins jouasse au quotidien, Paul aura poussé sur un terreau quelque peu bancal, traçant un sillon chargé d'humanité et de tragédie.

Le destin est facétieux, entend-on maintes fois déclamé entre deux petits fours un peu trop arrosés lors du pot de départ de Paul (comme par hasard). Je dis non, il est un infâme connard, générateur de trop nombreuses désillusions.
Pouvait pas laisser ce Paul à la place de superintendant qui lui était idéalement dévolue alors qu'il caressait sa bien-aimée et chérissait son chien, ou peut-être bien l'inverse.

Le ton se veut nostalgique et amer, mais pas que.
Grâce aux régulières saillies d'un Horton rarement le dernier en matière de cocasserie gratinée, Jean-Paul Dubois désamorce et allège un karma qu'on ne souhaiterait pas à son pire ennemi. Arf, en y repensant, y aurait bien Jean-Eudes, en primaire, qui avait le don de me faire bisquer en faisant habilement passer une gomme double face pour de la guimauve bicolore...Mais non. Rien de comparable avec les blagounettes Hortoniennes...

Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon, non.
Tous les écrivains ne pondent pas d'inlassables ritournelles glaçantes sur l'hiver qu'est bien précoce et rudement rude cette année.
Ce qui fait possiblement la différence entre un Goncourt et un con gourd.
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Paul Hansen, fils d'un pasteur danois et d'une française gérante d'une salle de cinéma Art et Essai reconvertie dans le porno, est incarcéré au pénitencier de Montréal. IL y partage la cellule de Patrick Horton, un biker déséquilibré...
Paul profite des longues journées d'inactivité et des nuits sans sommeil, où ses morts, son père, sa compagne et son chien, viennent le retrouver, pour essayer de comprendre comment il est arrivé là.

Premier roman de Jean-Paul Dubois que je lis, près de trois ans après que celui-ci ait obtenu le prix Goncourt.
J'ai apprécié la construction du récit, faite d'allers-retours entre le présent de la prison, et le passé du personnage central, qui entretient jusqu'à la fin le suspense sur les causes de son incarcération.
Le personnage de Paul, avec toutes ses interrogations, est attachant. Les personnages secondaires exhibent sans trop de pudeur leur beauté (Winona, le chien, les premiers employeurs) ou leurs failles (le père, le codétenu, le dernier employeur).
L'intrigue n'est pas palpitante ; il y a très peu d'action. Il s'agit là d'un roman de réflexion sur l'évolution d'un homme, et le poids de son environnement dans cette évolution.
J'ai beaucoup aimé la simplicité de l'écriture, directe et sans fioriture inutile. Cela contribue grandement au plaisir de lecture.
Je ne suis pas un grand fan des Goncourt, mais le prix a mis là en valeur un roman de qualité.


Lien : http://michelgiraud.fr/2022/..
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Que dire après tant de critiques ?

Paul Hansen a tout perdu , incarcéré à la prison de Bordeaux, au Canada, privé de liberté pour deux ans , il se repasse le film de sa vie, entouré des chers fantômes de ses proches: sa compagne Winona, son père , pasteur en errance de foi, sa mère à la beauté spectaculaire , sa chienne Nouk...auprès de son compagnon de cellule, Patrick, «  un homme et demi » ——-amoureux des Harley Davidson, attachant et drôle, qui dessine souvent, des compositions naïves , des motos qu'il s'acharne à reproduire, qu'il décalque souvent ———ses années de jeunesse à Toulouse, son enfance contemplative, son exil au Canada ...

Le roman alterne avec bonheur les pages consacrées à son histoire familiale: ——celle d'un gardien d'immeuble tout dévoué à ses semblables, concierge, factotum, consolateur des affligés , expédié en prison en vertu de faits que le lecteur découvrira petit à petit ——traversées du quotidien de sa prison ....
Il se penche sur sa vie avec humour , tendresse et philosophie.


J'ai beaucoup aimé l'écriture fluide , expressive, dénuée de toute fioriture .


Ce livre nous berce, nous chavire , profond sans avoir l'air, à l'ironie douce , au monologue mélancolique , à la passion étrangement indulgente pour les faiblesses de la nature humaine, à la tendresse un peu folle pour l'humanité, aux personnages qui vous arrachent des sourires et le coeur.


L' humour noir, bienveillant et désespéré donne un regard à la fois implacable et aimable , joint à une analyse lucide, tout en subtilité de notre société .

Un petit chef d'oeuvre pétri d'humanité et de tendresse, étrangement consolateur , fait de retenue, de détachement réel ou feint !

On retrouve Le Jean-Paul-Dubois que l'on connaissait , à la fois , précis, juste et indulgent ,fraternel, sensible aux injustices de toute sorte, aux digressions savoureuses, élégant et brillant !

Mon premier était : «Une vie française » en 2004 .
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"Il suffit de prêter son attention et son regard pour comprendre que nous faisons tous partie d'une gigantesque symphonie qui, chaque matin, dans une étincelante cacophonie, improvise sa survie. "

Vais-je enfin lire et réussir à pénétrer l'univers de Jean-Paul Dubois, qui semble avoir un nombre impressionnant de "fans" !?

En tout cas, le titre de son dernier ouvrage, à lui seul est fantastique et rempli de promesses !
Débuté il y a trois semaines, bien avant l'attribution du prix Goncourt, je me suis interrompue, ayant la fichue habitude de lire plusieurs livres à la fois...
Pourtant le ton est alerte, les thèmes les plus variés sont abordés... Nous nous attachons à ce Paul Hansen, personnage qui purge depuis deux longues années, une peine de prison pour un délit mystérieux... que l'on connaîtra très tardivement dans le récit.

Paul Hansen parle de la promiscuité , de l'insupportable du milieu carcéral, raconte, se souvient de son enfance, de sa famille , coincé entre deux parents , aux goûts, professions, manières de vivre, de penser, complètement discordants. le père, pasteur bienveillant, mais conventionnel, la mère, directrice d'un cinéma d'art et d'essai, engagée virulente,elle mettra, ainsi, son pasteur de mari, dans les situations les plus acrobatiques, vis à vis de son ministère....

Paul, ce fils unique... se construit dans cette famille dysfonctionnelle, comme il peut, admirant immensément sa mère, et plus affectivement attaché à son père... qui semble plutôt palot , comparé à la personnalité maternelle très affirmée !!


Revenons au présent du récit de Paul Hansen, qui partage sa cellule avec un grand escogriffe, Horton, un peu "brut de coffrage", emprisonné pour meurtre... Ces deux-là sont aux antipodes l'un de l'autre, mais le quotidien partagé reste pacifique !

Notre narrateur, Hansen, après avoir exercé tous les petits boulots imaginables, devint le "Surintendant " à l'Excelsior, une sorte de mélange détonant d'Homme à tout faire et "d'Homme aux clefs d'or" !!!
Il s'impliqua tant, qu'en plus de toutes ses responsabilités de maintenance du bâtiment, il se préoccupait des résidents, les voyait vieillir, souffrir de la solitude. S'étant attaché à eux, il débordait largement de ses fonctions initiales !... ce qui ne fut pas du goût du nouveau responsable- porte-parole des co-propriétaires, arrogant et obsédé de rentabilité et de sens pratique...le clash ne pouvait que survenir !!!

"Durant ces années-là, sur ses soixante-huit résidents, l'Excelsior comptait vingt-et-une femmes seules, toutes relativement âgés. Et toutes comptaient sur moi. Parfois pour déboucher un évier, parfois pour évoquer le passé et alléger une mémoire prête à déborder. Certains soirs, j'avais l'impression d'avoir passé plus de temps à écouter crisser les âmes qu'à vérifier sur le toit les grincements des extracteurs. Mais j'avais trente-cinq ans, la patience d'un ange et surtout ce goût qui ne me quitterait plus jamais, cette envie de réparer les choses, de bien les traiter, de les soigner, de les surveiller".(p. 154)

Un livre plein de très beaux personnages attachants et bienveillants... qui contrebalancent cette vie mesquine et aussi pleine de "peaux de vache" !! Des bons moments de lecture... mais l'impression d'un patchwork... décousu, tour à tour longuet ou tonique !... Je reste perplexe... Pour une fois, j'ai parcouru rapidement , en diagonale, les nombreux ressentis... et curieusement , je suis encore plus perplexe....entre les commentaires dithyrambiques, merveilleux et les lecteurs très déçus"... et moi, je ne sais toujours pas me prononcer... j'ai beaucoup apprécié certains passages, et
j'en ai trouvés d'autres trop longs, et pas d'une nécessité absolue , à mon humble avis...,pour la narration !

J'ai aimé plusieurs personnages dont notre narrateur, mais aussi un de ses amis, faisant partie de cette humanité souffrante, des gentils : Il s'agit de Read, personnage chaleureux, intelligent, avocat à l'origine, plein de convictions, ayant dû, pour subvenir à la vieillesse et aux frais médicaux de sa maman, accepter un travail sordide, celui d'"adjuster" , rôle des plus pénibles pour une société d'assurances, pénible et sordide rôle d'enquêteur pour que les assurances payent le moins possible d'indemnités aux "victimes", en cas de drames...
Autre personnage hors-norme, sympathique aviatrice- mi-irlandaise- mi-indienne, Winona, l'épouse adorée de notre Paul Hansen...qui mourra prématurément, puis la chienne du couple, Nouk, un animal affectueux et vif... et notre narrateur.. se retrouvera après tous ces chagrins, pire qu'un orphelin !!
Un style cependant étonnant, souvent déjanté avec des métaphores insolites, complètement décalées !!

Une lecture très appréciée, pleine de jolis moments et portraits très colorés , convaincants... mais qui curieusement n'a pas provoqué, en moi, un coup de coeur fulgurant !!
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Prison de Bordeaux, Montréal. La voix du prisonnier qui raconte cette histoire n'est pas celle d'un rustre : sa sensibilité au monde qui l'entoure, son débit, son choix de mots et de métaphores confinent à la grâce. Comment un tel homme s'est-il retrouvé là ?

C'est ce que nous allons progressivement comprendre en suivant le fil de la vie de Paul. Un récit qui commence aussi loin que possible de l'infamie de la vie en prison, par le coup de foudre improbable de son père, pasteur danois, et de sa mère, propriétaire d'un cinéma d'art et d'essai toulousain.

Si c'est la curiosité de découvrir ce qui a pu conduire un homme aussi sensible et réfléchi à passer par la case prison qui m'a initialement accrochée, je me suis finalement laissé embarquer aussi par le récit de sa vie. Celle-ci baigne dans une lumière nostalgique, même si les frasques de ses personnages rocambolesque, que l'auteur décrit magnifiquement, m'ont fait souvent sourire. Comment résister à l'humanité désarmante du voisin de cellule dont le nom de famille, Horton, finira par donner lieu à l'adjectif « hortonien » ? À celle de son père, désespéré d'avoir perdu la foi ? Et que dire de Winona qui survole si souverainement les grands espaces canadiens aux commandes de son aéroplane ?

Ces pages brossent, en toile de fond, l'avènement d'une ère mesquine gouvernée par les déterminismes, les procédures et les rationalités gestionnaires. La structure narrative non-linéaire alternant entre le présent en prison et les souvenirs du passé crée des effets de résonance saisissants qui ne peuvent que nous interpeller sur les injustices de nos sociétés.

Car cette vie a décidément quelque chose d'universel. Chacun connaît ces déraillements qui auraient pu paraître anodins mais qui font finalement bifurquer l'existence.

Beau, tragique, profondément humain.
Lien : https://ileauxtresors.blog/2..
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Le romancier Jean-Paul Dubois peut compter sur un noyau de lectrices et de lecteurs fidèles et enthousiastes. Je dois reconnaître qu'il écrit remarquablement bien. Son style, très maîtrisé sans en avoir l'air, conjugue nostalgie amère et humour noir. Il sait trouver les mots pour faire partager son émerveillement, son étonnement, son plaisir, son émotion ou son indignation, devant les beautés, les bizarreries ou les épreuves que les circonstances placent sur les chemins de ses personnages.

Affublé du long et curieux titre de Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon, son dernier livre est consacré à la vie tristement banale d'un Franco-canadien de père danois et de mère toulousaine. Après un parcours itinérant, Paul s'est installé à Montréal, où pendant quelques années de bonheur, il a partagé l'existence de Winona, une Indienne Algonquine, épousée à la mode de chez elle. Ils vécurent heureux, mais n'eurent pas d'enfant, juste une chienne, Nouk.

L'auteur a rythmé sa narration en intercalant passé et présent. le passé, ce sont les épisodes de la vie de Paul depuis son enfance. le présent, c'est le pénitencier de Montréal, et pour être plus précis, la cellule que Paul partage avec Patrick, un motard membre du redoutable club des Hells Angels, un colosse fort en gueule dissimulant une âme sensible derrière la Harley Davidson tatouée sur son cou.

Quel méfait a bien pu commettre Paul, le gentil Paul, si serviable, si dévoué, pour être condamné à deux ans de prison ? On ne le saura qu'à la fin de la narration de son parcours. Toujours est-il que sa cohabitation très fraternelle avec le biker est l'occasion de pages truculentes aussi drôles que touchantes. C'est le meilleur du livre.

J'ai été moins séduit par les très longues pages qui retracent le parcours de son père, le pasteur Hansen, dont la foi, déjà malmenée par les dures réalités humaines, aura fini par s'écrouler, sapée par un espoir illusoire en des jeux d'argent aléatoires et inappropriés.

La suite est plus plaisante. Vous avez déjà compris que Paul est un être fondamentalement bienveillant, toujours prêt à se mettre en quatre pour les autres. Chargé de l'entretien d'un grand ensemble immobilier, il s'occupe de tout, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Il est heureux quand tout fonctionne bien, quand tout le monde est content. C'est alors le coeur serein, qu'il peut survoler les forêts et les lacs du Québec, dans le petit Beaver piloté par Winona.

Dans son job, Paul est totalement autonome. Son dévouement, son perfectionnisme et son sens du devoir en font un gestionnaire modèle, tant que l'on respecte sa liberté d'action. Mais comme cela arrive quand un petit chef mesquin entre en jeu, tout s'enraye dès lors que l'on se met à vouloir le museler. Une spirale infernale s'enclenche. Les humiliations s'ajoutent aux injustices… avant que le malheur ne vienne de surcroît tout fracasser. Très émouvant ! Paul se soumet, jusqu'au jour où…

« Je suis un cimetière abhorré de la lune / Où comme des remords, se traînent de longs vers / Qui s'acharnent toujours sur mes morts les plus chers ». Ces vers de Baudelaire me sont venus, car Paul vit au milieu de ses morts les plus chers, son père, sa femme, sa chienne. Jean-Paul Dubois serait-il sujet au spleen ? La mort semble en tout cas l'obséder. Dans son précédent roman, le personnage principal, déjà prénommé Paul – la meilleure ou la pire partie de Jean-Paul ? – devait composer avec une famille dont les membres mettaient en compétition leurs tendances mortifères.

Revenons au titre, Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon. Il tranche avec la brièveté sobre et ouverte du titre du précédent opus, La succession. Je me suis interrogé sur le sens profond de ce titre à rallonge, sans trouver de quoi sortir des sentiers battus : il y aurait, dans le monde, des différences, des inégalités, des injustices ?… Quel scoop !... On a bien le droit de s'indigner. Mais cliché pour cliché, n'aurait-il pas été possible de trouver un intitulé plus court ?

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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