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EAN : 9782492352089
48 pages
Editions Le Sabot (02/09/2022)
4/5   8 notes
Résumé :
Inspiré par "La Grammaire méthodique du français" (PUF), ce texte est composé de 19 chapitres évoquant des principes grammaticaux (l'accord dans le groupe nominal, l'absence de déterminant, formes actives et passives), suivant les réflexions d'une jeune femme désirant s'absenter de sa propre vie. L'écriture y est fortement poétique tout en suivant une trame narrative à la fois fixe et flottante : ses réflexions au cœur de la ville, l'étrange couple formé avec son co... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique


Voici un projet inédit : disparaître par la parole, trouver des moyens linguistiques de se soustraire de son corps en présence d'un interlocuteur. le bref et neuvième texte des audacieuses éditions du Sabot déploie un programme drôle et réjouissant pour trouver « le moyen imperceptible de m'absenter de ma propre conversation », explique la jeune énonciatrice âgée de 30 ans. Elle rêve de pouvoir partir se promener tandis que son « colocataire » lui pose une question ou engage une conversation (la plupart des personnages comme ses parents ou son compagnon sont réduits à leur fonction principale : des colocataires). Ce qui la contraint et semble déstabiliser son existence, c'est de devoir sans cesse répondre, d'être responsable devant la présence de l'autre, de ne pas détacher son corps d'une conversation : « l'effort immesurable que je dois faire, chaque jour, pour ne pas détromper les gens de leur croyance que je suis, continûment, là où je suis, m'exténue et me met en nage ».
Alors, elle convoque Tintin et le capitaine Haddock, elle suit tout un été un autre colocataire qui, lui, a les mots pour dire ce qu'il veut : « un cornet maison et deux boules framboise s'il vous plaît ». À l'image d'un cycle court de lavomatic et à l'appui de son pouvoir de grande soeur qui, pendant l'enfance, savait dire non, elle développe ce drôle de système qui « ressemblera à la fois à un orgue à parfums, à une bombe à hydrogène, à un triple distillateur à whisky et au premier ordinateur électronique ». Instillant le soupçon sur le quotidien et tout ce qui nous entoure jusqu'à sa propre existence, Amélie Durand fait des tours de magie d'une logique implacable et inouïe comme les jeux d'enfant. On pense à une autre colocataire de poésie, Camille Readman Prud'homme, autrice du très beau Quand je ne dis rien, je pense encore (L'Oie de Cravan), qui ne serait pas indifférente à ce regret : « je reste amarrée partout où j'ai parlé comme si j'y étais encore ».

Flora Moricet, le Matricule des Anges
https://lmda.net/2023-01-mat23932-grammaire_pour_cesser_d_exister?debut_articles=@12711

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Amélie Durand se fait ici pince-sans-rire et pratique l'auto-dérision pour se dégager d'un pathos que la gravité du sujet pouvait générer. L'effacement de la narratrice rappelle la condition féminine pour laquelle la parole serait limitée mais aussi la difficulté d'être présent au monde là où la syntaxe est considérée comme technique pour passer inaperçue".

L'auteure la respecte pour néanmoins occuper une place dans la société. Et les liens entre le titre et le texte sont propices à diverses associations souvent comiques là où les événements viennent troubler une réalité banale : "Quand on revient au Lavomatic, parfois le linge est devenu tout rose ou une dame a un coin de notre pull préféré qui dépasse de son sac à provisions." écrit par exemple l'auteure.

Si l'usage ordinaire du langage est l'un des passages obligés, Amélie Durand s'en défait quand il le faut pour mettre à nu des mécanismes psychologiques et mentaux tout en y échappant au maximum.

Jean-Paul Gavard-Perret
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Pratiquer correctement une langue suppose d'en respecter la grammaire ; au-delà de cette dimension linguistique, occuper une place en société implique de se conformer à un certain nombre de règles. Dans ce premier livre , Amélie Durand relie explicitement ces deux pôles puisqu'elle relate une tentative de disparition sociale à travers une suite de dix-neuf brefs chapitres dont les titres correspondent à des notions grammaticales . On ne peut qu'être intrigué par les liens entre titre et texte, même si des associations viennent à l'esprit, le plus souvent drolatiques – ainsi, L'accord dans le groupe nominal expose les mésententes au sein d'un couple où la désignation du partenaire suffit à indiquer la distance : « Mon colocataire est coopératif, d'une certaine façon. Il ne comprend pas vraiment ce que je fais mais il ne cherche pas non plus à m'en empêcher. »
Bruno Fern

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L'enfer, c'est les autres ; le poncif est (trop) bien connu, on pourrait dire que dans cette Grammaire pour cesser d'exister, le poncif est actualisé, on pourrait se risquer à résumer la chose ainsi : l'assignation, c'est les autres. Ce sont bien ces fameux autres et qui fixent – figent ? – non pas notre être, mais notre manière d'être. Être là, soi et sa manière, parler, échanger, interagir ce carcan qui progressivement se referme sur nous.

Ahmed Slama, pour libr-critique.

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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Mon colocataire…



Mon colocataire serait, depuis une heure, en grande conversation avec moi dans la cuisine, et il se rendrait compte qu'il y a cinquante minutes que je suis sortie me promener. Bien sûr qu'il ne me le pardonnerait pas. C'est pourquoi je suis, en attendant d'avoir trouvé le moyen imperceptible de m'absenter de ma propre conversation, forcée de rester là, une fois un mot planté : de rester là, pas trop loin, une fois le mot dit, comme si c'était pour toujours moi-même qui l'avais dit et que je devais y rester attachée une époque, toute une vie au minimum, comme à un enfant, pour le toucher et le torcher, parce que je l'aurais voulu et qu'après tout il serait à moi.
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Bien souvent, il serait avantageux de n’être pas là. Le soir, par exemple, je rentre chez moi et j’attache mon manteau à une patère. Ce sont des moments comme ça. Ou alors, le soir, je rentre chez moi et j’entends quelqu’un dire : « Ça ne m’étonnerait pas mais alors pas du tout » ; et il faut que je réponde. Parfois, aussi, je mets mes vêtements à laver au Lavomatic.
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Je ne peux, cependant, renier ces flottements par lesquels je suis passée, car ils sont symptômatiques de la scientificité avec laquelle j'ai toujours traité, vis à vis de moi-même, de la possibilité de disparaître. Jamais je n'ai gaspillé mes échecs.
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« Je comprends »



Choisir un programme et pouvoir s'absenter : au début d'une très longue conversation pendant laquelle il faudra seulement dire qu'on comprend, trouver une façon de dire « Je comprends » qui durera très longtemps et disparaître.
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