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Au travers de six textes, c'est de l'horreur de la Seconde Guerre mondiale que Marguerite Duras témoigne. La narratrice commence un journal quand son mari Robert est arrêté en 1944. Lorsque les Alliés commencent à libérer les camps de concentration, elle attend le retour De Robert. Les jours semblent interminables, le doute lui est insupportable, et elle se vide alors peu à peu de tout espoir.

Témoignage de l'omniprésence de la douleur dans un contexte qui restera à jamais gravé dans les mémoires, ce roman s'appuie principalement sur un journal que Marguerite Duras avait écrit à cette époque. le traumatisme des événements étant si important, l'autrice avait oublié ce journal : « Comment ai-je pu écrire cette chose que je ne sais pas encore nommer et qui m'épouvante quand je la relis. Comment ai-je pu de même abandonner ce texte pendant des années dans cette maison de campagne régulièrement inondée en hiver ».

Roman autobiographique, La douleur met en avant l'atrocité dont est capable l'humanité, et les répercussions que cette atrocité engendre sur les différentes populations, qu'elles aient été victimes, témoins, résistantes ou complices. La véracité de ce récit le rend extrêmement compliqué à lire. Les émotions nous submergent en même temps qu'elles submergent la narratrice, s'accompagnant d'un sentiment de honte. Ce roman est un chef d'oeuvre qui mérite d'être lu et qui ne vous laissera pas indifférent.e !
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En 1985, Marguerite Duras publie chez P.O.L. un recueil de textes sous le nom de la Douleur. le premier texte, dont le recueil porte le nom, est le plus long et aussi le plus intense. Il s'agit d'un journal écrit à la fin de la Seconde Guerre Mondiale et retrouvé par Marguerite Duras des années après. Elle y raconte l'attente du retour de son mari, Robert Antelme, résistant déporté le 1er juin 1944 dans un camp de concentration.

Avril 1944. Certains prisonniers et déportés français reviennent à Paris. Duras et son amant D. (Dyonis Mascolo) s'occupent de réunir leurs noms, toutes informations susceptibles d'aider à trouver les personnes non encore revenues et de prévenir les familles qui attendent le retour d'un être cher. C'est aussi le cas de Marguerite Duras qui est sans nouvelle de son mari déporté depuis presque un an. En proie à cette terrible attente, à ce doute cruel (est-il seulement encore vivant ?), elle est totalement désemparée, ne se nourrit plus, ne dort plus, ne vit plus, malgré le soutien de D.. Elle ne cesse d'imaginer son mari mort, ou vivant ses derniers moments, quitte à s'en rendre malade.

Finalement, Jacques Morland (un des noms de guerre de François Mitterrand) retrouve Robert Antelme à Dachau et en informe Duras. Robert Antelme revient grâce à l'aide de ses amis, mais il est presque mort suite à des mois de mauvais traitements. Duras ne le reconnaît plus. Tous s'acharnent à redonner vie à ce corps et cet esprit détruits par les camps de concentration. Ils y arriveront mais à jamais Robert Antelme sera changé, et peut-être aussi l'amour que Duras lui portait...

Encore une fois j'ai apprécié la "voix" de Marguerite Duras, son style et son écriture. le thème abordé est des plus durs, celui de l'attente d'un être aimé, du doute terrible et Duras parvient à merveille à nous le faire partager, ressentir. Bien qu'intime, son journal apporte des éléments historiques sur la fin de la guerre : retour des déportés, Jacques Morland, De Gaulle... et l'avis de Duras sur ces événements. Enfin, le portrait que Duras fait de Robert Antelme à son retour est très dur et elle ne nous épargne aucun détail de sa dégradation physique. A lire en étant préparé !
Lien : http://leschroniquesassidues..
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~ Devoir de mémoire ~

J'ai lu ce livre en empruntant la route de Mascara, une route sinueuse, en plus de n'avoir aucun sens de l'orientation, j'étais malade. A chaque virage mon coeur venait se cogner contre la vitre, à chaque tournant ses mots se brisaient contre les portières. Des mots tels les obus qui claquent, du fracas, partout. Jusque dans ma gorge. Je ravale mes sanglots comme elle boit son rhum. Et comme elle, j'attends. J'apprends à attendre le retour De Robert !

Ainsi donc, c'est le récit d'une attente !
Duras retrouve son journal où elle raconte ses journées & ses nuits dans l'attente du retour de son époux déporté à Dachau. Mais aussi sa quête pour obtenir ses nouvelles & ses démarches pour savoir s'il est en vie. Prise dans un face-à-face avec la mort, de sa plume sèche & poignante, elle dissèque ses errements intérieurs, les images obsédantes, l'espoir furtif suivi du plus profond désespoir & les gestes quotidiens inlassablement répétés, comme une tentative de survie. Outre l'expression forte d'une foule de sentiments, j'ai été plongée dans le contexte troublant de l'Occupation & de l'atrocité humaine, malgré moi, et toute consentante !
Finalement la douleur ne rend pas nécessairement plus lucide. Elle rend juste un peu plus imperméable à l'insignifiant. Toutefois, il faut négocier en permanence entre l'attention qu'elle exige & les rares moments où elle relâche son emprise.
Une oeuvre brute d'émotions qu'elle n'exprime pas, parce que la douleur est au-delà des mots. Ce récit est suivi de cinq autres nouvelles condensées des différentes facettes de la guerre, un panel de situations aussi bien du côté des vainqueurs que des vaincus !

Robert Antelme publiera en 1947 “L'espèce humaine” l'un des livres les plus impressionnants sur les camps de concentration & d'extermination !

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La douleur de Marguerite Duras

Marguerite Duras...! L'incomparable. Quelle plume !

Le récit d'une attente. La reconstruction d'un homme. À lire après avoir pris connaissance de l'oeuvre de Robert Antelme L'Espèce humaine.

« S'il avait mangé dès le retour du camp, son estomac se serait déchiré sous le poids de la nourriture ou bien le poids de celle-ci aurait appuyé sur le coeur qui lui, au contraire, dans la caverne de sa maigreur était devenu énorme [...] » p67

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C'est grâce à l'adaptation cinématographique -que je n'ai pas vue- que j'ai lu La Douleur, et par là même, mon premier Duras.

Violent. Sa douleur est violente. Tout autant que l'époque, la « Libération ».
Plus les décennies passent plus cette période se résume à la fin d'une guerre; les témoins disparaissent avec leur douleur et leurs mots, pour peu qu'il y en ait jamais eu de suffisamment précis pour transmettre ce qu'ils ont vu, vécu, ressenti.
En lisant ces textes, écrits à chaud, j'ai eu le sentiment que l'on ne savait rien, ou qu'on avait oublié: la Libération est une vague puissante, l'apaisement vient bien plus tard.

Quant au film, je me laisserai tenter, l'affiche est prometteuse..
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Ici ce sont des nouvelles, de longueur et de qualité assez inégales, mais qui ont en commun le thème de la seconde guerre mondiale.
Les personnages sont parfois les mêmes (la narratrice; Robert L., et D. notamment) mais les intrigues sont différentes. C'est un peu déstabilisant au départ.
Donc c'est un livre que l'ont peut laisser dans un coin, pour le prendre et le reprendre au hasard de sa vie, en lisant une petite nouvelle par-ci, par-là.

J'ai beaucoup aimé la première nouvelle, extrêmement bien écrite, de cette femme qui attend le retour de son mari qui a été libéré des camps. Il ne se passe rien quasiment, sinon l'attente et cette douleur, mais on reste en haleine, tellement c'est bien écrit. On attend avec elle finalement, on espère, puis on ne sait plus...
Les mots sont crus, les sentiments bien présents, l'émotion est palpable. Parfois il faut avoir le coeur bien accroché!

La plume de Marguerite Duras est toujours tellement fine et intelligente. Une grande écrivaine en tout cas.
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Ce livre se compose de plusieurs récits se déroulant tous à l'époque de la seconde guerre mondiale. Il est relativement difficile de les englober dans un même avis parce que leur intensité, et à mon avis, leurs qualités, ne sont pas comparables. Certains m'ont laissée de marbre mais il est vrai qu'il était très difficile de passer après La Douleur, le premier texte, qui traite de l'attente de Marguerite Duras à la fermeture progressive des camps et au retour des déportés, puis de ce qui se produit après le retour de celui qu'elle attend. Ce texte est très fort et émouvant. Je pourrais en citer de longs extraits et il m'est difficile de choisir. En tant que membre du PC, avec lequel on sent pourtant qu'elle a récemment pris de la distance, elle critique De Gaulle et ne pardonne ni sa phrase, "Les jours des pleurs sont passés. Les jours de gloire sont revenus", ni son silence sur les camps. Elle s'interroge sur la nationalité allemande:
On est étonné. Comment être encore Allemand? On cherche des équivalences ailleurs, dans d'autres temps. Il n'y a rien. D'autres resteront éblouis, inguérissables. Une des plus grandes nations civilisées du monde, la capitale de la musique de tous les temps vient d'assassiner onze millions d'êtres humains à la façon méthodique, parfaite, d'une industrie d'état.
La scène au cours de laquelle les deux amis de Robert Antelme (appelé ici Robert L. pour une raison que je ne m'explique pas), habillés en vêtements militaires, l'un vêtu d'ailleurs du costume de colonel de Mitterand, alias François Morland, son nom de résistant, viennent le chercher dans les camps, l'habillent en soldat et le soutiennent pour qu'il puisse sortir du camp avant que la mort ne le prenne est d'une force incroyable. Puis, il y a les retrouvailles avec cet être qui ne ressemble plus à celui qui est parti, ce qui rappelle immanquablement un passage fort de L'Espèce Humaine, qu'écrira Robert Antelme, et cette lutte avec la mort pendant des semaines, réapprendre à manger sans en mourir, et ces passages indispensables car extrêmement parlants sur les excréments De Robert:
Pendant dix-sept jours, l'aspect de cette merde resta la même. Elle était inhumaine. Elle le séparait de nous plus que la fièvre, plus que la maigreur, les doigts désonglés , les traces des coups des S.S.
Comment ne pas être profondément touché par cet être qui revenant des camps, n'a pas mangé à sa faim pendant très longtemps et qu'on doit rationner pour le garder en vie, au point qu'il en arrive à voler dans le frigidaire?
Marguerite Duras mentionne le fait qu'après l'écriture de L'espèce humaine, il n'a plus parlé des camps. Jamais, dit-elle. La lecture de l'entretien entre le seconde épouse de Robert Antelme et Laure Adler, entretien truffé de fautes mais passionnant car il m'a menée à m'interroger sur La Douleur, sur ce droit que s'est arrogé Duras de décrire Antelme dans des postures on ne peut plus délicates, dément cette idée.
J'ai tellement parlé de la douleur que je n'ai plus envie de m'étaler sur les autres textes. Je vais tout de même mentionner le fait qu'un autre récit mentionne le besoin, l'envie de torturer et Duras le clame, celle qui souhaite cette torture, c'est elle.
A vous de décider si La Douleur est un texte qu'il faut lire. Je n'ai pas de réponse. Je sais qu'il m'a emmenée là où je n'avais pas forcément envie d'aller mais que j'y suis allée consentante et avec l'impression d'avoir vécu un instant très fort, qui répondait à L'Espèce humaine, qui me permettait sans doute de rester encore un peu avec cet homme que j'ai admiré. Pour autant, sur le fond, c'est tout ce que je n'aime pas, ce non-respect de la vie d'autrui. Mais comme tout un chacun, je suis un être plein de contradictions et on touche ici à l'une des questions éthiques de la littérature : la force et la beauté d'un texte justifient-ils l'usurpation de morceaux de vie?
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La douleur, le journal qui ouvre ce recueil, a eu lieu à Paris, au printemps 1945, alors que les alliés sont en train d'achever l'Allemagne, qu'on découvre peu à peu l'horreur des camps nazis, que les prisonniers de guerre se font fusillés, qu'il faut pourtant envisager le pardon, la reconstruction et les prochaines élections. Et tout le monde se positionne. Il y a ceux qui sont déjà prêt à oublier, ceux qui ne pensent qu'à se venger, ceux qui ménagent leurs futurs électeurs. Et parmi eux, Marguerite est comme en suspension, dans l'attente d'un coup de téléphone, de son mari peut-être mort. Elle erre de son appartement à la gare d'Orsay, centre de rapatriement des prisonniers de guerre. La première question qu'on lui pose lorsqu'on la croise n'est plus « ça va ? » mais « alors ? ». « Rien », pas de nouvelle. Elle l'imagine dans un fossé noir, face contre terre, troué de balles, ou bien avançant dans une colonne de prisonniers, affamé, presque mort. Mais rien, toujours l'attente. Puis le téléphone sonne enfin, c'est François Mitterrand, le chef de son groupe de résistants, il a retrouvé Robert à Dachau. Robert revient à Paris, « trente-huit kilos répartis sur un corps d'un mètre soixante-dix-huit ». Il va devoir réapprendre à manger et à vivre en silence. Ce premier récit est très fort émotionnellement, direct comme un journal intime peut l'être. Les autres récits, s'ils sont en partie issus de l'expérience de Marguerite Duras en tant que résistante, sont plus romancés. Même si dans l'introduction de « Monsieur X. dit ici Pierre Rabier », Duras précise qu'il s'agit d'une histoire vraie jusque dans le détail, ça reste une histoire ; et une histoire bien construite, avec des coïncidences, des rebondissements, de la tension. Une histoire de résistant. Les deux textes qui suivent concernent le traitement des prisonniers au sein de la résistance, tandis que les deux derniers sont assez courts et plus évasifs, bien qu'ils concernent aussi la deuxième guerre mondiale. Ce recueil vaut surtout d'être lu pour La douleur. Mais l'ensemble du recueil sert aussi à rappeler la seule véritable conclusion que devrait inspirer les camps de concentration : « Nous sommes de la race de ceux qui sont brûlés dans les crématoires et des gazés de Maïdanek, nous sommes aussi de la race des nazis. »
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Un des livres les plus beaux et les plus poignants de Marguerite Duras. Pour dire le retour de déportation de son mari, elle a des phrases bouleversantes d'authenticité et de poésie à la fois.
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Bon dieu, quel texte !
(est-il besoin de 250 caractères pour exprimer "putain, quel texte !" ? Si oui, alors allons-y !).
Une femme parle avec ses tripes de l'attente de l'homme aimé, dont elle n'a pas de nouvelles depuis qu'il a été arrêté par la Gestapo (qui pourrait être n'importe quelle police secrète/politique de n'importe quelle dictature).
Putain, quel texte !
Elle y parle de Bergen-Belsen, de Dachau. Il se trouve que j'y suis allé, à Bergen-Belsen, à Dachau. Alors je visualise...
Il se trouve qu'un vague oncle à moi a été arrêté (aléatoirement, dans une rafle quelconque) et n'est jamais revenu. Alors je visualise...

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Retour sur ce livre après quelques mois, l'émotion étant tombée…
Juste un point de morale…
L'auteur raconte que des fonctionnaires partent de Paris en voiture chercher à Dachau son mari. Très bien pour lui (à part que ce qu'elle veut lui dire c'est qu'elle l'a remplacé par un autre amant) car cela lui sauve la vie, à lui qui agonise dans un coin perdu du camp, et pour elle.
Mais les centaines d'autres Français qui agonisent dans ce camp ? Dont les familles ont payé des impôts pour financer le voyage de ces fonctionnaires ?
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