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Texte bouleversant, Marguerite Duras a rassemblé ici des textes sur la guerre. Dans le premier, La douleur, elle raconte l'attente insoutenable de celui qui était encore son mari, Robert l'(Robert Antelme, auteur de L'espèce humaine. Elle y raconte le retour d'un rescapé des camps par des mots souvent crus, chaque ligne est un cri de douleur. A travers tous ces textes, en grande partie autobiographiques, elle y raconte la résistance à l'oppression nazie, la collaboration, l'épuration, l'enfer des camps, le retour des rescapés et la douleur qui se poursuit malgré la libération. le tout, sans tabou.
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La peur viscérale et son corollaire, la douleur : avril 1945, Marguerite Duras attend des nouvelles de son mari Robert, déporté en 1944 vers un camp de concentration en Allemagne. La libération de ces camps sidère le monde et sème la consternation chez les épouses des prisonniers. Dans son journal, Duras rend compte de l'immense souffrance entourant le retour de ceux qui ont survécu à l'horreur, eux-mêmes changés à jamais.
J'aurais voulu lire en premier le récit de Robert Antelme, L'espèce humaine, mais ne le trouvant pas sur les rayons de la bibliothèque municipale, je me suis tournée vers La Douleur, un recueil de textes écrits par Marguerite Duras sur sa participation à la Résistance au coeur de Paris.
J'en ai vu des films sur la Seconde Guerre mondiale, mais ces courts récits de Duras montrent comme jamais tout le poids de la charge du résistant, évoluant au milieu de l'occupant nazi, côtoyant quotidiennement la trahison, la crainte d'être pris ou de donner des noms sous la torture. Une lecture mémorable, ancrée dans un réalisme cruel et poignant, au plus près de la vérité.
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La douleur de l'attente puis des retrouvailles, la douleur de ne pas savoir et de devoir sympathiser avec l'ennemi, la douleur de la perte...
Il semblerait que ces textes aient été écrit pendant la guerre. En tout cas, tous tournent autour de la guerre, de la Résistance, de la déportation des prisonniers politiques et de la Libération. Sans doute en effet ces textes n'ont pas été retravaillés, ou ) peine, avant publication. Je trouve que cela leur donne plus de force. C'est une sorte de chronique personnelle de la guerre, la guerre et surtout la Libération et l'attente de nouvelles de l'Allemagne comme une chronique du quotidien : aller à l'hôtel Lutetia transformé en centre d'information sur la déportation, aller voir les prisonniers de guerre qui reviennent, voir les amis, voir les autres personnes qui sont dans le même cas, au cas où... Mais aussi les vengeances d'après-guerre...
La dernière nouvelle se conclut sur une note positive, après avoir commencé de manière très sombre.
De l'attente douloureuse à la renaissance.
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Poignant, profondément humain, ce livre touche à la douleur, celle de l'attente, de la peur de perdre l'être aimé, celle du face a face avec l'horreur, avec la mort.
La confrontation avec les bourreaux, le flirt avec l'interdit, l'ambiguïté, les doutes, le jeu d'échecs avec les occupants... c'est aussi toute l'humanité des membres de la résistance qui est là, devant nous, avec ses peurs et ses faiblesses... les deux derniers textes nous emmenent avec une vérité troublante dans ce presque "après", entre la libération du territoire français et la capitulation.
L'écriture de Duras est magnifique de vérité, d'émotion. Un grand livre !
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Je referme le tatoueur d'Auschwitz et j'ouvre La douleur. J'ignore ce qui m'attend. Je le soupçonne. Je le soupconne par ma connaissance des oeuvres de Duras. Par l'écho de son écriture dans ma vie.
Je le soupçonne mais je ne sais rien encore.

Je m'assois comme à ses pieds. Petite fille emmitouflée. J'entends la guerre. La même. Mais plus bruyante. Violente. Inique. Vivante...
Pas de mots. Pas d'autres mots que ceux de Duras. Comme des obus qui claquent. du fracas, partout. Jusque dans ma gorge. Déglutir. Deglutir des sanglots comme Duras boit le rhum, à même ses cris.

Je m'assois comme à ses pieds. Aux pieds de la guerre.
Et comme Duras, j'attends. J'apprends à attendre. le retour de ceux qu'on aime. Et des autres aussi. Avant ils étaient des étrangers. Maintenant on sait. Ceux qui attendent et ceux qui meurent. En Europe, il n'y a plus de patrie.
Il y a ceux qui attendent ceux qui meurent.

Duras attend Robert.
J'attends Robert.
Je sais la guerre. Elle est au fond de ma gorge.
Je sais la douleur.
Je la connais toute entière, emmitouflée dedans. Aux pieds de Duras.

Émerveillée.
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Ce livre de Marguerite Duras était dans ma PAL depuis que j'ai vu, au printemps 2018, le film qui en a été adapté par Emmanuel Finkiel, un superbe moment de cinéma.
Je connais peu l'oeuvre de Marguerite Duras dont je n'ai lu, à ce jour, que La Maison, texte d'abord découvert dans une mise en scène théâtrale et La Vie matérielle, dont il est issu.
La Douleur est un recueil des textes de jeunesse que l'auteure reconnaît avoir un peu oubliés dans ses archives, à la fois journal intime, témoignage et récits de fiction, publiés en 1985.

Le premier texte, le plus long, donne son titre au recueil. C'est le journal tenu par Marguerite Duras alors qu'elle attendait l'hypothétique retour de son mari, résistant, arrêté par la Gestapo puis déporté à Dachau. Approximativement daté d'« avril », ou bien sans date précise, dans une tonalité à la fois urgente et détachée, l'auteure raconte la tension, le ressenti, l'espoir et la peur. L'écriture est efficace, sans filtre ni tabou. Marguerite Duras qualifiera elle-même, plus tard, au moment de la publication, ses mots de « désordre phénoménal de la pensée et du sentiment ».
Marguerite Duras met sa parole au service du vécu de toutes les familles qui attendaient des nouvelles des déportés au moment de la libération des camps de concentration. Son récit personnel, écrit dans l'urgence et la douleur, bien que profondément intime, devient universel. Les personnages sont réduits à des initiales : Marguerite attend des nouvelles de Robert L. et D. est à ses côtés… Parfois, son JE se dédouble et elle se raconte à la troisième personne. La libération de Paris, vue et ressentie par Marguerite, donne à voir un point de vue particulier entre euphorie et déni ; en ramenant tout à cet époux qui ne revient pas, elle met l'accent sur le sort des déportés de toutes natures, les juifs, les politiques, les droits commun, les prisonniers de guerre....
Parfois, le style se fait plus impersonnel, remet en cause la posture gaulliste, analyse et commente la gestion du retour des prisonniers. Son témoignage devient précis, elle cite des résistants célèbre comme François Mitterrand, dit Morland, ancre son récit dans la réalité historique de la défaite allemande et de l'horreur nazie.
Le film d'Emmanuel Finkiel traduisait magnifiquement l'ambiance sombre, les silences de l'inaction, le déroulement de cette attente, entre moments très calmes empreints de résignation et d'immobilité et périodes délirantes de crise, de tempête et de fureur.
Le retour de son mari est une véritable épreuve, décrite de manière hallucinée ; à la joie de retour, se mêle une terrible souffrance empreinte de culpabilité.
La fin de « La Douleur » est plus apaisée, avec des passages datés de l'été 1946, « un an et quatre mois » plus tard ou bien d'« une autre année », d' « un autre été », d' « un autre jour sans vent ». La vie a repris ses droits même si le traumatisme demeure.

Le film s'inspire aussi beaucoup de second texte de ce livre, consacré à Pierre Rabier. Dans ce récit où tout est vrai « jusque dans le détail », Marguerite Duras raconte sa relation ambiguë avec un policier collabo à partir de l'arrestation de son mari…
La peur de la jeune femme est palpable même quand elle se met à distance, semble se regarder en train d'agir et de ressentir des émotions, les légitimes et les inavouables.
Qui manipule qui ? Jusqu'à quel point ? La tension est mise en mots.
Les textes suivants sont plus difficiles à lire car ils évoquent les règlements de compte à la libération quand la vindicte populaire s'abat sur les donneurs et collaborateurs en tout genre. Encore une fois, Marguerite Duras n'édulcore rien et revendique les rôles qu'elle se donne au travers de la fiction.
Enfin, « L'Ortie brisée » renoue avec la littérature, propose une fin, une réflexion, tandis que le dernier texte, consacrée à une enfant juive, rappelle l'horreur et la folie, puis la force de l'amour.

Je n'étais pas sortie indemne du film, je termine cette lecture dans un état second, abasourdie et mal à l'aise. Je retiens un magistral portrait de femme, sans concession.
L'écriture de Marguerite Duras est complexe et, ainsi qu'elle nous le dit, ce n'est pas évident de se l'approprier : « apprenez à lire. Ce sont des textes sacrés »…

https://www.facebook.com/piratedespal/
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Une douleur sourde, ou bien aiguē, accompagne Marguerite Duras nuit et jour, obsédante, omniprésente, qui la remplit de scories, de sanies, comme un cri coincé dans la gorge.
Nous sommes cette douleur, nous lisons cette douleur avec son écriture, comme on respire, on halête, comme une respiration, tantôt douce, tantôt dure, proche parfois de la folie. Avec des phrases courtes, nominales, saccadées.
Elle attend son homme, Robert L. dans le livre, Robert Antelme dans sa vraie vie. Elle attend qu'il rentre du camp de concentration, elle attend, ne fait que cela, attendre.
A devenir folle.
Folle de douleur.
J'avais lu L'amant très jeune, j'avais adoré, puis je l'ai relu récemment.
J'ignorais que cette grande dame avait connu cette période ô combien sombre de la seconde guerre mondiale, et plus particulièrement de l'occupation, et du retour des déportés des camps d'extermination. J'ignorais également qu'elle a fait de la résistance, et que c'est François Mitterrand lui-même qui a aidé le retour de Robert.
Ce texte comprend trois parties ; le moment pendant lequel elle attend, la période du retour d'Antelme qui n'est plus que l'ombre de lui-même, et un petit texte intitulé Monsieur X, un homme de la Gestapo, qu'elle fréquentera pendant la période entre l'arrestation d'Antelme et sa déportation. Texte utile qui nous fait mieux comprendre l'ambiance dans le Paris de ces années noires. Elle le hait et souhaiterait le livrer à ses compagnons de la résistance. Lui, sans vergogne, aurait souhaité plus encore d'elle, Duras était très belle, mais ce fut non bien sûr (je souhaite le préciser car j'ai lu qu'elle avait eu une liaison avec lui ce qui est faux bien sûr).
J'ai préféré les deux premières parties, et le retour de l'homme tant attendu est terrible, à la limite insupportable à lire, tant cet homme n'est réduit à plus rien. Les camps l'ont détruit.
Elle ne nous épargnera rien, même la couleur, l'odeur et la texture des excréments de Robert, lui qui ne peut s'alimenter qu'avec une petite cuillère et qui ne pèse plus que 37 kilos.
Ce texte magnifique de la douleur nous prend à la gorge et aux tripes.
Duras, magnifique écrivain, écrit comme elle ressent, écrit comme elle vit.
Douloureusement.

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6 récits. Un texte très fort sur l'insupportable attente de la narratrice : elle espère le retour de son mari des camps à la fin de la guerre. Un style incisif, des phrases brutes, saccadées. Les autres récits m'ont moins plu mais le premier (le plus long) est extraordinaire. Détails sur le blog.
Lien : https://bibliblog.net/la-dou..
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Il s'agit d'un recueil de nouvelles autobiographiques, dont la principale se titre La douleur, et raconte l'attente par Marguerite du retour de son mari Robert des camps de concentration ; l'attente qui s'éternise, qui fait douter et se dire qu'il est sûrement mort, qu'il vaudrait peut-être mieux qu'il le soit, et qui la tue elle aussi.
La nouvelle suivante, Monsieur X. dit ici Pierre Rabier, raconte la période, situé entre l'arrestation de Robert et sa déportation, pendant laquelle Marguerite fréquente un agent de la Gestapo qui prétend pouvoir aider son mari.
Les deux nouvelles suivantes, Albert des Capitales, Ter le milicien, illustrent les activités d'épuration par la résistance, après la libération de Paris. le récit étant à la troisième personne, le personnage principal se nommant Thérèse, malgré que l'auteur nous dise "Thérèse, c'est moi", je ne sais pas si c'est tout à fait biographique, si un peu de fiction est venue s'y ajouter pour romancer l'histoire, ou si c'est une fiction mais que l'auteur fait référence au "Madame Bovary, c'est moi" de Flaubert.
Les deux dernières nouvelles après celles-là sont bien précisées comme étant entièrement fictionnelles, ce sont deux contes, sur la mort et sur la guerre.

On reconnait le style Duras dès les premières lignes ; la réaffirmation du sujet de sa phrase, ses répétitions, ses phrases courtes sans verbe, l'emploi du présent, le rythme, tout contribue à faire l'effet d'une transcription écrite du langage oral et donne l'impression de suivre des souvenirs vivants plutôt qu'une narration :
« Face à la cheminée, le téléphone, il est à côté de moi. À droite, la porte du salon et le couloir. Au fond du couloir, la porte d'entrée. Il pourrait revenir directement, il sonnerait à la porte d'entrée : « Qui est là - C'est moi. » Il pourrait également téléphoner dès son arrivée dans un centre de transit : « Je suis revenu, je suis à l'hôtel Lutetia pour les formalités. » Il n'y aurait pas de signes avant-coureurs. Il téléphonerait. Il arriverait. Ce sont des choses possibles. Il en revient tout de même. Il n'est pas un cas particulier. Il n'y a pas de raison particulière pour qu'il ne revienne pas. Il n'y a pas de raison pour qu'il revienne. Il est possible qu'il revienne. Il sonnerait : « Qui est là. - C'est moi. » Il y a bien d'autres choses qui arrivent dans ce même domaine. Ils ont fini par franchir le Rhin. La charnière d'Avranches a fini par sauter. Ils ont fini par reculer. J'ai fini par vivre jusqu'à la fin de la guerre. Il faut que je fasse attention : ça ne serait pas extraordinaire s'il revenait. Ce serait normal. Il faut prendre bien garde de ne pas en faire un événement qui relève de l'extraordinaire. L'extraordinaire est inattendu. Il faut que je sois raisonnable : j'attends Robert L. qui doit revenir. »

Certains monologues intérieurs m'ont fait penser à Molloy de Samuel Beckett, du fait de l'enchainement de phrases courtes, qui se reprennent, se corrigent entre elles. Molloy touche à la folie, alors que qu'ici on est plutôt dans l'inquiétude et l'amertume, mais les procédés semblent parfois avoir des points communs, même si ça reste léger et que c'est peut-être une coïncidence. le monologue intérieur est beaucoup moins présent dans les nouvelles suivantes, plus narratives, de même que le style de prose Marguerite Duras se reconnait surtout dans la première.
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Elle hurle dans le silence. Dans chacun de ces quelques récits. Elle asphyxie. Alors Marguerite Duras écrit des phrases courtes, parfois non terminées, avec des gradations; elle précise, mais elle ne veut pas trop en dire non plus, pas trop rapidement, en allant quand même au fond de l'émotion malgré cette volonté de pudeur - sans doute parce qu'elle n'a pas le choix. Elle a le coeur au bord des lèvres. Une colère froide, une rage glaciale qui s'efface dans un sursaut d'humanité (le "donneur" repartira vivant, probablement ...) Et pour le lecteur, difficile de rester de marbre. J'ai essuyé quelques larmes, et j'en ai un peu honte, de ces larmes littéraires. Elles me rappellent surtout ce qu'à vécu mon pays il y a seulement quelques décennies. Les événements décrits sont authentiques pour la plupart.
Cette lecture confirme mon goût pour cet auteur magnifique.
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