Les leçons inaugurales du Collège de France sont publiées depuis 2003. Elles permettent de prendre connaissance de la trajectoire intellectuelle des professeurs qui sont invités à dispenser un savoir dans des domaines très variés: philosophie, sciences humaines et sociales, histoire et toutes les sciences dites « exactes ».
Je garde dans ma bibliothèque deux mémorables leçons : celle de Michel Foucault prononcée le 02 décembre 1970 (« L'ordre du discours » aux éditions Gallimard, 1971) et celle de Pierre Bourdieu le 23 avril 1983 (« Leçon sur la leçon » aux éditions de Minuit, 1982).
La leçon prononcée par Edhem Eldem, le 21 décembre 2017, sur « l'Empire ottoman et la Turquie face à l'Occident » ressemble davantage à un exercice de reconnaissance plus qu'à un exercice critique. Certes, il n'est pas sociologue ni philosophe. Mais, au Collège de France, le professeur invité fait face et ne regarde pas du bas ceux d'en haut.
Cet historien, lui-même d'origine turque, semble emprisonné dans une posture d'élève face à ses pairs (notamment Henry Laurens); il multiplie les formules d'excuses et les expressions de gratitude. Il va jusqu'à épingler au passage le gouvernement turc en place, comme s'il fallait montrer patte blanche à cette très ancienne institution française.
Il entre ensuite dans son sujet et présente succinctement le long processus historique du « face à face » (Empire Ottoman versus Occident) du 18ème siècle au tout début du 20ème siècle.
En fermant ce petit livre, incontestablement instructif sur les collusions entre idéologie et sciences sociales, je ne peux m'empêcher de reprendre l'incipit de la leçon bourdieusienne: « On devrait pouvoir prononcer une leçon, même inaugurale, sans se demander de quel droit: l'institution est là pour écarter cette interrogation (…) Rite d'agrégation et d'investiture, la leçon inaugurale (…) réalise symboliquement l'acte de délégation au terme duquel le nouveau maître est autorisé à parler avec autorité et qui institue sa parole en discours légitime, prononcé par qui de droit. »
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Il faut se rendre à l'évidence: la Turquie est "cliomane" et "cliopathe", à la fois folle et malade d'histoire, selon deux néologismes dont je revendique la paternité et, le cas échéant, les droits.
Je persiste encore à croire qu'il y a des limites que l'histoire doit se garder de franchir en parlant du présent.
Une forme de myopie nombriliste hante plus d'un récit historique.
Edhem Eldem, professeur du Collège de France et invité sur la chaire internationale Histoire turque et ottomane, introduit son cours de l'année 2021-2022 : L'Empire ottoman et la Turquie face à l'Occident (V)
Retrouvez la suite de ce cours :
https://www.college-de-france.fr/site/edhem-eldem/course-2022-01-07-14h00.htm
L'enseignement de cette année portera sur la période 1876-1908, correspondant au règne d'Abdülhamid II qui mettra fin au chaos de 1876 en instaurant un régime de plus en plus oppressif. Pendant cette période de violence et d'autocratie, face au péril de l'impérialisme occidental et des nationalismes locaux, l'empire tentera de se redéfinir dans une sombre et inquiétante modernité dont bien des traces subsistent encore dans la Turquie actuelle.
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