Qui n'a jamais rêvé des princesses ottomanes, de leurs palais somptueux à Istanbul, le long du Bosphore aux reflets d'or ?
Kénizé Mourad est la fille d'une authentique princesse, qu'elle n'a pas connue puisqu'elle est morte quand elle était encore un bébé, et elle imagine ce qu'a été la vie de sa maman, après avoir effectué une recherche minutieuse dans des documents officiels et privés.
Avec ce roman – enfin, non, cette histoire « réelle imaginée et romancée » - , nous côtoyons ce monde fermé des sultanes protégées par leurs eunuques, n'ayant pour toute occupation que de choisir bijoux et soieries, et de recevoir avec somptuosité leurs invités.
Du moins, je parle ici de la 1e partie du livre.
Car Selma, c'est elle le personnage principal, nait dans ce palais des mille et une nuits mais n'y restera que moins de dix ans. En effet, la Turquie est en plein chamboulement, et Mustapha Kemal en fera une république en 1923. Terminée l'occupation par les Alliés de la Première guerre mondiale ! Et sous ce nouveau régime, les sultans sont priés de déguerpir.
Nous suivons cette belle petite Selma tout au long de son exil, qui commence à Beyrouth, la ville aux multiples plaisirs, douce et indolente. Puis nous embarquons avec elle dans le paquebot pour les Indes, où elle se mariera avec le rajah de Badalpour. Et enfin, nous l'accompagnons à Paris, où elle fuit un destin où les femmes sont brimées, fussent-elles princesses, et où elle mourra à vingt-neuf ans.
Cette histoire foisonne d'anecdotes et m'a complètement dépaysée. Transportée dans ces pays d'Orient, j'ai pris connaissance de la façon de vivre, de la politique (c'est l'époque des colonisateurs anglais qui veulent garder leur prédominance, de Gandhi, des guerres entre musulmans et hindous), de la religion, de l'éducation, du droit des femmes.
J'ai partagé les états d'âme de Selma, qui est en perpétuelle recherche d'elle-même, divisée entre la tradition et sa propre individualité, ayant au fond d'elle une blessure, celle d'avoir été abandonnée par son père, et éduquée par une mère aimante mais froide.
Cette princesse morte a donc revécu ici le temps de 600 pages. C'est foisonnant, vivant, coloré, quoiqu'un peu long.
Alors, la Turquie, le Liban ou la France ? Si vous n'arrivez pas à choisir la destination de votre prochain voyage, embarquez-vous ici-même, vous aurez tout à la fois, y compris le dépaysement vers une époque lointaine, celle du deuxième quart du vingtième siècle.