The Wild Storm, tome 3

Ce tome fait suite à The Wild Storm Vol. 2 (épisodes 7 à 12) qu'il faut avoir lu avant. Il faut avoir commencé par le premier tome car il s'agit d'une histoire complète en 24 épisodes. Ce tome comprend les épisodes 13 à 18, initialement parus en 2018, écrits par Warren Ellis, dessinés et encrés par Jon Davis-Hunt, avec une mise en couleurs réalisée par Steve Buccellato (épisodes 13 à 15), Brian Buccellato (16 à 18). Les couvertures principales ont été réalisées par Jon Davis-Hunt. Les couvertures alternatives ont été réalisées par Francesco Francavilla, Vanesa del Rey, Valentine de Landro, Sana Takeda, James Harren, Daniel Warren Johnson.

À New York, Jacklyn King arrive dans une ruelle où se trouvent déjà Miles Craven et Ivana Baiul. Dans la voiture devant eux, se trouve le cadavre de Mitch Saunders, un des analystes d'IO. Ivana Baiul indique qu'il s'agit certainement d'une vengeance de Skywatch, suite à l'invasion de leur réseau informatique. Miles Craven indique à King qu'elle doit mettre 3 équipes d'intervention clandestine (CAT) sur l'affaire. Dans le satellite de Skywatch, Laura Pennington fait son rapport à Henry Bendix. Il demande 2 plans de contre-attaque à Pennington. Dans un diner au milieu d'une zone désertique, John Lynch est en train de prendre son petit déjeuner. Il relève la tête et voit qu'il est observé par un individu qui lui indique qu'ils savent tout. Lynch se lève et sort. Il reprend sa voiture et conduit jusqu'à la demeure de Marc Slayton. Il rentre chez lui, salue son hôte et va se servir une bière dans le frigidaire. Il en lance une à Slayton. Ce dernier se lance dans une explication de l'origine de son nom de famille et qu'il signifie fermier. Lynch indique qu'il est venu le prévenir. L'agence IO a commencé à mettre son nez dans les fichiers de l'opération Thunderbook. Slayton lui demande pourquoi Lynch n'avait pas détruit tous les enregistrements. Il lui répond qu'il les a laissés sciemment pour qu'ils servent de système d'avertissement anticipé.

La discussion continue entre Lynch et Slayton. Lynch s'excuse pour ce qu'il lui a fait subir, à lui et aux autres. Il explique que IO avait trouvé des restes d'êtres extraterrestres, au patrimoine génétique encore actif. C'est lui Lynch qui avait ordonné les expériences génétiques, greffant du matériel génétique sur des êtres humains dont Marc Slayton fut le premier. Slayton fait comprendre à Lynch qu'il n'a aucune idée de ce qui lui est arrivé, que le matériel génétique a continué à évoluer dans son corps, qu'il faut le nourrir, qu'il lui parle dans sa tête. Slayton commence à faire se manifester des vrilles qui sortent de ses poignets. Lynch lui demande s'il a tué des gens. Slayton balance une de ses vrilles en direction de Lynch. Celui-ci l'évite et tire sur Slayton. le combat continue jusqu'à ce que Lynch parvienne à s'enfuir. À New York, Shen Li-Min et Jenny Mei Sparks prennent en charge un sans-abri dormant sur le trottoir : le maire. Chez lui, Slayton parle à l'extraterrestre qu'il visualise dans le miroir de sa salle de bain. Dans son lit, Priscilla Kitaen dort profondément, et un extraterrestre se manifeste au pied de son lit.

Le lecteur a gardé à l'esprit la déclaration de Warren Ellis : approcher les WildCATs comme un genre pour parler de l'air du temps présent. Il se demande en quoi ces épisodes constituent un commentaire sur l'époque contemporaine. D'un autre côté, il sait aussi qu'il va retrouver les dessins très agréables de Jon Davis-Hunt, et que le scénariste va continuer sa tournée des personnages de Wildstorm. L'artiste continue de détourer les formes avec un trait fin, précis et méticuleux, pour des dessins descriptifs avec un niveau de détails élevé, tout en restant parfaitement lisibles. Alors même que la distribution de personnages continue de s'agrandir, le lecteur identifie chaque protagoniste du premier coup d'oeil sans aucune difficulté. Certains présentent des particularités physiques les rendant immédiatement reconnaissables : John Lynch et son oeil gauche mort, Marc Slayton et ses cheveux blancs, Lucy Blaze et ses cheveux argentés, Henry Bendix et son crâne chauve, Laura Pennington et ses cheveux roux, etc. Les autres personnages présentent également des éléments visuels les rendant particuliers : Alexandra Fairchild et sa haute stature, Philip Chang et ses traits asiatiques, Gloria Spaulding et sa morphologie très particulière, Shen Li-Min et ses tatouages, etc.

Comme dans les tomes précédents, l'artiste apporte un soin particulier aux tenues vestimentaires et aux différents environnements. Alors que John lynch et Marc Slayton semblent avoir des goûts vestimentaires très proches, le premier préfère un blouson en cuir près du corps, alors que le second préfère une veste en jean doublée. de même quand Li-Min et Mei Sparks sont côte à côte pour regarder le sans-abri, le lecteur peut se livrer au jeu de la comparaison de leurs vêtements, noter les différences, et en déduire ce que cela dit sur leur personnalité propre. du début à la fin, il constate d'ailleurs que les auteurs ont proscrit les costumes moulants aux couleurs chamarrées, préférant des vêtements civils, et à quelques rares reprises des uniformes. Ils inscrivent ainsi le récit dans le domaine de l'anticipation, plus que dans le genre superhéros.

Pour ce récit d'anticipation la force de la narration visuelle réside également dans la qualité descriptive des décors. Jon Davis-Hunt investit du temps pour les représenter, leur donner des caractéristiques uniques, les rendre concrets et palpables. le lecteur voit la ruelle illuminée par les feux à éclat de la voiture de police. Il retrouve l'aménagement minimaliste et stérile de la station de Skywatch. Il a l'impression de retrouver le diner purement fonctionnel du début de la série Planetary de Warren Ellis & John Cassaday. Il jette un coup d'oeil au salon de la petite maison de Marc Slayton pour voir comment il l'a aménagé. Il apprécie la grande taille du lit de Priscilla Kitaen. Il soupire en voyant l'open-space des bureaux d'IO, environnement de travail déshumanisé. Il détaille les outils qui se trouve au tableau du garage d'Alexandra Fairchild, etc. le lecteur attend également avec impatience les scènes d'action, car il sait que dans ces moments le scénariste laisse l'artiste raconter l'histoire, sans dialogues ou cellules de texte. Effectivement l'affrontement entre Slayton et Lynch se déroule sur 4 pages, donc 3 sans un mot, pour une narration rapide et spectaculaire. L'épisode 2 s'ouvre avec une scène d'affrontement au pistolet dans les bureaux d'IO, à nouveau 4 pages sans un seul mot, mettant en évidence la grâce et l'efficacité des mouvements de Lucy Blaze. Dans chaque épisode, le lecteur trouve ainsi une scène muette, souvent un combat, mais pas seulement. Lorsque Jenny Mei Sparks s'occupe de l'esprit de Jack Hawksmoor dans l'épisode 15, cela donne une page de souvenir retranscrivant toute l'horreur des expériences qui ont été réalisées sur son corps.

Indépendamment des attentes du lecteur vis-à-vis de l'intrigue, il prend un grand plaisir à la narration, à la fois les séquences imaginées par le scénariste, à la fois la mise en scène et le découpage réalisés par l'artiste. Warren Ellis continue de raconter son histoire prévue en 24 épisodes. le lecteur retrouve donc Henry Bendix à la tête de Skywatch, toujours aussi cassant et cynique, prêt à sacrifier de nombreux civils pour conserver le statu quo entre son organisation et IO (International Operations). En face, il retrouve Miles Craven à la tête d'IO, tout aussi obstiné à ne rien céder à son rival. En ce qui concerne la troisième voie, le scénariste se focalise plus sur Angela Spica, Shen Li-Min et Jenny Mei Sparks, que sur Jacob Marlowe et les autres employés de Halo. Au fur et à mesure que John Lynch rencontre d'anciens cobayes du projet Thunderbook, le lecteur en apprend plus sur les extraterrestres, leurs intentions, et la manière dont IO a essayé d'en tirer parti. Toutefois le fil conducteur de ce troisième tome est constitué par les visites que John Lynch effectue pour reprendre contact avec lesdits cobayes. le lecteur familier de l'univers Wildstorm depuis sa création en 1992 et pendant la décennie qui a suivi peut y voir un exercice de nostalgie. Par exemple, il sourit en voyant des individus ayant constitué la génération d'avant l'équipe Gen13. Il peut aussi jouer au jeu des similitudes et des différences, voir ce qu'Ellis a repris en l'état, voir ce qu'il a modifié.

Évidemment pour un lecteur n'ayant pas lu ces séries des années 1990, ces références sont invisibles et il se focalise sur le fond de l'intrigue, plutôt que sur la forme revisitant des personnages ayant connu leur heure de gloire 20 ans auparavant. Il assiste ainsi à des avertissements dispensés par le responsable d''un ancien projet dont les cobayes ont refait leur vie, plus ou moins satisfaits de leur sort. Dans le même temps, la tension entre 2 agences gouvernementales menace de dégénérer en conflit ouvert très rapidement. Warren Ellis décrit un monde où rien ne peut rester secret, toutes les affaires finissent par ressortir, et où le risque de conflit mondial provient d'agences sensées travailler ensemble pour le même objectif. Il n'y a pas de preuve de l'existence ou de la présence d'extraterrestres dans notre monde, par contre les 2 autres caractéristiques sont bien présentes. L'humanité est à nouveau dans une situation où son extinction semble bien réelle, alors que les pouvoirs publics semblent préoccupés par des futilités.

Ce troisième tome s'avère tout aussi impressionnant et divertissant que les 2 premiers, que le lecteur soit familier de l'univers partagé Wildstorm des années 1990 ou non. Jon Davis-Hunt réalise des planches taillées au cordeau, avec une qualité descriptive excellente, tout en restant parfaitement lisibles, en étant à la hauteur des exigences du scénariste. Warren Ellis écrit une intrigue à l'enjeu planétaire, avec des personnages efficaces et différents, tout en revisitant l'héritage de Wildstorm. le dernier quart de l'histoire s'annonce explosif, et il n'est pas sûr que la nouvelle équipe d'intervention clandestine formée à la fin de l'épisode 18 pourra y changer grand-chose.