La forêt aux lapins, tome 1

En 2018, j'ai eu le plaisir de découvrir la triste poésie d'Enjo dans son diptyque Depth of field où j'avais décelé un vrai potentiel chez l'autrice pour les histoires douces mais âpres malgré quelques maladresses. J'ai donc été ravie de voir l'éditeur sortir sa nouvelle série cette année.

La Forêt aux lapins, commencé en 2018, ne compte à ce jour que 2 tomes au Japon et nous conte la lente évolution de la relation entre deux amis d'enfance passionnés d'athlétisme mais pour qui les aléas de la vie vont faire bien du mal.

Shii et Tamaki se connaissent depuis tout petits. Avec un an de moins, Shii est très attaché à Tamaki qui est le centre de son univers. Mais au fil des ans, il va en venir à questionner leur relation et les sentiments qu'il éprouve pour lui. Ce dernier, de son côté, ne se rend compte de rien. Il est trop pris par ses propres problèmes, c'est-à-dire une jeune mère célibataire qui aimerait continuer à vivre sa vie de femme comme s'il n'était pas là. Mais à l'aube de l'âge adulte, Shii n'arrive plus à taire ce qu'il ressent.

Ce premier tome, qui est une vaste introduction, m'a plu parce qu'il permettait de bien retracer le parcours des deux garçons à travers des chapitres où ils sont enfants, peu jeunes ados et enfin lycéens. Cette lente et douce évolution permet de mieux comprendre comment ont pu prendre racines leurs sentiments à l'un et l'autre, et leur confère aussi une aura très attachante. C'est comme suivre deux de nos propres amis à travers les âges.

Pourtant les héros n'ont pas forcément un caractère facile. L'autrice n'a pas choisi de nous facilité les choses, comme dans Depth of field ses personnages sont complexes et torturés malgré la jovialité qu'ils peuvent communiquer aux autres. J'ai été frappée par la triste vie de Tamaki et ce qu'il a dû subir à cause de sa mère qui était trop immature pour l'élever. Ce que l'autrice pointe du doigt ici est une situation malheureusement bien trop crédible pour qu'on y reste insensible et les conséquences font peine à voir. Shii, lui, est plus banal mais le fait de montrer peu à peu la naissance de son désir et de ses sentiments pour Tamaki nous le rende attachant, alors que parfois c'est vraiment juste la figure du sale gosse ^^!

L'autrice a vraiment frappé fort pour moi en mêlant cette critique sociale et le récit de sentiments et de désirs homosexuels chez un garçon de son plus jeune âge à l'aube de l'âge adulte. J'ai trouvé son récit réaliste et âpre. Les questions que se pose Shii quand il s'aperçoit des réactions de son corps sont tout à fait crédible. La mise en scène est pleine de bon sens et sans le moindre jugement. J'ai beaucoup aimé.

Cependant, il ressort aussi une certaine morosité qui pèse sur la lecture. Tamaki peut nous mettre mal à l'aise, tout comme la mère de Shii et le profond mal être de ce dernier fait mal. Ce n'est donc pas une lecture facile ou détente comme la couverture aurait pu y faire penser. Je l'avoue, je m'attendais juste à une tendre romance au début, et non à quelque chose d'aussi âpre.

Les dessins, eux, ont gagné en finesse et en précision. Ils sont bien moins maladroits que dans Depth of field. Au contraire, ils sont tantôt réalistes, tantôt poétiques, soutenant bien le récit de vie auquel on assiste. Ils m'ont régulièrement enchantée.

La Forêt aux lapins est donc un premier tome réussi qui met en bouche le lecteur et propose un récit plus profond que la simple évolution de la relation de deux amis d'enfance. C'est un bon début pour Enjo, maintenant je reste quand même pas mal sur ma faim et j'attends avec impatience le deuxième tome pour approfondir mon avis.
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Dès les premières pages, j'ai été happée ! C'est un total coup de coeur. Alors, oui, je suis faible face aux histoires sur des amis d'enfance, mais la série dégage quelque chose de différent, d'original et de complexe qui ma immédiatement plu.

Shii et Tamaki sont voisin et amis depuis qu'ils sont enfants, et Shii a toujours était amoureux de lui. À mesure qu'il grandit, son désir pour son ami va augmenter à tel point qu'il va essayer de couper les ponts avec lui en l'évitant pendant un an. C'est une fois entré au lycée que Shii retrouve Tamaki, qui a un an de plus, pour se rendre compte que ses sentiments n'ont absolument pas changé. Aussi, lorsque Tamaki lui confie ne pas aimer les femmes, c'est un signe. Il lui avoue alors ses sentiments, en espérant arriver à se rapprocher de lui.

Le manga prend bien son temps pour construire son histoire. du point de vue de Shii pendant une bonne partie du tome, on va suivre son enfance jusqu'au présent, son entrée au lycée. En grandissant, Shii a construit toute sa sexualité par rapport à Tamaki, sans que ce dernier ne se doute de quoi que ce soit. Toujours dans le fantasme et la frustration, on sent qu'il culpabilise énormément de ressentir autant de désir pour son ami qu'il pense salir.

Aussi, à aucun moment il n'a compris ni su que Tamaki était maltraité. En même temps, c'est dur d'appréhender ce qu'il se passe pour un enfant. On sent rapidement que le manga ne proposera pas une romance classique, mais va aborder des thèmes difficiles comme la sexualité, la famille, la maltraitance, le traumatisme… Je pense que les thèmes les plus durs seront développés à travers Tamaki et sa mère, qui l'air d'avoir quelques problèmes psychologiques et un style de vie difficile.

Ce premier tome est touchant, mais aussi dérangeant et triste. J'espère que Tamaki arrivera à dépasser tout ça avec Shii, mais j'ai bien peur que la mère soit un obstacle conséquent. En tout cas c'est pour moi un premier tome très réussi avec un dessin impeccable et une histoire qui prend bien son temps pour s'installer. Les personnages sont immédiatement attachants, notamment parce qu'on les voit grandir ! J'appréhende un peu la suite, j'espère que ça ne tombera pas trop dans le drama pour quelque chose de plus subtile et réaliste.

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