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Kline, détective privé se retrouve un matin contacté par deux hommes afin de résoudre un meurtre dans une société secrète. Ne travaillant plus depuis la perte de sa main dans un règlement de comptes il ne comprend pas bien l'enjeu de cet appel. Ce n'est seulement lorsqu'il est kidnappé par ces hommes et emmené dans un lieu tenu secret qu'il comprend pourquoi ils voulaient de lui. Cette société secrète ne comporte que des amputés volontaires et Kline se retrouvera bientôt obligé de se soumettre par sa propre volonté aux us et coutumes de ces hommes s'il souhaite résoudre ce meurtre.

J'ai fortement été troublée par cette lecture. Au-delà du caractère assez gore de cette société secrète se cache des réflexions très intéressantes sur l'endoctrinement religieux et ce qu'on est prêt à s'infliger sous couvert de la foi. Evenson ne va pas par quatre chemins, c'est tout ou rien. Les soi-disant choix de Kline ne sont motivés que par un conditionnement de groupe et la question d'humanité, ce qui défini moralement un homme est posée.

Je conseille cette lecture aux amateurs, attention tout de même, les scènes sont gores mais les réflexions intenses. Un livre marquant, inoubliable, qui m'a poussée à me poser de nombreuses questions sur la foi et sur l'abnégation.
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La chair ou la vérité ?
Je vous fais mon retour sur la confrérie des mutilés de Brian Evenson aux éditions le cherche midi, première rencontre avec l'auteur pour ma part mais certainement pas la dernière!
J'ai trouvé l'intrigue très originale, singulière (voir carrément dérangée) et prenante!!
Comment décrire ce livre ? Je dirais Perturbant, glauque, sanglant et très visuel dans ces descriptions. J'ai été happée dès les premières pages. J'ai dévoré ce roman hyper rapidement, le rythme étant super haletant et j'ai vraiment beaucoup aimé le style brut de l'auteur ! On ne peut pas vraiment dire que Kline le personnage principal soit attachant mais il m'a bien fait rire par son comportement !
J'ai adoré la fin, je l'ai trouvée vraiment fun et badass ! Je vais m'arrêter là pour ne pas spoiler mais en clair c'est un bon moment de lecture sanguinolent, déjanté et sans prise de tête...enfin à part les décapitations...
Cependant il faut avoir l'estomac bien accroché et cela ne plaira pas à tout le monde, pour ma part j'ai adoré ayant fortement l'habitude de ce genre de livre.
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Kline est un détective qui a perdu sa main au cours d'une enquête. Tranchée net par le gentleman au hachoir. Il a cautérisé au plus vite, lui-même la plaie avec un réchaud dans le but de surprendre le tueur et ainsi l'achever, d'une balle dans l'oeil…
Pas le genre d'histoire qui reste insignifiante.
Et qui va attirer une secte : La Confrérie des Mutilés.

Kidnappé par les membres de la secte, il se voit octroyé de force, une mission complètement absurde : trouver un assassin au sein de la Confrérie, mais sans corps, sans lieu du crime, et dans l'interdiction formelle d'interroger les frères… Car la Communauté est hiérarchisée par le nombre d'amputation. Hors Kline n'est qu'un « un », puisqu'il ne lui manque que sa main. Et pour pouvoir avancer dans l'enquête, il faudrait au moins être un « quatre »…

1/Si vous connaissez un peu l'auteur, vous savez que le mormonisme occupe ses récits. Je vous synthétise grossièrement le mormonisme : un jour un mec très charismatique, Joseph Smith, se balade dans la forêt et rencontre un ange qui lui confie des plaques d'écritures saintes, lui permettant de rédiger le Livre des Mormons (une sorte de suite à La Bible, pour ceux qui arrivent aux States). Il aura au cours de sa vie, plusieurs contacts spirituels avec les hautes sphères déistes, notamment lorsqu'il se lassera de son épouse et qu'un ange lui annoncera qu'il doit se marier avec plusieurs femmes (bah voyons). Des branches différentes vont s'éloigner du mormonisme de base. Puis plus tard, s'installant dans l'Utah et pour des raisons politiques, ils vont devoir redevenir monogames. Mais la monogamie n'est pas du goût de tout le monde et d'autres branches extrémistes vont voir le jour.
J'ignore si Brian Evenson a été élevé par des extrémistes mormons, mais son personnage, Kline, va se retrouver bringuebalé d'une branche sectaire à une autre. La base du premier mouvement était que de perdre un membre, permettait de se rapprocher de Dieu. «Si la perte d'un membre nous rapproche de Dieu, ils pensaient l'approcher de plus près en multipliant les amputations. » C'est ainsi que la secte dévie dans l'exagération absurde et ridiculement douloureuse. La convoitise d'accéder au plus haut rang, va créer une hiérarchie au sein de la Communauté : plus vous avez de membres amputés, plus vous êtes au sommet. « La hiérarchie, les jugements portés contre les camarades ayant subi un nombre inférieur d'amputations, la servitude, la suffisance. »
Le sacrifice de soi, plus au sens propre qu'au figuré, n'est alors plus spirituel, mais motivé par le Pouvoir. Jeux de mains jeux de vilains. Notre protagoniste va devoir affronter l'horreur, les personnages se découpant de manière absolument consentante des bouts de leurs corps.
Consentants ?
Est-ce que justement, ce n'est pas le propre de la secte de nous faire croire que nous sommes consentants ?
Car la soumission au sein du groupe, fonde la course à la multiplication des amputations. Elle n'existait pas lorsque tous les membres étaient au même niveau spirituelle. La hiérarchie, que ce soit dans la religion ou les sectes, ne devraient pas exister, car nous sommes tous les agneaux de Dieu, au même niveau... Il ne devrait pas exister d'être supérieur en dehors du démiurge. La hiérarchie ce n'est pas spirituelle. Et en voulant atteindre le haut niveau, pouvons-nous alors parler de consentement? Voilà, à mon sens, la première symbolique du roman.

2/Lorsque nous sommes extérieurs à une religion ou une secte, nous sommes confrontés à l'ignorance et l'incompréhension la plus totale, qui institue ainsi la place du mouvement dans quelque chose que nous ne pouvons pas saisir, sans ressentir La Foi. La Foi ou l'Appel de Dieu. Et pourtant, les détenteurs de cette Foi mystérieuse peut rendre curieux. Cette curiosité est un piège. « La curiosité est vraiment quelque chose d'affreux, songeait-il. Comment peut-on s'empêcher d'avoir envie de savoir? » Cette curiosité elle concerne surtout ceux ou celles qui s'intéressent à la métaphysique. Et les communautés prosélytiques le savent, elles sont formées ainsi. (Je peux en témoigner, ayant assister pendant 3 ans, deux fois par semaine aux réunions dans le salle du Royaume des Témoins de Jéhovah). C'est encore plus hermétique pour ceux ou celles qui ne cherchent pas à savoir. Ces derniers ne seront pas la cible. Alors quand on est la cible, on entendra des phrases, tel que Kline l'entendra : « Quand vous aurez reçu l'Appel » qui pour les fanatiques est une évidence incontestable. Vous recevrez l'Appel, c'est certain. Et lorsque l'Appel de Dieu ne vient pas, et qu'un carnage est accompli, l'autre branche le voit comme un Elu. Celui qui doit éliminer les faux prophètes. Ne peut-il donc pas se sortir de ce cauchemar ? Non car il est difficile de sortir d'une secte. Et la bienveillance qui y règne, avec cette gentillesse à outrance, cette assurance de « protection », c'est quelque chose de très enivrant. La communauté protège, aide, soutiens, pourquoi donc vouloir en sortir ? Et si elle disait la Vérité ? Adopter la politique de la main tendue lorsqu'on n'a pas de main, quelle idée!
L'auteur utilisera en symbole d'incompréhension, quelque chose d'absolument révulsant : la mutilation pure et simple (dans la joie et la fête en plus).

3/J'ai beaucoup de mal à saisir le rapport de Brian Evenson avec l'amputation. Dans son roman immobilité, le protagoniste n'est pas amputé mais il ne peut clairement pas utiliser ses jambes. Dans Baby Leg, on subit des expériences douteuses sur les corps et cette femme qui a une jambe de bébé à la place de sa vraie jambe, et maintenant celui-ci. Mais son génie d'écriture rend certaine situation très drôle. Les dialogues absurdes n'ont rien à envier à Samuel Becket et la banalisation des amputations donnent l'impression que l'auteur joue avec monsieur Patate. Même si j'avoue que les premiers passages m'ont donné la nausée, la répétition de l'horreur grandguignolesque finit par rendre ses scènes horribles à la limite de la comédie. Et lorsque le protagoniste se balade avec une tête ensanglantée, et qu'il se pose des questions sur son inhumanité, nous nous rendons compte que nous avons perdu la nôtre puisque nous ne sommes pas horrifiés par la situation. C'est très fort.

C'est mon quatrième roman de Evenson, et je dois avouer que je suis accro.
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Enfin, dans « La Confrérie des Mutilés », (2008, Cherche Midi, 228 p.), le livre est divisé en trois chapitres, le premier reprenant le titre du recueil, le second « Derniers jours » est traduit de « Last Days », sorti en édition limitée à 300 exemplaires plus 15 exemplaires reliés et signés (2003, Earthling, 48 p) puis en broché (2009, Underland Press, 256 p., enfin une dernière partie na pas de titre dans la version française. C'est un peu difficile à suivre d'un point de vue éditorial (tout comme d'ailleurs l'intrigue). Mais cela justifie l'incipit, tiré de Matthieu « Si ton oeil droit est pour toi une occasion de chute, arrache-le et jette-le loin de toi… Et si ta main droite est pour toi une occasion de chute, arrache-la et jette-la loin de toi… »
Un ancien policier, Kline, est un jour agressé par le « gentleman au hachoir », et pour se défendre ( ?), et détourner l'attention de son agresseur, il se mutile avec un hachoir, se coupe une partie du bras, et cautérise le moignon sur la plaque brulante d'un réchaud, après s'être fait un garrot avec sa ceinture. Pour ne pas en rester là, il tire une balle dans l'oeil de son agresseur, le tue, et lui vole une coquette somme. On voit que l'histoire commence calmement. Fors de son exploit, il est contacté par une mystérieuse société. Cette dernière possède une certaine hiérarchie, Un, Deux, Huit, Dix, Douze, basée sur la propension des membres à s'être auto-mutilés (d'où le chiffrage). On a donc bien affaire à une belle histoire dans laquelle le hachoir est aussi un personnage important. Mais des problèmes autrement importants agitent la secte. L'amputation d'un pied correspond elle à un, cinq (les orteils) ou six membres (les orteils et le pied) ? Vaste question métaphysique. L'intrigue se poursuit par une demande d'élucidation du meurtre du chef de cette communauté, moyennant bien sûr une contrepartie physique («Chair ou vérité ? Qu'est-ce qui compte le plus ? »). On trouve d'ailleurs dans le livre une séance de strip-tease assez spéciale puisqu'elle se termine par plus qu'un effeuillage de vêtements. (Mais bon tout le monde n'est pas forcément adepte de la Confrérie des Mutilés).
Le chapitre « Derniers jours » fait intervenir une secte dissidente où tout le monde s'appelle Paul, est blond et amputé de la main droite. C'est un hommage au pianiste manchot Paul Wittgenstein (le frère de Ludwig), que l'on croise là par inadvertance. S'ensuivent alors (dans le tout dernier chapitre) des questions hautement philosophiques sur la condition d'être humain « Quand cesse-t-on d'être humain ? Quand on décide d'empoigner par les cheveux la tête d'un cadavre, de la brandir devant soi comme une lanterne, tel Diogène qui cherche un homme ? »

Trois autres titres encore non traduits que je vous livre ici en cadeaux. (Vous aurez sans doute compris que je trouve cet auteur assez attachant.
« Dark Property » (2002, Thunder's Mouth Press, 128 p.). Une femme traine un bébé mourant dans le désert, à la recherché d'une citadelle qui abrite une secte mystérieuse vouée à la résurrection. Elle est en plus poursuivie par un chasseur de primes qui laisse derrière elle une trainée sanglante. On retrouve tout le fanatisme religieux et ses dérives. Comprenne qui pourra pourquoi il est parti de chez les mormons.

« The Wavering Knife: Stories » (04, Fiction Collective 2, 205 p) 4 nouvelles don't je n'ai pu trouver que les titres.
« Moran's Mexico » ,« Greenhouse » ,« White Square » ,« The Prophets »

« Prophets and Brothers » (97, Rodent Press, 54 p) édition limitée à 250 exemplaires. Il s'agit de 4 nouvelles, essentiellement dédiées à l'Ouest américain et aux Mormons.
« The Prophets » est une nouvelle republiée plus tard dans The Wavering Knife. On y découvre un Mormon fondamentaliste, qui décide de déterrer le corps du prophète Ezra Taft Benson et de le ressusciter (bonne chance à lui).
« Blessing the Dog » qui s'est mis en tête de bénir son chien, malgré l'opposition de sa femme et de l'Eglise
« A Brother's Love », justification épistolaire d'un home pour se justifier.
« Sanctified, in the Flesh » raconte les problèmes automobiles que donnent lieu une rencontre entre les Trois Néphites et/ou un groupe de tueurs. Les Néphites, qui combattent les Lamanites, sont tous deux des descendants de Néphi ou de Léhi, groupements issus du peuple de Mormon. (Jospeh Smith, le premier président de l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, a reçu la visite de l'ange Moroni qui lui indique l'endroit, sur la colline de Cumorah, New York, où se trouvait le livre de Mormon, volume d'Écritures saintes complémentaire à la Bible. Mormon (311 – 385), chef militaire de l'âge de quinze ans à sa mort, a vécu sur le continent américain. (Vous saurez tout sur les mormons, après tout cela. Cela vous permettra de porter la contradiction quand ceux ci viendront sonner chez vous. Ils sont facilement reconnaissables, allant par deux, en costume noire, chemise blanche, cravate et cheveux courts. N'hésitez pas à leur parler de sexe, cela les fera fuir).

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Après son acte de naissance avec La langue d'Atlmann, et alors que l'on se remet encore de son premier roman au vitriol de l'Eglise avec Père des Mensonges, l'américain Brian Evenson publie une novella au titre intriguant : La Confrérie des mutilés. Traduit en France dans la défunte collection Lot 49 dirigée par Claro et Hofmarcher, la version française regroupe à la fois la novella originale de 2003 mais également sa suite, Derniers jours, parue six ans plus tard. L'auteur continue de définir les contours morbides de son oeuvre et vous êtes loin d'imaginer les tréfonds indicibles de l'horreur qu'il vous réserve…avec le sourire !

L'homme-chiffre
Ancien mormon, Brian Evenson est fasciné depuis toujours par le pouvoir de la croyance et le phénomène sectaire. Logique donc que la religion occupe une place centrale dans son oeuvre. La Confrérie des mutilés ne fait pas exception à la règle.
Nous y retrouvons Kline, un détective privé qui vient de vivre une expérience pour le moins très désagréable. En cherchant à débusquer le « gentleman au hachoir », Kline est contraint de s'amputer la main et de cautériser la plaie lui-même pour pouvoir s'échapper et mettre fin aux agissements du tueur. En pleine convalescence et alors qu'il en est encore à s'habituer à sa nouvelle condition, notre détective reçoit un étrange coup de fil de deux inconnus qui lui proposent de venir les rencontrer au plus vite. Kline doit les aider sans tarder.
D'abord surpris, puis intrigué, notre héros n'a finalement plus d'autre choix que de suivre les deux inconnus lorsque ceux-ci se présentent à son domicile en le forçant à les suivre.
Gous et Ramse, puisque c'est ainsi qu'ils se nomment, expliquent à Kline qu'il doit absolument les aider à résoudre une sinistre affaire qui a eu lieu dans leur communauté et que sa mésaventure avec le « gentleman au hachoir » est un signe clair qu'il est l'homme de la situation.
Voilà donc que Kline se retrouve de l'autre côté d'un portail sécurisé, au milieu d'un lotissement de plusieurs maisons encadrant un immeuble à deux étages. C'est là que réside la fameuse Confrérie dont sont membres Gous et Ramse.
Il ne faut d'ailleurs pas longtemps pour comprendre que ce qui rassemble les hommes de cette Confrérie, c'est un goût prononcé pour l'amputation.
Ici, on vénère l'absence plutôt que la présence.
Le dévot est celui qui sera prêt à se séparer du plus de membres ou de morceaux de chair inutiles. Orteils, doigts, pieds, jambes, bras, oreilles, oeil, fesses… Plus, c'est moins.
Brian Evenson nous fait pénétrer dans un monde avec des règles complètement insensées et macabres, construisant une religion autour de la mutilation de soi, troquant la livre de chair contre l'accumulation du savoir, suscitant l'excitation pour le corps transfiguré.
Les membres de la Confrérie sont d'autant plus élevés dans la hiérarchie qui leur manque des morceaux. Un novice est un « Un » tandis que les puissants vont bien au-delà de Dix. L'homme devient un chiffre, devient un tableau de chasse.
C'est ainsi que Kline se retrouve devant un « Douze », le numéro deux de la Confrérie en réalité, un certain Brochert. Celui-ci demande alors au détective de faire ce qu'il fait le mieux : débusquer la personne qui a assassiné le Prophète et Chef de la Confrérie, Aline. Mais Aline est-il vraiment mort ? Et comment découvrir quoique ce soit quand on soi-même qu'un « Un », presque un non-croyant ? Faut-il jouer selon les règles des autres une fois dans leur monde ?

Croire jusqu'à la lie
En explorant la secte avec Kline, le lecteur finit par perdre pied et l'atroce devient une norme. Se couper un membre quelque chose de banal, de ritualisé, d'obligatoire. Cette banalisation de la violence et du macabre permet à Brian Evenson de déployer une certaine forme d'humour noir qui vient donner un ton plus distancié que, par exemple, celui de Père des Mensonges. Mais cet humour n'empêche pas l'américain de disséquer patiemment et cliniquement les chemins empruntés par le fanatisme.
Ce qui fascine dans La Confrérie des mutilés, c'est sa capacité à exposer les rouages de l'endoctrinement de façon implacable. Kline, à force de côtoyer des croyants complètement inébranlables dans leur conviction, finit par supporter une réalité qui vacille à son tour. La dévotion et le changement de paradigme entraînent de facto une déformation du réel. Et l'on en perd ses repères.
Sous l'influence de Beckett, Brian Evenson poursuit par une suite direct avec Derniers jours. Une suite qui ajoute une autre dimension supplémentaire à son exploration du phénomène sectaire : le schisme et l'uniformisation. Car si la Confrérie était une première étape dans la négation de l'individualité, les adorateurs de Paul en sont une autre expression qui cherche à annihiler peut-être encore plus complètement l'identité, à la façon d'un Chuck Palahniuk dans Fight Club.
Tous les membres s'appellent Paul et prennent Kline pour l'Élu, menant à un phénomène de prophétie auto-réalisatrice aussi sanglante que savoureuse. Cette fois, Brian Evenson pousse son jeu de massacre jusqu'à dénicher le point de rupture où la raison se laisse dominer par l'absurdité de ce qui nous entoure. Où l'on est prisonnier de l'absurde.
C'est aussi une façon radicale de comprendre que pour sortir d'une secte… il faut trancher dans le vif. Que seule une solution extrême peut mettre fin au fanatisme qui, lui-même, s'auto-alimente sans aucune limite.
Évidemment, le roman reste un monument de macabre et de glauque comme seul Brian Evenson en est capable. On y retrouve sa fascination pour le body-horror et l'amputation, sur la capacité de l'humanité à produire une violence qu'elle justifiera par n'importe quel mythe ou religion.
D'ailleurs, Kline a surtout un très vilain défaut : celui de la curiosité.
Cette curiosité qui mène à la fascination et ultimement, à l'endoctrinement. Un fait que lui fera remarquer à plusieurs reprises Brochert, comme si la curiosité avait l'effet pervers de découvrir ce qu'il ne fallait pas et allait de fait causer notre perte.
Surtout quand le mystère s'annonce déjà sinistre à l'avance…

Aussi fascinant que macabre, La confrérie des mutilés dépèce les croyances et le phénomène sectaire. C'est une exploration radicale et extrême de l'homme qui croit, de ce qu'il est capable de se faire à lui-même et à autrui en modifiant le réel. Brian Evenson s'amuse dans le glauque et l'on en ressort éprouvé autant qu'étrangement réjouit. Amputez-vous qu'ils disaient…
Lien : https://justaword.fr/la-conf..
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--> 2eme lecture de Brian Evenson.
(1ere lecture Baby leg, petite nouvelle rafraîchissente et complètement déjanté)
On suit les messantures, toujours WTF, de Kline inspecteur mutilés de la main à qui il va arriver une drôle d'histoire avec une secte de mutilés qui vont l'employer pour enquêter sur un soit disant meutre. Mais tous sa n'est qu'une façade afin de l'intégrer à la secte, qui le glorifie et le voit comme un avant-gardiste car lorsque que kline à était mutilé il s'est auto-cotérisé son moignon.
Cette fameuse cette secte marche par échelon plus on est amputé plus on est à haut échelon. (8/9/10/12 amputation)
Je vous passe certains détails pour pas tous vous raconter.
Mais par la suite il va rencontrer une seconde secte tout aussi étrange et tout aussi mutilé "Les Paul", car oui il s'appelle tous Paul et ils sont tous mutilé de la même manière.
Un roman WTF, un auteur très très prometteur, une vraie bonne surprise. Hâte de continuer ma découverte de cet auteur avec ces autres livres.
Je recommande ++++++
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Cette édition française présente les deux parties de ce texte, « La Confrérie des Mutilés », et sa suite directe « Les Derniers Jours », écrites et publiées aux USA à quelques années d'intervalle.
Notre ex-prêtre Mormon y offre le récit brut et gore d'un type, ex-policier infiltré aux contours plus que flous, nommé Kline, ni propre ni remarquablement petit, au prise avec des sectes dismophophobiques, ou plus précisément et « positivement », adepte de l'apotemnophilie…

Mais laissons la place à Marc Gozlan dans son blog du Monde pour nous expliquer:
« Apotemnophilie, terme utilisé la première fois en 1977 pour désigner le désir d'amputation d'un membre sain. Ce terme vient du grec apo signifiant « loin de », en référence à la notion d'extrémité, temno qui signifie couper et philie qui veut dire aimer. L'apotemnophilie signifie donc littéralement « l'amour de l'amputation ».

Initialement, ce terme désignait clairement un trouble de l'ordre d'une paraphilie (ensemble des pratiques sexuelles déviantes), le désir d'être amputé (apotemnophilie) coexistant avec une recherche de partenaires amputé(e)s (acrotomophilie). L'assimilation de l'aptemnophilie à une paraphilie va cependant rapidement laisser place à une autre conception.

Depuis 2004, le caractère paraphilique du trouble n'est plus établi. le terme d'apotemnophilie tend à être remplacé par une autre appellation. Les psychiatres parlent aujourd'hui de « trouble de l'identité et de l'intégrité corporelle » (TIIC). Cette nouvelle terminologie renvoie au fait que de nombreux patients expriment d'extrêmes préoccupations concernant leur image corporelle. Les patients atteints par ce trouble auraient un corps normal mais qui leur est devenu insupportable, estimant devoir être amputés pour être eux-mêmes. » M.G.

Ce « trouble », ou bien cette « maladie », — on voit bien que la terminologie, ( le langage en général ) pose la relativité de l'appréciation de certains comportements, spécialement de ce qui est ou a été catalogué sous le terme de paraphilie… on y reviendra… — mérite de s'y intéresser attentivement. Assez rares, les patients souhaitant l'amputation sont généralement décrits par les psychiatres comme « entièrement conscients et cohérents » dans cette volonté de modifier leur corps. En découle quantité de questions morales et d'arbitrages scientifiques…

Occasion donnée d'y réfléchir, car à part cela, ce roman ne demande pas beaucoup de concentration. Même l'horreur en reste plate, juste absurde.
Le plus court « Baby Leg », sorti juste après celui-ci, offre une variation beaucoup mieux menée de ces thèmes, avec sa structure ourobore, que cette tuerie allant crescendo.

Cousins des Assassins en Fauteuil-Roulant découverts dans « L'Infinie Comédie » de DFW, ces groupes sectaires aiment beaucoup le hachoir ou le couperet. Il y a vraiment beaucoup de sang dans ce roman.

En ultime page du livre, l'éditeur Lot49 annonce d'un énigmatique et volumineux symbole Omega Ω la prochaine sortie (en 2010) du volumineux roman « Oméga mineur » de Paul Verhaeghen, dont je vous parlerai un jour.
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Je viens de vivre une curieuse expérience…
Celle de lire un roman avec lequel je me suis sentie totalement en décalage, ayant à l'esprit l'idée d'un autre roman que je m'étais imaginé.
Je m'explique : suite aux avis qui m'ont donné envie de découvrir "La confrérie des mutilés", de Brian Evenson, j'avais cru comprendre qu'il s'agissait d'un polar ou tout au moins d'un roman noir.
Ce roman est effectivement plutôt sombre, mais pas exactement dans le sens où je le pensais.
Il est d'ailleurs difficile de classer ce récit, qui oscille entre ouvrage de science-fiction et fable macabre.

Dans un style froid, exempt de toute émotion ou digression inutile, l'auteur nous raconte l'histoire de Kline, sur le compte duquel on ne saura quasiment rien, hormis le fait qu'il vient d'acquérir une certaine célébrité en neutralisant "L'homme au hachoir". Ce qui transforme cet événement en exploit, c'est que pour le réaliser, Kline n'a pas hésité à se trancher lui-même la main avant de la cautériser sur un réchaud, afin de tirer ensuite une balle dans l'oeil de l'homme avec sa main restante.
Cette attitude, qui révèle un sang-froid peu commun, incite deux étranges individus à le contacter et à lui présenter une non moins étrange requête. Il s'agit d'infiltrer une secte dont la particularité des adeptes est de pratiquer l'auto-mutilation, le nec plus ultra étant de se priver du maximum de membres possible... de l'objectif de cette infiltration, les deux acolytes ne veulent dans un premier temps rien dévoiler à Kline. Ce dernier, après de compréhensibles réticences, finit par accepter la mission.

Pendant une bonne partie de ma lecture, j'ai attendu que le récit bascule dans une histoire plus crédible, que des explications soient données sur la genèse de cette secte, le passé des personnages, jusqu'à ce que je finisse par admettre que je m'étais complètement fourvoyée, et que ce roman ne serait jamais celui que j'espérais...
Attitude sans doute stupide, puisque je dois bien avouer que j'ai du coup le sentiment d'être passée à côté des probables qualités de cette "Confrérie des mutilés"...
Je ne suis pas parvenue, notamment, à en apprécier le ton absurde, l'humour macabre, qui de mon point de vue donne aux scènes sanglantes du roman -dont l'auteur est loin d'être avare- un aspect plus comique qu'effrayant.

Cette rencontre avec Brian Evenson fut, pour résumer, un rendez-vous manqué...
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Je ne me rappelle plus comment j'ai entendu parler de la confrérie des mutilés. Toujours est-il que je pensais avoir à faire avec un roman policier un peu trashouille puisqu'il aborde le monde très (ré)créatif de la mutilation.
Il narre l'histoire d'un détective privé qui, après avoir perdu l'une de ses mains, se retrouve embauché par une drôle de société secrète qui base son culte sur la mutilation volontaire afin d'élucider le meurtre qui vient de les toucher. Ceci n'est cependant que le point de départ d'une intrigue alambiquée, d'une véritable descente aux enfers faisant la part belle à la dégradation des corps et des esprits (apotemnophobe, passe -vraiment- ton chemin).

Au final, La confrérie des mutilés, c'est tellement plus qu'un polar ! C'est un roman drôle, déjà. Très drôle même. Un texte assez extraordinaire dans lequel se mêle l'absurde et la poésie, la folie et la fureur. Un tourbillon d'aberration, poussant à l'extrême le fanatisme (religieux, essentiellement). C'est un roman féroce, très très féroce et bien plus subtile qu'on pourrait le croire, un texte qui dénonce, qui accuse, qui dresse un bilan bien peu glorieux de la nature humaine.

L'écriture de Brian Evenson est extrêmement clinique et particulièrement démonstrative... Si tu te lances dans cette lecture, assure toi d'abord d'avoir le coeur bien accroché et l'estomac en place, car l'auteur va se faire un malin plaisir de te déstabiliser, de te positionner dans le rôle du voyeur, de titiller ton côté malsain.

Mais tu vas ressortir de tout ça en ayant parcouru un chemin très enrichissant bien que dérangeant, et tu vas rire !
Lien : https://unspicilege.org/inde..
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complétement décalé et déjanté, avec une bonne dose de glauque..on aime ou on déteste; je suis dans la première catégorie. j'ai apprécié l'histoire, le personnage principal ainsi que la galerie de personnages secondaires.;c'est un ovni à découvrir!
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