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EAN : 9782714403223
256 pages
Belfond (04/01/2024)
3.71/5   29 notes
Résumé :
Depuis sa rupture, Melvile déprime. Sur une appli de rencontre, une certaine Tangere l'encourage à réveiller ses fantômes. Trois disparues prennent alors la parole pour le replonger dans sa jeunesse, ses étés auprès du grand-père bien-aimé à Saint Dalmas Valdebore, les truites du Boréon, les premiers émois et malentendus. L'occasion pour lui de réparer une partie de son passé. Premier roman.
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Critiques, Analyses et Avis (20) Voir plus Ajouter une critique
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Melville lutte contre son mal-être qu'il décrit avec une précision analytique, tandis que sa libido loin d'être défaillante ouvre le bal du récit, sans beaucoup de préliminaires. Pour se sortir de ce mauvais karma, il tente le virtuel, et entre en communication avec Tangere, une sorte de muse ou de thérapeute analytique. L'évocation intermittente de rêve renforce cette impression de cure par la parole.

Comme il se doit le discours fait émerger des figures fondatrices de son histoire, des fantômes surgit du passé et qui ont joué un rôle fondamental dans sa construction.

Ce récit intime décrit bien les états d'âme et les émotions du narrateur, avec des fulgurances qui émanent de phrases bien senties. Mais je n'ai pas accroché à ce récit trop introspectif à mon goût, et je crains fort qu'il ne m'en reste que peu de souvenirs à long terme.

Malgré tout de ce premier roman ressort une écriture forte, exprimant sans concession les émotions qui musèlent l'épanouissement d'un homme poursuivi par ses démons.

Merci à Netgalley et aux éditions Belfond.

256 pages Belfond 4 janvier 2024
#Seulslesfantômes #NetGalleyFrance
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«J'écris pour ceux qui ne sont plus là»

Dans son premier roman, Cyrille Falisse retrace le parcours d'un jeune homme dépressif, entouré de fantômes et d'amours défuntes. Autour du visage tutélaire de sa mère partie trop vite, Alice, Laetitia, Nina vont jalonner une vie qui n'est peut-être pas finie. Une quête sensible.

Dans l'agence de com de Louvain-la-Neuve où il travaille, le narrateur peut compter sur des collègues compréhensives. Misko, réfugiée irakienne, lui voit même un avenir d'écrivain. «Pour le moment je suis dépressif. C'est peut-être le préambule.»
Cette dépression résulte d'une douloureuse séparation. Presque un pléonasme, tant les séparations sont difficiles à vivre. Il avait pourtant été prévenu puisqu'après l'amour, elle lui avait assené: «Je vais te détruire». Cela avait failli marcher. Il errait comme un zombie et ni ses collègues, ni sa voisine n'avaient pu le faire sortir de sa léthargie. Restaient les sites de rencontre. «Je suis incapable de sortir de chez moi, d'aller dans un café avec ma triste gueule, encore moins de prétendre danser. Je n'ai qu'une option, le faire ici, entre les pixels et chercher le plaisir derrière l'écran.»
Des échanges virtuels qui vont lui permettre de converser avec Alice. Cette dernière va convoquer des souvenirs de jeunesse, quand il passait des vacances chez son grand-père à Saint-Dalmas Valdeblore. Quand, encore enfant, il était tombé amoureux de Laetitia.
La belle Réunionnaise à la peau cuivrée va longtemps le hanter, tant il est vrai qu'on n'oublie jamais son premier amour. Bien des années plus tard, il va tenter de retrouver sa trace.
Une enquête qui va en appeler d'autres, une envie qui va virer à l'obsession. Quand, il s'était mis en tête de séduire Sandra, la plus belle fille du collège et, touchant au but après des années passées à espérer, il avait finalement fondu pour les beaux yeux de Nina. Que sont ses femmes devenues?
Dans ce premier roman, Cyrille Falisse, né à Bruxelles en 1976, se livre à une introspection pleine de nostalgie et de poésie, dans lesquels les rêves virent au cauchemar. Dans sa quête de l'amour perdu, on sent toute la détresse de l'enfant qui a perdu sa mère trop tôt – les pages consacrées à son vain combat contre le cancer sont bouleversantes – et la folle envie d'avoir envie, à nouveau. Si l'espoir fait vivre, alors on peut se réjouir de refermer ce livre face à un vivant que seuls les fantômes accompagnent.
Ce roman teinté de nostalgie, brille aussi par son humour teinté d'autodérision et de fulgurantes réflexions. En voici une qui conclura à merveille cette chronique: «La vie est une succession d'opportunités manquées. En les additionnant, ça peut donner une belle vie.»
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu'ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.

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Chacun d'entre nous a ses propres fantômes. Ses moments de doute, de désespoir insondable mais aussi d'euphorie, de joie intense et de souvenirs vibrants. Ils sont tapis au fond de notre âme et l'on prend un soin méticuleux à ne pas les faire trop affleurer.
Melvile, ce jeune homme au teint trop pâle, a osé convoquer son passé. C'est là son tour de force. Lui qu'une sorcière a voulu piétiner, martyriser jusqu'à l'os. Une de ces femmes que l'on adore détester, qui veut faire de vous une chose faible et fragile.
Pourtant, ce sont d'autres femmes qui peuvent rendre à Melvile sa dimension d'homme, d'amoureux, de fils. Elles sont là ces figures féminines si prégnantes, ces fantômes, proches ou lointains, virtuels ou de chair et d'os.
Un roman avec une puissance, dont on se demande si elle est totalement libérée ou si l'auteur retient encore ses chevaux. La narration vous emporte à différentes époques, celle des premiers émois, celle des premières ruptures, celle des derniers jours. A chaque page, le lecteur oscille entre une brutalité sensuelle et une tendresse infinie, car Cyrille Falisse use des mots comme des caresses, tantôt douces comme des plumes, tantôt rugueuses comme de l'émeri. Cela laisse des traces, mais c'est bien cela l'existence. Un cahier de traces, de coups et de cicatrices.
Seuls les fantômes va vous submerger d'émotions, de toutes sortes. Apprêtez vous à vouloir secouer Melvile, aider Melvile, consoler Melvile, encourager Melvile.
Vous tous, vous reconnaîtrez vos propres spectres, vos entraves et vos élans. Vos chagrins et vos espoirs. Vous aurez envie de cerises et de bouquets de fleurs sauvages, de ciel bas et lourd et de mer turquoise. Vous serez consolés.
Seuls les fantômes, un roman à découvrir assurément.

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Notre héros déprime après s'être fait larguer. C'est grâce à une autre femme anonyme sur un réseau social de rencontres qu'il décide de se remémorer les trois femmes de sa vie, et ce qui fait qu'il est ainsi aujourd'hui : il part réveiller quelques fantômes pour mieux expliquer où il en est. On le suit dans ses souvenirs et ses recherches. Mais, s'il y a quelques phrases efficaces et quelques pensées peu communes, ça n'a pas suffit à m'emporter. Je suis resté à côté de ce personnage sans charisme et sans même avoir réussi à m'être attachant. Insipide j'allais écrire.
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Melvile souffre de dépression. Depuis que sa dernière compagne en date l'a quitté, il erre sur les réseaux sociaux, où il y fera la connaissance d'Alice, qui va l'aider à reprendre confiance. Et si pour aller mieux, Melvile devait simplement apprendre à vivre avec ses disparues et se réconcilier avec elles. Il y a sa mère, laetitia et Nina.

Je ne veux vraiment pas en dire davantage, mais simplement vous susciter l'envie de découvrir ce très beau récit, empreint d'une très belle poésie et de sentiments forts et tendres.

J'ai été très touchée par le personnage de Melvile qui se dévoile peu à peu à son lecteur, et nous raconte ainsi son histoire, faite de blessures irréparables et de drames. En évoquant les trois figures féminines qui l'ont aidé à se construire, c'est pour lui également l'occasion de se réconcilier en quelque sorte avec elles.

En proie aux souvenirs du passé, le narrateur nous entraîne dans ses premières découvertes de l'amour et dans sa construction personnelle qui ont fait de lui l'homme qu'il est maintenant. C'est une sorte de voyage initiatique.

Là plume de l'auteur m'a beaucoup plu. Je l'ai trouvée franche, directe et introspective. Les sentiments sont bien décrits et beaucoup de poésie émane parfois de ces pages. le roman est divisé en trois grandes parties.

Un roman fort et puissant, tout en introspection. À découvrir.
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critiques presse (1)
LaLibreBelgique
07 février 2024
Les histoires d’amour de Melvile finissent souvent mal. Dans un premier roman attachant aux accents autobiographiques, le libraire Cyrille Falisse alterne entre nostalgie et crudité.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
(Les premières pages du livre)
L'image manquante
Elle est nue de dos face à la fenêtre. Les cheveux remontés en chignon. Dehors la lumière est vive. Si je devais la photographier à cet instant précis, je serais à contre-jour et elle, prise sous un effet de halo, ses fesses rondes et blanches ressortiraient sur la pellicule. Ce serait beau. Son bras gauche tient une serviette et laisse percer un triangle de couleur vive au cœur de sa peau brune. Je ne vois pas l’autre bras, juste sa main au niveau du cou qui tripote le lobe de son oreille. Elle a les jambes légèrement écartées. Elle m’entend ou me devine derrière elle. Une mère sent son enfant. Viens, dit-elle. Elle se retourne vers moi. Je quitte l’embrasure de la porte et m'avance. Elle m’attire à elle, me serre contre ses seins, la serviette tombe à ses pieds. Je ne peux pas m’en empêcher, je l’embrasse sur les lèvres, elle me rend mon baiser et met sa langue dans ma bouche. Au moment où ma respiration se bloque, quelque chose de mou tombe dans ma gorge. Je m’écarte brusquement d'elle et parviens à l’expulser de mon œsophage, je le mâche un instant par réflexe avant de le cracher dans ma main, ça a un goût de plastique ou de gélatine. C’est un morceau de chair sanguinolent. J'ai envie de vomir. Je la regarde. Il lui manque un bout de lèvre.
Rêve n° 1

Je me réveille en criant, m’étouffant à moitié. J'inspecte mécaniquement mes joues et déglutis avec méfiance. À travers les stores, l’obscurité est dense, le réveil numérique indique 4 h 21. Une éternité que je n’avais pas fait ce rêve. Enfant et même adolescent, il était aussi fréquent que le cartable qui se renverse, la sortie sans slip ou le surplace alors que je suis coursé par des monstres. Ce petit bout de lèvre se détachait et finissait dans ma gorge. Je dévorais maman ou elle se décomposait en moi. À l’époque les adultes riaient quand je disais : «Avec ma maman j’ai un complexe de jeep.» Aimer sa mère au point de lui manger un morceau de bouche. Oui, moi aussi j’ai envie de te croquer, me répondait-elle avant que je ne me réveille.
J'habite au second étage d’une maison où la porte-fenêtre coulissante ne ferme pas complètement. Un courant d’air froid et humide me lèche le menton. Le proprio est le père de Joanne, une amie. Elle crèche juste en dessous avec Samuel, son mec, un artiste qui procrastine. Un insomniaque lui aussi. Le prix du loyer n’est pas énorme donc je me la ferme. En contrepartie je gèle et mon appart sent le moisi. La vaisselle sale dégage très vite une odeur immonde, les cendriers froids à côté c’est du parfum. Et ce futon qui me défonce le dos. Qui peut aimer dormir sur un truc aussi dur? Celle dont je veux mais ne peux oublier le nom m'a bien eu. Je l’ai acheté sur ses conseils en me disant qu’il serait le parfait outil du Kâma-Sûtra qu’on allait explorer ensemble. Un lit au niveau du sol, elle trouvait ça à la fois pratique et érotique. Ça ne l’a pas empêchée de me quitter en prétextant que j'étais une petite chose faible et fragile. Faible et fragile! Elle a bien insisté sur ces deux mots. Elle a dit d’autres amabilités qui me trottent dans la tête, elles viennent par vagues et me débordent. Je fais une obsession. On devient fou quand on ne maîtrise plus ses pensées. C’est ce qui m'arrive. Je lutte contre moi-même. L'idée m'effraie. Je suis fou. Ce sont les images qui me contrôlent, des idées fixes et récurrentes. Je tourne en rond dans mon studio où l'air froid se glisse comme une langue reptilienne. Je ne sors plus que pour aller bosser. Mon esprit ne me laisse aucun répit. C’est son souvenir qui commande. Pas elle. Elle, elle est partie depuis longtemps. Son nom est impossible à prononcer mais elle est partout, dans tous les recoins de cette cage mentale. Elle est chaque silhouette, elle habite chaque ombre, patiente derrière chaque porte. Elle a tout pris, tout ravagé. Je n’ai plus rien, sauf des images d’elle qui se moque de moi. Je m’allume une clope, la nausée agrippée à la gorge. Quand je fume je ne contrôle pas plus, mais c’est au moins une chose que je fais par ma propre volonté, elle ne souffle pas à ma place. Cette liberté relative m’angoisse. Très vite les pensées m’enferment à nouveau, la fumée flotte éparse sans que je puisse m’attacher à elle, j’aimerais tant me dissoudre. Je repasse nos conversations en boucle, la bande magnétique usée. Je suis un convecteur glacial, les souvenirs m’absorbent et me régurgitent. Au lieu d’une plage déserte à la mer plate et turquoise que je convoquerais pour aller mieux se répète la vision de son sexe et de ses seins lourds qui me manquent atrocement.
Mes amis estiment que je vais mal. Le week-end dernier, deux d’entre eux sont venus jusqu’à mon studio, J'étais vautré sur mon instrument de torture nippon, le regard morne, incapable de soutenir leur présence. Je fixais le sol, détaillant la poussière entre les lattes, les défauts du plancher. Leur monologue était inaudible. Ils ont répété et élevé la voix, sans doute, car j'ai discerné: «C’est elle ou nous.» Ils avaient dû préparer cette réplique en montant l’escalier. Je n’ai rien répondu. Mon esprit n’en a pas le loisir, occupé à analyser les derniers mots que nous avions échangés avant que son dos ne chante «Bang bang, my baby shot me down». À l'endroit même où ils se tenaient tous les deux, elle avait un jour joué du violoncelle nue, juste pour moi, rien que pour moi. Une de mes idées à l’époque, imprimer autant que possible sa peau dans l’espace. Elle jouait comme un pied. Le résultat était affreux mais elle était nue, c’est tout ce qui m'importait, alors je l’incitais à continuer. «Mais non c’est magnifique, continue.» «Ça fait longtemps que je n’ai pas joué, je suis rouillée.» «Continue, c’est beau.» Devenir un instrument entre ses cuisses. Ils sont repartis comme ils étaient venus, par l'escalier. Je perds des amis chaque semaine. Bientôt je n’en aurai plus.
La sonnerie métallique du Nokia 1112 retentit. Trois heures perdues à faire l’ouroboros. On pourrait écrire un livre sur la volonté inouïe qu’il faut à un dépressif pour se lever, prendre une douche, passer quinze minutes sous un jet d’eau brûlante, continuer de ressasser, sans répit.

Quand l’eau me touche, quelque chose au moins me touche... Je visualise toutes les fois où on a fait l'amour, je compte et recompte à l’endroit et à l'envers, futon, chaise, canapé, table, lavabo, radiateur, carrelage, parquet, terrasse, toit, bois, forêt, bosquet, voiture, ciné, cabine d’essayage chez Zara (coup de bol, je venais de la croiser par hasard avenue Louise), toilettes publiques dans un café du bas de la ville, douche, douche, douche, l’eau m’apaise. Je la regardais souvent quand elle en sortait. Elle ouvrait alors le peignoir qu’elle venait d’enfiler pour que je mate ses seins laiteux striés de veines vertes et bleues, je ne pouvais m’empêcher de le soulever pendant qu’elle se brossait les dents et de me frotter contre son cul, tomber à genoux et y enfouir mon visage. Le manque me fait crever. J'ai peur de ne plus jamais être capable de choisir mes pensées, de contrôler ma mémoire. Je me rappelle ce vieil homme croisé à la montagne avec qui j'avais dîné un soir où j'étais seul et lui aussi. À la fin du repas, en me raccompagnant vers mon studio, il m'avait asséné: «Je veux baiser, vous comprenez, je veux juste la baiser.» Un vieux type qui avait encore envie de baiser. Je ne suis pas sorti des emmerdes, je n’ai que vingt-sept ans. Je n’avale plus rien le matin. Manger me donne envie de gerber. J’enfile un bonnet, un col roulé, un jean, une paire de bottines et je m’assieds dans la Clio vert vertigo. Marche arrière sans écraser les gamins de l’école avant de m’engager dans les bouchons de l’avenue Winston-Churchill. À chaque feu rouge, je m’autorise une ou deux apnées en observant les travailleurs ou les étudiants coincés dans le tram. Comment vont-ils, est-ce si différent d’être un autre? Vu les gueules qu’ils tirent, ils n’ont pas l’air d’aller mieux que moi. C’est triste un visage dans un tram.
Le souvenir me kidnappe, je recompte: futon, chaise, canapé, table, lavabo, radiateur, carrelage, parquet, terrasse, toit, bois, forêt, bosquet, voiture, ciné, cabine d’essayage, toilettes publiques, douche, douche, douche, chambre des parents (j’ai failli oublier, devant le miroir du dressing, «la chambre de tes parents ça me gêne», tu parles, en levrette, à me tordre le poignet pour lui caresser le clito en même temps que je la pénétrais). Je conduis en aveugle, roue libre, sabot antivol du cerveau. Le matin, je prends la chaussée de Waterloo et contourne le bois par l'avenue Legrand, puis me dirige jusqu’à Franklin-Roosevelt et ses ambassades, là je me laisse porter dans la descente.
Je ne mets plus de musique dans la voiture, toute musique me déprime. J'ai Housewife de Daan qui de toute manière passe en repeat dans ma tête, une parfaite musique de psychotique. Je croise parfois Daan au Belga, il est grand, beau gosse, grisonnant. Il ressemble à mon voisin. Les gens qui sont beaux ont une démarche particulière, ils flottent imperceptiblement. La dernière fois que j'ai croisé celle que je ne nomme plus, c'était justement à la terrasse d’un café. Je lui ai fait une scène. Je me suis incrusté à sa table en ignorant la fille qui l’accompagnait. Un mec assis à côté lui a demandé si je l’importunais. Mais non, mon vieux. La demoiselle n’a pas besoin de toi. On parle, connard. Arrête de le regarder toi aussi! Tu ne peux pas t’empêcher de tous les draguer. Le pire c’est qu’elle rigolait. Elle se foutait encore de moi, devant tous ces inconnus et ces mecs qui rêvaient sans doute de voir ses nichons. Moi je la connaissais, la douceur de sa peau au creux du galbe, la couleur de ses aréoles claires, le goût salé de ses mamelons. Parfois je les tétais, recroquevillé en position fœtale sur ses cuisses. On m'a arraché à son sein.
Je déteste cet endroit où le Tout-Bruxelles se presse le vendredi soir. Dans les étangs, en face,
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J'ai passé six ans de ma vie avec une centaine de personnes, filles et garçons, aux côtés desquels j'ai mangé, étudié, ri, dormi même parfois, pris ma douche et pleuré. À certains d’entre eux j'ai confié des choses intimes, l’âge des violences sèches. J’en ai écouté d’autres me dire qui ils devenaient à l’abri d’un auvent, dans l’intimité d’un vestiaire après un cours de sport ou derrière la cloison des toilettes. J’ai vu leur peau d’enfant se durcir et se creuser quand on ne les croyait pas. J'ai parfois pensé qu’ils allaient devenir mes amis. Plusieurs ont disparu. L’horreur frappe au hasard, intoxication au monoxyde de carbone, crash de voiture, suicide, je pense à vous trois souvent. Je me demande si je n’écris pas pour être pardonné de tous ceux à qui j'aurais manqué de respect ou d'attention, ceux dont je me suis moqué, que j'ai imités en forçant le trait pour paraître drôle car c'était mon masque, je n'étais pas un pierrot, j'étais le clown qui provoque ou désamorce. p. 214-215
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Elle pense que je vais devenir écrivain. Pour le moment je suis dépressif. C'est peut-être le préambule.
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Gamin, j’étais passé maître dans l’art de dérober ce qui échappe au regard et adulte je suis devenu cinéphile. Tout cinéphile est un voyeur qui continue de voler des images dans la plus parfaite impunité. Les serrures, les interstices des portes, les rideaux de douche de l’enfance mués soudain en un écran. Psychose, Blue Velvet, tous les films du monde se nourrissent de ce fantasme.
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La vie est une succession d’opportunités manquées. En les additionnant, ça peut donner une belle vie. p. 219
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