Son père a craché toute sa sœur
Son père a craché toute sa sœur dans le portrait du nourrisson double entre les bras du chien sur la photographie du baptême de la mère — sosie. Les faces feuilletées draguent obstinément les fonds du même grand corps flou, dans leurs rets que parfois crève un traître. sans autre issue que son propre accroc dans la maille, il tente d'avaler tout rond l'air de famille mais ses dents butent contre le cuir de raie qui coiffe toutes les promesses, écus de picots contre l'intrus. Il s'aplatit lorsque sur lui fonce la mante ample de l'énigme, qui voudrait l'emporter dans le courant glacé de son ombre, pour le coudre à sa doublure. Il ressemble, sous sa rage d'être quand même, à sa mort serrée dans un sac de sutures.
Ne l'écoutez pas, la vie, la mort
Ne l'écoutez pas, la vie, la mort
ce ludion aborde les inconnus
pour se rendre intéressant
faire passer le hic de son gosier
Regardez-moi plutôt
qui me cherche du dedans
par le tuyau de l'âme
L'âme, voyez-vous
elle joue du violon
et moi je n'ai qu'une corde
pour mesurer mon tour de force
Pour pas me pendre
étoiles nous attendent
étoiles nous attendent qui sont mortes
dit-on
Peut-être veillerons-nous
sur l'œuvre de l'humanité
ses boutures ses greffes
ses nuitons ses ludions
ses contrefaçons
ses réserves
ses rêves
Nous dirons aux nouveaux
que la vie n'est pas née
de la dernière pluie
Tristan Felix lors de son exposition de dessins au 60Adada à l'hiver 2020, à Saint-Denis. Musique de Philippe Botta, chant et performance (extraits) de Tristan Felix. Vidéo de Nicolas Thoraval.