Les
Carnets d'Orient, ce sont ceux de Joseph Constant, peintre inventé par
Jacques Ferrandez, mais au plus proche des peintres orientalistes des années 1830 ayant vraiment existé – surtout Delacroix, dont les carnets servent de source d'inspiration-, qui se rend en Algérie, toute jeune colonie française. Dans le premier tome, d'un cycle de 5 tomes présents dans cette intégrale, mais d'une série de 10 – enfin 11, avec le nouveau cycle, Suites algériennes, qui vient de débuter -, nous découvrons les périples de Joseph via ses carnets, entre croquis, aquarelles, et textes, ses rencontres, ses réflexions sur ce qu'est, dès les premiers temps, en train de devenir l'Algérie colonisée. Au fil des tomes, et ce jusqu'à la fin de cette première intégrale, à l'aube de la guerre, les carnets referont surface et seront l'un des liens entre plusieurs générations de personnages, algériens, français installés ou nés en Algérie.
Plus la colonisation et les colons s'imposent dans la vie et les coutumes algériennes, à coup de violences, de spoliations diverses et variées au fil des années, plus le propos de
Jacques Ferrandez laisse place, au fil des pages, à davantage d'Histoire que de fiction, à travers des extraits de journaux d'époque notamment, de représentation de discours ou d'allocutions de certains grands hommes – ainsi de Camus. L'Histoire de l'Algérie colonisée se dessine avec une remarquable précision, narrative comme graphique, sous nos yeux, dans toute sa barbarie, ses injustices, ses bourreaux – mais aussi parfois ses sauveurs -, à tel point que les personnages inventés par l'auteur nous semblent criants de réalisme et de vérité.
C'est la principale raison pour laquelle j'ai particulièrement apprécié cette première intégrale : alors que nous sommes en 1987,
Jacques Ferrandez prend à bras le corps la problématique algérienne, encore à vif dans les esprits, très peu évoquée dans les arts, pour montrer les choses et les évènements sans fard : oui, la colonisation algérienne a été une monstruosité française, comme toute colonisation et oui, comme le montre l'auteur, l'on ne pouvait qu'en arriver à la guerre de 1954…
La deuxième intégrale, s'intéressant exclusivement à la guerre d'Algérie, a été lue dans la foulée, et l'avis, aussi enthousiaste, arrivera donc sous peu.
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