Romain Gary, c'est l'écrivain que j'aime aimer.
Il y a ceux dont la plume me scotche, m'esbaudit, tel le Louis-Ferdinand aussi génial romancier qu'individu méprisable ou que le
Paul Verlaine dont la femme inconnue caresse mieux que la violence domestique de son créateur. A l'ère télévisuelle, il y a des écrivains dont les charmantes apparitions ne comblent guère la vacuité totale des oeuvres commises ou l'indigence stylistique de leurs quelques pages reliées.
Romain Gary, lui, m'enchante en tant qu'auteur et en tant qu'homme. Ce n'est pas si fréquent.
Dans
ces femmes que j'aime, l'homme fait écho à l'immense humanité des racines du ciel, là où l'homme devient trait d'union avec ses manques et ses faiblesses. Tournant le dos au machisme, récusant le mouvement féministe, le premier texte qui donne son nom à ce joli carnet de l'Herne plaide mieux que mille harangue pour que change le mâle. Que la
femme soit égale de l'homme ne saurait suffire.
"S'il y avait le moindre respect de la féminité, la sexualité aurait été depuis longtemps reconnue comme un partage et un échange, sans prise et sans preneur; sans séducteur et sans conquête". Elégante et brillante, cette courte plaidoirie pour une refondation des rapports hommes/
femmes mériterait une diffusion massive. Bien sûr, le prince charmant verrait son existence menacée, les idylles entre chirurgiens et infirmières s'étoufferaient dans les noeuds des cathéters, Barbie, dépressive, se noierait dans le rosé, mais toute révolution est un drame passionnel, comme disait Mao.
Deux autres petits textes aussi savoureux qu'une ganache chocolat peignent un
Romain Gary, toujours attachant, ironique, plein d'une irrésistible auto-dérision. Lesley est une sorcière narre la jalousie et la mauvaise foi de l'homme écrivain face à sa femme écrivaine en devenir puis écrivaine reconnue. Expérience vécue par notre français d'écrivain marié à son américaine d'épouse qui finit par connaître une plus grande notoriété. de la sollicitude du gentleman soucieux d'épargner les déconvenues à sa tendre moitié aux conseils quelque peu présomptueux en passant par les grincements de dents dissimulés, on n'applique pas si aisément les préceptes que l'on prône…
Mais comme le dit lui-même
Romain Gary : "L'humour est une affirmation de la dignité, une déclaration de la supériorité de l'homme face à ce qui lui arrive"
Démonstration réussie.