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Critique de Denis_76


Ce livre m'a mis en colère. Après un bla-bla abscons de chercheur de sciences de l'éducation, Marie-Claude Blais, avec un plan ( ? ), fait un historique intéressant sur le parallèle entre les partisans traditionnels de l'école républicaine et les pédagogues progressifs qui "mettent l'enfant au centre du système éducatif". Mais ceux-ci n'ont pas fait avancer le schmilblick, l'auteure a l'honnêteté de le reconnaître.

Pourquoi suis-je en colère à l'issue de ce livre ? D'abord le style est un discours de fac, avec des "postures", des "ruses", des "systèmes", du conformisme", bref, des concepts aux limites trop floues. Pourquoi un style aussi abscons et technocrate ? Eh bien, je pense que les les chercheurs en sciences de l'éducation (que je connais , puisque j'ai fait un DEA de didactique) voient un " progressisme" des enfants dans la liberté et leurs droits, sans contraintes. Je pense à Maria Montessori, à Alexander Sutherland Neill ("Libres enfants de Summerhill") ou à Ivan Illich ("Une société sans école"), qui m'ont certes influencé, et à mai 68 ("il est interdit d'interdire"). Je fais remarquer que, dans les trois écoles sus-citées, la population scolaire était particulière, et ne concernait pas la nation entière.

Pourquoi un style tellement flou ? Je pense que l'auteure est partagée entre les deux "écoles" ; elle ne prend pas parti. Les tenants de la démocratie sont des écorchés, très "à cheval", et toute attaque contre eux est susceptible d'être créditée d'autoritarisme, et de contrainte injustifiée. Donc, ce langage de chercheur a le mérite d'être accrédité dans les hautes sphères technocrates, et il permet de contourner les reproches éventuels de certains, mais il a l'inconvénient de n'être ni clair, ni direct : diable, appelons un chat "un chat" ! Mais dans notre milieu, on n'a pas le droit de dire les tabous. L'enfant est devenu roi.
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Dans le contenu du livre, l'auteure oppose l'école républicaine qui privilégie des savoirs, les contenus, à l'école des pédagogues, " laboratoire de la démocratie", dit-elle, qui se préoccupe des « besoins » des élèves.

Pestalozzi (1780), et Marion sont partisans des savoirs, ainsi que maintenant, après la révolte de 1968 pour tuer le père, Jacqueline de Romilly , Alain Finkielkraut, Elisabeth Badinter, Bernard Lahire.

Mai 68 a fait beaucoup de mal.

De l'autre côté, nous avons les partisans du puérocentrisme que sont Edouard Claparède, qui s'appuie sur la psychopédagogie (1900), et dans les années 1970, des chercheurs qui attaquent l'école républicaine : Pierre Bourdieu, Jean-Claude Passeron ("La reproduction" ...des élites par l'école), Christian Baudelot et Roger Establet ("L'école capitaliste en France"). La sélection est mise sur la sellette, et on baisse le niveau.
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Mais ce qui fait le plus de mal, c'est cette notion d'égalité. On sait qu'elle est impossible, et cependant les « pédagogues » s'y accrochent, et gagnent l'écoute du ministère, toujours fervent de récupérer les voix des parents, sans s'occuper des conséquences pour notre jeunesse.
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Au début, l'instruction des enfants partait d'un bon sentiment : Condorcet (1792) institue l'école primaire nationale. Guizot (1933) améliore le système scolaire, et Jules Ferry (1882) le rend gratuit, laïque et obligatoire.
Ces républicains, privilégiaient les savoirs, LES DEVOIRS et L'EFFORT.
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L'égalité : après la massification dans les années 1950-60, la réussite scolaire n'est pas au rendez-vous pour tous ! Cependant, sur le tabou "égalité des chances" qu'on n'a pas le droit de critiquer, les pédagogues ne veulent pas en démordre : on saute à pieds joints sur les propositions de John Rowles (1971): il faut de la discrimination positive ! Les bourses pour les élèves défavorisés, c'est bien, mais créer des ZEP en 1981, accepter l'enfant roi, et privilégier la parole des enfants et des parents sur celle de l'enseignant, est ce la solution ?
Je connais bien une REP+, je peux en parler.
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Les savoirs reproduisent-ils les élites ?
La réussite scolaire des élèves de base ne donnent pas les mêmes métiers gratifiants que ceux des élites ?
Les élèves s'ennuient ?
Alors vive les parcours diversifiés ! " La reproduction" a dévalorisé la république des savoirs : comme on n'arrive pas à l'égalité, on fait le procès du savoir, et aussi, parfois, celui de l'enseignant.

Puis l'auteure parle du métier d'enseignant qui a évolué.
1) La massification pose le problème d'enseigner avec hétérogénéité, étant tabou de faire des classes de niveau.
2) Les médias influencent les élèves : ils ont fasciné les enfants et pris le pouvoir par rapport aux familles et à l'école (Postman, Popper). Les jeux vidéo,peuvent engendrer la violence.
3) Il faut lutter contre l'ennui des élèves. Mais enfin, les enseignants ne sont pas là pour ça, enfin ! Nous ne sommes pas des "animateurs", ni des assistants sociaux !
4) L'auteure dénonce aussi la peur des autorités : les élites ont peur d'une bombe à retardement : ils ont peur de "la fracture sociale".
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Mais la CULTURE, bon sang ! Il faut prendre compte des racines ! On dirait qu'on a honte de notre histoire, d'être Français !

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En fin de livre, l'auteure consacre un chapitre à l'éducation civique.
Depuis la fin du XXè siècle, les pédagogues se sont enfin aperçus que certains élèves faisaient des incivilités, et même des violences. Tiens donc !
Alors pourquoi pas un peu de morale, cette « nouvelle-ancienne matière » ?On ne va quand même pas déterrer la morale, c'est un fossile !
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Erasme et Montaigne, vers 1500, savaient prendre les choses à l'endroit. de même, Arnaud Berquin, vers 1780, prévu pour éduquer Louis XVII, écrivait :

"Rosalie prit le billet et lut :
"Pour une petite fille grognon, qui reconnait ses défauts, et qui, en commençant cette nouvelle année, va travailler à s'en corriger."
-- Oh ! c'est moi ! c'est moi ! " s'écria t-elle en se jetant dans les bras de sa mère, et en pleurant amèrement.
Madame de Fougères versa aussi des larmes, moitié de chagrin sur les défauts de sa fille, et moitié de joie sur le repentir qu'elle en témoignait."

Ils savaient, par maints exemples, remettre les enfants dans le droit chemin, apprendre le contrôle de soi. On ne sait plus l'éduquer.
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De nombreux parents, pour de multiples raisons, n'éduquent plus leurs enfants dans le RESPECT. Ce mot a mauvaise presse en France.
Donc, nos pédagogues du « vivre ensemble », qui ont "gagné" sur les républicains, sont pris à leur propre piège : ils n'arrivent pas à s'en sortir, avalés par leur flou et leurs contradictions : leur maître mot est "pas de contraintes pour les élèves !"
Mais comment éduquer les enfants avec leurs seuls droits et sans aucun devoir ? C'est l'hôpital qui se moque de la charité ! On fabrique des révoltés.

L'auteure pose la question : l'apprentissage de la démocratie dès le primaire, est-ce la solution ?
Il y a peut-être d'autres priorités.
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Puisque l'auteure et les pédagogues n'ont aucune solution, je propose un cours d'éthique obligatoire et important, qui consiste par exemple en :
1) Au primaire, apprendre et appliquer les règles de politesse.
2) Au collège, apprendre la prise de conscience de son propre état (colère, agitation), maîtrise de soi, autonomie.
3) Au lycée, apprentissage de la démocratie.

En fait l'auteure, et je pense qu'elle n'est pas seule, confond éducation et instruction. Notre travail, c'est d'instruire, et là, sans moyens supplémentaires, nous sommes aussi obligés d'éduquer : nous faisons le grand écart !
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