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EAN : 9782348055805
368 pages
La Découverte (23/09/2021)
4.41/5   46 notes
Résumé :
Je suis une personne née sous X, qui ne possède rien de son passé : ni antécédents médicaux, ni arbre généalogique, ni mémoire familiale. Je dois donc écrire mon histoire pour ne pas être qu’une somme de silences, de traumas et de dépossessions. Ce livre est une trace, une archive, une pièce du puzzle que je tente de compléter grâce à l’analyse politique de ce qui m’arrive.
On oublie trop souvent que si des familles sont constituées par l’adoption, c’est parc... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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J'ai découvert Amandine Gay il y a quelques années, au travers d'une préface qu'elle avait rédigée pour l'essai Ne suis-je pas une femme ? : Femmes noires et féminismes, de bell hooks. Dans le même temps, j'ai entendu parler de son film documentaire Ouvrir la voix, que j'ai découvert bien plus tard que je ne l'aurais souhaité, puisque j'ai même pu voir entre temps son autre film, Une histoire à soi. Avant même que je commence Une poupée en chocolat, je savais que j'allais me prendre une claque. le genre de claque nécessaire.

Dans cet essai, l'autrice traite de l'adoption, et plus spécifiquement de l'adoption transraciale et transnationale, qui entraîne parfois un déracinement et, très souvent, du racisme - conscient ou non - de la part de la famille adoptante. Amandine Gay est une femme noire adoptée par des personnes blanc•hes. Ainsi, elle nous livre ce qui oscille entre le témoignage, le récit d'autres vécus, mais aussi l'essai et le militantisme.

Elle casse largement les clichés que nous pouvons avoir sur les adopté•es - et notamment les adopté•es racisé•es qui ont des parents blanc•hes. Elle permet, grâce à cet ouvrage, de comprendre en quoi le syndrome du sauveur blanc se retrouve très largement représenté dans l'adoption. En effet, lorsqu'un•e blanc•he adopte un•e enfant racisé•e, iel pense parfois - souvent ? - que l'enfant lui est redevable. L'autrice nous parle des conséquences du racisme systémique, et de celui qu'une personne adoptée racisée peut vivre de la part de son entourage le plus proche.

Cet ouvrage est un véritable pamphlet qui nous donne envie de nous insurger, qui m'a permis de mieux appréhender ce qu'Amandine Gay et les personnes adoptées avaient pu vivre, m'éloignant de mes propres clichés sur l'adoption. Ce livre oscille entre l'essai et le témoignage, ce qui rend la lecture plus digeste qu'un essai pointu sur le sujet. C'était très intéressant !
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« J'ai placé devant toi la vie et la mort, dit l'Éternel, et toi, tu choisiras la vie. » (passage du Deutéronome).

« Une poupée en chocolat » est bien le récit d'une femme qui a choisi de vivre et de témoigner au nom de tous ceux qu'on a si longtemps privés de parole: les adoptés transnationaux, des enfants qu'on n'a pas hésité à déraciner en tentant de faire table rase de leur passé sans se soucier des conséquences sur leur vie d'enfant et d'adulte (mal-être pouvant aboutir à leur suicide).

Ce livre est bien plus qu'un témoignage où s'entremêlent incontestablement colère, douleur et indignation, il nous offre en réalité une analyse juridico-economico-sociale argumentée et documentée. Je m'y suis plongée bien volontiers dans ces études avec curiosité pour y constater avec effarement que le sujet des adoptés transnationaux n'intéresse pratiquement personne dans notre beau pays. Peut-être parce que les adoptions transraciales renvoient à la définition même de la parentalité, un sujet qui cristallise encore aujourd'hui notre société française : « qu'est-ce qu'un parent biologique » d'un point de vue juridique ou le mythe du lien du sang prédominant en France alors qu'on voit de plus en plus de familles recomposées ou homoparentales, ce qui renvoie à la notion de justice reproductive où pourraient s'inscrire dans un continuum les questions de filiation…
Comment ne pas aborder la suprématie blanche ou encore le décolonialisme, Amandine Gay traite ces deux dimensions qui sont pourtant occultées dans les récits des adoptants et qui sont bien évidemment lourdes de conséquences pour les adoptés.

Pour tous, l'adoption se résume à un désir d'enfant et à des enfants abandonnés qu'on sauve. Ce sont bien là les messages martelés par les adoptants. Mais, ici, ce tableau idyllique ne résiste guère à la réalité de la brutalité du déracinement forcé infligé à des enfants qui vont être marqués à vie.

A l'heure où certains clament l'assimilation, prônent la hiérarchisation raciale du peuple français pluriel par le mépris et la division, ce livre est donc plus que nécessaire dans une société française en mal d'identité.
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Les origines de l'adoption sont très anciennes. Dans la mythologie, nombre de héros fondateurs de religions ou de civilisations, sont des enfants perdus ou abandonnés par des puissants et qui ont été recueillis puis adoptés. Napoléon 1er préoccupé de s'assurer un successeur, lorsque l'adoption fut admise et inscrite dans le code civil de 1804. En France le nombre des abandonnés en bas âge nés sous X est en diminution du fait des lois sociales. le problème n'est pas résolu pour autant. Adopter un jeune enfant en France est un parcours du combattant. Les couples, ou célibataires en mal d'enfant, ayant consulté tous les processus légaux de la procréation ayant échoués, puis déposés des dossiers à l'AES du département, après des années de procédures en désespoir de cause se voient refuser et se tournent vers l'Europe, et les pays étrangers: dont l'Afrique et l'Asie où les conditions de l'adoption sont considérablement réduites, et la France n'y oppose pas son refus de consentement pour intégrer la venue de l'enfant sur son territoire. Il y a comme une fièvre de l'adoptant, une urgence à sauver un enfant étranger, à la vue des conditions précaires ou survivent les orphelinats, qui doivent le salut de l'enfant bien souvent grâce aux dons des mécènes connus, des personnes sensibilisées à l'avenir des pays du tiers monde, des nombreuses associations, le don anonyme du privé. Les adoptants ont-ils suivis les conseils psychologiques et philosophiques suffisants pour se préparer à l'adoption? Un enfant noir, ou chocolat de peau dans une famille blanche, avec tout l'entourage bienveillant des adoptants sont confrontés aux regards des autres, du voisinage, la société, le quand dira-t-on qui un jour impacte pleinement les origines biologiques dues à la couleur de peau. Personne n'en réchappe, que ce soit des enfants africains, asiatiques ou européens, tous, se posent des questions sur le problème identitaire. Les enfants légitimes en plein bouleversement hormonal lié au passage de l'adolescence eux aussi un jour ne sont pas exemptés, même dans des familles unies et aimantes le doute subsiste quand les relations se compliquent, encore d'avantage par celles aux lourds secrets.
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Comment « critiquer » un tel livre ?
Amandine nous (m')ouvre les yeux sur des évidences dont on se demande comment elles sont restées tapies si longtemps.
Parfois léger, souvent difficile, c'est un livre militant, une analyse vaste et sensible, accusateur sans complaisance pour personne, à commencer par l'auteure elle-même.
Quelques longueurs parfois, lecture parfois ardue, lecture qui bouscule mais aussi qui déplace un peu nos certitudes, nos idées reçues, …
Si vous cherchez un roman de vacances, passez votre chemin.
Si vous voulez lire, comprendre, apprendre, grandir ‘….ce livre est un témoignage bouleversant et lucide
On n'en sort pas tout à fait indemnes.
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"L'amour et la volonté de bien faire ne sont pas suffisants. Seule une éducation politique des familles adoptantes sur les questions raciales, effectuée par les institutions en amont de l'adoption, peut permettre aux enfants racisées grandissant dans des familles blanches de faire face au racisme systématique dont elles seront victimes toute leur vie."

Amandine Gay a mélangé un récit autobiographique avec un livre de sociologie, bien sourcé et clair. Et le résultat est impressionnant.

Au vu de la législation française actuelle, je n'ai pas le droit d'avoir d'enfant biologique. Si un jour, je veux un-e enfant, et que la loi n'a pas changé, j'aurais plusieurs possibilités : partir faire un parcours de PMA à l'étranger, ou essayer d'adopter. Si pendant un moment, l'adoption était une idée que j'aurais pu envisager, entendre des discours de personnes adoptées sur leur expérience m'avait fait questionner ce choix. Ce livre m'a apporté beaucoup, beaucoup d'informations complémentaires.

Tout au long du livre, l'autrice questionne l'aspect éthique de certaines adoptions, son histoire, l'impact sur les adoptées. C'est un système qui, à l'heure actuelle, a beaucoup de défauts, et n'accompagne pas les adoptées correctement.
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
C'est au détour d'une conversation avec une amie adoptée, qui a grandi dans le fin fond de la campagne berrichonne au sein d'une famille raciste, que j'ai commencé à identifier les liens entre le cannibalisme de l'Occident et le phénomène de l'adoption transnationale ou transraciale. Mon amie est noire et n'a jamais compris pourquoi ses parents, qui ne connaissaient ni ne fréquentaient aucune personne noire ou racisée, l'ont fait venir du Congo. Lors d'une dispute avec sa mère, elle lui pose la question : "Mais pourquoi t'as adopté une enfant noire alors ?" "Parce que j'ai toujours eu envie d'avoir une petite poupée en chocolat !" J'étais bouche bée. Tout ce que j'ai trouvé à répondre c'est "Mais pourquoi en chocolat ? Le chocolat ça se mange. Elle voulait une poupée pour la manger ? Elle voulait te manger ?". Puis j'ai commencé à spiraler dans ma tête, en me disant qu'il est tout de même étonnant que la figure du cannibale soit toujours associée dans la culture populaire française aux personnes noires : pour moi les cannibales, ceux qui ont englouti des millions d'Africaines dans les cales de leurs bateaux, pour leur faire produire du sucre, toujours plus de sucre qui les rendraient riches, toujours plus riches, toujours plus avides de corps et de biens, ces cannibales-là, ont-ils jamais cessé de manger les "petites poupées en chocolat" ? Et par quel tour de magie ont-ils réussi à retourner le stigmate de leur propre monstruosité sur celles qu'ils dévorent depuis des siècles ?
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L'adoption transraciale, dans un pays qui traîne un passé colonial et esclavagiste non résolu, est une pratique qui expose les personnes adoptées, en particulier noires, à des violences individuelles et systémiques, y compris lorsque les familles sont aimantes et bienveillantes. L'amour et la volonté de bien faire ne sont pas suffisants. Seule une éducation politique des familles adoptantes sur les questions raciales, effectuée par les institutions en amont de l'adoption, peut permettre aux enfants racisées grandissant dans des familles blanches de faire face au racisme systémique dont elles seront victimes toute leur vie. C'est là que le bât blesse : en 2021, en France, la notion de race comme construction sociale fait encore débat. Que peut-on attendre d'institutions et d'individus qui participent activement à l'invisibilisation du racisme ?
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La rage est mon moteur, le feu qui brûle au fond de moi et me fait avancer, mais c'est aussi ce qui me consume sournoisement, et qui m'a presque engloutie sans même que je m'en rende compte.
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J'ai oublié mon féminisme et le droit des femmes à disposer de leur corps. J'ai 5 ans, 3 ans, 3 mois ; je viens de comprendre que ma mère n'a pas voulu de moi.
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S'il suffisait pour ne pas tomber sur des parents violents, abusifs, homophobes, et j'en passe, que ces personnes soient vos parents de naissance, ça se saurait !
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Videos de Amandine Gay (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Amandine Gay
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