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Ce pavé de 740 pages, superbement écrites, romance la destinée de sept familles durant un siècle (1914-2014).

Alix de Chalendar (1924-2014) lègue aux archives nationales la correspondance que son oncle, le lieutenant Alban de Willecot (1887-1917), adressait durant la première guerre mondiale au poète Anatole Massis et choisit une historienne comme exécutrice testamentaire, écartant ainsi son petit fils Alexandre Aparof, joueur impénitent. Blanche, la mère d'Alix, épouse de Maximilien de Barge, décédé en 1925 des séquelles de la guerre, gère de main de maitre leurs vignobles durant les deux guerres mondiales. Alix de Barges rencontre à Londres en 1942 son futur mari.

Anatole Massis, handicapé d'un bras, est employé durant le conflit par la censure militaire pour surveiller le courrier posté par les soldats à leurs proches. Anatole est marié à Jeanne de Royères, petite fille de l'académicien Louis Limoges, mentor d'Anatole. Mère de leurs 3 enfants, Jeanne décède peu après la naissance du dernier en 1916. Un petit fils d'Anatole confie à sa petite fille Ariane Brugg leurs archives familiales (courriers et albums photos).

Diane Nicolaï, née vers 1897, a été remarquée par Alban de Willecot, qui évoque leurs fiançailles dans une lettre à Anatole Massis. C'est un jeune fille cultivée, intelligente, séduisante, qui maitrise le grec et le russe, passe son bac malgré l'opposition de son père, et rêve devenir une nouvelle Marie Curie. La famille Nicolaï, ruinée par la guerre, est harcelée par les créanciers, et Diane, une semaine après la mort au champ d'honneur d'Alban, est mariée, contre son gré, le 25 janvier 1917 à Etienne Durieux qui comble les dettes des Nicolaï.

Victor Durieux nait de cette union en octobre de la même année. Diane meurt d'un accident de chasse et Etienne Durieux se remarie avec Hortense Stiegler dont il a deux enfants, Basile et Sybille.

Elisabeth Bathori, l'exécutrice testamentaire d'Alix de Chalendar, se met en quête des lettres qu'Anatole envoyait à Alban et qui semblent disparues, quoique certaines apparaissent sur le marché, à Bruxelles, aussitôt raflées par une université américaine où sévit une sulfureuse biographe de Massis. Elisabeth se remet difficilement de la perte de son compagnon. Plonger dans les archives d'Alban et Anatole est pour elle une réelle thérapie. Elle enquête pour identifier les détenteurs qu'elle localise au Portugal ou en Suisse.

Violetta Mahler, petite fille de Basile Durieux, poursuit les recherches que sa maman, Suzanna née en aout 1938, et réfugiée au Portugal en 1940 grâce au consul bordelais Aristides de Sousa Mendes, a mené pour connaitre le sort de ses grands parents Paul Lipchitz, déporté, et Tamara Zilberg disparue vers 1942.

Gérald Lecouvreur, dans les Côtes-d'Armor, sa bat pour réhabiliter son grand-père, fusillé en janvier 1917.

Les lettres et les photos, progressivement retrouvées par Elisabeth Bathori, dévoilent les liens tissés entre les héros et les salauds des 42 cartes de ce jeu des 7 familles, remémorent les tragédies des deux guerres mondiales et rappellent le rôle aussi essentiel que méconnu des femmes durant ces conflits. Elles montrent l'évolution de l'état d'esprit des poilus épuisés par les mois et découragés par l'inanité des sacrifices consentis. Elles révèlent les délations de l'occupation.

Le personnage de Tamara Zilberg rend hommage à Tamara Isserlis, morte à Auschwitz en 1942, évoquée dans « Dora Bruder » de Patrick Modiano, « Jours de Guerre » de Berthe Auroy et le Journal d'Hélène Bert.

« Pour un nom dont on se souviendra, pour une Tamara Isserlis rescapée de l'oubli, combien d'autres, perdus à jamais ?
Ce livre est né du désir de tresser des histoires de disparus, avalés par la guerre, le temps, le silence. de raconter le devenir de leurs traces, qui éclairent, mais aussi dévorent les vivants. »

Magnifique livre qui donne envie de lire les autres titres d'Hélène Gestern.

PS : la résistance dans l'Ain est l'objet de la Douceur
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Voilà un livre que je ne pensais pas être "pour moi".La couverture ne m'attirait pas:des soldats face à des appareils photos,en noir et blanc,bof.Une quatrième de couverture sympa mais sans plus et puis,surtout,quel pavé, près de 800 pages d'une écriture très fine.Bref,je passe mon chemin.
Pour mon anniversaire,ce livre figure dans les cadeaux offerts par ma fille!!!!.Aucune concession,il rejoint les "copains" en attente.
Finalement,je me souviens des droits du lecteur énoncés par Pennac,on a le droit d'arrêter si on n'aime pas.
Et puis je me souviens de ce que je disais à mes élèves à savoir qu'un "gros livre " peut s'avérer plus passionnant qu'un "petit maigrichon"!!!!
Enfin,c'est un cadeau,et de ma fille qui a toujours eu si bon goût ....
C'est parti.Dès, les premières pages,le charme opère :quelle belle écriture, aérienne,des phrases pleines de jolis mots qui dansent avec magie pour éclater en phrases somptueuses,un vocabulaire soigné sans être pompeux assurément, cette auteure a un profond respect pour son lecteur et sait manier la langue française avec art.C'est vraiment beau,plein de poésie .
Et ce roman,c'est un mélange de pelotes de laine .Il faut tirer les brins qui depassent pour faire jaillir les histoires,Il y a Elisabeth,une historienne qui affronte difficilement l'épreuve d'un deuil cruel et qui se lance à fond dans la recherche d'une correspondance adressée à un poilu en 1914....En tirant lentement sur les fils,on se retrouve pendant la Première guerre,pendant la seconde ou encore aujourd'hui,à Paris,au Portugal,sur le front ,en Suisse,ou à Jaligny.Les personnages virevoltent,Elisabeth,Samuel,De Willecot,Diane,Victor,Violeta,Massis et tant d'autres.La pelote ne se dévoile que peu à peu mais on ne se perd pas dans ses méandres tant l'auteure maitrise son sujet et sait où elle va.Oui,ça semble parfois compliqué mais c'est tellement bien fait qu'une main experte vous ramène toujours sur le bon chemin.C'est un beau livre qui se dévore.Elisabeth nous emmène dans ses quêtes, tournée vers des vérités parfois difficiles à énoncer et surtout à entendre. Personnellement,j'ai été aussi très anxieux par rapport à sa propre recherche...Suis je rassuré, je ne le dirai pas,mais ce que je peux dire ,par contre,c'est que j'ai été séduit....
Alors non,ce livre n'est pas un pavé, sa couverture n'est pas moche,oui ,ma fille a toujours très bon goût, oui,j'avais raison de rassurer mes élèves, oui,je vous conseille vivement la lecture de. cet ouvrage.
732 pages lues en 4 jours...Il doit bien y avoir quelque chose de fort,non?
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Un véritable bonheur de lecture ce pavé de 700 pages. C'est la première fois que je lis un roman d'Hélène Gestern et c'est une très belle découverte. Extrêmement bien écrit, bien documenté tout en étant accessible à tous. Je pense que c'est un de mes coup de coeur de l'année 2020.
Elisabeth Bathori, une historienne de la photographie va mener une enquête sur un héros de la Grande Guerre. A l'aide d'une correspondance incomplète, de clichés clandestins et d'un journal intime codé par une toute jeune fille, voilà les éléments à dépouiller et à interpréter de la guerre de 1914-1918. Elisabeth, dans sa vie, sort d'un veuvage difficile. Cette quête de vérité va l'emmener aux quatre coins de la France ainsi qu'au Portugal, en Espagne et en Suisse.
L'autrice à mis deux ans et demi pour écrire ce roman dense, prolifique, multiple. Elle y mettra tout son coeur pour faire ressortir la vérité dans ce travail de mémoire collective.
Moi qui n'aime pas trop les récits historiques, j'ai plongé dedans très facilement. Hélène Gestern à l'art de nous prendre par la main pour nous raconter son récit. Une bien belle rencontre avec ce livre que je conseille vivement.
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Même si on m'avait caché la couverture de L'odeur de la forêt, j'aurais rapidement deviné qu'il s'agissait d'un roman écrit par la talentueuse Hélène Gestern, c'est déjà vous dire tout le plaisir que j'ai pris à la lecture de son dernier roman.
J'avais déjà beaucoup apprécié Portrait d'Après Blessures et Eux sur la photo et j'ai retrouvé son écriture classique et élégante, la place centrale de la photo et des liens épistolaires dans ses intrigues captivantes. Ses récits sont subtils, intimistes sans jamais être impudiques, et aborde avec douceur et lucidité la complexité des liens amoureux, le poids écrasant ou libérateur du passé sur les êtres.
Hélène Gestern a mis deux ans pour mettre un point final à L'odeur de la forêt, si riche en rebondissements. C'est une intrigue à tiroirs prenante, avec de bouleversants portraits de personnages broyés par la guerre et la longue narration de leurs descentes aux enfers, avec leurs parts d'ombres et de lumière, de bravoures et de lâchetés.
Deux (en)quêtes se chevauchent, activement menées par Elisabeth Bathori, une historienne de la photographie qui se retrouve en possession des lettres et de l'album d'Alban de Willecot, un jeune lieutenant, mort au front en 1917, l'ami d'un des plus grands poètes de son temps, Anatole Massis, avec lequel il a entretenu une abondante correspondance.
Élisabeth, particulièrement attachante, émerge douloureusement d'une longue période de deuil en se lançant dans de longues investigations, les petites histoires se mêlent à la grande... Les petits mensonges qui sauvent les apparences s'entremêlent aux mensonges d'état, toute vérité n'est pas bonne à entendre ou à voir.
Les chapitres sont courts, entrecoupés de lettres, de cartes postales ou d'extraits d'un mystérieux journal intime retrouvé au Portugal, le récit se déroule sur un siècle.
C'est une réussite totale, j'ai mis du temps à me plonger dans une autre lecture après avoir terminé L'odeur de la forêt tant j'étais imprégnée par ce roman richement documenté et fort en émotions.
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Après avoir beaucoup aimé " L'eau qui dort" et" Eux sur la photo", il me tardait de poursuivre ma découverte de l'univers d'Hélène Gestern. Ce livre -ci pourrait rebuter, avec plus de sept cents pages, et on s'attendrait à des longueurs. Eh bien, pas du tout! Mon plaisir n'a jamais faibli.

Lettres, photos, et secrets ( leimotiv de l'auteure) sont au coeur du roman. Mais ce serait bien réducteur de le résumer ainsi! Comme dans d'autres livres aussi , passé et présent s'entrecroisent . Trois époques : la première guerre mondiale, la seconde dans le milieu de la Résistance, et la période contemporaine, en France et à Lisbonne notamment.

Je n'ai pas envie d'en dire plus. Par contre j'aimerais communiquer mon enthousiasme de lectrice, mes émotions au fil des pages...

Alors j'évoquerai juste l'un des personnages, autour duquel gravitent tous les autres: Alban, le poète des étoiles plongé dans l'horreur des tranchées, le jeune homme ravagé dans son corps et son âme, qui ne trouve la force de continuer qu'à travers les lettres qu'il envoie à son ami, poète connu, ou les photos qu'il prend avec un autre soldat, au coeur de l'enfer.

Alban, qui fascinera la narratrice, historienne spécialisée dans les cartes postales anciennes, meurtrie d'une autre façon, elle aussi...

La langue de l'auteure est toujours subtile, riche, ses personnages nous touchent, surtout par leurs faiblesses, si humaines. La difficulté de faire son deuil, les injustices de la guerre comme les exécutions pour l 'exemple, la volonté de ne pas oublier tous ces morts broyés par des ordres militaires contradictoires et vains, la femme si enfermée dans la société du début du 20ème siècle, le poids des non-dits familiaux, tous ces thèmes très forts sont abordés avec justesse.

Mon seul regret, c'est que les textes ( inventés ?) de Massis, le poète imaginé par l'auteure, ne m'ont pas vraiment plu, hermétiques et artificiels... Mais je garde l'image de la rebelle Diane, de Tamara, au destin tragique, et d"Elisabeth, à la recherche d'elle-même, en puisant dans le secret des âmes...
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Roman riche, dense, grave, multiple et étincelant. Roman-gigogne qui entremêle les histoires et nous offre un chassé-croisé à plus d'un siècle de distance entre ces hommes partis la fleur au fusil défendre leur patrie en 1914 et qui vont se retrouver confrontés à l'une des pires boucheries de l'Histoire et une historienne de la photographie, Elisabeth Bathori, qui en enquêtant sur cette période va découvrir des secrets de famille, mais aussi se découvrir elle-même. Quand les morts réparent les vivants.
Tout commence par la rencontre de l'historienne avec une vieille dame, Alix de Chalendar, qui confie lui confie « l'album d'un poilu, qui avait envoyé pendant deux ans et demi des cartes postales et des photographies qu'il avait lui-même prises de sa vie dans les tranchées. Il avait écrit, aussi, presque chaque semaine, à sa soeur et à celui qui semblait être son meilleur ami, Anatole Massis, un éminent poète post-symboliste. » Très vite, Elisabeth se rend compte de la valeur inestimable de ce fonds et commence un travail d'archivage, de déchiffrage et de documentation sur cette période et sur ces personnes qui vont finir par l'obséder.
Car au travail de l'historienne va bien vite s'ajouter la volonté de remercier la vieille dame qui, avant de mourir, lui a non seulement confié ses documents, mais aussi les clés de sa maison dans l'Allier. Un endroit qu'elle va tenter d'apprivoiser et où de nouvelles découvertes l'attendent.
Hélène Gestern, en choisissant de passer d'une époque à une autre, de raconter la vie de ces hommes dans les tranchées, celle de cette femme qui enquête sur eux, fait éclater son roman en quatre histoires, toutes aussi passionnantes les unes que les autres.
Il y d'abord cette plongée dans la réalité de la « Grande guerre » et sur la barbarie, les injustices et les souffrances que le récit national a tenté d'occulter. Au fur et à mesure, on va découvrir un drame humain, une machine à briser les hommes. « Les correspondances, les ouvrages d'historiens empruntés à la bibliothèque de l'Institut me dévoilent un autre visage de la Grande Guerre, dont je n'avais jamais pris la peine de questionner la réalité quotidienne, celle qui se cachait derrière les images stéréotypées de régiments et de tranchées. Et ce visage est barbare : non seulement parce qu'il est marqué du sceau de l'orgueil militaire, poussé à son paroxysme d'aveuglement, mais surtout parce qu'il signe de manière définitive l'entrée du siècle dans le marché industriel de la mort. »
Il y a ensuite le roman de l'historienne, fascinante plongée dans le travail d'enquêtrice. On y voit comment, pièce après pièce, en rassemblant les témoignages, en faisant des recoupements, en déchiffrant un journal intime, le travail de documentaliste vous happe littéralement au point de « vivre » aux côtés de ceux qui prennent chair au fur et à mesure de cette enquête.
Et nous voilà confrontés à une nouvelle réalité, celle de cette famille qui, par le travail de cette femme, se voit confrontée aux fantômes du passé. Qui soudain ne sait plus si elle veut vraiment savoir ce qui s'est passé, qui craint elle aussi de voir la légende familiale voler en éclats.
Enfin, il y a l'histoire personnelle d'Elisabeth, dont l'auteur nous livre là encore, petit à petit, la part d'ombre. Elle essaie de se remettre de la disparition de son mari en se plongeant dans le travail, n'hésitant pas à prendre l'avion pour Lisbonne où un nouveau témoin, Diane Ducreux, peut l'éclairer sur certains points encore obscurs. « J'aurais voulu pouvoir expliquer à mon hôtesse que cette quête à laquelle je me raccrochais était ma seule arme pour comprendre le sentiment d'être suspendue dans le vide. C'est lui que j'avais espéré fuir en quittant Paris, mais il était toujours là, inscrit en moi ; il devait suinter de partout, de mon corps, de mes gestes, de ma voix. C'était le prix de ce deuil sans deuil ». C'est sans doute aussi en raison de cet état d'esprit qu'elle rencontre une oreille attentive à ses requêtes, qu'on lui confie ce que l'on sait. Que quelquefois même, on va au-delà. Et voilà déjà que s'esquisse une nouvelle histoire, celle de Tamara Zilberg, la grand-mère de Diane que l'on n'a jamais retrouvée. Elisabeth ne pourra dès lors, la laisser sur le côté.
Pas plus d'ailleurs que Samuel, le frère de Diane, un autre coeur meurtri. de façon presque impromptue, dans la ville du Fado, elle va se retrouver cheminant dans le vieille ville à ses côtés puis finissant dans son lit. Mais l'addition de deux souffrances peut-il suffire à construire un nouveau couple, notamment quand la distance vient compliquer l'histoire d'amour naissante ? Durant des semaines, ils vont se chercher, s'écrire, se retrouver quelquefois. « le revoir aurait dû être bouleversant, après une si longue absence, mais j'avais trouvé ces retrouvailles difficiles : un sentiment de flottement, l'impression dérangeante de ne pas le reconnaître tout à fait. Je n'ai rien ressenti au moment de le prendre dans mes bras et j'ai repensé à une phrase que j'avais lue un jour dans un récit, une phrase absurde et terrible : "Je vous ai tellement attendu que je vous attends encore." Durant ces semaines où il s'est mis en retrait Samuel m'avait, d'une manière subtile, écartée de lui. »
Si ce roman est si passionnant, c'est que l'auteur travaille comme un maître du thriller, semant ça et là des indices, n'hésitant pas à nous offrir des rebondissements inattendus, émettant des hypothèses qui ne vont pas forcément s'avérer exactes, jouant avec le lecteur qui… en redemande ! C'est tout simplement l'un des plus beaux romans que j'ai lu depuis longtemps. Il serait dommage de passer à côté !

Lien : https://collectiondelivres.w..
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Un excellent gros pavé de près de 700 pages qui pèse autant dans nos mains que dans nos âmes.
Cette lecture laisse une empreinte profonde, même après avoir posé le livre. Les personnages m'accompagnaient toute la journée avant que je les retrouve le soir pour trois heures de lecture passionnée.
Le talent d'Hélène Gestern pour décrire les lieux, les tableaux, les photos donne un ensemble infiniment vivant.
J'étais en totale empathie avec cette narratrice qui tente de fuir le souvenir douloureux de son amour disparu. Elle s'immisce avec beaucoup de pudeur et d'interrogations légitimes dans la mémoire de ces disparus de la Grande Guerre pour effacer la sienne.
Chose rare en lisant, j'ai même ressenti l'ambiance olfactive des lieux, de cette maison dans l'Allier, de son jardin et ses massifs de roses.

Les chapitres sont courts, intercalés de lettres du poilu, du journal de Diane, de narrations de l'époque des deux guerres. C'est une façon très intelligente d'alléger ce pavé et d'en simplifier sa progression. Toutes les parties sont dignes d'intérêt. Que ce soit le présent avec les difficultés de la narratrice à se reconstruire ou l'évocation de ces vies disparues, tout est captivant et extrêmement travaillé.
Une lecture riche, belle et profonde qui nous fait comprendre que beaucoup de poilus, avant de perdre la vie dans les tranchées, perdaient la raison face à l'innommable.

Je n'ai plus de place dans ma valise pour mon île déserte mais j'y glisserai aussi celui-ci quand même !
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J'ai découvert Hélène Gestern l'année dernière, avec 'Portrait d'après blessure', qui m'avait profondément marquée. Alors quand une amie m'a prêté 'L'odeur de la forêt', j'ai attendu un peu avant de l'ouvrir pour savourer l'attente de mon immersion dans ce roman ... 

J'ai bien fait, car une fois ouvert, il m'a été impossible de le poser (ou presque) ; j'étais totalement immergée dans l'histoire , ou plutôt LES histoires qui composent ce roman, fresque qui démarre au début du vingtième siècle.

Elisabeth  Bathori, historienne  spécialiste des cartes postales et de la photographie est contactée par Mme de Chalendar qui voudrait une expertise de la correspondance de guerre et les photos de son oncle Alban Willecot, lieutenant mort au front en 1917. 

Les lettres émeuvent Elisabeth qui se prend d'amitié pour ce jeune homme d'un autre temps, elle mène l'enquête, trouve d'autres correspondances .... et hérite d'une propriété de Mme de Chalendar, à charge pour elle de poursuivre ses recherches sur les trous d'ombre de cette histoire familiale et de fleurir régulièrement la tombe de sa fille.

Peinant à sortir de la dépression qui a suivi le décès de son compagnon, Elisabeth reprend cependant goût à la vie en reconstituant la généalogie d'Alban et en découvrant peu à peu les zones d'ombre de son histoire familiale. 

De l'Allier au Portugal, de la Belgique à la Suisse, des Archives militaires aux boutiques d'antiquaires, Elisabeth ne ménage pas sa peine pour nous brosser un portrait de la vie dans les tranchées et des événements malheureux de la vie au front entre mitraillage par les forces allemandes et fusillades pour l'exemple.

Composé d'extraits de correspondance, de journal intime, de souvenirs familiaux, voire de coupures de journaux, de souvenirs personnels, cet ensemble est d'une grande unité. Servi par une très belle écritutre, un vocabulaire large et précis, ce roman est l'un des meilleurs que j'aie lus.

Un roman très attachant où on suit pas à pas l'historienne dans sa reconstitution des faits et dans son histoire personnelle. Un roman qui montre comment l'histoire familiale peut imprégner les comportements.  Un très grand bonheur de lecture.
Lien : http://les.lectures.de.bill...
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Il y a de ces livres qui vous laissent une trace indélébile, qui vous transportent, qui vous touchent au plus profond, tout simplement parce que c'est ça l'art et c'est ça la littérature. Parce que parfois il arrive que l'on tombe sur son «âme soeur» littéraire. Et ce livre fut la mienne.
Un merveilleux voyage, 750 pages exceptionnelles, trop vite terminées, dans lesquelles j'ai tout trouvé.

Elisabeth Bathori est historienne de l'histoire de la photographie et un jour elle reçoit un don d'une vieille dame prénommée Alix, celle-ci lui lègue un tas de lettres de son aïeul poilu qui avait entretenu une correspondance avec l'un des plus célèbres poète du début du siècle, un vestige inestimable. Mais Elisabeth ne reçoit pas que cela de la part d'Alix, elle héritera également de sa maison et tout ce qu'elle contient. Tant matériellement que tous les souvenirs et la lourde histoire qu'elle contient.
Une histoire qu'Elisabeth va tenter de reconstituer, de déchiffrer, de comprendre. L'histoire tortueuse d'une famille, très grande famille (j'ai du me faire un arbre généalogique), qui a traversé les deux guerres avec son lot de drames, souffrances et de secrets.
Ce roman est si bien construit qu'il ne ressemble pas une simple enquête familiale. Il est profond, haletant, bouleversant. On avance à la fois rapidement et lentement. On tourne les pages avec hâte tandis le fil des mystères et de l'histoire se dénoue doucement mais surement. On y voit les conséquences terribles que peuvent avoir deux conflits mondiaux sur plusieurs générations et l'enchainement d'événements tragiques mais évitables qui peuvent briser une famille entière dans le silence de la grande Histoire. C'est vertigineux et à la fois bouleversant.
On suit également Elisabeth dans sa quête parallèle d'elle même, cette femme renfermée mais attachante et passionnée. Qui comme moi s'est attachée aux personnes dont elle essayait de reconstruire l'histoire. Elle s'est tant investie dans sa recherche qu'elle avait l'impression de faire partie de cette famille, et moi j'étais tant investie dans cette lecture que j'avais l'impression de faire partie de cette famille aussi. C'était merveilleux.
J'ai découverte le fabuleux talent d'Hélène Gestern, cette autrice que je connaissais pas et qui nous offre ici un roman d'une complexité et d'une maitrise extraordinaire qui m'aura bouleversé jusqu'au tréfonds.

Alban, Diane, Massis, Blanche, Tamara, Victor, et tous les autres resteront dans ma mémoire pendant longtemps.
Merci Hélène Gestern.
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Me voilà une nouvelle fois conquise, emballée, sous le charme... suite à ma lecture d'un livre d'Hélène Gestern. Quel bonheur que cela ait duré pendant les 692 pages que compte son dernier roman intitulé L'odeur de la forêt.
Cette fois-ci, nous voici embarqués dans une histoire qui balaie 3 époques : de nos jours, la Grande Guerre et la seconde guerre mondiale. Elisabeth Bathori est une historienne de la photographie et elle nous raconte son histoire. Presque par hasard, elle entre en possession de "l'album d'un poilu, qui avait envoyé pendant deux ans et demi des cartes postales et des photographies qu'il avait lui-même prises de sa vie dans les tranchées" ainsi que de lettres qu'il écrivait presque chaque semaine à sa soeur et son ami, Anatole Massis, "éminent poète post-symboliste". Outre la description de la vie quotidienne de soldats dans les tranchées du côté de Verdun, Hélène Gestern nous fait partager leur questionnement sur l'utilité de cette guerre, l'angoisse des familles restées chez elles, la volonté d'autonomie de certaines femmes. Outre la valeur historique inestimable d'un tel trésor, si Elisabeth Bathori met autant de coeur à lire ces lettres, à chercher celles du poète, à retrouver des descendants des soldats..., c'est en partie pour noyer son chagrin suite au décès de son compagnon qui a failli la faire sombrer dans le plus profond désespoir. J'ai d'ailleurs particulièrement aimé tous les passages où Hélène Gestern évoque la manière dont Elisabeth vit son deuil, l'alternance des sentiments qui la traversent.
Ce roman très dense, très fouillé, très documenté se présente un peu comme un puzzle dont les pièces s'assemblent au fil des pages. Au fur et à mesure nous comprenons les liens entre les différents personnages, les différentes époques, les différents lieux.
J'avoue m'être parfois un peu perdue dans le foisonnement des informations lues et en même temps au bout d'un moment, je retrouvais le fil de l'histoire et je n'avais de cesse de poursuivre ma lecture pour découvrir la suite tellement j'étais avide de connaître la vérité sur l'histoire d'Alban de Willecot et d'Anatole Massis, de percer l'énigme du journal de Diane afin de découvrir ce qui avait bien pu provoquer la mort de Diane, si Tamara avait survécu à la seconde guerre mondiale...
Et ce fut également pour moi une belle occasion de découvrir le métier d'historienne.
Bref vous l'aurez compris c'est un véritable coup de coeur littéraire pour moi et j'en suis d'autant plus ravie que c'est le dernier livre que j'ai acheté avant la fermeture définitive de ma librairie indépendante préférée : Entre les lignes à Clamart. Alors un grand merci à Odile ma libraire préférée et à Hélène Gestern dont j'en profite pour célébrer le talent.
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