Un loup pour l'homme

Antoine et Lila sortent à peine d'une vaine virée à Genève (et à scooter, depuis Lyon !), où Lila espérait qu'un médecin compréhensif approuverait sa demande d'un avortement pour cause de conscription du conjoint et d'envoi en Algérie, qu'Antoine traverse la Méditerranée. L'administration militaire, dans sa grande bonté, a bien voulu accéder à sa requête de ne pas être affecté au service armé. C'est donc à l'hôpital de Sidi Bel Abbès qu'il remplira sa mission, et s'il ne participe pas directement aux opérations de "maintien de l'ordre", il en voit tous les jours le résultat sur les soldats blessés ou traumatisés dont il doit prendre soin. Parmi eux, il y a Oscar, amputé d'une jambe et mutique depuis son admission. Antoine se prend d'affection pour ce handicapé boudeur qui semble ne renoncer à sa colère sourde qu'en sa présence et qui finira par lui révéler le secret qui le mine.
Lila, persuasive cette fois, a obtenu des autorités qu'elle puisse accoucher en Algérie et s'installer "en ville" avec mari et bébé, non loin de l'hôpital. Elle s'acclimaterait bien à ce pays tant célébré par les pieds-noirs mais, au tournant des années 1960-1961, la situation y devient explosive, au propre comme au figuré, et Lila devra reprendre l'avion pour la métropole, rejointe quelques mois plus tard par Antoine. Lui n'aura droit qu'au même bateau qu'à l'aller et sera donc à même de rendre tripes et boyaux pour clore en beauté cette période indélébile de sa vie.
Brigitte Giraud analyse avec acuité les sentiments changeants d'un jeune homme brusquement plongé dans un conflit qui le dépasse, comme la plupart des appelés d'alors, mais aussi la tendresse insoupçonnée qui peut naître entre un soignant et son patient choisi.

La guerre d'Algérie vue au travers du regard d'un jeune infirmier qui ne verra quasiment rien des combats mais soignera les blessures. Une guerre qu'il ne comprend pas, qui détruit et fait taire, une guerre qui l'isole, coupe les liens avec sa femme pourtant venue près de lui pour lui donner son enfant. Une guerre dont ils parlent à peine entre eux, collègues de chambrée.

Puis il y a ce blessé qu'il veut sauver malgré lui, qui lui permet de tenir même s'il ne comprend pas l'attachement qu'il lui porte.

Une belle histoire qui met en avant ce qui nous dépasse et avec quoi nous devons vivre malgré tout. L'incompréhension générale de cette guerre aussi bien du coté des appelés que des pieds noirs ou des algériens eux mêmes.

Un roman sur l'art de soigner, la patience, et l'écoute. Un roman plein de douceur malgré parfois la dureté des propos et des situations. Une belle écriture pour un beau moment de lecture.
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Brigitte Giraud est une écrivaine française, née en 1960 à Sidi-Bel-Abbès en Algérie. Elle a déjà remporté le Goncourt de la nouvelle en 2007 pour « L'amour est très surestimé » et le prix Giono en 2009 pour « Une année étrangère ».
« Un loup pour l'homme » est son treizième livre.

France, 1960. Antoine et Lila sont un jeune couple d'amoureux et ils attendent un bébé. Mais Antoine est alors mobilisé pour l'Algérie. Ne voulant pas porter d'arme à feu, il décide d'être incorporé comme infirmier. A ce moment-là ça lui semble moins dur, moins risqué que de participer à d'éventuels combats.

Débarqué sur l'autre rive de la Méditerranée, il va découvrir la vie militaire, et progressivement l'Algérie des arabes et l'Algérie des pieds-noirs. Et puis surtout, l'un des devoirs du militaire, celui de l'attente, de l'ennui que les nombreuses parties de cartes et les centaines de cigarettes ne peuvent vraiment atténuer.

Mais les évènements les rattrapent et des hommes blessés viennent remplir l‘hôpital militaire de Sidi-Bel-Abbès. La dure réalité des combats et des embuscades hantent maintenant leurs pensées. Heureusement pour Antoine, deux faits majeurs faits viennent renforcer l'homme : tout d'abord il tisse un lien très fort avec Oscar, un jeune soldat amputé à qui il va apporter toute l'aide possible. Et ensuite, fait rarissime, Lila enceinte vient le rejoindre en Algérie. Cela suffira-t-il pour qu'Antoine sorte indemne de cette guerre ?

Ce livre de Brigitte Giraud est une biographie romancée puisqu'il s'agit en partie de l'histoire de ses parents. Et c'est sans doute pour cela qu'elle a écrit un roman de guerre à « hauteur d'hommes ». Ici les dates et évènements politiques de ce conflit sont quasi inexistants. Sont ici mis en avant les doutes, les inquiétudes et les peurs des soldats, et pour certains leurs folies cruelles, ou des moments de joie.

L'écriture de Brigitte Giraud est très sensible, ses phrases et chapitres courts nous agrippent avec facilité. Un conflit qu'elle décrit avec objectivité, en évitant le plus possible l'ironie malvenue et surtout un parti pris aujourd'hui inutile.

Brigitte Giraud signe un beau roman intimiste et psychologique à propos de la guerre d'Algérie, vue par un appelé qui, ne voulant pas prendre les armes, a été assigné au rôle d'infirmier. Un roman d'apprentissage, aussi : cette courte période où Antoine quitte l'adolescence pour basculer dans l'âge adulte. Une entrée chez les adultes en 1960, au temps de la décolonisation et du général De Gaulle, au temps où les lettres étaient le seul moyen de communication pour prendre et donner de ses nouvelles et où leur attente plongeait tout le monde dans l'incertitude et l'angoisse.
Antoine s'est retrouve projeté dans un monde doublement inconnu pour lui : l'Algérie, sa mer, sa chaleur, ses parfums d'une part, et d'autre part, l'armée et la violence inhumaine de la guerre. Il doit apprendre à composer avec son caractère doux et timoré pour supporter la brutalité de ce qui fait maintenant son quotidien : l'hôpital, les appelés blessés et les morts. Il se sent particulièrement investi d'une mission de salut envers un jeune blessé amputé, Oscar. Par ailleurs, il doit supporter l'éloignement de sa famille, et surtout de sa toute jeune femme Lila, enceinte.
Le roman est écrit au présent, les phrases sont courtes, aucun dialogue : il y a comme une urgence latente dans ce style. Urgence de vivre car l'avenir est plus qu'incertain. Brigitte Giraud décrit la peur de tous jeunes hommes : seront-ils pris dans un attentat ? une exécution ? Survivront-ils mutilés ? mourront-ils ? Comment réagiront leurs familles, leurs fiancées ?Elle dépeint aussi très bien l'atmosphère algérienne, son ciel bleu, sa chaleur.
L'analyse psychologique des 2 personnages principaux, Antoine et Lila, est bien menée. On sent les prémisses de la libération de la femme : Lila est obligée de prendre des décisions, esseulée dans son appartement. La paternité fait basculer aussi Antoine dans un monde plus moderne : il prend le bébé dans ses bras, lui donne son bain…
Une belle réussite.

Brigitte Giraud retourne avec ce roman sur les lieux de sa naissance, à Sidi-Bel-Abbès, lors de la guerre d'Algérie.

Elle nous montre les appelés français, leur quotidien dans cette guerre dont on ne sait pas toujours si ce terme est bien choisi, s'il ne s'agit pas davantage d'une révolution ou d'un conflit, d'autant qu'on leur parle plutôt d'une mission de pacification. On suit Antoine qui, appelé alors qu'il espérait être réformé, demande à ne pas tenir une arme, à soigner plutôt que tuer. Après une courte formation, le voici donc infirmier - à l'abri, peut-être? Mais être infirmier n'empêche pas de voir et de sentir la guerre, la violence, la mort et la souffrance. Et Antoine, que son épouse Lila, enceinte, a tenu à rejoindre sur place, se retrouve à tenir une sorte de grand écart entre la mort qui s'impose et la vie qui se crée, entre l'hôpital et le campement d'un côté, et le petit appartement préservé de l'autre, où il a été autorisé à emménager avec sa femme. Un grand écart tel qu'il lui est parfois impossible de jeter des ponts, de raconter, ou d'oublier.

Ses journées tournent souvent autour d'Oscar, un jeune soldat amputé d'une jambe, qui refuse de parler, et dont il se rapproche. La relation qu'il tisse avec le jeune homme va bien au-delà du lien qui unit un soignant à un soigné. Antoine donne en réalité l'impression de se raccrocher à Oscar, peut-être sa seule façon de se sentir utile dans ce bourbier.

L'écriture de Brigitte Giraud laisse passer les émotions, la chaleur écrasante, la lourdeur et la pesanteur des journées et le sentiment d'abandon des Français sur place. Pourtant, je n'ai pas accroché, ni été touchée, autant que je l'aurais pensé, autant que j'avais envie de m'y plonger. Il faut dire que ce livre est arrivé tellement en retard, alors que d'autres engagements s'étaient greffés, que je n'ai pu prendre le temps de l'appréhender, d'en respecter le rythme, de pénétrer dans les motivations d'Antoine et de Lila. Ce n'est pas un livre qui se dévore, c'est un livre qui se déroule et qui se tisse, doucement, lentement.
Il m'aurait fallu, je pense, le temps de me pencher plus en détails sur le contexte historique dont je ne connais que très peu de choses. Je n'ai pu qu'effleurer les sentiments de Lila et d'Antoine, sans pouvoir tenter de les comprendre vraiment : j'ai par exemple été assez mal à l'aise avec l'idée que la jeune femme, enceinte, se jette en quelque sorte dans la gueule du loup en allant le rejoindre sur place; mais j'imagine que c'est parce que je me fais de la situation évoquée une image erronée ou du moins incomplète, occultant notamment le volet diplomatique et la façon dont les appelés eux-mêmes vivaient cette situation dans un premier temps.
C'est finalement le personnage d'Oscar qui m'a le plus intéressée et touchée, dans son désespoir de voir sa vie lui échapper : j'avais envie de comprendre ce qui lui était arrivé, ce qu'il cachait, ce qu'il craignait, et envie de savoir qu'il allait s'en sortir.

Bref, j'ai malheureusement le sentiment d'être un peu passée à côté d'un roman qui aurait vraiment pu me plaire...
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Un roman bien écrit dont on déplie les pages pour accompagner Antoine et sa famille, dans cette parenthèse historique, dans cette guerre qui ne dit pas son nom. Une réflexion sur la guerre et ses ravages, la violence. Un livre agréable et touchant à découvrir grâce à la langue délicate de l'auteur.

Lila, 22 ans, part en Suisse dans l'intention d'interrompre sa grossesse car son mari, Antoine, est appelé pour l'Algérie. Affecté à un hôpital militaire, Antoine est confronté indirectement à l'horreur du conflit. Il donne en particulier des soins à Oscar, amputé d'une jambe, qui refuse depuis de parler.
L'auteur nous plonge dans le roman avec un style fluide et une description minutieuse des événements et de l'état d'esprit d'Antoine. Elle nous fait découvrir, à travers le regard d'Antoine, aux côtés des hommes blessés et affectés psychologiquement la réalité du conflit en Algérie qui n'a été qualifié de guerre que tardivement.
Le roman est découpé en 3 parties : Antoine, avec la découverte de la situation en Algérie les 3 premiers mois, Lila lorsqu'elle rejoint Antoine et Oscar au moment où son rapatriement est envisagé. Ce découpage retranscrit l'évolution des préoccupations d'Antoine, de sa relation avec Lila et Oscar et sa prise de conscience progressive de la situation en Algérie.
La beauté de l'amour et de la fraternité qui est retranscrite dans ce roman s'oppose radicalement à l'absurdité et l'horreur du conflit.
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Certainement un des romans les plus personnels de Brigitte Giraud qui met en scène un couple pendant la guerre d'Algérie. A travers cet homme et cette femme c'est l'histoire de sa famille que l'auteur nous raconte.
Le récit de la guerre d'Algérie à travers les yeux d'un appelé Antoine, jeune infirmier à l'hôpital militaire de Sidi-Bel-Abbès.
Mais aussi celui de sa jeune épouse Lila qui n'a pas hésité à venir le rejoindre, et du mystérieux Oscar, blessé.

Le contexte historique m'a beaucoup intéressée, d'autant que c'est la première fois que je lisais un roman sur la guerre d'Algérie, même si parfois je trouve l'auteure n'a pas été assez loin sur ce plan.
Ce qui m'a le moins plus, c'est la relation un peu particulière du couple Antoine/Lila.
En revanche, la relation infirmier/blessé, c'est-à-dire Antoine/Oscar est captivante, elle m'a rappelée un peu le roman "Au revoir là-haut" de Pierre Lemaitre. Malgré le comportement d'Oscar, on s'attache beaucoup à ce personnage.
Ce livre évoque aussi mais de manière un peu brève à mon goût le retour compliqué à la vie en France après la guerre d'Algérie pour les anciens combattants.

J'ai choisi ce livre pour le match de la rentrée littéraire de PriceMinister. Ce livre parle de la guerre d'Algérie. C'est un thème que je n'ai pas l'habitude de voir dans mes lectures historiques.

Nous retrouvons donc Antoine, jeune appelée en Algérie. Il travaille au sein de l'hôpital de Sidi-Bel-Abbès. Il a appris la grossesse de sa femme avant son départ, cette dernière vient le rejoindre pour accoucher en Algérie.

C'est un roman qui m'a particulièrement plu car il permet de voir la guerre d'Algérie du côté des combattants mais également, via le regard de Lila, des pieds noirs. On voit la situation se tendre au fils des mois entre les algériens et les français. Les pieds noirs se méfient de plus en plus des algériens.

J'ai également apprécié la description des paysages faites par l'autrice qui m'a permis de m'immergé dans cette ville d'Algérie. J'aurai peut-être aimer découvrir un peu plus la casbah mais je peux comprendre pourquoi Antoine et Lila sont rester dans le quartier français.

J'ai aussi aimé la présence d'un troisième personnage dans ce roman, Oscar, soldat amputé d'une jambe qui est également muet. Pourtant cela ne va empêcher la création d'un lien fort entre Oscar et Antoine. Son point de vue permet de voir l'histoire différemment.

Si j'ai aimé le contexte de ce roman, je regrette cependant de n'avoir q'effleurer la guerre d'Algérie. J'ai eu l'impression qu'il n'y avait qu'un malade à l'hôpital c'est Oscar. On ne voit également pas ce qui se passe en dehors de cet hôpital à part lors des quelques sorites d'Antoine sur le terrain. Mais il est vrai qu'il est compliqué de montrer toutes les facettes de la guerre d'Algérie.

Antoine, Lila et Oscar sont les trois personnages qui sont le plus détaillés. Les autres personnages secondaires ont tout juste un prénom alors que certain joue un rôle important dans cette histoire.

En bref, un bon roman pour découvrir une facette de la guerre d'Algérie. Il manque cependant du relief au personnages secondaires et de la vie à cet hôpital.