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EAN : 9782490222063
176 pages
Macenta (30/08/2021)
4.5/5   2 notes
Résumé :
Patrick Godfard nous entraîne délicieusement dans l'univers pictural et poétique des fêtes galantes de Watteau et de Verlaine et construit ainsi un subtil jeu de miroirs entre le peintre et le poète.
Si son érudition sans faille les situe dans l'histoire de l'art et de la littérature, son style incomparable fait avant tout de cet ouvrage une invitation à écouter la musique de la poésie, à déceler les liens entre la musique et la peinture, à se laisser envoût... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Dès sa parution en 1869, le recueil de poèmes de Verlaine, Les fêtes galantes, est apparu directement inspiré de la peinture de Watteau. Patrick Godfard s'est attaché à mettre en lumière les résonances et concordances entre ces deux oeuvres que plus d'un siècle sépare.


Etayée par une solide documentation, l'analyse est érudite et experte. Elle s'ouvre d'ailleurs d'emblée sur une introduction si pointue que le néophyte risquera peut-être de s'en effaroucher un temps, un peu perdu d'entrer si vite dans le détail d'un sujet manifestement exploré avec une profondeur intellectuelle de haute volée. Heureusement, très vite, le propos devient limpide grâce à la juxtaposition parlante et judicieusement choisie des vers de Verlaine et des tableaux de Watteau qui les ont inspirés. Et c'est bientôt avec une fascination émerveillée que l'on se laisse guider par l'intelligence et la sensibilité de l'auteur, dans le jeu de répons entre le poète et le peintre.


Ainsi, peu à peu, se retrouve-t-on plongé dans une lecture croisée et extraordinairement complémentaire de Verlaine et de Watteau, l'oeuvre de l'un venant démultiplier la puissance de l'autre. Car, si les vers du poète soulignent en mots et en images musicales l'univers pictural de Watteau, les toiles du maître mettent en évidence le singulier pouvoir de suggestion et le génie poétique de Verlaine. Même s'il l'est pour moi, ce lien entre les deux artistes n'est certes pas une découverte en soi, mais l'art et la manière qu'a Patrick Godfard d'en éclairer toutes les facettes font soudain découvrir leur oeuvre avec une acuité nouvelle.


Alors, lorsque le livre s'achève par les vingt-deux poèmes des Fêtes galantes de Verlaine, chacun illustré de son pendant pictural chez Watteau, c'est d'une oreille et d'un oeil transformés qu'on les appréhende désormais. Un ouvrage brillant, dont il convient également de souligner la grande qualité des reproductions et de l'édition.

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Je me suis lancé avec appétit dans la lecture de cet essai qui m'avait été offert à Noël, un beau livre magnifiquement illustré par de nombreux tableaux et dessins.
L'auteur a dû ressentir une profonde délectation en écrivant cet essai, étude croisée entre la peinture de Watteau et la poésie de Verlaine. Son érudition atteint des sommets. Presque trop, avais-je pensé… Je redoute souvent que ce genre de livre passe à côté de l'essentiel : expliquer clairement les liens unissant les deux artistes et montrer la beauté de leur art.
Sans toujours comprendre les figures de style de certains mots utilisés par l'auteur, j'ai dépassé cette difficulté de lecture apparente et, finalement, je me suis laissé embarquer par la qualité de l'analyse et la beauté des textes et reproductions de tableaux.

Après la mort de Louis XIV, une folie de plaisir s'installe au moment de la Régence. le peintre Antoine Watteau montre des personnages de la haute société s'adonnant au badinage dans la pénombre de bois ou parcs, au son de mandolines, au milieu de statues suggestives. le théâtre et la danse sont présents. Il s'agit d'une sorte de chronique du temps : robes à panier, perruques poudrées, attitudes outrancières, visages pâles agrémentés de touches rouges. En 1712, le peintre est reçu à l'Académie royale de peinture avec le tableau « Pèlerinage à l'île de Cythère ». Ce genre pictural est appelé par les académiciens « peintre en festes galantes ».
Un siècle et demi plus tard, en 1869, le jeune Paul Verlaine fait paraître son recueil de poèmes « Fêtes galantes » directement inspiré de l'oeuvre de Watteau.

« Qui d'autre mieux que Verlaine a compris qu'un poème est de la musique avant toute chose. » Elle est constante dans ses vers : sonorité, répétitions, pas de danse, sensations.
Watteau se fait lui-même musicien dans ses tableaux : « Fêtes vénitiennes » ; ou montre des musiciens qui apparaissent dans la plupart de ses toiles : « Les charmes de la vie, « La gamme d'amour ». La peinture elle-même est musique et rythme la composition : les personnages de « Pèlerinage à l'île de Cythère » s'invitent, se lèvent, discutent, s'enlacent au rythme d'un menuet.
Verlaine nous étourdit par la danse dans le poème « Mandoline » : « Leurs courtes vestes de soie / Leurs longues robes à queues / Leur élégance, leur joie / Et leurs molles ombres bleues / Tourbillonnent dans l'extase ».

« Les « Fêtes galantes » sont un éternel bijou », écrit Mallarmé. Watteau a introduit la grâce musicale en peinture ; Verlaine est le poète qui a musicalisé la langue française. Il nous invite au songe dans « L'allée » : « Fardée et peinte comme au temps des bergeries / Frêle parmi les noeuds énormes de rubans / Elle passe, sous les ramures assombries / Dans l'allée où verdit la mousse des vieux bancs ».

Un poète grec Simonide de Céos et le peintre Léonard de Vinci comparèrent la peinture à la poésie. Un chapitre du livre s'interroge : « des « Fêtes galantes » préimpressionnistes ? » On peut se poser cette question, car Verlaine est contemporain de la plupart des peintres avant-gardistes. Lorsque paraît le recueil en 1869, Monet et Renoir créent l'impressionnisme en allant peindre ensemble la guinguette La Grenouillère sur l'île de Croissy. La peinture de Watteau et la poésie de Verlaine cherchent, eux aussi, à rendre la sensation, la fugacité des choses. D'ailleurs, Monet affectionnait « L'embarquement pour Cythère » et Renoir a été influencé par des scènes de Watteau dans ses toiles « La Promenade » ou « Les amoureux ».
On pourrait alors parler de signes avant-coureurs de l'impressionnisme… Pourtant l'auteur ne retient pas l'image impressionniste : pour lui, Watteau et Verlaine proposent une perception de la réalité alors que les impressionnistes créent un univers onirique. J'ai un avis différent de l'auteur sur la poésie de Verlaine dans laquelle je retrouve tout ce que j'aime chez mes amis peintres : spontanéité, atmosphère trouble, vivacité de la touche …

Rubens… Watteau s'inspira de ses toiles en visitant le Palais du Luxembourg à Paris. Nous retrouvons les tonalités colorées du peintre flamand dans son oeuvre où la couleur prime : un jeu des contrastes s'intègre dans l'ensemble et les touches de couleur vibrent et fusionnent. Deux vers de Verlaine « Car nous voulons la Nuance encore / Pas la couleur, rien que la nuance ! » peuvent s'appliquer à la façon dont Watteau travaille la couleur : non pour elle-même, mais comme nuance, par touches légères, dans un jeu global où tout est lié.

« le Verlaine des Fêtes galantes peut nous aider à mieux saisir Watteau : à côté du chantre des plaisirs et de la nonchalance, il y a le Watteau peintre de la mélancolie. » Les deux artistes ont en commun une même vision de l'homme où le libertinage n'est finalement qu'une illusion visant à refuser d'affronter la réalité.
Derrière l'évocation des plaisirs chers à Watteau, certains paysages reflètent l'âme du poète, sa propre sensibilité, laissant entrevoir un spleen baudelairien qui va en s'amplifiant au fil des poèmes. « En sourdine » :
« Et quand, solennel, le soir
Des chênes noirs tombera,
Voix de notre désespoir,
Le rossignol chantera. »

Le ton devient sombre dans « Colloque sentimental » :
« Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux spectres ont évoqué le passé. »

Les 22 poèmes des Fêtes galantes illustrés des toiles de Watteau terminent ce très beau livre.

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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
L’apport wattesque et la révolution verlainienne consistent à ne plus dire mais à suggérer. Pour l’historien de la littérature française Victor Jeanroy-Félix, Verlaine a créé « l’école suggestive » en poésie. Cette école existait déjà en peinture. (…)
Car c’est ainsi qu ‘en effet, Verlaine « opère » : il commence par une image pour terminer sur une sensation.
Cependant la lune se lève
Et l’esquif en sa course brève
File gaîment sur l’eau qui rêve
(En bateau)
Une image, un mouvement, puis une sensation évanescente mais dont, justement, l’évanescence même fait qu’elle persiste dans la mémoire, comme un je-ne-sais-quoi qui obsède et berce.
Verlaine part d’un élément naturel défini (la lune) pour arriver à une sensation indéfinie (l’eau qui rêve), jouant évidemment sur un défini qui peut tout aussi bien être pris, dès le début, comme un « signe métaphorique » : la lune annonce le rêve.
Verlaine va du défini à l’indéfini, soit l’opposé d’un raisonnement ordinaire.
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L’ALLÉE

Fardée et peinte comme au temps des bergeries,
Frêle parmi les nœuds énormes de rubans,
Elle passe, sous les ramures assombries,
Dans l’allée où verdit la mousse des vieux bancs,
Avec mille façons et mille afféteries
Qu’on garde d’ordinaire aux perruches chéries.
Sa longue robe à queue est bleue, et l’éventail
Qu’elle froisse en ses doigts fluets aux larges bagues
S’égaie un des sujets érotiques, si vagues
Qu’elle sourit, tout en rêvant, à maint détail.
— Blonde en somme. Le nez mignon avec la bouche
Incarnadine, grasse, et divine d’orgueil
Inconscient. — D’ailleurs plus fine que la mouche
Qui ravive l’éclat un peu niais de l’œil.

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LES INGÉNUS

Les hauts talons luttaient avec les longues jupes,
En sorte que, selon le terrain et le vent,
Parfois luisaient des bas de jambe, trop souvent
Interceptés ! — et nous aimions ce jeu de dupes.

Parfois aussi le dard d’un insecte jaloux
Inquiétait le col des belles, sous les branches,
Et c’était des éclairs soudains de nuques blanches
Et ce régal comblait nos jeunes yeux de fous.

Le soir tombait, un soir équivoque d’automne :
Les belles, se pendant rêveuses à nos bras,
Dirent alors des mots si spécieux, tout bas,
Que notre âme depuis ce temps tremble et s’étonne.

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Les fêtes galantes de Watteau et Verlaine ne sont pas faites pour penser : elles invitent au songe. C’est l’amour ; mais c’est l’amour poétique, l’amour qui songe », se sont exclamés les frères Goncourt. Ne pas décrire, ne pas raconter, ne pas gloser mais faire ressentir. Comme fait la musique.

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La touche de « Femme nue étendue » a un caractère « duveteux ». La composition est contrastée avec la diagonale du corps et du coussin : sombre au-dessus, lumineuse au-dessous, les cheveux bruns se perdant dans le noir et la main gauche posée avec délicatesse, les doigts légèrement écartés sur la couche blanche. Blanche mais légèrement bleutée, d’un bleu qui se retrouve en léger éclat sur le corps nu. Un portrait osé pour l’époque. Watteau ne voulait pas provoquer, mais, tout simplement, peindre une femme nue.

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