Écrire sur le quotidien est un travail difficile. Il y faut un auteur courageux pour essayer de décrire des vies si banales qu'elles ne sont même pas très malheureuses.
Et le bonheur - juste le bonheur au jour le jour - a pratiquement disparu de la fiction.
C'est peut-être parce que nous nous en méfions, le considérons comme de la sentimentalité, confondant le vrai avec le faux.
En effet, ce n'est pas facile de l'écrire. Pour sonner vrai, la description même du plus humble type d'épanouissement et de contentement doit être écrite en tenant compte de l'inadéquation et de la cruauté humaines et de la possibilité de maladie, de ruine, de mort.
Un mot faux peut rendre tout cela impossible à croire.
D'ordinaire, les circonstances de l'écriture d'un roman ne m'intéressent pas beaucoup,
mais dans ce cas, je suis ému de considérer que le livre a été écrit alors que l'auteur était mourant.
Haruf témoigne.
Étant allé plus loin que nous, il veut nous dire ce qui compte là-bas.
La voix est calme. Toute l'obscurité est là, mais nous regardons la lumière, une lampe dans une chambre d'une petite ville du Colorado.
Les romans de
Haruf se déroulent tous dans cette petite ville, Holt.
Holt est loin de New York, plus loin peut-être que Londres ou Prague.
'Et puis il y a eu le jour où Addie Moore a appelé Louis Waters.'
Ainsi commence l'histoire . Addie, une veuve, est venue demander à son voisin veuf s'il envisagerait de venir parfois chez elle pour coucher avec elle.
"Quoi?" dit Louis, naturellement un peu interloqué. "Qu'est-ce que vous voulez dire?"
Et elle dit: 'e veux dire que nous sommes tous les deux seuls. Nous sommes seuls depuis trop longtemps. depuis des années. Je suis seule. Je pense que vous aussi. Je me demande si vous viendriez dormir la nuit avec moi. Dormir et parler'
Alors la lumière s'allume dans la chambre de Cedar Street, à Holt, Colorado. Et le bonheur arrive très prudemment, très tendrement.
Pas, cependant comme on pourrait s'y attendre, car le bonheur est moins prévisible que la misère, puisqu'il participe de la liberté.
Et comme la liberté, il n'est jamais sûr; ça ne peut pas être pour toujours.
Mais cela peut être réel, et dans ce très eau roman, nous pouvons le partager.
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