Au moment où la Chine de
Xi Jinping fait copain-copain avec la Russie de Poutine, où elle menace "physiquement" l'intégrité de Taïwan après avoir mis au pas du PCC ( Parti Communiste Chinois ) Hong Kong qui se voyait jusqu'en 2047 "One country, two systems", où en France un
Mélenchon lancé dans "une campagne "anti-droitière" nous fait le coup du « que cent fleurs s'épanouissent, que cent écoles rivalisent ! »... avant d'envoyer probablement "les repentis" se "rééduquer" à la campagne, que le gourou des Insoumis reçoit des congratulations très appuyées de Pékin, je vous propose de faire un détour, un retour en arrière dans un passé très récent durant lequel la voix d'un homme "libre" s'est élevée contre la dictature chinoise. Cette voix et ce visage avaient pour nom :
Liu Xiaobo.
Si vous vous intéressez à la marche de ce Monde, je suis sûr que vous vous souvenez des reportages qu'ont consacrés les médias occidentaux à ce dissident, condamné en 2008 à onze années de détention pour avoir participé à la conception et à l'élaboration de " la Charte 08 ", sorte de programme démocratique inspiré de " la Charte 77 " de
Vaclav Havel,
Vaclav Havel dont
Liu Xiaobo avait fait son modèle.
Je suis persuadé que vous n'avez pas oublié le visage épuisé de cet homme en train de mourir d'un cancer du foie dans une chambre d'hôpital où le régime de Xi l'a laissé agoniser en dépit des demandes internationales réitérées pour l'accueillir et le soigner.
Car non seulement
Liu Xiaobo qui, croupissant dans les geôles chinoises depuis neuf ans sans soins alors que souffrant d'une hépatite, aurait pu échapper à la dégénérescence et au cancer, mais que de surcroît si Xi et ses cerbères avaient consenti à accéder au diagnostic et aux recommandations ensuivies par les deux éminents spécialistes envoyés à son chevet grâce à Angela Merkel, qui préconisaient d'effectuer un rapatriement sanitaire en Allemagne afin que Liu pût être opéré ou soumis à un traitement par la radiothérapie...
Liu Xiaobo aurait peut-être survécu...
Mais Xi le préférait mort que vif.
Je suis sûr et j'espère que vous avez gardé en mémoire le visage de sa femme, la poétesse
Liu Xia, aujourd'hui réfugiée à Berlin... mais condamnée au silence par et pour son frère Liu Hui gardé par les autorités chinoises comme "police d'assurance"...
Mais qui était pour ceux qui n'en ont pas entendu parler ou pour ceux qui l'auraient oublié
Liu Xiaobo ?
C'est cet exercice de mémoire et de témoignage dans lequel
Pierre Haski, ex-envoyé spécial à Pékin pour le journal Libération, fondateur de Rue89, éditorialiste géopolitique sur France Inter, s'est lancé en écrivant ce livre, et c'est à cet exercice de mémoire qu'il nous convie en le lisant.
Pierre Haski a rencontré à de nombreuses reprises
Liu Xiaobo.
Mais il a également rencontré et interviewé ses amis et ses proches, menant une enquête au plus près du terrain, et des recherches fouillées.
Ainsi parvient-il dans cette biographie de
Liu Xiaobo à nous faire approcher au plus près cet homme, cet opposant non violent, ce lettré, cet enseignant, ce poète, ce révolutionnaire pacifiste "héros" de la Place Tian Anmen, ce mari, ce père, cette "victime" expiatoire d'une démocratie sinophone possible, cet idéateur de la " Charte 08 "...
La biographie de
Liu Xiaobo est intimement liée au sort et aux convulsions de la Chine post-1949, à celle de son " Grand Timonier ", à ses " réformes " qui firent périr des millions de Chinois , à sa " Bande des Quatre ", à l'après Mao qui a coïncidé avec un apaisement momentané des tensions internes, à l'éclosion d'une société civile et à celle d'une nouvelle littérature " libérée des entraves " imposées par le régime, l'émergence et l'enrichissement d'une classe moyenne conviée à s'enrichir, au mouvement révolutionnaire de la Place Tian Anmen, au lâchage et au " lynchage " des étudiants par Deng Xiaoping, le " Petit Timonier", au "Mouvement des mères "... jusqu'au repli totalitariste du pays repris en main par le dictateur
Xi Jinping en 2012.
C'est dans ce contexte que s'est déroulée la vie de
Liu Xiaobo.
C'est dans ce contexte que s'est forgé son destin, un destin extraordinaire... que le régime de Xi tente d'effacer des mémoires.
Grâce à ce livre, j'ai pu mieux faire connaissance avec
Liu Xiaobo, me familiariser avec ce pays de 1,4 milliard d'habitants devenu ou en passe de devenir la première puissance mondiale.
Avec cette civilisation cinq fois millénaire.
J'y ai retrouvé, grâce à mes lectures, de grands noms comme ceux de
Liao Yiwu, un grand écrivain dissident exilé en Allemagne depuis 2011, ami proche de Liu,
Mo Yan,
Prix Nobel de littérature 2012... écrivain plus "conforme" aux attentes du régime de Xi...
Vaclav Havel, célèbre dissident emprisonné puis devenu Président de la République... sans renier ses idéaux.
Et j'ai également découvert
Liu Xia, cette poétesse épouse de
Liu Xiaobo, dont je ne gardais que des souvenirs médiatiques liés à son sort d'otage de Xi.
Une biographie, un destin qui s'écrivent dans
L Histoire.
Un nom,
Liu Xiaobo,
Prix Nobel de la Paix 2010, écrivain, homme libre... qui s'inscrit, lui, dans la lignée des Mandela, des
Havel, des Sakharov...
Un nom à garder en mémoire, un témoignage à transmettre, une inspiration à entretenir et à opposer aux
Mélenchon et autres cireurs de pompes des dictateurs.
Car comme l'affirme
Alain Frachon, nous sommes entrés dans lère des dictateurs.
Liu Xiaobo l'avait compris et a donné sa vie pour que nous ne bradions pas la nôtre pour quelques compromissions lâches et égoïstes offertes aux autocrates prompts à flatter nos parts d'ombre.