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3,88

sur 395 notes
Quand la poésie rencontre l'absurde quête d'un ouvrier chargé de la destruction de livres, quête visant à sauver des livres dignes d'intérêt, perdus parmi les immondices…

Auteur tchèque à découvrir, surtout si on aime le grand Franz.

Une très belle surprise que je vous conseille.
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C'est clairement un Hrabal bien plus mature qui parle ici que dans ses premiers «Trains Etroitement Surveillés» : tout est plus élaboré, plus condensé, bourré de références littéraires, mais surtout encore beaucoup plus sombre. Car là où dans le premier roman le jeune protagoniste pouvait trouver du réconfort dans un acte d'héroïsme (discutable), cette histoire-ci se termine par une ferveur très détaillée et en même temps tragique du protagoniste Haňtá envers la société déshumanisée. L'ironie désarmante de ce livre est qu'il est un «écraseur professionel de livres» (« trente-cinq ans j'écrase du vieux papier et des livres ») qui nous confronte à cette déshumanisation: Haňtá broie/écrase des livres en vieilles ballots, mais il chérit aussi ces livres, en extrait les meilleurs et les plus beaux, cite par exemple Kant, Rimbaud et Hegel, et décore les ballots de vieux papiers qui sortent de sa machine de belles couvertures de livres d'art. Donc, le travailleur manuel Haňtá est à la fois un artiste-intellectuel et, à travers ses voyages dans les égouts de Prague, également un expert du côté sordide de la société moderne. Ses descriptions rappellent involontairement le Kafka des ‘Métamorphoses' et ‘La Colonie Pénitentiaire', bien que cela puisse être une comparaison trop évidente, peut-être que l'oeuvre la plus sombre de Piranèse est une meilleure référence. La chose intelligente est que Hrabal évoque tout un monde somnolent en seulement 90 pages et y ajoute à la fin un point saisissant et dramatique, un règlement avec le monde désenchanté et aveuglement mécanisant.
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« C'était des chargements entiers de livres qu'on détruisait ici ; apaisé maintenant, je voyais, derrière les parois vitrées, ces camions décharger de pleines cargaisons de livres encore vierges, qui s'en allaient directement à la poubelle sans qu'une seule de leurs pages ait pu souiller les yeux, le coeur ou le cerveau d'un homme. »

Hanta est un homme plus tout jeune qui passe ses journées de travail dans une cave. Il détruit des livres à l'aide d'une presse mécanique un peu poussive. Il est en fait des ballots qui partent au recyclage. Mais c'est un artiste dans son genre car il prend soin de cacher tout au milieu de chaque paquet un classique de la littérature ou de la philosophie ; il soigne aussi l'extérieur grâce à des reproductions de grands peintres. Il arrose copieusement ses journées de litres de bière, qu'il sort acheter dans un café proche. Il prend parfois le temps de lire et de savourer un extrait d'une trouvaille particulièrement belle. Autant dire qu'il n'est pas dans les bonnes grâces de son patron, qui le rabroue souvent.

Hanta sauve de sa presse certains des livres qu'il voit passer. Il les entrepose alors chez lui pour les lire, au risque de se retrouver enseveli sous eux…

Sa retraite approche. On est à Prague dans les années 1960/1970. Il a pour projet de racheter sa presse et de finir ses jours en faisant chaque jour un seul ballot, mais un chef d'oeuvre !

C'est sans compter sur les temps nouveaux : l'ordre du jour est à la rentabilité sans états d'âme, comme la décrit ma citation ci-dessus…

Ce court roman, imaginatif et d'une très grande liberté de ton, est une merveille dans son genre unique. Mais il n'est pas pour autant « mignon » ! Les ordures, les égouts, les rats et souris (écrasés ou pas), le sang, les excréments, les mouches s'y trouvent souvent au premier plan. Autant dire la vie dans tous ses états.
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Trente-cinq ans durant, il a écrasé du vieux papier à la presse mécanique. Sysiphe, le fils d'Éole, était condamné à pousser une pierre au haut d'une montagne, d'où elle finissait par retomber sempiternellement. le narrateur, lui, reproduit les mêmes gestes, au fond d'une cave, enseveli sous les vestiges de papiers de toute nature, les pieds dans un magma innommable, retourné, sous l'action de l'humidité, quasiment à la bouillie de cellulose originelle, côtoyant les souris, environné d'un nuage de mouches agglutinées sur l'immonde provende sanguinolente d'emballage de boucherie. L'homme n'est pas insensible à cette matière destinée au rebut, il ouvre les volumes, sélectionne les reproductions d'oeuvres d'art qui orneront le produit de son labeur, des balles de papier compressé; son appartement croule littéralement sous les livres qu'il a sauvé de l'holocauste.

Une Trop bruyante solitude est une oeuvre du ressassement, traduisant le soliloque d'un homme solitaire. Ce remâchement du propos, ce processus digestif de rumination, s'inscrit dans un univers fermentant et grouillant, où règne de manière obsessionnelle - ce livre se prêterait fort bien à cet égard à une analyse psychopathologique, le déchet, la matière en putréfaction, l'excrémentiel. C'est très spécial, çà n'est guère ragoutant, il stagne sur ce court opus un remugle permanent.
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Bohumil Hrabal n'est pas très connu en France à l'instar de Jaroslav Siefert et Karel Capek , ses compatriotes .

Très peu de temps après leur parution , ses deux premiers livres , victimes de la censure du PC tchécoslovaque sont passés au pilon .

Interdit de publication , ses écrits suivants sortirent sous le manteau ( en samizdat , qui à quelque chose près , signifie autoédition en russe ) et par mesure de prudence sa technique d'écriture se cantonna à une fiction irréelle . Parler au temps présent du réel sous le communisme étant plutôt périlleux et apte à vous envoyer au goulag .

Cosignataire , aux cotés de Vaclav Havel et de quelques autres intellectuels courageux , de la charte 77 , il entra en résistance contre le totalitarisme communiste .

Il nous livre ici , dans un style particulier , mêlant l'argot , la poésie et l'humour acide , comme un regard extérieur sur le pilonnage des livres interdits et manifeste son chagrin de voir disparaître des titres qu'il aurait voulut sauver

Décidément abonné aux foudres de la censure , il connut de nouveau l'interdiction de publier durant plus de dix ans jusqu'en 1985 . Sa mort " accidentelle " , qu'on nous a vendue comme une chute de la fenêtre d'un hôpital , reste , à ce jour , encore inexpliquée .

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Abandonné à la page 43 par désir de ne pas perdre mon temps : des répétitions incessantes, des allusions à la culture universelle en citant des noms d'auteurs... Les allusions à un régime totalitaire oppressant (pléonasme sans doute) sont trop succinctes pour m'intéresser.
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Voilà une lecture qui aura été source de bien des questions, bien dérangeante parce qu'elle m'a obligée à sortir de mes conforts habituels, finalement, avec mes goûts pour certains sujets, mes habitudes de narration, peut-être même le choix d'un style d'écriture.


Dans ce récit, tous les chapitres débutent presque toujours par les mêmes mots - une allusion aux trente-cinq années qu'a passées Hanta dan sa cave à détruire les livres, créant une sorte de leitmotiv et par là évoquant une chose immuable, qui ne pourra s'arrêter qu'avec l'absence d'Hanta de ce lieu oublié comme par exemple s'il part en retraite. Ce dernier nous raconte son quotidien, dans un premier temps : le travail qui est le sien - pilonner des livres à longueur de journée, être "presseur" de livres, tâche qu'il effectue néanmoins dans le respect des pages qu'il détruit en faisant des "paquets" esthétiques garnis de reproductions de tableaux célèbres et au coeur desquels il prend soin de placer une oeuvre qu'il juge magistrale ou pleine de beauté, comme un noyau pour allier culture et couleurs, quoiqu'il en soit. Une façon de rendre hommage à ces pages qui lui donnent tant puisqu'il les apprend par coeur, se les récite, s'en créant tout un environnement à moins que finalement ce ne soit réellement sa vie. Une vie par l'intermédiaire de ce qu'il lit et médite au jour le jour dans sa cave.
Pourtant, tout n'a pas toujours été ainsi et les souvenirs viennent souvent lui parler, faisant réapparaître des amis chers ou des situations alambiquées.

Hanta n'est pas particulièrement attachant au début de ce roman : il est quelque peu négligé, il a un humour grinçant quand ce n'est pas carrément une certaine trivialité dans le ton de ce qu'il raconte...
Il vit dans une maison qui est le lieu où il entrepose les ouvrages qu'il a sauvés de la destruction, qu'il empile, le faisant dormir sous un échafaudage qui est instable, à l'image de sa vie qui ne l'est pas moins.
C'est aussi une histoire de solitude, subie mais surtout cultivée, Hanta vole les phrases des livres qu'il détruit, s'en délecte, s'en construit et il n'est pus livré seulement à lui-même.
Ses seuls "amis" sont les personnages de son passé dont il nous narre la destinée, le phrases se suivent se répètent, comme un ressac, comme la pensée qui va et vient, à l'image du mouvement de la presse, à l'image des idées qui apparaissent dans les vapeurs d'alcool ou les personnages évadés des textes qu'il déchire.

Le jour où il découvre une autre façon de travailler en observant les brigades de jeunes qui, un oeil tourné vers une occidentalisation de leur mode de vie, pilonne sans vergogne et sans curiosité ses chers livres, il sait que ses jours sont comptés et que l'espoir est vain.



J'ai poursuivi ma lecture, même si parfois, je l'avoue, certains passages m'ont perturbée, mais à d'autres moment, il y en a de très beaux sur les Tsiganes, leur culture, leur regard sur ce qui les entoure...
J'ai vu que bon nombre de lecteurs disaient avoir relu plusieurs fois ce texte et en lisant la dernière phrase, j'ai compris le pourquoi, car le regard change sur Hanta et de là sur tout ce qu'on a lu auparavant. La seconde lecture ne manquera pas de permettre une autre analyse des idées et du texte.
Je ne sais dire si ce livre est un chef-d'oeuvre ou non, je n'ai pas les clefs pour le juger c'est avant tout pour moi, un texte qui demande qu'on oublie sa façon de lire habituelle.
Je ne sais pas non plus s'il se veut la critique d'une certaine politique, peut-être à mes yeux davantage la dénonciation d'une perte culturelle qui uniformise les êtres par la pensée unique.

Tout au long de la lecture, je n'ai pu m'empêcher de penser à Vélibor Colic et à son arrivée sur le sol français quand il dit avoir eu l'impression d'avoir dans la poche, sa vie d'avant, son identité, son âme presque, compactées, pour les oublier un peu d'une certaine façon. Lui qui, lors du premier emploi qu'il occupe dans une bibliothèque sauve du pilon les oeuvres de Kafka en les indiquant comme sorties pour une consultation, alors qu'elles restaient désespérément sur les étagères et n'étaient pas empruntées.



Je remercie l'ami babéliote qui m'a guidée jusqu'à ce livre : pari réussi puisque j'ai très envie de lire un autre récit du même auteur, parce que ma curiosité a été piquée...
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Auteur d'une oeuvre conséquente, Bohumil Hrabal a été interdit de publication dans son pays, contraint de publier en Samizdat (j'apprends, donc, qu'il s'agissait d'un réseau clandestin, évidemment, permettant de faire circuler les ouvrages interdits au sein du bloc soviétique), du fait que deux de ses livres se sont même retrouvés au pilon en 1970. Il existe d'ailleurs trois versions de ce texte, nous explique Václav Jamek, auteur de langue française et tchèque, et préfacier de mon édition, modelées selon les pressions idéologiques exercées par les pouvoir.

Au centre de l'intrigue, la destruction de livres. Pourquoi cette infamie? Comment donc? Telle fut ma réaction première au résumé de la quatrième de couverture. On brûle les livres, depuis longtemps, c'est chose connue, les autodafés ont toujours été un moyen d'oppression des populations, encore aujourd'hui. Des auteurs, insatisfaits, mécontents, impétueux, ont même procédé à des autodafés de leurs propres livres, je pense à Gogol avec la deuxième partie de ses Âmes mortes et à Boulgakov ayant mis au feu les deux premières versions de son chef-d'oeuvre le maître et Marguerite. L'historien Suisse Christophe Vuilleumier, sur son blog, évoque même le terme de mémoricide continuel. Plus récemment, me dit Wikipedia, l'Etat Islamique a brûlé près de 2 000 livres à Mossoul, en Irak, tandis qu'en Pologne, en 2015, des prêtes catholiques ont brûlé des Harry Potter et autres Twilight.

Mais dans le cas des autodafés, le livre est écrasé, non pas brûlé. Cette différence est, il me semble essentielle, surtout en ce qui concerne sa valeur symbolique. Car si l'on brûlait, et que l'on continue à brûler des livres, c'est bien parce qu'on a peur de ce qu'ils contiennent, et de la manière dont ils peuvent influencer leurs lecteurs. Leur passage sous la presse ici, bien au contraire, fait d'eux des objets totalement inutiles et encombrants, qui ne représente de menace pour personne. Non seulement, il ne fait plus peur mais on s'en fiche totalement. Mieux encore, il ne sert même plus à caler les portes.

Hanta écrase les livres, condamnés à périr, parce qu'ils ont été oubliés, parce qu'ils ne servent plus à personne, c'est son métier, son gagne-pain. C'est un bourreau de livres, qu'il décime, par dizaine, par centaine, il écrase, aplatit, broie, compresse, tout ce qui est papiers et encres. Et pourtant, il les adore les livres, et c'est là toute l'ambivalence de sa situation. Il aime la littérature, il se délecte de belles tournures de phrases, il est la mémoire vivante qui face à la destruction de leur matière parle de leur âme. En effet, qui d'autre que lui, à travers son amour de la langue, de la perfection littéraire, lui le mieux en placé pour en connaître leur valeur. À cet égard, l'incipit est un joyau de poésie, dans la lignée du reste du texte d'ailleurs, vous le retrouverez en extrait plus-bas. La langue de l'auteur est d'une délicatesse et d'une poésie rare, un trésor de finesse, c'est une des premières choses qui m'ait frappé à la lecture de ce roman. C'est une langue très imagée et qui possède une force évocatrice sans pareil. Mais les points forts du texte sont loin de se résumer qu'à cela.

Hanta, à force de ces trente-cinq années, est devenu ce qu'il écrase, livres, pages déchiquetées, lettres morcelées. Hanta destructeur oui, mais créateur aussi, ce roman célèbre ainsi le livre, sa vie, sa puissance créatrice, qui n'a d'autres moyen d'être détruit qu'à travers la force de la presse hydraulique. Il y a ces livres, les élus, qui survivent même grâce à Hanta et sa mémoire, gardien féroce dont lui seul détient le secret. Célébration des belles-lettres, en tant que pouvoir créateur, mais aussi pouvoir modeleur, sculpteur d'une langue précieuse, d'un monde poétique unique, créateur du Beau. Mais c'est aussi, dans le même temps, une célébration de la lecture, et du lecteur, qui se nourrit, au sens littéral, des lignes que ses yeux devinent, des pages que son esprit décode, des chapitres que son cerveau dévore. J'y ai goûté, j'ai apprécié et savouré cette langue délicate au service de cet amour de la littérature. C'est un amour qui prend d'autres dimensions, il transcende vie humaine, il est au-dessus de tout, il est Dieu. Et c'est la religion de l'auteur. Lui, il extermine et il sauve, les meilleurs d'entre eux. Qu'il garde compulsivement chez lui, essayant d'étouffer la solitude pesante dans laquelle il s'est enfoncée d'année en année, un peu plus profondément. Ces livres qui remplacent les individus, sa société à lui. Pour tenter de palier à cette solitude si encombrante, il les collectionne, les entasse, les presse en des piles babyloniennes qui n'en finissent plus. Bourreau des livres, il subit lui-même le massacre orchestré de la bibliothèque de Prusse, mais il subit autant qu'il agit et il a bien du mal à comprendre leur destruction, même s'il en est l'instrument. Un carnage qui n'est pas sans rappeler un autre massacre, celui de l'holocauste, Vaclav Jamek ne manque pas d'établir le parallèle.

Tragédie du lecteur, drame d'une société qui n'a plus guère de considération pour ces livres, la vie de Hanka au sein de sa cave tourne peu à peu au délire, les personnages de ces précieux livres prennent vie, Jésus; Lao Tseu accompagnent Hanta, avec l'aide capiteuse des cruches de bière. Puisque au fond, c'est l'histoire tragique de la solitude d'un homme, qui ne peut que nous toucher, isolée et qui assiste à la mort des rares membres de sa famille, sa mère, puis son oncle, qui s'est tellement laissée envahi par le silence qu'il en vient à donner vie à des personnages fictifs ou morts. Un sentiment individuel fondu au milieu de l'universalité composée de ses livres. le témoignage émouvant d'un homme qui sombre peu à peu dans la folie, raconté par une écriture vive, alerte, prompte qui n'a de cesse de combler tous les v ides, de combler cette solitude oppressante.

Un homme déconnecté, incapable de s'adapter à la modernisation, lui-même compressé par un système qui n'a cure de l'individu au profit de l'efficacité et du rendement. La symbiose avec les livres devient parfaite pour son plus grand malheur. C'est un livre d'une riche incroyable, qui pourrait donner lieux à de longues exégèses, sur la place du livre dans cette société ou le temps est devenu monnayable, la disparition de la culture, les digressions philosophiques sur la vision sociale et humaine de Hanka, la destruction en masse, des livres, des hommes.


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C'est vraiment un hasard total que j'ai lu ce livre. En fait, c'est en rangeant des ouvrages à la mediatheque où je travaille que ce dernier n'était pas à sa place...Et m'est venue à l'idée de le lire sans regarder la quatrième de couverture. Je me suis dit que c'était peut être un signe...
Malheureusement, le hasard ne m'a pas porté chance. Un petit livre fin (120 pages) où je me suis ennuyée au possible. Beaucoup de répétitions ce qui donne au récit un rythme infernal. Des descriptions parfois insupportables, pour moi en tout cas, où la nausée n'était pas loin. Un livre qui parle de livres (en général j'adore) mais la quantité est tellement énorme qu'on sent l'étouffement du seul héros Hanta. Un mélange de Kafka pour l'ambiance et du "parfum" de Suskind pour les détails nauséabonds. Bref une lecture pénible et ennuyeuse. Je ne sais pas si cet auteur écrit bien mais la traduction n'est pas terrible. Pourtant la plupart des critiques sont bonnes voire dithyrambiques. Pour ma part, cela m'est passé au dessus de la tête. Comme on dit, il en faut pour tous les goûts.
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Cela faisait plusieurs années que j'avais lu ce livre, que j'avais adoré.
Je viens de le relire pour la 3e fois, et il m'a encore davantage impressionné !

En 1968, les Soviétiques ayant envahi la Tchécoslovaquie, et interdit la publication de leurs ouvrages à de nombreux auteurs tchèques, Bohumil Hrabal, qui subissait lui aussi ces pressions du pouvoir idéologique, s'adonnera néanmoins à l'écriture de ses plus grands livres, parmi lesquels « Une trop bruyante solitude » (en 1976).

A savoir que les manuscrits circulaient en samizdats (écrits signés par l'auteur pour ne pas être considérés comme des publications clandestines par les autorités, mais comme simples manuscrits), et il a fallu attendre la fin des années 1980, (voire le début des années 1990) pour les voir édités à nouveau, légalement !

« Voilà trente-cinq ans que je travaille dans le vieux papier, et c'est toute ma love-story.
Voilà trente-cinq ans que je presse des livres et du vieux papier, trente-cinq ans que, lentement, je m'encrasse de lettres… ».
Ainsi commence ce livre, qui a fait connaître Bohumil Hrabal en France.

C'est un court roman, magistral, un « Majestueux cri de révolte lancé à l'assaut des sociétés totalitaires ».

B. Hrabal y déplore un monde perdu.
Il l'aborde à travers le parcours du antihéros de son roman, qu'est Hanta. Son travail consiste à pilonner toute la journée, des livres, des encyclopédies et autres imprimés, au fond de la cave glauque d'une vieille usine, où grouillent les rats !

Hanta est « submergé » au sens propre comme au sens figuré, - submergé par le nombre impressionnant de livres qu'il sauve de la destruction, et qu'il amasse chez lui (tant bien que mal),
et – submergé par la destruction de toute une culture à laquelle il reste très attaché.

« Comme on ne peut plus y ajouter un seul volume, j'ai fait faire dans ma chambre, …des étagères en forme de baldaquin, …et j'y ai empilé deux tonnes de livres trouvés pendant ces trente-cinq ans ; quand je m'endors, ces deux tonnes de bouquins pèsent sur mes songes comme un énorme cauchemar… »

Les ouvrages qu'il ressuscite du pilon, vont du Talmud à Schopenhauer en passant par Camus « parce qu'un livre renvoie toujours ailleurs hors de lui-même ».
Tout au long du récit, on voit Hanta se livrer à une étrange célébration de la destruction. C'est comme un grand rituel funéraire, mais il veut refonder la vie contre le désordre du système.

Hrabal avait fait beaucoup de petits boulots pour gagner sa vie, et lui-même avait été employé dans un dépôt de papier récupéré.
Hanta, cet antihéros, solitaire et marginal apparaît bien comme son alter ego. - Marginal, parce qu'il est fidèle aux valeurs d'un monde donné pour révolu, - marginal parce qu'il fait le métier de marginaux, en s'occupant de déchets, - ironiquement marginal, parce qu'il est chargé de détruire ce qui est infiniment précieux pour lui, mais dépourvu d'intérêt et de prix aux yeux de la société, alors que les oeuvres qu'il doit liquider sont bien celles de l'esprit humain !

Bohumil Hrabal fit le choix d'un ultime et radical plongeon. Sa vie s'est arrêtée entre le 5e étage et le RDC d'une clinique praguoise en 1997.
C'est aussi le sort qu'il attribua à son héros !

Et Bohumil Hrabal de confier : « Je ne suis venu au monde que pour écrire - Une trop bruyante solitude - »
On ne peut qu'acquiescer et reconnaître que ce roman court est un chef d'oeuvre de la littérature tchèque !

Je voulais ajouter aussi que le choix de l'oeuvre de Paul Klee en 1re de Couv., ce crieur double qui fait la grimace, me semble bien approprié pour représenter l'état mental dans lequel se trouve Hanta et la souffrance qu'il éprouve.
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