C'est une nuit à foutre la nuit dehors

Comment une vie à peine commencée peut-elle s'éteindre ? Quel scandale est la mort, quelle injustice, quel horrible mystère ? D'autres y ont réfléchi, réfléchiront. Pauline Husy s'occupe du jour le jour. Comment vivre avec deux petits garçons et un mari adorable, tellement présent, si beau, soudain bouffé par le crabe ? C'est le récit quotidien d'une entrée dans un autre monde, l'antichambre de la mort quasi annoncée, avec l'hôpital, les cancérologues, les traitements, les retours chez soi. C'est le récit de la vie qui se poursuit malgré tout, les mots des enfants qui grandissent malgré tout, le travail malgré tout, la famille, la boulangerie, les courses, les vacances, et Fred qui s'épuise mais qui s'accroche, terrorisé qu'ils continuent sans lui, que les enfants l'oublient, que le soleil se lève sur Issy, Paris ou les Cévennes sans lui pour le contempler. C'est le récit d'une femme, Pauline, qui ne lâche jamais prise, même dans le pire désespoir toujours elle se relève et repart de l'avant.
Ce qui fait la beauté de ce texte, c'est que Pauline Husy a fait du récit un poème, fragmentaire, où s'entrechoquent le présent et le passé, la joie et la peine, la souffrance et le plaisir, la lumière et la nuit. Chaque phrase, chaque groupe de mots, est ciselé en quête de pureté, de choc, d'éblouissement, de douleur fulgurante. C'est un texte qui ne s'épuise pas, qui peut être lu et relu, du fait justement de sa haute teneur poétique. Les phrases s'incrustent en nous, de même que les images recherchées pour être au plus près de réel, comme ce "regard impossible" de Fred, comprenant sa condamnation.
A l'heure où le cancer demeure un tabou mais aussi un fléau mortel qui ne fait que s'étendre, ce texte salvateur fait comprendre ce que vivent les familles confrontées à ce drame. Il s'adresse à tous, aussi bien ceux qui l'ont connu que ceux qui le subissent, et ceux, qui, par chance, l'ignorent.
Mais Pauline Husy ne cherche pas à nous tirer des larmes. Si notre gorge se serre, c'est devant l'acuité de son regard et leur courage à tous deux, le souvenir des jours heureux et les ténèbres qui s'annoncent. le scandale, l'injustice, l'incompréhension. L'horrible mystère. La beauté de l'amour et de la vie. Pauline, avec sa force, son courage de Romaine, sa droiture, son talent, fait jaillir la beauté et la vie de l'horrible mystère. Comme les plus grand.e.s, à sa façon à elle.

Il FAUT lire ce livre.
Un coup de poing dans la tronche.
Une grosse peignée.
Une énorme secouée.
Un de ces livres auxquels on a tort de ne pas s'attendre.
Parce que l'auteur est inconnue.
Parce qu'il n'est pas porté sur le marché.
Parce qu'aucun média n'en parle.
Bref, parce qu'il ne roule pas sur l'autoroute de l'industrie, de ses évidences imposées et de ses happy ends.
C'est un récit. Pas une fiction.
Pauline a perdu son mari. Jeune. D'un cancer.
C'est la réalité.
Et c'est cela qu'elle raconte.
Sans pathos.
Sans tabou.
La vérité crue de ce qu'elle a vécu et pensé. Et lui aussi. Et leurs enfants.
Elle le fait sous forme d'instantanés. Ses flashes de pensées. Consignés jour après jour.
Des échantillons de l'inadmissible contre lequel rien n'est possible.
Chacun de ces petits paragraphes est un uppercut qui vous soulève ou vous renverse.
Tous.
L'un après l'autre.
Et vous finissez KO.
Et puis il y a la dignité par dessus tout. Cette volonté de conserver sa part d'humanité quand tout semble l'emporter et que la maladie veut vous emmener dans la déchéance.
C'est sombre me direz-vous ?
Non.
Ça ne l'est pas.
Tout le reste est dit dans la dédicace.
Vous finissez KO. Mais plus vivant que jamais. Car il est toujours possible d'aimer la vie.
Et c'est cela l'immense cadeau que nous fait Pauline.
Ce petit livre est dans mon panthéon aux côtés de quelques grands noms.
Un trésor découvert au salon de Mormant, où nous étions voisins de tablée.
Il faut aller dans les salons découvrir ce que vous ne trouverez nulle part. Sur les chemins de traverse de la littérature.
Merci Pauline Husy d'offrir ceci au monde.
Et que le monde te lise. Et comprenne ce que tu lui dis.

Autobiographie lue dans le cadre de Librinova.
témoignage certes émouvant mais où je ne suis pas complètement entrée car la maladie étant mon quotidien professionnel, je préfère me consacrer à d'autre thèmes pour mes temps libres et loisirs.
Iln'enreste pas moins que l'écriture est sans complaisance et garde une part de combativité et d'espoir.