Dans les écrits d’Al-Hasan, nous trouvons le hadith du Prophète qui rapporte la sentence de Dieu :
« La pureté consiste pour le dévot à ce que son cœur soit élevé jusqu’à Moi. Dès lors il ne peut plus M’oublier. Quand il en est ainsi Je le gratifie en lui faisant ressentir Ma présence à chaque instant. C’est Moi qui anime son cœur à tout moment et quand il parle, il parle pour Moi et quand il se tait, il se tait pour Moi. C’est pour ce dévot que J’accorde Mon secours à la création. »
Les dévots tels que décrits dans cette parole divine, sont les étrangers parmi les étrangers ; leur exil est le plus noble des exils. Pour les dévots, il existe en effet deux sortes d’exil ; un exil apparent et un exil caché.
– L’exil apparent est celui des saints parmi les perfides, celui des hommes sincères parmi les hypocrites, l’exil des oulémas parmi les ignorants et les rustres, l’exil des ascètes parmi les débauchés, l’exil des vrais gens de science parmi les prétendus savants qui ont perdu toute piété et dévotion.
– L’exil caché réside quant à lui dans l’intention. C’est l’exil des initiés parmi la création toute entière. Ils sont étrangers mêmes aux yeux des oulémas, des ascètes ordinaires et des dévots. Grâce à leur connaissance, à leur adoration et à leur renoncement, ils se tiennent auprès de Celui qu’ils adorent, et jamais ils ne S’en écartent.
Abû Sulaymân al-Darânî disait à leur sujet que :
« Leurs intentions et leurs soucis n’ont rien à voir avec ceux des autres hommes et que mêmes leurs invocations (du’a) diffèrent de celles des croyants ordinaires. »
On demanda alors à Abû Sulaymân quelle est leur caractéristique la plus étonnante, il répondit en pleurant :
« Quand Dieu scrutera leurs cœurs et verra qu’ils ne désirent rien de cette vie, ni de l’au-delà si ce n’est de Le contempler. »
Yahya Ibn Muâdh a dit quant à lui :
« L’ascète est un étranger dans cette vie et l’initié est un étranger même dans l’au-delà. » (Ibn Rajab al-Hanbalî, pp. 133-135)
Il est aussi rapporté par le biais de la Sunna que Jésus (paix sur lui) aurait dit :
« Passez cette vie et ne vous y établissez point »
Il aurait dit par ailleurs :
« Qui bâtirait sa demeure sur un terrain menacé par les vagues de l’océan ?! Il en est ainsi de cette vie, ne la prenez pas comme demeure ! »
Le croyant est donc dans cette vie comme un étranger qui passerait par un pays où il ne compte point s’établir. Sa terre natale lui manque terriblement et il espère y revenir bientôt. Pour cela, il accumule les provisions nécessaires pour le voyage de retour. Il ne partage en rien les préoccupations des habitants du pays d’exil. Il n’essaye pas de gagner leur estime et il ne se soucie guère du mépris dans lequel ils le tiennent car il sait qu’il ne restera pas longtemps parmi eux.
Fudhayl Ibn Ayyâd a dit à ce propos :
« Le croyant est dans cette vie mélancolique et amer (car il est comme un étranger). Son seul souci est de préparer ses bagages pour le retour. »
Al-Hassan a dit :
« Le croyant est dans cette vie comme un étranger. Il ne recherche point ses gloires et il n’a que faire de l’opprobre. Les hommes vivent dans un monde et le croyant dans un autre. » (Ibn Rajab al-Hanbalî, pp. 130-131)