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EAN : 9782490545131
176 pages
LE BAS DU PAVE (01/05/2023)
5/5   1 notes
Résumé :
Quatrième de couverture :
Avec la destruction des quatre immeubles « Millions », ce qui fut le quartier des "Petits Logis" n’aura plus jamais le même visage. À l’heure où une page se tourne, les anciens habitants de cette petite cité ouvrière de Châteaudun nous livrent, avec beaucoup d’émotion, leurs souvenirs et leur fort attachement à ces lieux.

À l’initiative du présent ouvrage, Monique Jallois a pris la plume pour raconter son quartier,... >Voir plus
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Jallois Monique – Les Petits Logis au grand coeur : histoire et témoignages des habitants d'un quartier populaire de Châteaudun – éd "Le Bas du Pave" (24.400 Mussidan), 11 mai 2023 – format broché 20x14cm, 176p. - ISBN 978-2-490-54513-1 (EAN13 9782490545131)

Il s'agit là d'un document rare : à l'initiative de l'une d'entre elles, de nombreuses personnes (la plupart nées dans les années mille neuf cent cinquante) ayant habité dans ce quartier populaire des "Petits logis" (Châteaudun) se sont réunies en mars 2023 (cf photo p. 121-122) juste avant la destruction des immeubles dans lesquels elles et ils avaient passé leur enfance, et pour certains même une bonne partie de leur vie.
Animatrice de cette démarche, Monique Jallois retranscrit ici les témoignages recueillis auprès de ces habitants. Toutes et tous issus de milieux fort modestes, elles et ils livrent ici quelques uns de leurs souvenirs les plus marquants.
C'est ce qui fait la grande valeur de cet ouvrage. Il est tellement rare de voir ainsi consigné par écrit la parole des "petites gens" qu'il convient de recommander ces pages à tous les sociologues, historiens et autres "grands" politiques vivant aujourd'hui dans leur bulle, en totale déconnexion des réalités de la France profonde.

Dès la préface, Fred Morisse trouve le ton juste :
"Qui n'a jamais vécu dans un quartier populaire comprend difficilement la nostalgie dont témoignent leurs anciens habitants. La vie n'était pas tous les jours aisée, les fins de mois étaient compliquées, les lieux, esthétiquement parlant, sont rarement agréables à l'oeil. C'est ignorer le bonheur simple, la solidarité spontanée, la force des liens qui s'y créent, et qui souvent durent toute une vie." (pp. 7-8)

La plupart des gens dont les témoignages sont ici réunis arrivèrent dans ce quartier aux environs de 1958 alors qu'elles et ils étaient enfants (p. 13) : les conséquences de la seconde guerre mondiale se faisaient encore sentir. le plus souvent, les parents se voyaient attribuer ces logements parce que le père (le chef de famille, à l'époque) avait trouvé un emploi d'ouvrier dans l'une des nombreuses usines (cf p.13) qui existaient alors à Châteaudun.
Face au baby-boom ("ça grouillait d'enfants", cf p. 14), suite à l'industrialisation menée à marche forcée en prélevant largement dans la main d'oeuvre dégagée en détruisant le tissu agricole rural, les besoins en logements dits sociaux avaient littéralement explosés. En janvier 1954, l'appel de l'abbé Pierre vient appuyer l'urgence qu'il y a à mettre en oeuvre à grande échelle et rapidement le "plan Courant" (programme LOGECO, 1% patronal, HLM) : les "opérations Millions" sont lancées (cf références données en note, page 13, ainsi que les articles de Wikipedia consacrés à l'habitat social).

Cela commence (cf p. 54, 79) par la construction des "petits logis", des maisonnettes avec cour et jardinet, mais sans aucune commodité, sans eau chaude, avec des murs de ciment cru. Viennent ensuite les quatre blocs d'appartements "Millions", dans lesquels les familles éblouies découvrent l'eau chaude au robinet, la salle de bain équipée d'une baignoire sabot, une cuisine carrelée et des chambres avec du parquet (p. 21, 43, 78; 107, 135).
Il s'agit de créer des quartiers pour "les petites gens" (p. 13), qui avaient encore des liens forts avec le monde rural (p. 44) et leur famille au sens large (p. 93, 135, 138, 158).
Dans une petite ville comme Châteaudun, les enfants vont chez le fermier, le "père vingt sous" (p. 18, 45, 63, 87, 94) avec la "boîte à lait" d'un litre, en fer blanc ou en alu, certains vont ramasser l'herbe pour les lapins des grands-parents (p. 64, p. 69). Situé en périphérie, les immeubles sont entourés de champs, vastes espaces pour les jeux des enfants (p. 17).
Enfants qui se dépensaient en jeux physiques d'extérieur "de billes, de corde à sauter, d'osselets" (p. 17, 93, 155), qui jouaient "au ballon, à la pétanque, aux raquettes" (p. 25), qui se déplaçaient surtout à pieds ou en vélo (p. 44, 87, 88, 137) sans hésiter à parcourir des distances inimaginables aujourd'hui (la baignade à Saint-Jean, cf p. 27, 62, 89, 132).
Ados qui se retrouvaient au "petit buisson" puis au "grand buisson" (p. 17) pour fricoter loin des regards des parents, mais en respectant "la" limite à ne pas franchir : la pilule ne fut créée et autorisée que bien plus tard, monsieur le curé expliquait aux garçons que les filles étaient la représentation sur Terre de la Vierge Marie, et aux filles qu'elles devaient conserver leur "trésor" jusqu'au mariage, le tout dispensé au catéchisme car "la communion était de rigueur" (p. 29-30, 131), d'autant plus qu'elle amenait LE cadeau d'entrée dans la vie presque adulte, à savoir la montre (p. 30). Cette morale était d'ailleurs fortement relayée par le parti communiste (Jeannette Thorez-Vermeersch veillait au grain).

L'épicier, le "père Menant" (p. 20), ouvert jusqu'à pas d'heure, inscrivait "sur le compte" les achats impossible à régler vers la fin du mois. Il en allait de même à la "Coop" de quartier (p. 26). Les vélomoteurs les plus répandus, y compris chez les adultes, étaient les "mobylettes" bleues, dont les garçons réaménageaient le siège pour emmener leur dulcinée (p. 22). Les voitures étaient rares dans les classes populaires, les enfants pouvaient jouer dans les rues sans risque de se faire renverser.

Ce volume comprend également de nombreuses reproductions de photos de ces années-là, dans ce contexte là : tout un monde, toute une ambiance ! L'appareil photo, les pellicules, le tirage papier, ce n'était pas donné !

Les gens qui s'expriment ici sont nés dans ces années-là, elles et ils évoquent le "temps d'avant".
- Dans le temps d'avant, les gens des quartiers sortaient des chaises devant les immeubles pour se parler, plaisanter, discuter de vive voix. C'était avant que la télévision (p. 44, 64, 71, 88, 149) puis les écrans puis le téléphone portable ne viennent détruire la sociabilité sous couvert de "réseaux sociaux" (!!!)
- Dans le temps d'avant, les jeunes organisaient des "surprise-partie" pour y boire du lait-fraise, du sirop d'orgeat, en se risquant à une bière. C'était avant que le trafic de drogue n'en arrive aux fusillades en pleine rue (des dizaines de morts rien qu'à Marseille dans les six premiers mois de cette année 2023).
- Dans le temps d'avant, les gens avaient un travail, une petite bourgade comme Châteaudun comptait plusieurs usines. C'était avant que les élites n'aient massacré l'emploi industriel après avoir détruit le monde rural et celui des artisans et commerçants au nom de leur "mondialisation heureuse" (sic).
- Dans le temps d'avant, les "jeunes filles" (un mot disparu) se voyaient proposer Gigliola Cinquetti remportant l'Eurovision 1964 avec "Non ho l'età", Adamo demandant poliment "vous permettez Monsieur", et Sheila bramait "Adios amor"... C'était avant que les "ados" se voient proposer les trépidations hurlantes, mondialement standardisées, avec tenue ordurière de rigueur, des Madonna, Rihana et autres Beyoncé botoxées, déhanchées, sur le moule standard, toutes sorties des ateliers états-unisiens... et bien sûr, qu'il s'agisse des drogues tueuses ou de pornographie dégradante, nos braves politicardes et politicards ne font rigoureusement rien.

Vers la fin du temps d'avant, il y eut cependant, par exemple, le succès de "Pourtant, que la montagne est belle" (1964) :
"il faut savoir ce que l'on aime, et rentrer dans son HLM, manger du poulet aux hormones"
Deux citations:
"on se contentait de peu" (p. 101)
"maintenant les gens se plaignent encore du manque de confort, eh bien, nous, l'avantage,c'est que nous n'en avions pas" (Jean-Pascal Nicol, p. 143)

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