Bill James3.5/5
2 notes
Le Lapin Enragé
Résumé :
Ça sert, des fois, d'avoir fait la guerre. Surtout quand on devient vioque, mou et froussard. Et que soudain vous voilà embarqué dans le monde obscur où les truands se pourchassent, stupides, rusés et sadiques à la fois. Et qu'on sent qu'il faut y aller, sauver la veuve et l'orphelin, malgré la trouille, la vieillesse menaçante, qu'il faut retrouver l'ardeur guerrière de jadis. Alors, à ce moment-là, les truands, on s'en balance!
Ils étaient dans une confiserie où la plupart d'entre eux avaient couru s'abriter quand les premières détonations avaient claqué et que l'homme avait dégringolé les marches de la bibliothèque. Odil ne s'était pas tout de suite mis à courir. Après tout, il avait fait la guerre, il savait ce que c'était qu'un pistolet, il en avait manié lui-même. Il avait vu des hommes abattus, il en avait abattus lui-même, au pistolet ou autrement. Aujourd'hui, il avait d'abord maîtrisé sa peur. Pendant un moment, il avait pensé traverser la rue pour se rendre utile. Il était sûr d'y avoir pensé. Certainement qu'il y avait pensé. Puis les gens s'étaient enfuis vers la boutique, en galopant et en hurlant ; il les avait suivis. Mais en marchant ; il s'était forcé à ne pas courir.
Les bonbons enveloppés de papiers brillants et colorés formaient de petites montagnes dans la vitrine, et ils respiraient l'odeur appétissante du chocolat. Par la vitrine, ils regardaient la bibliothèque, de l'autre côté de la rue. L'homme tombé gisait face contre terre sur la dernière marche, un bras sur le trottoir, la main bien à plat, comme s'il voulait s'empêcher de rouler. Les deux jambes, sagement allongées l'une contre l'autre le long de la marche, le faisaient paraître jeune et élancé.