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sur 167 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  

Pour cette petite pépite de Serge Joncour, U V , je dirais voilà une gourmandise, pour amateurs de jeux littéraires dans la veine des Papous dans la Tête de France Culture, cette émission culte du dimanche après la messe, à 12h45. Serge Joncour est cette voix de province en décalage avec le monde de la modernité.

Ici c'est l'histoire du parfait sans gène, Boris, qui débarque dans une famille, ayant un pied à terre à l'île de Bréhat, cette merveille de beauté de la côte nord, aux hôtes immortels, qu'un Eric Orsenna a hissé au sommet de sa clinquante renommée académique.


Une famille gagnée par une sorte de lassitude, « les dames s'exposant au soleil sans retenue, pour le plaisir cosmétique de peaufiner le hâle, donner du sens à l'ennui »p187.

Le père trouve enfin de la distraction et le goût de rire, sinon de vivre, chez ce personnage à la limite du vulgaire, Boris l'ami du fils parti en Amérique, va donner le ton et la famille de vignerons côtés et reconnus va s'encanailler, faisant tomber pour quelques heures les barrières des bonnes manières.


Bains de minuit, sortie avec le fameux Riva, fumettes, et dans cette fébrilité générale, l'enthousiasme reprend le dessus sur les animosités rampantes. Seul André-Pierre n'est pas de la fête, il est sans doute le seul à savoir où est passé réellement le fils de la famille, Philip.

André-Pierre l'antithèse de Boris, maladroit au tennis, droit dans ses bottes, le bras droit de Mr Chassagne, homme de droit chargé de gérer le domaine, sursaute quand Boris le tutoie, où quand Boris débarque un matin avec sa chemise Dior que sa femme Vanessa lui avait offert.

Serge s'amuse et nous avec lui, son oeil coquin, passe de l'un à l'autre, cultivant comme un vrai laboureur sillon par sillon l'art de la provocation. Il s'amuse tant, qu'il nous sert ici ou là des alexandrins rimés, "comme à une victoire, une paix de gagnée, / goûtant pour de bon au repos du guerrier."p 209.

La fin est magistrale, nous finissons par découvrir Philip, l' énigmatique ?
C'est drôle jusqu'au bout avec au final un feu d'artifice comme un clin d'oeil à Antoine Blondin ,Un singe en Hiver.
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UV Serge Joncour le Dilettante ( 215 pages – 15 €)
Prix France télévisons 2003

Serge Joncour maîtrise l'art d'installer une atmosphère. Dans L'écrivain national, la forêt est omniprésente. Dans UV c'est la mer avec son flux et reflux qui rythme la vie des protagonistes sur l'île de Bréhat, île de « rêve », grâce à son « microclimat », sa végétation luxuriante, « la senteur balsamique et chaude » comme sur la Riviera.
Les paysages qui défilent, servis par une écriture poétique, évoquent des tableaux de Monet : « L'émeraude chaude des pins sur le granit rose, les reflets de la silice comme une ondée de soleil ». La mer se révèle sous différentes facettes, dangereuse, « jalonnée d'écueils », « expéditive », aux « vagues dévergondées ».
L'auteur adopte une écriture cinématographique : panoramique balayant la baie, travelling sur les « myriades d'embarcations », sur « les voiliers filant doux », sur « une coulée de safran qui serpentait entre les pins », contre plongée sur « le petit escalier taillé à même la roche », plongée sur la plage en contrebas.
Très vite on ressent l'isolement, pas de navette avec le continent après vingt heures.

Selon l'édition, deux couvertures s'offrent au lecteur. L'une sobre : une parcelle d'eau
miroitant sous le soleil. L'autre, une scène de l'adaptation à l'écran (1), campe trois protagonistes du roman autour de la piscine du domaine d'une famille aisée.

Progressivement, l'auteur , tel un cameraman, focalise notre attention sur chacun des membres de la famille Chassagne, réunie pour les vacances. le 14 juillet se profile, mais Philip, le fils, spécialiste du feu d'artifice manque. Absence auréolée de mystère, tout comme la présence de cet homme qui débarque inopinément.
On s'interroge. Est-il vraiment un ami du fils prodigue ?
Le narrateur décrypte les rapports de chacun avec le personnages central, l'intrus, dont la personnalité se tisse de façon chorale. Pour les uns, Boris apparaît comme l'« homme providentiel ». Il gagne vite la confiance des parents, armé de l'art du savoir vivre, s'incruste. Les deux bambins, il les amadoue par les jeux. Son côté séducteur, sympathique ne manque pas de plaire aux deux soeurs. N'ont-elles pas remarqué « le miel de ses épaules brunies » ? Laquelle va succomber ? André Pierre, le gendre, plus lucide, devine en lui plutôt un « parasite », « frimeur », « un salaud », « un maboul », un « fauve » prêt à « dominer la meute et rameuter les femelles », d'où sa méfiance.Il tente de mener son enquête, de faire parler une photo. Toujours est-il que la présence insidieuse de cet inconnu vient bouleverser la routine de cette famille. Jusqu'où va-t-elle se laisser engluer, manipuler ? Que penser des déclarations fracassantes de Boris quand il affirme vivre « d'expédients », de trafic ?
Quant à la relation de Boris avec l'absent immature, influençable, Philip, elle est l'objet de maintes spéculations. Certains sont dépositaires de secrets.
Parallèlement, par le prisme de ses proches, se reconstitue le portrait de Philip.
(Allusion à ses frasques, à des « histoires sordides », à de l'argent versé.)
Serge Joncour excelle à happer son lecteur en instillant du suspense.
Un corps repêché. Un gendarme qui rend une visite éclair et repart avec un document signé. Julie,l'une des soeurs, introuvable, comme évanouie. Chacun spécule, l'inquiétude du père est palpable. L'imagination du lecteur galope.
On peut craindre le pire quand Boris a embarqué les gosses à bord du Riva. La tension monte, d'autant que Boris n'a pas de permis. Voilà le père vrillé d'angoisse. « L'inquiétude est la goutte de citron qui fait tourner le litre de lait ».
On s'interroge sur ses intentions quand le père, ancien chasseur, le surprend devant sa collection de carabines. Est-ce bien avisé de l'initier à leur maniement ?
Rebondissement quand Boris, à son tour, n'est pas de retour pour le repas de fête.
A nouveau, chacun avance une hypothèse. Quelques indices montrent que deux protagonistes, « scellés par le même pacte » connaissent la vérité.
Que signifie cette détonation qui clôt le roman ? Encore une énigme à élucider.

A travers le personnage central de Boris, Serge Joncour aborde les méfaits de son emprise sur les membres de la famille. Il explore cette «  relation prison », toxique, déséquilibrée qu'André-Pierre n'a eu cesse de souligner, puis de subir. On est témoin de la façon dont le gendre se retrouve ligoté lorsqu'il est chargé d'accompagner Boris, avec pour conséquence son malaise physique. Cette dépendance impacte ses choix . Par crainte, ne règle-t-il pas les achats superflus de Boris ( pied-de-biche) ?
On constate comment cet imposteur est vite idéalisé par la mère au point de le trouver « charmant, gentil, agréable, courtois » et même un masseur exceptionnel.
Il réussit la prouesse de fédérer toute la famille, plutôt sédentaire, pour un pique-nique. Il élargit son ascendance jusqu'au gendre qui voit sa liberté aliénée, contraint à suivre le mouvement. Des scènes très animées, voire mouvementées, ponctuent le récit. On assiste à une partie de tennis musclée entre Boris et André-Pierre, bombardé de « balles folles, assassines ». Une telle violence peut-elle être désamorcée ? La fureur du service de « l'autre » finit par déstabiliser le plus faible. Tel un «  GO », il est le « copain idéal » des jumeaux et « pourquoi pas l'amant » d'un soir. Il convie aux promenades nocturnes, aux sorties en mer. La quiétude de l'île est déchirée par le « rugissement » du Riva, les cris, les rires, cédant aux sanglots et «  incantations » des « deux petits gladiateurs », « le brouhaha de la plage ».

Serge Joncour, portraitiste hors pair, nous livre une galerie de portraits très fouillés, dissèque les rapports entre fratrie. Ce « panorama de la famille complète » rappelle la phrase de Shakespeare : « Le monde entier est un théâtre et les hommes n'y sont que des acteurs ». Dans UV, Boris s'arroge le plus beau rôle, «  le rôle de l'extravagant » « qu'il improvise sans partition, souligne Serge Joncour ».

En filigrane, la question de la transmission du patrimoine est soulevée( vignobles).

Inutile d'être autour d'une piscine, sur une plage pour plonger, avec délectation, dans ce thriller psychologique divertissant, à l'intrigue pleine de mystères ou dans un autre roman de cet auteur. (2) Serge Joncour rime toujours avec amour et humour.

Un bon roman n'est-il pas un récit qui interroge, comme dans ce huis clos oppressant, à la tension palpable ? Et vous ?Vous avez peut-être côtoyé ce genre d'individu « inébranlable, insubmersible » qui sait s'immiscer, se fondre au sein d'une famille ?
(1)UV, film ( 2007) réalisé par Gilles Paquet-Brenner, adapté du roman UV de Serge Joncour, publié en 2003.
(2)L'amour sans le faire, Combien de fois je t'aime ?, L'idole, Situations délicates, Vu,
L'homme qui ne savait pas dire non, In vivo, à mettre dans votre PAL, par exemple.
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Découverte d'une belle plume!
C'est la première fois que je lis Serge Joncour et je pense continuer. Il m'a convaincu avec "UV", thriller psychologique qui se passe dans une grande villa en bord de mer.
Par une chaleur accablante qui alanguie les corps au bord de la piscine, les vacances vont être perturbée par l'arrivée d'un inconnu sur l'île de Bréhat. Car même en Bretagne l'été peut être très ensoleillé.
Boris est un ami de Philip le fils de la famille. Mais ce dernier n'est pas là. Pour autant, le jeune homme va être invité à rester quelques jours pour l'attendre.
Boris est beau et séducteur et tout semble lui réussir. Il a tout du fils idéal contrairement à Philip. Rapidement il va faire '"comme chez lui".
Les soeurs de Philip, Julie et Vanessa, vont également tomber sous son charme. le seul qui reste à distance est André-Pierre, le mari de Vanessa, qui sent le parasite manipulateur. Est-il parano?
La tension va monter et on s'attend à des événements troubles qui ont bien lieu, sans surprise, mais qui rebondissent à chaque fois. C'est ce qui fait la richesse de ce texte, les contrecoups permanents qui laissent le lecteur en suspens jusqu'à une fin inattendue.
C'est très réussi même si on a l'impression de connaître l'intrigue. Il faut dire que j'ai été séduite par le style de Serge Joncour et que l'adaptation au cinéma de ce roman peut donner un film Hitchcockien. Je vais donc le regarder même si j'ai peur que le film ne soit pas à la hauteur du roman.
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Mi juillet. île de Bréhat. Il fait chaud.
Boris vient rendre visite à son ami d'internat, Philip. Or à son arrivée, point de Philip. Vanessa et Julie, les deux soeurs de l'absent font connaissance avec cet homme qu'elles voient pour la première fois et l'accueillent sans restriction aucune, alanguies au bord de la piscine. Leurs parents font de même. Ils ne le connaissent pas, et alors ? Puisque Boris est un ami de Philip, il est le bienvenu ! Boris : une omniprésence ; une gentillesse ; une courtoisie. Toujours là.
Boris sait se faire aimer de ses hôtes. Il balade les enfants, entretient le Riva pour le faire voguer, séduit toute la famille ou presque. Point de méfiance à l'horizon ? Quoique.....André-Pierre le mari de Vanessa commence à s'interroger. Heureusement que l'un des hommes de la maison met la main sur une ancienne photo de classe d'internat. Voyons où est Boris sur cette photo...
Et Philip qui n'est toujours pas là. Où est-il ?

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COUP DE COEUR. Un réel talent chez Serge Joncour qui sous des dehors de calme, tranquillité, en plein été, installe un doute, distille des indices, des suspicions. Il fait si chaud que l'on aurait pu se croire installé tranquillement au bord de la piscine à suivre cette famille et cet homme qui attend le retour de leur fils et ami. Or, tout colle. La sueur, les vêtements, le calme et Boris. L'angoisse arrive, une scène nous met sur le qui-vive et puis pfft, on se rassure ; ou plutôt Boris nous rassure. Puis on repart pour un autre suspens. Jusqu'à quand ? L'auteur sait vraiment nous tenir en haleine jusqu'au bout, en légèreté extérieure mais en intensité intérieure.

A LIRE ABSOLUMENT
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