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Olivier Le Lay (Traducteur)
EAN : 9782378561666
288 pages
Verdier (23/03/2023)
4.1/5   15 notes
Résumé :
Suite de Lilas rouge paru en 2021, Lilas noir évoque le dernier descendant des Goldberger.
Dans une esthétique intemporelle, empreinte des inquiétudes modernes - la question du refoulé des années du nazisme en Autriche, et celle de la transformation du monde paysan -, Reinhard Kaiser-Mühlecker achève avec ce texte l'écriture de l'épopée de la famille Goldberger. Son style narratif inimitable fait de lui un héritier d'Adalbert Stifter - un Stifter qui aurait ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
C'est sûrement la grand-mère, même si elle est tenue pour folle, qui détient la vérité sur la famille avec « ces salades tirées de la Bible, ces abracadabrantes histoires de malédiction, ces «  Il punit l'iniquité des pères sur les enfants jusqu'à la troisième ou quatrième génération ». Car de malédiction, il en sera question même si cela se fera en discrétion, deux ou trois allusions, très bon roman oblige. On est dans la lignée de « Lilas rouge » – la longueur en moins, quelque descendance plus tard, et on retrouve un Ferdinand Goldberger, même patronyme que son arrière-grand-père responsable supposé de la mauvaise étoile familiale avec ses accointances passées avec le nazisme. Mais Ferdinand semble s'être éloigné de tout ça, en tout cas il a quitté le milieu rural et familial pour se consacrer à ses études en agronomie à Vienne. le roman s'ouvre sur un de ses amis qui a rencontré une certaine Suzanne, pas blanche aux souvenirs de Ferdinand. Et il y a de quoi, c'est justement une de ses anciennes petites amies de Rosental expatriée elle aussi à la capitale. Il faudra peu de temps à Ferdinand pour renouer avec elle, se replonger dans le passé et se faire rattraper par le présent.
Le roman se bâtit sur quatre parties, on pourra suivre ainsi Ferdinand aux prises avec ses fantômes familiaux en Bolivie, à l'écoute d'un long monologue de sa tante, ou de retour à ses racines paysannes. Mais ce qui marque dans ce roman aux allures de grand, c'est la prose de Reinhardt Kaiser-Muhlecker, délicate et puissante, déployée dans le classicisme d'un temps révolu à base de passé simple et de subjonctif. Une magnifique prose ondoyante avec laquelle l'auteur s'amuse des temporalités et des espaces, où présent et passé se font écho avec virtuosité. Un superbe roman, j'ai en tout les cas une nouvelle fois beaucoup aimé.

« Oui, tout était en train de se bousculer dans sa vie. Et sans doute éprouverait-il un temps encore la sensation que les événements s'abattaient d'un coup sur sa tête, et qu'il n'était pas en son pouvoir, momentanément du moins, de les saisir avec plus de fermeté que des ombres, les dernières lueurs évanescentes d'un rêve »
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C'est avec Ferdinand, le personnage principal de Lilas noir, que s'achève le cycle romanesque de la famille Goldberger. Lilas rouge se terminait sur le départ de Ferdinand pour Vienne pour ses études supérieures, au grand dam de son oncle Thomas qui voyait en lui son successeur pour reprendre la ferme.
Au début de Lilas noir, Ferdinand est depuis plusieurs années à Vienne où il vit dans une sorte de vide existentiel, portant un regard froid sur le monde qu'il tient à distance, jusqu'au jour où il retrouve Suzanne, son amour de jeunesse.
Lilas noir décrit la lente descente aux enfers de Ferdinand qui, à son corps défendant, accomplit la malédiction lancée contre son arrière-grand-père. Prisonnier de ses passions, Ferdinand ne parvient pas à échapper à son mal-être contrairement à son père Paul, décédé en Bolivie et sur les pas duquel il va se lancer, espérant trouver des réponses à sa souffrance.
Ce roman est beaucoup plus sombre, comme l'indique son titre, que Lilas rouge qui portait en lui la riche fécondité d'une nature omniprésente et des personnages animées de passions parfois mortifères mais puissamment vivants. Ici, la nature est tenue à distance, comme étrangère, un fond d'écran que l'on finit par ne plus voir. L'agriculture n'est plus une relation passionnée avec la terre mais une question de rentabilité. Les femmes n'ont plus qu'un rôle secondaire ; elles sont effacées, rendues mutiques par l'autoritarisme des pères et des époux. Ferdinand incarne cette mutation douloureuse d'un pays hanté par son passé et happé par le productivisme promu par l'Europe. C'est sur une note sombre que s'achève cette passionnante histoire familiale aux qualités littéraires qui ne se démentent pas dans ce dernier opus.
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La floraison du lilas ne ment pas
Lilas Rouge se terminait par le départ de Ferdinand, fils de Paul, arrière-petit-fils de Goldberger.
Parti à Vienne faire des études d'agronomie, étudiant boursier faisant des petits boulots, il était bien décidé à prendre son destin en main. Résolu plus que jamais à ne pas être un pion entre les mains de Thomas, son oncle, celui qui avait chassé Paul de Rosental.
Il retrouve à Vienne son amour de jeunesse Suzanne.
Dire cela pourrait faire de cette histoire familiale une histoire comme tant d'autres.
Mais chez les Goldberger, rien ne peut s'assimiler à une norme quelconque.
La terre et l'évolution de l'agriculture accompagne chaque génération, tremplin ou perte ; des chevaux aux machines agricoles les plus performantes, l'agriculture trace son sillon et traine dans son sillage la malédiction des Goldberger.
Dans cette suite, véritable gageure, l'auteur de sa belle écriture nimbée de classicisme nous fait vivre dans une attente tendue comme la corde d'un arc.
C'est intelligent, habile dans la construction où une répercussion d'échos nous évite les redondances de lourdes rétrospectives des six décennies passées.
Ce sont les non-dits, à l'intérieur de la famille comme à l'extérieur, le village est là à épier, commenter et propager la vie de celui qu'ils n'ont jamais accepté Goldberger, l'ancien.
La période lumineuse que va vivre Ferdinand va prendre fin brutalement et sa seule échappatoire sera d'aller sur les traces de son père en Bolivie.
L'écriture associée à cette période fait vivre au lecteur cette hantise qui habite Ferdinand, les fantômes sont là prêts à le dévorer.
Mais Rosental le rappelle, le happe à nouveau, sera-t-il le marionnettiste ou la marionnette ?
Sabine, femme de Thomas va vider son sac et celui-ci est lourd. Cette femme qui a tout encaissé parle et c'est un tableau qui se peint devant nos yeux avec tous les détails et nous en donnent la compréhension. Elle dit la dureté d'un monde.
La vengeance qui se fait jour sera-t-elle un soulagement ? Rien n'est moins sûr.
« Dès son premier souffle, l'homme ne vit que dans l'attente de l'instant de son trépas, quand bien même cette évidence demeurerait-elle un temps voilée à sa conscience. »
Lilas rouge et Lilas noir sont un grand livre, par l'histoire narrée mais par le style et cette manière de percevoir et de faire vibrer les sentiments de chaque personnage comme les changements de la nature au fil des saisons. C'est une impression de chaleur, de lumière aux premiers rayons du soleil, le froid aux premiers gels, c'est la terre qui donne. le poids de la terre au creux de la main, le brin d'herbe entre les lèvres, les premiers épis…
Tout est offert pour que le lecteur ressente les joies et les affres des personnages.
Quoi de mieux que le travail de la terre pour être au plus près de ce qui fait un homme.
J'ai aimé cette osmose terrienne.
J'ai refermé ce livre avec une sensation de vertige devant l'habileté de Ferdinand à fouiller ses sensations au plus près.
Le raccord entre ce volume et le précédent est juste parfait.
De la belle littérature et une pépite de plus dans cette belle maison d'éditions : Verdier.
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2023/05/15/lilas-noir/


Lien : https://jai2motsavousdire.wo..
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En 2021 paraissait en français le volume initial d'un diptyque autrichien édité en 2012 et 2014, dont le second volet nous parvient aujourd'hui, toujours servi par une impeccable traduction d'Olivier le Lay. Cela s'intitulait « Lilas rouge » et s'attachait au parcours de trois générations d'une lignée de paysans dans un village reculé de la Haute Autriche. A l'origine de celle-ci s'était trouvé Ferdinand Goldberger, riche exploitant forestier et criminel nazi dont la descendance allait devoir expier ce péché originel « jusqu'à la troisième et la quatrième génération. » Dans ce texte, aussi captivant qu'admirable, Reinhard Kaiser-Mühlecker interrogeait les rémanences d'un passé sinistre sur le temps long de l'histoire.
C'est un autre Ferdinand que l'on retrouve dans « Lilas noir » : un jeune homme de notre siècle qui depuis sept ans, durée éminemment biblique aurait dit sa grand-mère confite en religion, a quitté le fief familial de Rosental pour venir s'installer à Vienne. Il porte le même prénom que le patriarche, son arrière-grand-père. Il est aussi le dernier de la lignée des Goldberger. Comme si le temps de la malédiction avec lui allait se refermer. Ce Ferdinand-là se présente le jour comme un brillant collaborateur du ministère de l'Agriculture et de l'Environnement. Mais la nuit comme un fêtard invétéré. L'incipit du roman le montre un petit matin au sortir d'une boîte, observant le spectacle du lever du soleil de juin, derrière le pare-brise de la voiture où il vient de piquer un somme. D'entrée de jeu apparaît son double visage, entre l'action et la contemplation, le dynamisme de la vie et la mélancolie, dans une manière de lointain héritage de la culture duale de la double monarchie austro-hongroise. A ce Ferdinand au bout de la chaîne familiale, il appartient en effet de choisir entre faire fructifier l'héritage des Goldberger et le liquider. C'est ce que donne à voir ce texte, qui constamment oscille entre l'esprit de l'odyssée, se lancer dans « quelque chose de neuf », et une manière de résignation mortifère, dans la grande tradition viennoise.
Si Ferdinand, ainsi que tous les Goldberger, ressent le poids d'un passé qui ne passe toujours pas, il est cependant comme eux capable d'innovation. Ils étaient devenus les plus gros propriétaires fonciers de Rosental, premiers représentants d'une véritable « aristocratie terrienne ». Pour sa part, en homme moderne il mise sur l'agriculture durable et prend en charge un « rapport vert » pour le ministère. La page pourrait donc peut-être se tourner pour lui si Susanne, sa petite amie neurasthénique, ne décidait un jour de se suicider dans le Danube. Pour lui, un regain de culpabilité qui le pousse à quitter l'Autriche et prendre la direction de la Bolivie où son père, comme lui en rupture de ban, était mort assassiné. le cycle de l'expiation semble ainsi se continuer. Reinhard Kaiser-Mühlecker restitue admirablement la manière de ténèbre intérieure dans laquelle évolue le dernier des Goldberger. Loin de l'Autriche, de son refoulé historique et des inquiétudes liées aux dérèglements du monde, celui-ci s'occupe là-bas dans un hôpital d'enfants en mal de soins et d'affection. Et peu à peu semble accéder à une certaine sérénité. le temps est alors venu pour lui de regagner son pays, pour la troisième et la quatrième partie du livre.
De retour dans la ferme de la famille, alors qu'à la suite d'une sale affaire son oncle Thomas purge une peine de prison, toujours la malédiction, Ferdinand se mue en agriculteur « au sens authentique du terme. » On le voit en effet maintenant multiplier les expériences dans l'étable-laboratoire qu'il s'est aménagée, mais aussi lire Virgile, noter ses réflexions sur la « plus noble » des activités, puis insérer dans un journal une petite annonce en vue de trouver une compagne. le quotidien d'un paysan écologiste dans une région perdue, saisi dans sa grandeur et sa détresse par Reinhard Kaiser-Mühlecker, qui donne ici à lire le grand roman d'un monde en mouvement malgré le vieil enracinement dont il porte encore les stigmates : les lilas plantés par le dernier des Goldberger ne donneront jamais de fleurs, sur leur écorce toute noire s'affichera la couleur du passé, celle de la maudissure, soixante-dix ans après.
C'est peu de dire que ce second volet du diptyque confirme à quel point le romancier saisit au plus près un certain état de l'Autriche, pays prospère entré depuis 1995 dans l'Union européenne mais portant encore la charge du passé. le jeune Ferdinand Goldberger, avec son mal-être, se présente comme l'incarnation de cette tension. Jusque dans les dernières pages, quand un espoir paraît se lever, il lui faut encore payer, ne cessant de valider l'imprécation biblique. On l'aura compris, cette oeuvre d'un écrivain né lui-même en Haute-Autriche dans une famille paysanne, s'inscrit décidément dans le tout meilleur de la littérature. Tout ensemble activité narrative et symbolique.

Lien : https://jclebrun.eu/blog/
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Ce qui refleurit d'une malédiction, les manières dont l'agriculture altèrent la perception des personnages qui sont comme prisonniers de leur vide, de leur tristesse, d'une obscure fatalité aussi, du silence surtout. Dans cette prose intemporelle, sensible à toutes les variations de couleurs, des saisons, du flottement dans lequel flotte Ferdinand Goldberger qui, malgré lui, retrouve la trace de ses ancêtres, le poids de culpabilité dont Reinhard Kaiser-Mühlecker parvient à cerner, comme d'ailleurs pour la politique agricole, les non-dits et autres dénis. Un grand roman tout d'évocations.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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critiques presse (1)
LeMonde
17 avril 2023
Lilas noir est l’étape ultime de cette vertigineuse odyssée des origines, que Reinhard Kaiser-Mühlecker avait amorcée dans ­Lilas rouge (Verdier, 2021) et dont il compose ici le chant final.
Lire la critique sur le site : LeMonde

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