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Mikaël Cabon (Traducteur)
EAN : 9791036001154
480 pages
L’Atalante (19/01/2023)
4.37/5   34 notes
Résumé :
«J'ai connu jadis une femme qui avait l'éclat du diamant et deux hommes que je n'oublierai jamais. J'ai joué un rôle dans une histoire en des temps féroces, sauvages, venteux. C'est à moi. Pour toujours. Je suis ici et ces souvenirs seront miens aussi longtemps qu'il me sera accordé de vivre.»
Séresse, Acorsi, Macera, Avègne, Remigio, Firente....
Dans un monde inspiré de l'Italie de la Renaissance et des condottieres, soit à la frontière des XIVe et X... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
L'annonce de la sortie d'un nouveau roman de Guy Gavriel Kay est sans doute l'un des événements littéraires les plus à même de me procurer une joie immense tant ses précédentes oeuvres se sont avérées marquantes. Considéré comme l'un des principaux maîtres de la fantasy historique actuelle, l'auteur se plaît dans chacun de ses romans à déployer une intrigue ancrée dans une période historique bien particulière et dont les principales caractéristiques sont décortiquées avec un soin minutieux. La Reconquista pour « Les lions d'Al-Rassan », les dynasties Song et Tang pour « Les chevaux célestes » et « Le fleuve céleste », le règne de l'empereur Justinien dans « La mosaïque sarantine »… : les choix de Guy Gavriel Kay se portent sur un large choix d'époques et de zones géographiques et reposent sur une documentation toujours extrêmement solide qui permet de s'immerger pleinement dans la période évoquée, quand bien même les noms utilisés ne sont pas les mêmes. C'est, en partie, pour cette raison que les ouvrages de l'auteur ne sont pas catalogués comme des romans historiques mais bien de la fantasy. A cela s'ajoute une petite touche de magie plus ou moins légère en fonction des romans mais qui suffisent pour le faire basculer dans le surnaturel. Dans le cas de « Comme un diamant dans ma mémoire », le surnaturel occupe justement une place extrêmement marginale, voire carrément anacdotique. Tout se passe en Batiare, une péninsule constituée d'une nuée de petites cités-états plus ou moins puissantes se livrant à des guerres permanentes qui empêchent toute stabilité dans la région depuis des décennies. Vous aurez bien évidemment reconnu l'Italie du XVe siècle, et, de manière générale, identifier le modèle dont s'est inspiré l'auteur pour la plupart de ses cités se révélera assez aisé (Séresse est évidemment Venise, Firente Florence, Rhodias Rome ou encore Bischio Sienne). Parmi les condottieres qui louent leur talent stratégique et leurs hommes aux différentes cités, il en est deux qui, à cette époque bien précise, bénéficient d'une réputation également excellente : Folco d'Acorsi et Teobaldo Monticola (inspirés de deux condottieres véritables que sont Federico Montefeltro et Sigismondo Malatesta). Deux chefs de guerre au profil et au talent identique, et qui se vouent une haine viscérale pour des raisons liées à leur histoire familiale respective. C'est l'affrontement larvé entre ces deux seigneurs de guerre qui va ici constituer le coeur de l'intrigue.

Ce n'est pas la première fois que Guy Gavriel choisit de situer son action en Italie. « Tigane », par exemple, mettait déjà en scène la péninsule, et ce à une époque seulement un peu plus avancée que celle du présent roman. de même, une partie de l'intrigue de « Enfants de la Terre et du Ciel » se situe à Venise à la même époque, aussi n'est-il guère surprenant que la fin de « Comme un diamant dans ma mémoire » prenne la forme d'une sorte de préquelle au roman consacré aux cités balkaniques de la fin du XVe. Toutes les oeuvres historiques de l'auteur se déroulent en effet dans le même univers et, s'il n'est jamais nécessaire d'avoir lu au préalable un roman avant un autre, les clins d'oeil et références à des intrigues ou des personnages évoqués dans d'autres volumes sont légion (c'est notamment le cas ici avec la « Mosaïque sarantine » que j'ai relu il y a peu et auquel l'auteur multiplie les allusions). Si l'Italie a d'ores et déjà servi de cadre à de précédentes intrigues, les aspects de la période sur lesquels Kay a voulu insister ici sont toutefois totalement différents de ceux évoqués dans « Tigane » ou « Enfants de la Terre et du Ciel ». Tout tourne ainsi autour des activités guerrières menées par les condottieres et des stratégies déployées par les plus puissantes cités pour perpétuellement étendre leur zone d'influence. le roman met ainsi en scène une région en état de guerre permanent qui pourrit le quotidien des habitants et entraîne une instabilité constante dans la plupart des cités-états. Celles-ci sont d'ailleurs régies selon des modes de gouvernement extrêmement variés dont l'auteur nous explique de façon fort ludique les spécificités. Ici, c'est la ville de Bischio (Sienne) qui se trouve au coeur du conflit à venir, cette dernière ayant attiré sur elle l'attention indésirable de la puissante Firente, bien décidée à annexer sa voisine pour profiter des taxes et impôts qu'elle lui versera une fois soumise. En filigrane de ce conflit et de la lutte que se livrent Folco (représentant Firente) et Teobaldo (engagé pour défendre Bischio), l'auteur nous livre le récit de l'un des événements les plus marquants de l'époque : la prise de Sarance (Constantinople) par les Asharites.

Outre ces considérations géopolitiques et stratégiques, Guy Gavriel Kay revient également sur trois grandes thématiques qui traversent la totalité de son oeuvre et participent à rendre ses romans aussi immersifs. La première est l'état de la médecine à l'époque étudiée, et l'ouvrage ici présent n'y coupe pas puisqu'on y trouve à nouveau un personnage de médecin (une, en l'occurrence) qui permet à l'auteur d'évoquer les pratiques chirurgicales ou médicinales alors communément admises ou en développement. le second grand sujet concerne la place des femmes dans chacune des civilisations et des périodes évoquées. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les romans de l'auteur possèdent tous des personnages féminins mémorables, de l'impératrice Alixana à la médecin Jehanne, en passant par la troubadour Lisseut. Ici, c'est une jeune femme indomptable désireuse de s'affranchir temporairement du carcan lié à son sexe qui occupe pendant un temps une partie de l'intrigue : Adria Ripoli de Macera. Certes, les héroïnes dépeintes par l'auteur ont une forte propension à revendiquer leur indépendance dans un environnement pourtant généralement hostile à leur genre, toutefois ce dernier prend toujours bien soin de limiter leurs options et leurs aspirations au contexte de l'époque. On découvre ainsi, par exemple, qu'intégrer un couvent prestigieux avec la quasi certitude de succéder à Mère supérieure peut être considéré comme une situation très enviable pour une jeune femme de bonne famille voulant jouir d'une certaine liberté. On en apprend également plus sur ces femmes partageant la vie des ducs ou condottieres ayant parvenu à se hisser à la tête de petites cités et qui n'ont de cesse de chercher à assurer la pérennité de leur condition.

Le troisième grand thème sur lequel l'auteur se focalise pour donner un aperçu le plus riche possible de la période qu'il dépeint est à chercher du côté de l'art et du sport. A ce sujet rien n'égalera sans doute le travail réalisé dans « La mosaïque sarantine », mémorable diptyque dans lequel Kay se livrait à des envolées bouleversantes et captivantes sur les techniques des mosaïstes du VIe siècle ou sur les courses de chars disputées par les auriges des deux grandes factions de Sarance. Rien de surprenant par conséquent à ce que l'auteur ait choisi ici de consacrer le deuxième tiers de l'ouvrage à une course de chevaux célébrée chaque années à Bischio, bien évidemment inspirée de la fameuse course du Palio de Sienne. On pourrait croire que consacrer plus d'une centaine de pages aux préparatifs d'une course et à son déroulement serait une monumentale erreur et provoquerait le désintérêt du lecteur, or c'est tout l'inverse. Que cela tienne à la qualité de la plume de l'auteur ou à son talent de conteur, en tout cas j'ai rarement lu de moment aussi intense et aussi épique que cette course opposant des chevaux et des cavaliers tirés au sort pour représenter les différents quartiers de la ville et dont l'auteur nous révèle le moindre secret (combines des quartiers, techniques des cavaliers, organisation des paris, lutte des autorités contre la triche, spécificités du terrain…). La peinture, évidemment, occupe aussi une place importante dans le roman (avec notamment l'ombre de Piero della Francesca qui plane sur certains passages), de même que la philosophie (avec l'évocation du personnage de Vicorin de Feltre et de son école de Mantoue) ou encore les savoir-faire liés à la fabrication de livres. Tous ces aspects contribuent évidemment à donner de l'épaisseur à l'univers et font en grande partie le charme du roman. Il est toutefois un dernier point qu'il convient d'évoquer, et qui explique là encore la qualité des romans de Guy Gavriel Kay, à savoir le soin apporté à ses personnages. Certes, toutes et tous ne sont pas aussi marquants que les précédents héros de l'auteur, mais beaucoup imprimeront néanmoins durablement leur marque dans l'esprit du lecteur, que ce soit par leur finesse d'esprit, leur intelligence retorse, leur détermination ou tout simplement leur humilité et leur bienveillance, à l'image de celui qui assume ici en partie le rôle de narrateur. Même les simples figurants se voient doter d'une histoire, d'une personnalité et d'une profondeur que je n'ai retrouvé nul par ailleurs et qui rendent chacun des acteurs du récit, petits ou grands, inoubliables.

Avec « Comme un diamant dans ma mémoire » Guy Gavriel Kay renoue avec la fantasy historique qu'il affectionne tant et nous livre le récit d'une guerre sans merci livrée par deux condottieres dans la péninsule italienne du XVe siècle. On y retrouve tous les ingrédients qui font le sel des romans de l'auteur, à commencer par des personnages profonds et attachants, ainsi qu'une documentation impressionnante permettant une immersion et une compréhension des enjeux de la période incomparables.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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Il y d'abord cette couverture comme le couvercle d'une boîte à bijoux. Cette couverture ou presque tout est résumé.
Le lieu, ce qui ressemble à l'Italie et plus précisément Sienne dont on devine ce qui semble être la Torre de Mangia du Palazzo Pubblico ;
Deux cavaliers somptueusement vêtus qui font immédiatement penser aux condottiere de cette époque ;
Ces vexillums/étendards ornés de symboles animaux qui font soit penser aux contrades siennoises, soit aux armes des familles de l'époque qui régnaient sur ces villes-états ;
La poussière soulevée sous les sabots des chevaux qui porte dans ses particules en suspension les images du Palio, tradition séculaire, de Sienne.

Et une fois le couvercle/couverture ouvert autant le dire tout de suite le contenant est à la hauteur du contenu.

J'en profite pour un aparté : parfois des traductions de titres sont à notre désavantage (j'y reviendrais dans une autre critique...) parfois c'est à notre avantage car ce livre s'appelait dans sa version originale "A Brightness Long Ago",

Dans la traduction qui nous en est donnée ce livre porte bien son titre, pour une fois, serais-je tenté de dire... "Comme un diamant dans ma mémoire" .
Un diamant c'est quoi une pierre brute qui à la base ne ressemble à "rien", mais qui après être passée entre les mains expertes du diamantaire finira par révéler ainsi toute sa beauté, sa transparence, sa brillance et au final lui donner don éclat ce qui fera sa valeur.

Mais revenons à cet ouvrage. Quelle découverte !!! , je connaissais pas cet auteur avant d'être interpellé par cette couverture.
Et Guy Gavriel Kay est, je peux le dire maintenant, un diamantaire de l'écriture
On s'en rend compte dès les premières lignes :
"Un homme plus tout jeune dans une salle spacieuse, la nuit. Des lanternes et des lampes, des torches fixées à leur monture, une belle table, de hautes fenêtres occultées de volets, des tableaux aux murs dans l'obscurité. Il n'est pas seul. Quoi qu'il en soit, il se prend à repenser à des temps où, jeune, il l'était encore. Cela nous arrive à tous. Un parfum nous emporte, une voix, un nom, un visage qui nous en rappelle un autre...
Des événements sont en cours à cet instant, mais un contretemps est intervenu, une interruption dans la succession des visiteurs, et le passé se rapproche toujours la nuit.
Il se remémore un épisode survenu à l'époque où il étudiait le monde et la place qu'il y occupait. Il ne saurait tout raconter et il ne s'y risquera pas. On ne perçoit jamais que des bribes de l'histoire, même de la nôtre. Elle nous échappe toujours en partie, que ce soit dans nos souvenirs ou nos écrits, dans ce que nous entendons ou lisons. On ne peut saisir qu'un fragment du passé. Parfois, c'est suffisant..."

Cela se passe de commentaire... On est happé, comme un premier reflet, une première facette, qui créera cette persistence rétinienne tant la lumière qui en jaillit est forte, et l'on sent bien que ce livre qu'on tient entre les mains un petit bijou.

Et les pages s'enchaînent très vite et l'on sent que l'on a affaire à un orfèvre de l'écriture, tant on ressent son travail dans une écriture fluide, mais la grande force est de rendre ce travail invisible.
Chaque facette de ce diamant est travaillé. Les personnages, les lieux, les actions, les questions qui sont posées. Car, peut-être est-ce dû à sa formation en philosophie, Guy Gavriel Kay soulève des questions relatives aux choix que nous faisons. Sont-ce les actions qui guident nos choix, nos choix ont-ils une influence sur nos actions.
"Le choix, une fois de plus. Concept fondamental dans son existence. Toutefois, elle savait la nuance subtile. On avait toujours trop tendance à tracer des lignes droites dans le monde, même quand rien ne le justifiait."

Tout cela pour en rendre un magnifique éclat, d'une brillance inégalée....

Pour être honnête, j'ai interrompu ma lecture pour en savoir plus sur cet auteur me disant : "Mais bon sang, comment ai-je pu passer à côté de cet auteur ?"
Pour faire rapide et contextualiser son oeuvre forte de : étudiant en philosophie, il assiste Tolkien sur le "Silmarillion", avant de se lancer dans un univers qu'il qualifie de "fantastique historique". Un mot qui pourrait fait penser à un inévitable cortège d'elfes, de nains et de sorciers, évoquer les luttes dantesques du Bien contre le Mal, d'une magie omniprésente… Or, Guy Gavriel Kay, ce n'est pas ça. Pour être précis : ce n'est plus ça.
Car il le dit lui même : "Notre origine est notre destin", remarque certainement due à son lien avec Tolkien...
Ce terme me laissant un tantinet dubitatif tant on se trouve dans un monde imaginaire mais avec un énorme travail historique.
Car dans ce roman on y retrouve Firente (Florence), Séresse (Venise), Rhodias (Rome), Sarance (Byzance/Istanbul), Bischio (Sienne)....

On dit de son oeuvre : "C'est une transposition. le cadre, les faits, les personnages sont inspirés de lieux, d'événements, d'individus réels, sans prétendre à la véracité historique. Ce qui laisse à Kay une extraordinaire marge de manoeuvre." mais aussi "les ouvrages de Kay ne font pas que troubler les classifications traditionnelles. Au bout du compte, ils remettent en question la distinction entre littérature de divertissement et grande littérature, entre profondeur et page turner."

Et c'est peut-être là que réside le tour de force de l'auteur faire voler les classifications, couper court à tout débat, seul compte le résultat, seule compte la réussite.
Je ressors de ce roman en ayant découvert une écriture à la fois élégante et gracieuse, une narration originale et lyrique, et des personnages par lesquels l'insignifiant prend une signification car mêmes les personnages les plus insignifiants ont leur place dans cette mécanique formidablement bien huilée.

"Elle se demande qui se trouve là aussi, où qu'elle soit. Elle se sent comme suspendue au-dessus d'elle-même. Elle voit ses parents qui pleurent, ainsi que d'autres gens. Mais ce n'est pas le moment de se lamenter, voudrait-elle leur dire. le palais est la proie d'une attaque !
        Elle aurait dû éprouver de la peur. Elle est morte, elle le sait. Mais se prépare-t-on à rencontrer son Seigneur dans la peur ? Elle n'a pas mené ainsi son existence. Elle n'était pas de ces femmes-là. Et elle n'affrontera pas ainsi cette nouvelle étape. Si elle peut l'éviter. Peut-être sent-elle tout de même, en toute franchise, une crainte discrète monter en elle.
         Mais elle n'a eu que si peu de temps... le temps n'est-il pas ce qui compte le plus ? Il lui en aurait fallu davantage. Ce regret, la plupart des défunts le partagent sans doute. On a toujours plus à apprendre, à découvrir. D'autres lieux, d'autres gens. L'amour à trouver parmi les hommes et les femmes. l'connaissance, le rire, des chevaux à monter.
          Rien de tout cela ne lui arrivera plus. Pour elle, c'est fini. À cet instant (car le temps manque toujours, même ici !), ses proches réunis autour de sa dépouille semblent s'estomper, se dissiper, s'évanouir. Lui échapper. Ce qui l'attend commence comme s'achève autre chose. La vie. La vie s'arrête. La sienne. Quel gâchis, se dit-elle.
          Elle se rend compte qu'elle est sortie du grand salon, qu'elle en a traversé le plafond, par extraordinaire ! Elle flotte au-dessus du palais, de la ville. Panorama splendide. Au-dessus du monde entier, elle baisse les yeux... et voit, si loin, le toit où elle se tenait quand. . .
          Les chevaux. Elle aimait tant leur courage, leur vigueur, leur élégance.
          La lumière. le Seigneur la dispense. À certains.
          Elle n'éprouve plus de douleur, au moins. Elle peut encore s'accrocher au courage, à son essence, au souvenir qu'elle en garde, pour aborder ce qui viendra ensuite.
          Et alors son destin vient à elle, pour elle, et elle se fond dans l'air, le clair de lune, pour se perdre et n'être plus."

Je pense que cela se passe de commentaires, je n'entrerai pas plus dans les intrigues car se serait gâcher à d'autres la découverte d'une pépite, au risque de ternir l'éclat de ce diamant...

Mention spéciale à ces chapitres haletants qui nous plonge dans ce que l'on reconnaît comme étant le Palio. On sent le souffle des chevaux proche de nous, les cris de la foule qui résonnent à nos oreilles, nos yeux qui piquent sous le sable projeté à chaque coup de sabot, on sent la peur des cavaliers, les mâchoires serrées devant les risques pris pour quelques secondes de course...

Cette lecture est ma première incursion dans l'écriture de Guy Gavriel Kay, et une choses sûre ce ne sera pas la dernière, tant cet ouvrage est comme un diamant dans ma mémoire...
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C'est toujours un plaisir immense que lire un roman de Guy Gavriel Kay ! Ici c'est un monde inspiré de l'Italie de la Renaissance, les noms ne sont pas les mêmes mais on reconnait facilement. A travers le récit d'un jeune homme, qui va se trouver, par hasard presque, au coeur des évènements, nous découvrons deux chefs mercenaires rivaux, Folco et Monticola qui seront le fil rouge du récit.
J'ai une fois de plus adoré découvrir les personnages de l'auteur, notamment Jalane et Adria, deux femmes qui veulent choisir leur destinée dans une région où les tensions politiques et rivalités sont parfois inquiétantes. J'ai trouvé le narrateur plus en retrait, après tout il n'est ni soldat ni homme politique et on sent que c'est un peu par chance ou malchance qu'il assiste à tout ça, son rôle n'est pas déterminant sauf au tout début peut-être. Beaucoup de questionnement sur le destin, un peu répétitif parfois. Des références à des évènements historiques, des ouvertures sur ses autres romans, le récit est adroitement mené et étudié. On ne peut que savourer ! J'ai encore quelques uns de ses romans dans ma PAL et j'en suis bien contente.
Challenge Mauvais genres 2023
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Après l'assassinat du comte de Mylasie et la mort de son mentor, Guidanio Cerra est obligé de fuir sous peine de connaître le même sort. Nul ne le sait mais il a aidé la meurtrière à s'échapper. Une rencontre qui va le marquer et en entraîner d'autres. En effet, il va croiser la route de deux hommes puissants, Folco Cino d'Arcosi et Teobaldo Monticola de Remigio qui vont impulser une nouvelle direction à sa vie. Ainsi, au milieu de ces hommes et de ces femmes de pouvoir à la tête des plus importantes Cités États de la Batiare, le jeune Danino va vite apprendre à louvoyer pour demeurer l'ultime témoin de ces temps troublés mais non moins fastes.

Dans Comme un diamant dans ma mémoire, Guy Gavriel Kay s'est inspiré de l'Italie du XVe siècle pour servir d'écrin à ce présent récit. Aussi, on marche ici aux côtés de condottieres, autrement dit des seigneurs à la tête de modestes territoires tirant de faibles revenus qui se mettaient au service des grands seigneurs en échange d'une aisance financière. En somme, ils étaient ni plus ni moins des mercenaires chargés d'assurer la sécurité des puissantes cités italiennes. Ils s'incarnent ici à travers les figures de Folco d'Acorsi et de Teobaldo Monticola de Remigio, d'autant que Folco a été engagé par la famille Sardi, de riches banquiers qui ne sont pas sans nous rappeler la famille Médicis. Tout comme l'artiste Matteo Mercati dont on croise le chemin ici ou là, son talent et son inconstance ressemblent à si méprendre au célèbre Léonard de Vinci.

Guy Gavriel Kai joue beaucoup sur les antagonismes de ces deux hommes pour nourrir son intrigue de manoeuvres et de duperies et ainsi corser vivement le ton. L'époque est impitoyable et l'auteur nous met de suite dans le bain en multipliant les assassinats et autres règlements de comptes pour réparer des affronts réels ou imaginés. le récit n'en est que plus vivant à travers cette menace mortelle qui plane en permanence sur les protagonistes et même épique au vu des péripéties incroyables par lesquelles certains passent.

Quant au merveilleux, il s'exprime toujours de manière diffuse sous la plume de Guy Gavriel Kay préférant le délicat à l'ostentatoire. Ainsi, entre ces lignes, le don de prescience de la guérisseuse fait office de magie lui servant à la fois pour la réalisation de son art que dans la prédiction de certains évènements notables.

Comme un diamant dans ma mémoire est clairement un récit foisonnant comme en témoigne d'ailleurs les nombreux points de vue qui se bousculent pour dépeindre ces hauts faits. Dans ce livre, Guy Gavriel Kay s'essaye à un exercice de style consistant à faire défiler des narrateurs ayant prise ou non sur le fil de l'histoire. C'est un procédé narratif intéressant autant du point de vue de l'appréciation des évènements et de leur implication que de la fluidité de la lecture qui est ici nettement dynamisée obligeant même les lecteurs à rester pleinement attentifs.

Avec Comme un diamant dans ma mémoire, Guy Gavriel Kay signe un nouveau récit captivant dont on renferme la porte à regret. Entre des personnages fascinants et des intrigues mordantes, il a l'art et la manière pour captiver son auditoire et le transporter dans d'inoubliables épopées...plus sur Fantasy à la Carte.


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🎭 le maître de la fantasy historique est de retour cette année avec un nouveau roman dont l'univers imaginaire est très fortement inspiré de l'Italie de la Renaissance (XIV/XVe siècle) avec ses guerres entre Cités États (Venise, Florence, Rome...), ses artistes de génie, ses condottieres, ses complots, ses grandes familles restées célèbres dans l'histoire bien que tout ait un nom complètement différent. Il s'agit du même univers que dans d'autres de ces romans (La mosaïque de Sarance) mais il peut se lire complètement indépendamment.

🧶 Dans ce monde (où très peu de magie intervient) , le fil rouge est constitué par le récit de Guidanio Cerra qui, après sa sortie de la prestigieuse école d'Avène et une décision prise sur un coup de tête (que je ne vous spoile pas), se retrouve mêlée aux rivalités des grandes cités de son époque.

🛣 On alterne entre son histoire et le point de vue d'autres personnages dont le destin est parfois brisé, parfois chanceux, parfois bouleversé pour une infime décision ou par les événements du monde.

🌞 C'est toute la beauté de ce roman, celui de s'interroger sur les choix qui changent une vie ou la brisent, parfois injustement. Les points de vue ont beau se multiplier, les personnages sonnent tous justes et exercent leur charme sur le lecteur. On ressent comment les puissants de l'époque ont le droit de vie et de mort sur les autres et comment les plus faibles doivent accepter que leur destin soit dans les mains des plus grands. Ainsi, bien que l'auteur ne se concentre que sur une période courte et quelques événements importants, l'immersion et l'attraction est totale.

❤ Après avoir adoré, Tigane (sorti en 2007), j'ai retrouvé donc avec beaucoup de plaisir cet auteur et une période qui me fascine, je dois l'avouer (je suis allée 2 fois à Florence).
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critiques presse (1)
Elbakin.net
17 mai 2023
En un mot, ce livre est un indispensable pour qui veut lire les deux autres livres du trio et reste un excellent roman. Il ne pêche peut-être que par sa proximité avec les meilleurs passages des précédents livres de l’auteur, mais peut-on vraiment le reprocher…
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
On se réjouissait rarement d'être convoqué devant le Conseil des Douze.

Quand il les faisait venir dans ce salon confortable avec vue sur la lagune, ses invités risquaient moins de se laisser gagner par la terreur. Certains à tort, néanmoins, faute de lire dans ses pensées.

Ricci avait étudié les philosophes et les historiens. Il admirait et soutenait financièrement l'art et l'architecture. (Une partie de ses acquisitions n'avait de valeur que pour l'apparat, mais une partie seulement.) Il avait lu les poètes et même composé des vers pour des femmes et le Seigneur (quand il était jeune, beaucoup plus jeune). Mais l'une des leçons qu'il avait retenues au fil de ses années sous le soleil béni de Jad voulait qu'il fût le plus souvent préférable de frapper avant d'être attaqué.
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D'APRÈS MON EXPÉRIENCE, ce ne sont pas toujours nos intentions ni nos décisions qui façonnent et encadrent notre existence. L'inverse se produit même tout aussi souvent. Ce sont les impulsions soudaines qui génèrent notre parcours, ou alors le hasard, l'imprévisible. Or ce dont on se souvient de son passé est des plus aléatoire. [...]

Plus largement, nous allons souvent là où nous entraînent les vents de notre époque. Chacun peut mettre le cap où il le veut... jusqu'à ce qu'une tempête emporte son navire, sans parler d'un abordage de pirates au lever du soleil. Les eaux calmes et les vents cléments offrent une illusion de maîtrise, de contrôle. Mais ce n'est jamais qu'une illusion. Les dévots soutiennent qu'il faut avoir confiance en Jad. J'en suis venu à croire que la vie est plus simple pour eux. Les revers de fortune sont plus faciles à accepter quand on a la foi.

J'en ai trop vu désormais pour éprouver encore une fervente piété, bien que je redoute encore d'être jugé pour mes errements sur la voie de l'hérésie, surtout quand je cherche le sommeil, la nuit, ce qui m'arrive souvent. C'est un monde scabreux que celui où il faut cheminer quand on n'a aucune certitude sur ce qui viendra ensuite, ni le réconfort de savoir que sa foi aura raison des épreuves rencontrées dans la vie.

De tout cela je ne parle jamais à personne, naturellement.
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SÉRESSE SUR SA LAGUNE était souvent humide et pluvieuse au printemps, noyée sous la brume le matin ou balayée par un vent de mer qui s'engouffrait avec force le long des canaux creusés dans la direction du large. Ce n'était pas sain, se lamentait le duc par intérim à la fenêtre de son palais. Les médecins gagnaient bien leur vie dans cette ville, sans forcément s'y montrer utiles.
Elle n'en demeurait pas moins la cité marchande la plus importante du monde jaddite. La plus riche, la plus rusée, la plus exubérante. Nul ne voulait heurter Séresse... ni y être identifié comme une menace. Par ailleurs, quand le brouillard se dissipait sous le soleil qui s'élevait dans le ciel au-delà de la lagune, cette ville était d'une beauté prodigieuse.
Il l'adorait. Il la connaissait bien. Ses dangers et ses trésors, ses dorures et ses œuvres d'art volées, ses rats de ponton et ses miasmes, son carnaval, ses assassinats au bord d'un canal au milieu de la nuit.
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COMME LE RACONTENT LES MARINS, la pluie se languit des nuages alors même qu'elle tombe vers la mer à travers la lumière ou l'obscurité. Je me languis d'elle de la même manière alors que je tombe vers la mort à travers le temps, le chaos de notre époque. Il m'arrive encore de rêver d'elle la nuit, mais rien ne confère de poids ni de valeur à ces songes car il s'agit seulement de moi et de mes aspirations. De mes désirs.

Je me souviens très bien de cette nuit d'automne. Le contraire serait étonnant, étant donné que ce sont ces heures qui me lancèrent sur un autre chemin que celui où je me croyais engagé. Qui pesèrent sur l'arc de mes jours, comme aurait pu le formuler Guarino. J'aurais tout aussi bien pu mourir. L'arc se serait alors brisé. Des images de couteaux m'assaillirent longtemps par la suite. Celui dont j'étais armé et celui qui avait frappé avant le mien.

(INCIPIT)
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Les philosophes ont abondamment écrit sur le temps, sur son écoulement parfois irrégulier, sur sa capacité à accélérer oui ralentir, voire à rester suspendu. J'étais parfaitement convaincu, dans les bras d'Adria Ripoli sur un lit d'une auberge près de Bischio, que ces idées étaient très judicieuses, dignes de réflexion et dignes d'être soigneusement comparées les unes aux autres.
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