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EAN : 9782491241933
250 pages
Editions du Faubourg (20/01/2022)
4/5   8 notes
Résumé :
Savez-vous que les contrôles aéroportuaires n'ont jamais empêché les attentats, qu'une grande partie des logiciels d'intelligence artificiels dans le recrutement ou la police prédictive par exemple, n'ont jamais fait la preuve de leur efficacité, que les agences d'interim n'aident pas à fluidifier le marché du travail mais permettent de le contourner, que les gestionnaires de portefeuille n'aident pas à gagner plus d'argent ?
Les bullshit jobs envahissent le ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Je remercie Babelio et les Éditions du Faubourg pour m'avoir adressé cet ouvrage dans le cadre d'une Masse Critique.

J'apprécie les documents sociologiques en général, et ceux qui mettent en exergue les absurdités en particulier. Ce livre n'y échappe pas. Et la modestie de l'auteur en préambule aide aussi à envisager l'écrit avec un a priori positif.

A priori qui se confirme au fil du temps.
Nicolas Kayser-Bril débute son propos en expliquant ce qui l'a amené à s'intéresser au sujet des bullshit jobs : il en a lui-même occupé ! Ayant considéré que cette situation ne lui convenait pas, il a préféré démissionner et tenter de définir pourquoi des sociétés, institutions et entreprises peuvent avoir recours à de tels emplois.

L'auteur commence dans une première partie à définir ce qui différencie un bullshit job d'un travail valorisant et utile. Il met ainsi en lien les objectifs poursuivis par l'entreprise et les ressources affectées pour atteindre ces objectifs. Plus les objectifs sont flous et plus les ressources sont importantes, plus le bullshit job est de mise : conseil en tous genres, par exemple, dénomination pompeuse du poste sans consistance aucune. Si les objectifs initiaux sont clairs mais les ressources insuffisantes, l'émergence du bullshit permet de ne plus assumer la mission : l'auteur évoque ainsi, à travers de nombreux exemples, les travers et dérives liés au reporting incessant qui limite désormais le travail de terrain dit « utile ».

Dans la deuxième partie, c'est le système économique actuel lui-même qui est décrié, dans la mesure où il permet les bullshit jobs.

Selon l'auteur, la mise en avant de la valeur « travail » conduit à créer ou conserver des emplois inutiles alors même que la durée du temps de travail hebdomadaire aurait dû baisser de façon constante au regard des progrès techniques. C'est ici l'émergence de nouveaux métiers, totalement inutiles - et on y retrouve les fameux conseils - qui contribue à « normaliser » le système. Mais si on les supprimait, cela n'engendrerait-il pas un supplément de chômage ? L'auteur évoque ainsi à plusieurs reprises les interactions entre les jobs inutiles et la bienséance apparente des structures, qu'elles soient publiques ou privées, en vue de garantir une paix sociale de bon aloi. C'est aussi « l'inutilité ostentatoire » qui entraîne des gens intelligents à consulter des cabinets, employer des subalternes dans le seul but de montrer la place qu'ils occupent sur un marché ou dans une entreprise. Il aborde également la sociologie du marché du travail, les classes sociales et emplois réservés à ceux détenteurs du genre ou de l'origine voulus pour occuper des jobs rémunérateurs, quoique inutiles...

Dans la troisième partie, l'auteur expose les conséquences pour les entreprises et institutions du lissage des politiques publiques. Selon lui, c'est ce qui explique la multiplication des emplois inutiles, car dépourvus de missions précises dans un cadre de restrictions budgétaires. L'évaluation, la recherche de performance produiraient un effet totalement inverse à celui attendu : des salariés qui diluent leur travail dans le temps imparti pour démontrer leur loyauté, plutôt que de fournir un travail effectif de qualité.


J'ai trouvé ce livre passionnant à plus d'un titre. Il traite du sujet, de son contexte et de ses conséquences en l'étayant de nombreux exemples. La liste des sources est conséquente, et permet d'effectuer le cas échéant des recherches complémentaires (j'aime bien aussi vérifier par moi-même les sources...). Même si les séquences liées aux systèmes économiques et management d'entreprise pourraient sembler par moment un peu ardues au néophyte, l'ensemble est assez accessible. Et j'ai franchement ri à certaines réflexions ou situations mises en valeur par l'auteur.

J'ai donc réfléchi, appris, réfléchi encore et amusée tour à tour. Je n'en demande pas plus, et c'est un ouvrage intéressant pour comprendre son époque et les implications de son job !
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Excellent! Un livre d'une clarté remarquable, bien écrit et parfaitement structuré. Je n'avais pas connaissance du livre de David Graeber auquel l'auteur fait souvent référence, ni de la théorie des bullshit jobs en découlant, alors que force avait été de constater autour de moi - et avec la même irritation que l'auteur - pléthore de ces activités inutiles sans en comprendre l'origine. Avec ce livre, les pendules sont remises à l'heure, non seulement sur la définition des bullshit jobs, mais aussi sur leur origine socio-économique et sur le pourquoi de leur pérennité. La seconde partie, liée aux différentes théories économiques sous-jacentes au thème, peut paraître un peu longue et déconnectée, mais prend finalement tout son sens dans la troisième partie et dans la conclusion, magistrale. L'auteur aura su également resituer le sujet dans le contexte épidémique actuel ce qui est assez remarquable compte tenu qu'il est souvent difficile d'analyser des faits immédiats par manque de recul. On pourra juste critiquer, parfois, le manque (ou le peu) de références sur certains points qui apparaissent donc un peu subjectifs. Mais cela ne réduit en rien la pertinence de la vision de l'auteur sur le thème, et associée à celle d'autres ouvrages sur le sujet, nous laisse entrevoir à la fois les failles du système et, qui sait, d'autres modes de fonctionnement sociétal.

Je remercie Babelio et les Éditions Faubourg pour ce livre offert lors d'un Masse Critique.
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Le livre Bullshit jobs de David Graeber a popularisé le concept du même nom il y a une dizaine d'année sans pour autant en dessiner un contour tout à fait satisfaisant. Cette première définition importante mais incomplète m'avait laissé sur ma faim, j'ai donc été très heureux de recevoir Imposture à temps complet grâce à l'évènement Masse critique, je remercie donc Babelio ainsi que les éditions du Faubourg de me l'avoir fait parvenir.

Nicolas Kayser-Bril s'attaque à cet épineux problème avec la légitimité de celui qui a ressenti dans sa chaire ce qu'est un bullshit job, un travail qui ne sert à rien qui ne créé aucune valeur. Son livre est une bonne contribution et complète la typologie créée par Graeber et j'y ai pioché d'excellentes idées. Cela dit j'ai quelques réserves à exprimer à son propos.

D'abord le livre est très coloré politiquement. Les opinions exprimées sont franches mais pour moi c'est une oeillère qui empêche d'analyser à fond le phénomène qu'on tente d'observer. Pour Kayser-Bril et d'une manière générale la littérature de gauche l'explication du bullshit c'est le système capitaliste, c'est une lecture morale du problème. En management le bullshit est plutôt nommé comme inéfficience qui est perçue comme un obstacle systématique des organisations, cette lecture là est très pragmatique mais 100% autocentrée et incapable de comprendre son propre inconscient. Réconcilier les deux approches me semble être l'optimum pour comprendre pourquoi les emplois inutiles existent.
Ensuite je n'ai pas toujours été très convaincu par la démonstration de l'auteur qui articule des exemples anecdotiques pour faire des explications macro, ca montre bien la difficulté à illustrer le concept et la part de subjectif qu'il contient.

C'est un livre utile mais qui ne clôt pas le sujet qui a un bel avenir devant lui.
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Nicolas Kayser-Brill reprend le concept de bullshit jobs, popularisé par l'anthropologue David Graeber, pour creuser un peu plus la réflexion visant à comprendre comment de tels jobs peuvent exister alors que, en toute logique, le marché si parfait devrait s'auto-réguler et supprimer toutes les tâches et tous les coûts inutiles. N'ayant plus en tête tous les développements, parfois sinueux, de Graeber, j'ai souvent eu une impression de déjà-vu dans certains passages, même dans ceux où Graeber n'était pas directement cité.
Ce qui me semble aller plus loin, ce sont les considérations Nicolas Kayser-Brill par rapport à la reproduction des inégalités sociales et raciales. Certains bullshit jobs valorisés socialement ne seraient que des moyens pour les hautes classes sociales d'afficher un travail et justifier leur haute position sociale. Avoir un travail est actuellement indispensable, puisque la valeur travail est au coeur de notre société actuelle (contrairement aux membres de la noblesse de l'Ancien Régime, pour lesquels devoir avoir un travail aurait été dégradant). Ces bullshit jobs ne seraient en revanche pas accessibles au commun des mortels.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
La liste complète serait longue et prête parfois à sourire, mais les conséquences du management par objectifs peuvent être tragiques. Dans le secteur de la construction, en France, les équipes sont souvent récompensées quand elles n'ont pas d'accident. Résultat, les ouvriers sont incités à cacher leurs blessures et font pression sur leurs collègues pour qu'ils en fassent autant. En 2004, Nicolas Sarkozy créa une prime au mérite pour les policier.es. L'un des critères était le nombre d'affaires élucidées. Les arrestations d'étranger.es en situation irrégulière ou de consommateurs et consommatrices de stupéfiants augmentèrent en flèche, puisque, dans ce genre d'affaires, le coupable est immédiatement identifié. A contrario, le système décourage les commissariats d'enregistrer des plaintes plus difficilement élucidables, comme les viols.
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[...] Leur étude montre que les garçons nés de parents riches avaient une chance sur deux d'être eux-mêmes riches à trente ans s'ils étaient blanc, mais seulement une chance sur cinq s'ils étaient noirs. L'écart persiste même en tenant compte du niveau d'éducation des parents, de leur situation familiale, etc. Seul le racisme institutionnel semble être responsable de cette différence. Par exemple, les enfants noirs ayant grandi parmi les 1% les plus riches des Etats-Unis ont autant de chance de se faire arrêter et emprisonner que des blancs issus de familles parmi les 30% les plus pauvres.
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Les bullshit jobs, ce sont des emplois ou des tâches profondément inutiles, mais dont les exécutant•es prétendent l’inverse, que ce soit par contrainte ou par crédulité.
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Les bullshit jobs sont à l’économie classique et néoclassique ce que l’ornithorynque était à la biologie prédarwinienne. Ils ne rentrent pas dans les cases autorisées.
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La promotion au mérite remet sans cesse en cause la hiérarchie d'une organisation. Au contraire, les bullshit jobs, puisqu'ils empêchent toute action, sont profondément conservateurs et permettent de cimenter les relations de pouvoir.
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Video de Nicolas Kayser-Bril (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nicolas Kayser-Bril
Rapide présentation du livre "Voracisme – Trois siècles de suprématie blanche dans l'assiette" par son auteur, Nicolas Kayser-Bril. Dans "Voracisme", il est question du lien inextricable, consubstantiel, entre histoire de la suprématie blanche et histoire de l'alimentation. Une enquête journalistique, historique et sociologique, qui court des champs de canne à sucre au XVIIe siècle jusqu'aux rayons des supermarchés en passant par les salles et cuisines de nos restaurants.
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