Bien commençons tout de suite avec les approximations :
Trilogie berlinoise !! :les deux premiers tomes (L'été de cristal et
la pâle figure) ont Berlin comme cadre ( respectivement en 1936 et 1938)
Le troisième tome (
un requiem allemand) ayant lieu principalement à Vienne en 1947.
Deux choses font que les histoires sont intéressantes :
Bernie Gunther, flic désabusé, ancien combattant de la première guerre mondiale, nostalgique de la république de WEIMAR, qui permet à peu près toute sorte de dépravation et de légèreté, il est aussi cynique, porté sur la boisson et les femmes.
Septique face à l'évolution de l'Allemagne, apolitique ( surtout ne s'est pas ostensiblement affiché comme communiste et surtout se garde bien malgré tout de manifester trop fort son ressentiment anti nazi).
Enquêteur talentueux qui se permet l'humour noir face à certains dignitaires nazis ; tous ? Non, passé maître dans l'art de survivre, il n'osera pas avec tous son cynisme .
L'autre point fort, c'est l'aspect historique. Que ce soit avant ou après la guerre, l'époque est remarquablement bien décrite et les enquêtes policières y sont parfaitement intégrées ( car elles sont assez banales).
Gunther détective dans l'Eté de Cristal pour un riche homme d'affaires afin d'éluder le meurtre de sa fille et de son gendre, ce dernier gravitant dans les hautes sphères du pouvoir nazi.
1936, Bernie Gunther a quitté la police ( 3 ans après l'arrivée « au pouvoir d'Hitler », son opposition au système lui aura pris quelque temps à réagir) pour s'installer à son compte comme détective privé.
Spécialisé dans la recherche de personnes disparues, il s'en sort plutôt bien, les juifs ayant tendance à beaucoup disparaître dans l'Allemagne nazie ( joli trait d'humour si l'on peut dire surtout un grand cynisme).
Pourtant, la fortune pourrait bien venir d'un sympathisant nazi ( euphémisme) en la personne de Hermann Six, richissime homme d'affaires prêt à beaucoup pour retrouver les assassins de sa fille et de son gendre. A charge pour le détective de retrouver les voleurs. Louvoyant entre voyous, SS et Gestapo, Bernie se lance à la recherche des tueurs et se confronter au petit monde des magouilleurs et fraudeurs en toute sorte mais estampillé lié au pouvoir ; ce qui pose quelque difficultés.
Dans
la pâle figure (le 2ème opus) Bernie doit résoudre un mystère après le meurtre de plusieurs adolescentes allemandes très typées ariennes.
Berlin, 1938. Associé à un ancien collègue, Bernie se voit fortement suggéré de mettre son talent au service de la patrie et donc de réintégrer les rangs de la police. Nommé commissaire par, Reinhard Heydrich en personne ( qu'il était difficile de contrarier pour qui voulait rester en bonne santé), il doit retrouver un tueur sanguinaire qui enlève et assassine de jeunes adolescentes aryennes dans les rues de Berlin.
Dans le requiem allemand ( 3ème acte),notre enquêteur, appelé par une ancienne connaissance accusée du meurtre d'un américain.
Vienne, 1947. Revenu de la guerre et des camps de prisonniers russes, Gunther, désormais marié, tente de survivre dans un Berlin ruiné et divisé.
Quand un officier russe lui demande de se rendre à Vienne pour aider un ancien policier, Emil Becker, accusé d'avoir tué un officier américain.
Toute la force de Gunther est là : ce type a survécu au régime nazi en rendant quelques menus services, en côtoyant les plus grands dignitaires, en participant à quelques exécutions d'opposants au régime nazi ; mais il est toujours là et en plus les communistes lui demande son aide.
Respect, ce type est le prototype de l'opportuniste qui navigue au grès du vent.
Au final, mélange astucieux d'enquêtes criminelles et d'histoire Allemande.
Cette trilogie couvre une petite période de l'avant-guerre vue par le prisme berlinois, dénonçant toute la barbarie du régime nazi ( mais occultant toute la période de la fin de la première guerre mondiale jusqu'en 1933) et ce, jusqu'à la fin du Reich.
Toujours le prisme berlinois de l'après la guerre, un pays entier est entre les mains des alliés, le peuple meurt de faim ( mais depuis bien des années, il n'est pas la préoccupation du régime nazi ), et il s'agit encore de naviguer entre les différents régimes qui considèrent le peuple allemand coupable et responsable du désastre en oubliant bien soigneusement de mettre en avant la somme des lâchetés des démocraties de l'époque qui ont trahi quelques pays européens, qui n'ont pas osé contrarier Hitler et laissé faire espérant on ne sait quel miracle ; sans oublier Staline, qui par quelque petit accord secret s'est préservé un moment, en profitant en toute complicité avec l'Allemagne nazie pour récupérer quelques territoires en début de conflit ou en oubliant d'activer ses troupes pendant que quelques révoltés des ghettos se faisant massacrer espérant naïvement un secours du grand frère russe.
Sans omettre avec quel empressement démocraties de l'Ouest et dictature de l'Est se chamailleront pour « récupérer » les savants nazis, et tous l
es autres allemands ayant des compétences militaires, policières, politiques ; une conscience bien vite oubliée au nom de la « real politik ».
La seconde guerre mondiale, n'est donc pas une responsabilité allemande unique, mais une responsabilité mondiale.
Mais pour avoir conscience de tout cela, il ne suffit pas de lire uniquement ce genre de roman ( qui n'est qu'un raccourci orienté) mais bien de vrais livres historiques.