Jean-Claude part à la découverte de son père Jean-Marie, officier médaillé de la 2ème guerre mondiale puis d'Indochine, et qui à 38 ans mourut en Algérie en octobre 1959, alors qu'il n'avait que 9 ans.
Quel a été son rôle dans cette sale guerre qui n'a jamais dit son nom ? Quelles sont les circonstances de sa mort ?
Il lui a d'abord fallu grandir malgré cette absence, et ces questions sont restées latentes, immergées pendant des décennies. Pourtant, comme un fait exprès,
Jean-Claude a plusieurs fois croisé la route de l'Algérie et des Algériens, et son petit-fils est à moitié kabyle, la région où son père a été tué...
Quand il est prêt à répondre aux questions qui ont fini par émerger, l'Algérie est dans la guerre civile qui l'a déchirée durant une décennie tragique au tournant du millénaire. Il lui faut encore patienter, jusqu'au moment où le voyage redevient possible, en 2012.
Jean-Claude nous guide donc dans sa quête filiale, découvrant dans le souvenir des autres cet homme qu'il n'a connu qu'avec des yeux d'enfant et qui ressemble étonnamment à l'homme qu'il est lui-même devenu : "Particulièrement consciencieux (...). S'intéresse à tous les problèmes posés par les populations, apporte à leur résolution un sens humain développé. Aimant la troupe et aimé d'elle" disaient de lui ses supérieurs (p. 135)
C'est donc à un voyage en Algérie qu'il nous convie, en même temps qu'un voyage dans son histoire personnelle et familiale, tout en nous donnant le contexte de cette guerre sans nom.
Sa posture est humble, humaniste, pacifique, jamais moralisatrice, il accueille tout ce qui vient à lui et cherche à lui donner du sens.
Ce qui me frappe, c'est de voir à quel point l'Algérie et la France se font miroir, des deux rives de la Méditerranée. D'où leurs relations si tumultueuses. Leurs deux histoires sont intimement mêlées, au grand dam des prétendus "puristes" de chaque côté. Des histoires nouées de pouvoir et de liberté, d'amour et de sang.
Voilà pourquoi ce récit d'un jeune orphelin n'est pas juste un tragique "fait divers" issu d'une convulsion du si violent 20ème siècle : il peut parler à tous les Français et à tous les Algériens d'aujourd'hui.