C'est le premier jet d'un ecrivain que j'admire. Depuis un certain temps j'essaie de pousser mes amis a le lire. Mais c'est un premier jet qui ne permet pas encore d'augurer la grandeur future de
Danilo Kis. Je ne conseillerais donc pas de le decouvrir, de commencer a le lire, par ce livre.
C'est sous-titre “poeme satirique". Comme tel j'ai cru y voir une parodie de romans romantiques du 19e siecle. Un jeune homme qui se fait appeler Orfee vit dans une mansarde, entoure de livres classiques, de cafards classiques et de souris classees. Il la partage un certain temps avec un ami, Igor, un eternel etudiant, astronome a ses heures, cynique et les pieds sur terre, son alter ego et son contraire, qu'il nomme Bouc-le-sage, Capricorne ou Somnambule au fil des jours et des pages. Il rencontre une jeune fille qu'il baptisera evidemment Eurydice. Il essaie d'ecrire un livre satirique sur sa vie boheme romantique idealisee, sa mansarde philosophique, ses bars sordides, ses vapeurs d'alcool et de tabac, ses prostituees vieillissantes, et s'engage dans des voyages et des aventures aussi exotiques qu'imaginaires. En fin de compte, en fin de livre, il devra prendre une decision, decider pour une fois quelque chose dans sa vie de boheme, choisir entre la vie et la boheme.
Le livre projete a deja son titre:
La mansarde, et il est en train de s'ecrire sous les yeux du lecteur, ce qui permet a Kis d'introduire toutes sortes d'elements heteroclites, a la
Alfred Doblin, listes de maximes latines, menus hallucines de restaurants, longs dialogues en francais, et j'en passe. Mais tout cela, dans un livre si court, n'a fait que me donner une impression d'exercice d'ecriture. Pour moi, dans ce livre, Kis se cherche et ne s'est pas encore trouve. Il a deja l'ironie, une arme dont il continuera de se servir, mais il n'a pas encore trouve sa voie. Ni sa voix, la profondeur de la voix de ses grandes oeuvres, la voix d'un des plus grands ecrivains de l'ancienne Yougoslavie, une des grandes voix elegiaques du 20e siecle.
Ce livre est bon pour les inconditionnels comme moi. A tous les autres je conseillerais “
Jardin, Cendre” ou “Encyclopedie des morts".