La plupart des tueurs croient les flics bêtes. Et c’est pour cela qu’ils se font avoir. Il n’y a pas plus futé qu’un flic. Même le flic le plus stupide reste encore plus intelligents que la moyenne des gens. C’est leur principale arme, qu’on les prenne pour des imbéciles. Les plus grands flics sont ceux qui, toutes les secondes que Dieu fait, n’oublient pas que nous ne sommes que des animaux. Dans tous les sens du terme. Des animaux. Ils ne s’encombrent pas de balivernes, les grands flics. Des animaux. Pas des animaux perclus de manques, d’inachèvements, des animaux symboliques, non. Des animaux. Des rampants, des volants, des marchants, des nageants. Cette certitude est la vigie du grand flic. Malgré les moyens techniques et scientifiques à sa disposition, le grand flic travaille tous sens déployés, naseaux au vent, à l’affût. Le chasseur de l’aube des temps croyait plus en ses sens qu’à ses flèches. L’instinct, le flair, voilà en quoi a avant tout foi un grand flic. Mamba noir, requin dormeur, mygale, c’est à la chaleur du feu qui consume l’âme du tueur que le grand flic lui bondit dessus. Le flair, l’instinct. D’une certaine manière, le grand flic est un tueur à sang tranquille, un prédateur adossé à ce qui est censé être le bien. Pourtant, face aux flics du monde entier je suis là. À attendre avec eux aux mêmes feux rouges. À fréquenter les mêmes bistrots. À pleurer aux mêmes enterrements. À m’enjailler aux mêmes naissances. À suivre les mêmes cours de tap dance. Là, parmi eux sur les plages, parmi eux dans les bois, parmi eux dans les ascenseurs, parmi eux dans les stades, parmi eux dans les théâtres, parmi eux au cœur du grand confinement et son haleine de fin des temps, et ses journées aux tronches de dimanche, et ses rues, et ses boulevards et avenues livrés au pavanement des rats et des corbeaux. Partout je suis là avec eux dans la nudité de l’enfant qui vient de naître. Cependant, malgré les indices complaisamment semés, malgré les empreintes digitales, le profil génétique, le Bluestar, les mises sur écoute, les filatures, malgré leur flair, leur instinct, malgré les flammes de l’enfer qui embrasent mon âme, aucun flic n’a encore réussi à mettre un visage sur le tueur de fille de. Malgré leurs caméras de surveillance. Car mille milliards de caméras jamais ne remplaceront l’œil de Dieu. Et le ciel est à présent vide. (Close up, p. 27)
Quand je pense,
toute ma vie durant,
boulimie de joies,
boulimie de théâtre,
boulimie de cinéma,
boulimie d’amours,
de sexes en tout genre
pour oublier.
Oublier qu’il me faudra coûte que coûte,
me présenter face à l’ultime vertige.
Sans pouvoir parler à personne,
sans pouvoir prêter l’oreille à personne.
Seule.
Cette solitude-là. Éternelle.
Une peur panique j’en ai toujours eu.
Mais finalement voilà.
C’est tout.
Ce n’est que ça, j’allais dire. (Arletty..., p. 48)
Les Matins - La francophonie dans tous ses états -A l'occasion du sommet de francophonie de Montreux, La francophonie dans tous ses étatsKoffi Kwahulé, Auteur, essayiste, comédien et metteur en scène ivoirien, auteur de Monsieur Ki (roman, Éditions Gallimard, coll. "Continents noirs", 2010)Abdourahman Waberi, Ecrivain djiboutien d'expression française, auteur Aux Etats-Unis d'Afrique (Jean-Claude Lattès, 2006)Nicolas du four, Journaliste au quotidien suisse le Temps par téléphoneClément du haime, Administrateur de l'OIF (Organisation Internationale de la Francophonie) par téléphone