Guadeloupe. Ce nom évoque les vacances, le soleil, les plages ensoleillées... Cette image de carte postale cache malheureusement une réalité autrement moins riante : alors que l'île a été autrefois surnommée "l'île aux Belles-Eaux", la situation a, depuis, évolué et le quotidien des habitants est devenu un enfer faute d'approvisionnement en eau.
J'ai eu la chance de pouvoir aller plusieurs fois en Guadeloupe, ayant des amis natifs de l'île. Quelle ne fut pas ma surprise en découvrant dans la salle de bain des bassines remplies d'eau... Suite à quoi mes amis me racontèrent leur quotidien sans eau. Comment imaginer au 20e siècle, dans un département français, que l'eau ne parvient pas jusqu'au robinet, alors que les habitants paient leurs factures ?!
M'intéressant au sujet, j'ai donc reçu ce livre dans le cadre de Masse critique et j'en remercie les éditions Massot.
Thierry Gadault, journaliste indépendant, et
Marc Laimé, consultant spécialiste de l'eau, ont mené une enquête pour comprendre la situation dans laquelle se trouve l'île aujourd'hui. le constat est édifiant : cette île, autrefois réputée pour la qualité de ses eaux - qu'elles soient de baignade ou coulant au flanc du volcan, fait aujourd'hui face à un effondrement de l'approvisionnement en eau potable pour ses habitants. La faute à des infrastructures défaillantes parce que trop vieilles et de nombreuses fuites sur tout le réseau. Mais comment la situation a-t-elle pu en arriver là ?
L'enquête menée par les auteurs met en avant un scénario digne d'une république bananière : prises d'intérêt illégales, corruption, créances non honorées, personnel incompétent, entreprises privées qui promettent des travaux puis se retirent les poches pleines... La liste est longue.
N'oublions pas l'Etat français, au courant de la situation depuis des décennies mais qui ne semble pas prendre la mesure des conséquences. le livre permet de mieux comprendre la méfiance des îliens vis-à-vis des vaccins contre le COVID. le lien ? Des années de scandales sanitaires dus au fameux chlordécone, ce produit phytosanitaire pour les bananeraies qui empoisonna les terres agricoles, les nappes phréatiques et les hommes.
Mais ce n'est pas tout : les tuyaux d'acheminement de l'eau en PEHD, un plastique inventé dans les années 1950, ne sont pas adaptés aux conditions guadeloupéennes, d'où de nombreuses fuites sur tout le réseau.
L'enquête est palpitante, édifiante et éclaire la situation dans laquelle se trouve aujourd'hui la Guadeloupe.
Toutefois, j'ai trouvé le livre pénible à lire : j'ai eu l'impression que chaque auteur avait fait sa partie dans son coin et que tout avait été réuni, sans ordre précis. Les redites sont (beaucoup trop) nombreuses. Pourquoi, par exemple, revenir 4 fois sur la création du SIAEAG, le syndicat de l'eau guadeloupéen ?
Je ne suis pas allée jusqu'au bout, lassée de relire toujours les mêmes propos. C'est dommage... Traitée de façon chronologique, l'enquête aurait gagné en clarté, sans perdre de son piquant, et aurait tenu le lecteur en haleine.
Un livre à découvrir toutefois !