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3,41

sur 174 notes
Percutant, viril, un ciel zébré d'éclairs, « Querelle » de Kévin Lambert est un roman sombre, emblématique, au souffle rare. En plongée directe dans une histoire d'une émouvante contemporanéité où tout vole en éclats. La trame resserre ses griffes acérées sur les peaux tendres de ces jeunes garçons (tous). Ces êtres égarés, violentés, ivres de sexe et de douleurs morales. Endurcis par les affres de la vie. Des hommes perdus dans la débauche, les caresses abolies, tableau cauchemardesque d'une jeunesse qui se meurt. L'auteur délivre un fleuve gorgé de boue à l'encontre des diktats sociétaux, des inégalités criantes, des habitus étranglés par les marginalités, tranchées de guerre sociologique. L'écriture est soyeuse, écharpe de laine pour les hôtes des pages. « Et les grévistes, 7h30 le matin, le soleil à peine sorti pour venir crever le gris froid de l'hiver, pris entre la route régionale et la grille d'entrée, ils ont le lac dans les yeux, un feu qui brûle timidement dans une vielle cuve, et pas grand-chose d'autre. » L'histoire est encerclée dans le grand nord canadien, éloignée du consumérisme, en étau dans un chômage irrévocable, en toile de fond, un lac à perte de vue inspirant mais piégeant où ces oubliés d'un XXIème siècle s'entredéchirent. Le néant affiche le carton rouge. Une scierie aux rouages d'une idiosyncrasie en perte de vitesse, des travailleurs en grève suicidaire. Ce récit à visée syndicale et politique est sans compromission. Des hommes, dont Querelle fragile, offrant son corps en délivrance aux jeunes garçons aux abois, est un miroir d'honneur de sensualité. Gestuelle devenant un sapin de noël vacillant. Une femme, Jézabel dont le prénom colorie une Babel en furie, mi-déesse mi-démon, battante, va se frayer un chemin dans cet antre où le masculin est une chape de plomb. Ce récit est une plongée dans ce paroxysme de violence, de jouissance, une noyade prévisible, radeau de Géricault, mais d'une beauté infinie. Querelle au nom parabolique, emblème des oubliés, des mains écorchées vives, échardes d'une scierie de sang et de larmes. Il est le héros de ces gavroches des temps modernes, de ces révoltés, enfants écrasés d'un coup de pied sociétal. Nécessaire, percutant, lire « Querelle » est un devoir. Son sombre est une espérance, sa force, l'authenticité. Les émotions attisent les larmes. Ce récit tremblant de vérité confirme que toute lutte doit être constante et implacable. J'ai aimé ces garçons de la nuit. Dans les passages sublimes de lecture où tous étaient les soldats emblématiques, gerbes de ténacité pour un monde meilleur. A l'instar du murmure d'une quatrième de couverture donnante « Querelle se repose, content. Il est persuadé, pendant un très court instant, d'être utile à quelque chose et, d'une manière étrange, se sauver le monde juste un peu. » Publié par Les Editions le Nouvel Attila, qui viennent de mettre au monde un récit des plus engagés et bénéfiques.
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Quand un roman s'ouvre sur des exergues de Jean Basile et de Britney Spears, le lecteur comprend qu'il s'engage dans une expérience littéraire hors du commun. C'est exactement ce qu'est «Querelle», librement inspiré de l'autre Querelle, celui de Brest, imaginé par Jean Genet. Ce récit, sous-titré «fiction syndicale», fait sauter les barrières qui séparent la sexualité, la politique et les rapports de force sociaux patrons/ouvriers.

Le récit a pour décor une grève des ouvriers (et de quelques ouvrières) dans la scierie du lac Saint-Jean, dans la ville de Roberval au Québec. Parmi les différents protagonistes, grévistes ou patrons, le regard de l'auteur se porte particulièrement sur Querelle, ouvrier fraîchement débarqué à la scierie.

Emprunté du roman de Jean GenetQuerelle de Brest»), ce personnage nous est présenté comme l'incarnation d'un fantasme. Fantasme de ses jeunes amants qui l'idolâtrent, de leurs pères inquiets, et complexés par la masculinité exacerbée de l'ouvrier, et de l'ensemble de Roberval, enfin, qui se nourrit des rumeurs à son sujet et en fait une sorte de surhomme.

Cadencé par les rencontres sexuelles de Querelle et par l'avancée de la grève, le roman met en lumières les dynamiques de pouvoir, et leurs effets sur le quotidien de tous et de toutes. le mouvement syndical y est présenté comme un bras de fer avec non seulement le patronat, mais aussi entre ouvriers. Sous l'apparente cohésion de la lutte, on découvre rapidement les revendications plus personnelles de chacun. Alors que le conflit s'enlise, se réveille en eux une rage enfouie, jusqu'à un point de non-retour. Tout est désormais permis. Ils cassent des bouteilles sur la plage, règlent leurs comptes à coups de batte de baseball. Et puis ils font pire, bien pire...

Un roman étonnant, qui trace un parallèle ingénieux entre l'homosexualité de son personnage principal et la force subversive des revendications ouvrières qui embrasent la scierie de Roberval, et qui nous pousse à sortir de notre zone de confort avec un langage cru, imagé et, souvent, très violent.

Au-delà de l'univers ouvrier et régional qu'il met en scène, on décèle rapidement une volonté à faire comprendre, par les actions de ses personnages, l'étau que crée certaines structures de notre société, le mal-être et les désirs autodestructifs, la banalisation de la haine et de la violence, la quête du profit et les jalousies exacerbées… Sans mentionner que le récit transpire le Québec, on est immédiatement frappé de la ressemblance avec l'oeuvre cinématographique de Xavier Dolan.

Le rythme de l'intrigue s'accélère au fil des pages et nous amène à un final percutant et inattendu, qui a tout pour choquer et qui nous laisse dans un état de questionnement, à l'instar du soudain parti pris de l'auteur contre le syndicalisme. Cet aparté sans doute ironique et sarcastique est difficile à appréhender tant le reste du livre met en lumière cette dynamique de pouvoir oppressante à travers le quotidien de Jézabel qui ne peut pas trouver de travail puisque son patron s'attache à ruiner sa réputation, ou encore dans l'impunité avec laquelle il peut mener une guerre à ses employés, ne renonçant à aucun coup bas, mais toujours soutenu par les institutions en place, tandis que le moindre écart de conduite de la part des ouvriers et des ouvrières les conduit directement en garde à vue.

« Je ne demande pas pardon aux poètes que j'ai pillés ». La note de remerciements de l'auteur donne le ton de l'oeuvre : irrévérencieuse et sulfureuse. Sur le modèle de l'oeuvre originale de Genet, le roman met à mal certaines habitudes de pensées, ébranlant les repères moraux et les représentations traditionnelles. le lecteur sera tour à tour dérangé, excité, mal à l'aise, enthousiasmé, séduit, et le plus souvent tout à la fois par l'ambitieux pari de Kévin Lambert.

Un livre sulfureux qui parvient avec brio à traiter à la fois de luttes syndicales et de sexualité sans retenue. Une écriture percutante doublée d'une réinterprétation jouissive d'un grand classique de la littérature française. Pour ne rien gâcher, les éditions « Le Nouvel Attila » proposent un objet livre particulièrement réussi. Qu'on apprécie ou non ce livre, il ne laissera personne indifférent.
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Je ne suis pas du tout rentré dans ce roman (qui parle beaucoup de pénétration par ailleurs).
L'ennui à chaque page malgré les mots crus et le plaisir évident de l'auteur à vouloir choquer. Propos limites pédophiles qui ne rend pas service à l'homosexualité. Prétexte d'un sujet sociétal... Une fiction syndicale ? Peut-être... j'y vois surtout l'empreint d'un sujet bis pour pouvoir publier ses écrits pornographiques qui hélas ne m'ont même pas excités. Je suis peut-être passer à côté du livre, sans doute. Il y a une belle écriture mais le récit n'est pas tenu, en tout cas ne me tient pas...
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Quand un auteur québécois débarque en pleine rentrée littéraire hexagonale, il y a de quoi être confiant. Kevin Lambert et Querelle publié chez le Nouvel Attila confirment-ils cela ? Lettres it be vous dit tout !

# La bande-annonce

Une grève éclate dans une scierie du Lac-Saint-Jean, dans le nord canadien. Derrière une apparente solidarité ouvrière, l'ennui et la dureté de la lutte, que seules rompent les nuits dans les bars et karaokés, révèlent les intérêts plus personnels de chacun.

Parmi ces ouvriers, il y a Querelle, magnifique colosse venu de la métropole, et Jézabel, issue d'une lignée rebelle de mère en fille. Doux et charnels, ces héros incarnent la liberté, la jouissance et la joie sauvages, hors des lois du marché et de l'aliénation familiale ou sexuelle.

Au gré des sabotages, des duels et des ivresses, la colère s'empare des grévistes et les événements se conjuguent dans un conflit généralisé aux allures de vengeance sociale, qui rappelle le Siegneur des porcheries, Jean Genet ou Kathy Acker.

# L'avis de Lettres it be

À croire que le mouvement ouvrier et ses spasmes de lutte, que toutes ces couches de population qui s'amoncellent dans les territoires reculés d'ici et d'ailleurs, à croire que tout ça constitue la matière littéraire la plus intéressante en ce moment. On avait eu le livre de Joseph PonthusÀ la ligne : Feuillets d'usine en janvier dernier, un livre qui semblait (déjà) faire écho à Leurs enfants après eux, le Goncourt 2018 signé Nicolas Mathieu. D'un écho l'autre, Querelle, nouveau roman de Kevin Lambert publié en France un an après sa sortie québécoise, semble être le fils illégitime de cette tendance littéraire. Et de fils illégitime à grand espoir de la famille, il n'y a qu'un pas…

L'usine et le lit. Chambre à coucher du capitalisme et chambre à coucher… tout court. Kevin Lambert donne à Querelle (Querelle de Roberval dans son titre original) ce cadre-là avec la ferme intention de sonder ce monde ouvrier, ses grèves et ses revendications par le prisme du quotidien et du banal. Des karaokés, des bouteilles et encore des bouteilles, des amourettes, des échecs et des fiertés discrètes, la plongée du lecteur est réussie, sans accroc. Mais tout aurait été trop « normal » si l'auteur s'était arrêté là. Et Querelle peut entrer en scène : ce personnage jouera, au gré des pages, le fil rouge d'une histoire bien plus forte qu'elle en a l'air. Quand seule la sexualité se débride dans une existence vouée au cadenas.

« C'est Noël et, dans les sous-sols, les cousins et les cousines se font tripoter par des monsieurs pendant que les autres jouent avec leurs nouveaux Lego. Demain, ils pleureront d'avoir mêlangé les briques. »

Pas un dialogue pour rompre le rythme, pas une étincelle d'espoir ou de lumière. de son fond à sa forme, Querelle est une surprise permanente. Mention spéciale, d'ailleurs, à ce chapitre page 149 où l'auteur s'invite dans son récit, entre sans toquer pour une parenthèse claire et nette. Ou comment assumer et justifier de tout l'intérêt d'un doctorat en création littéraire obtenu par l'auteur. On adhère. En plus, on croirait croiser Vernon Subutex ou Neal Cassady dans ce livre, des personnages qui auraient pris la voie de la lutte finale dans un monde aux fausses allures de fin du monde. C'est n'importe quoi ? C'est précisément pour cela que l'on adore.

Querelle est un roman sale, brut, un roman qui gêne aux entournures. Les premières lignes coupent le souffle, et les autres cassent la gueule. On a envie d'arrêter, on se dit que c'est quand même un peu n'importe quoi, puis on continue, le thorax noué, compressé… On arrive à bon port sans trop savoir où nous sommes et d'où nous sommes partis. Manifeste ouvrier et/ou sexuel ? Critique de la lutte ? Aucune idée… Mais ce qui est certain, c'est que l'on vient de parcourir quelques 240 pages de littérature en barre. Et si c'était précisément cela la marque des grands livres ?

Retrouvez la chronique en intégralité sur Lettres it be
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Clash de classes, de belligérants, où parvenus et prolétaires se font la main, se font la moue. Quand grève et griefs piétinent tête baissée vers l'impasse, quoi de mieux qu'un lock-out à saveur d'allumette pour que scintille le plus beau des brasiers. Odeur de mort à l'ombre du merdier, ou quand « Querelle de Roberval » de Kevin Lambert prend ses aises, prend son pied légendaire de tout son foutre…
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Écrivain québécois né en 1992, Kevin Lambert a passé son enfance à Chicoutimi, petite ville située dans la région du lac Saint-Jean. En 2017, il publie son premier roman, intitulé Tu aimeras ce que tu as tué. Querelle de Roberval, rebaptisé Querelle pour le marché franco-européen, est son deuxième roman.

Les 21 employés de l'usine de la Scierie du Lac, la dernière scierie indépendante de la région du lac Saint-Jean, sont en grève depuis plusieurs mois. Querelle, 27 ans, homosexuel et fraichement venu de Montréal, est le dernier journalier arrivé. Comme dans le Germinal de Emile Zola, on s'immerge dans le quotidien des employés de la scierie engagés dans une lutte syndicale contre le patronat pour améliorer les conditions de travail. Héritier du Querelle de Brest de Jean Genet, véritable fantasme ambulant, Querelle donne à voir son quotidien sexuel avec les jeunes hommes en fleur de Roberval, rendant fou de rage et de vice leurs pères trompés.

Dans un style cru, pornographique, rappelant Guillaume Dustan, et suivant une construction digne d'une tragédie grecque (prologue, parodos, stasimon, kommos, exodos, épilogue), la lutte atteint des sommets de cruautés inattendus... et rimbaldiens.

La lecture est dure, les repères sont bousculés, les héritages littéraires sont empruntés pour mieux les tordre. Ce texte ne s'excuse pas (“je ne demande pas pardon aux poètes que j'ai pillés”) et met son lecteur au contact avec ses instincts les plus primaires. Je peux dire que je n'ai pas aimé lire Querelle, mais j'ai adoré y réfléchir !

Gaultier
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‪Fiction syndicale trash et violente, Querelle me laisse ULTRA perplexe. J'ai l'impression d'être en face d'un hybride mêlant porno gay et gilets jaunes. La critique politique tente de se mêler à la question des genres mais ça n'a pas fonctionné pour moi.‬
‪Inclassable.‬
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Merci à Lecteurs.com et aux éditions NOUVEL ATTILA pour cette lecture !

L'étape de la page 100 :
Ma première impression est plutôt mauvaise : le début du livre se découvre sur la couverture et ne laisse aucun doute sur le langage très cru de ce roman, ni sur son contenu. Je me traîne sur chaque page, ayant du mal à entrer dans l'histoire.

Après avoir refermé ce livre, je suis perplexe, assez déconcertée par ma lecture. C'est sans doute un ovni. J'ai du mal à mettre des mots sur ce que je viens de lire. C'est trash, c'est « débridé », c'est violent. 

Apparemment très inspiré de « Querelle de Brest » de Jean Genet, on y retrouve un homme, Querelle de Roberval, presque un Dieu, assouvissant sans frontière ses pulsions sexuelles, tel un ogre mangeur de jeunes garçons en fleur. Remplie de descriptions crues magnifiant la masculinité, l'histoire s'axe néanmoins autour d'une lutte syndicale. Difficile de faire le lien entre ces sujets divergents...  

Une grève éclate au coeur d'une scierie du Nord Canadien. Nous suivons les syndicalistes durant pratiquement un an de protestation. Querelle est l'un d'eux. On analyse la vision sociétale de ces travailleurs oubliés à travers une écriture fraîche et piquante comme seul les Québécois savent l'inventer.  le narrateur dit ouvertement être pour le patronat, ne pas soutenir la paresse et la bassesse des grévistes.  « De nos jours, la corruption et la paresse sont les deux seules choses que le monde a en tête quand on prononce le mot « syndicat » [...] » 

Notre vision du texte change donc à partir de là et nous repensons aux précédents faits avec un oeil neuf. La montée inexplicable de violence qui clôture cette grève et ce récit est une illustration rocambolesque de sa vision syndicale. Nécrophilie, infanticides, empalement et méchoui. Vous voilà prévenus.  Avec le recul, et malgré le fait que j'ai eu énormément de mal à le terminer, ce livre et sa vision sont intéressants. Même s'il était parfois difficile de trouver un sens à ce que je lisais, l'histoire syndicale me reste en tête.  Néanmoins, je trouve que le rythme est gâché par la profusion de détails crus et trash.

Alors oui, on pointe du doigt, en filigrane, entre deux piquets de grève, les conservateurs et les rétrogrades, les pensées d'un autre âge sur la sexualité débridé de certains. C'est bien, mais c'était peut être de trop.  

Je suis soulagée de l'avoir enfin refermé. Ce livre n'est pas à placer entre toutes les mains mais ceux qui aiment les récits « agressifs » et incongrus, ceux là sûrement, le trouveront novateur ! Pour ma part, je reste perplexe.

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J'ai adoré le début du roman. Me plonger dans une grève au Canada, découvrir la vie d'un jeune homme gay dans un environnement hyper machiste... le style m'a vraiment emporté et le québécois était pour moi une force.

Malheureusement, après 100 pages, j'ai eu l'impression de tourner en rond, que l'histoire n'avançait pas. Dès la première page, toute l'intrigue était là. Puis, plus rien...

Comme en parallèle ma liste de livres à lire ne baissait pas, j'ai fait le choix de ne pas aller plus loin pour consacrer mon temps à des romans qui résonneront plus facilement avec moi.
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Le roman était intéressant jusqu'environ la moitié et là cela devient du grand n'importe quoi. J'ai pas compris le but. Franchement je le recommande pas.
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