Autopsie d'un sans-papiers

On sait forcément qu'ils n'en ont rien à faire de notre survie et a fortiori de notre confort. Ils savent parfaitement bien que si nous sommes des sanspaps réduits à survivre clandestinement en France, c'est que la plupart d'entre nous sommes condamnés dans notre pays d'origine : et que quand ils nous auront rapatriés, notre sort sera de crever de faim, du typhus ou des deux à la fois ou alors de mourir suppliciés pour dissidence coincés dans un pneu enflammé. Pourtant, partout s'affichent des règlements et même une "charte" qui précisent que rien ne doit être "contraire à la dignité humaine", qu'il faut se plaindre contre tout abus d'autorité. Dans le fourgon de transfert, j'étais face à un panneau qui indiquait : "signalez tout traitement dégradant au 3636, numéro vert; appel non surtaxé.

Un romancier réel ou virtuel a toujours le choix du dénouement heureux, d'un clair de lune secourable ou d'une étoile filante présidentielle. Mais les poussières de quota, elles, n'auront jamais d'autre espoir que d'aller de jour en jour, de peur en peur, de survie en survie.
Jusqu'à la vraie rafle, celle du dernier petit matin, celle que l'on n'a pas su deviner, celle que vous n'aurez pas su dénoncer.

On ne nait pas sans papiers. On le devient. (...) On ne naît pas avec l'envie d'écrire. Elle survient un jour.

C'est quoi l'équivalent de la coupe de champagne dans un centre de rétention ?

Une prison c'est l'oppression, mais une prison sans écrit, cela ne peut être que du déni.