Mais je me répétais aussi la phrase merveilleuse d'Antonioni, je ne sais plus dans quel film : "L'amour, c'est vivre dans l'imagination de quelqu'un."
Le dîner a été bizarre, hésitant entre le vieux couple mutique et la première rencontre Meetic.
Il était la preuve que j'existais.
La suite est floue, je revois le soleil revenu à travers la baie vitrée, un gros galet posé sur un coin de la table basse, les cendres grises, la couverture écossaise où j'étais enroulée, la nuit qui tombait.
C'est quoi, l'amour ? C'est quoi, sinon l'envie de retrouver toujours un certain corps, et le récit qu'on s'en fait ?
Va mourir.
La phrase qui tue.
Il y a des gens qui se défenestrent pour moins que ça, non ? Il y en a plein ici. A force d'être cognés à coups de mots, ils chancellent.
Va mourir. VA MOURIR. Les paroles des autres les poursuivent comme des fantômes hostiles. Leurs voix profèrent des injonctions impossibles à fuir. Du harcèlement textuel, en quelque sorte, ah ah ! Moi aussi j'aime les jeux de mots, vous voyez.
Qu'est-ce qu'un enfant ? Comment vous dire... C'est quelqu'un qui a besoin qu'on s'occupe de lui.
C'est quelqu'un qui veut qu'on le berce.
C'était moi l'enfant. D'accord ? C'est moi. Il n'y a pas d'âge pour être petite.
Enfin, vous êtes une rhapsode : vous brodez du lien sur les trous, vous reprisez. Ce n'est pas pour rien que ça s'appelle la Toile. Tantôt on est l'araignée, tantôt le moucheron.
Difficile à dire. C'est mystérieux, le désir. On veut de l'autre quelque chose qu'on n'a pas ou qu'on n'a plus.