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Des héroïnes de roman qui portent mon prénom et qui ont mon âge, ça ne court pas les rues. Alors cette Nicole Sauxilange née en 1966, j'ai eu très envie de m'intéresser à son cas, alléchée par une chronique bien troussée dans Télérama. Bien m'en a pris puisque j'ai découvert un auteur et surtout une plume comme on n'en fait plus beaucoup, de celles capables de vous tricoter des phrases sur plusieurs pages, de celles qui usent des parenthèses au point d'en mettre aussi dans les parenthèses (eh oui... mieux vaut avoir l'esprit clair, pas d'alcool avant de se plonger dans ce livre, hein.). Et surtout, de celles qui vous transforment l'histoire d'une fille banale en celle d'une héroïne à vous tirer des larmes (de rire le plus souvent). Ou l'art de réenchanter le fait divers.

L'histoire de Nicole Sauxilange (prénommée ainsi par une mère qui détestait autant ce prénom que le bébé non désiré) est narrée par l'un de ses anciens camarades de classe après qu'il l'a reconnue sur la photographie d'une page du magazine Dreamgirls, affichant tous ses charmes sur papier glacé avec, semble-t-il un certain talent. Photographie qui figure également, par un heureux hasard au-dessus du lit d'un prisonnier nommé Robert Malbosse qui ne se doute pas un instant que cette pin-up est sa fille. A partir de ce début jouissif, on retrace la vie de Nicole - plus connue sous le pseudo de Nicky Soxy - et on n'est pas déçu du voyage. Une dose de Cosette, un saupoudrage du Rémi de Sans famille et on a un bon aperçu du pedigree de la donzelle confrontée dès sa naissance à un environnement de frappadingues et de tarés en tout genre. D'ailleurs, je ne veux même pas déflorer cette partie tellement c'est croustillant. Très tôt, Nicole veut devenir célèbre mais, sans trop se fatiguer. Elle a bien songé à faire comme Françoise Sagan ou Anne Franck mais n'a jamais dépassé l'étape du titre sur le cahier dédié à son oeuvre. Lorsqu'elle lit pour la première fois un magazine de charme, elle se dit qu'elle tient la solution (d'ailleurs, Marylin Monroe elle-même a débuté ainsi) qui la mènera de Clermont-Ferrand à Paris...

Mine de rien, Eric Laurrent nous dresse le tableau d'une certaine société des années 80 où pointait déjà le règne des medias et des paillettes, avant l'invention de la télé-réalité dont Nicole aurait certainement été une reine. le petit monde qu'il décrit, même dans ses aspects les plus sordides (et il y en a), il a une façon jubilatoire de nous le donner à déguster, sans lésiner sur le vocabulaire d'une érudition rare (nécessitant la compagnie d'un dictionnaire). Résultat : on se régale.

Je ne peux que vous inciter à passer un bon moment avec ce livre aussi croustillant dans le fond que surprenant dans sa forme. Quant à moi, je vais sûrement m'intéresser à la dizaine de romans déjà commis par l'auteur. Et puis le relire, celui-là.
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Il faut savoir que Un bon début prélude à Une fille de rêve du même auteur, sinon la déception risque de prendre toute la place à la fermeture du roman.
Nicole Sauxilange est abandonnée à sa naissance par sa mère adolescente. Fruit d'une union incestueuse, la petite Nicole est élevée par ses grands-parents, au sein d'une famille reconstituée, bancale, un environnement qui ne prédispose aucunement à l'édification. Sans repère sérieux, influencée par la musique pop et ses vedettes instantanées, Nicole se projette dans un avenir rêvé, nimbé d'une célébrité qu'elle aura atteinte en tant que chanteuse, actrice, écrivaine (« Elle avait déjà en tête le titre de l'ouvrage : Adieu joie. Cela valait bien Bonjour tristesse. Elle n'alla pas au-delà du premier paragraphe. »), diariste ou pourquoi pas, athlète. Mais sans talent évident, comment parvenir à la gloire?
Éric Laurrent décrit très bien l'obsession d'une fille issue d'un milieu modeste qui table sur son apparence pour parvenir à ses fins. Malgré des phrases à rallonge et l'abus des doubles parenthèses, un style qui m'a rebutée au début, j'ai aimé cette histoire à la fois sordide et belle, portée par un langage châtié.
C'est donc avec une grande curiosité que j'aborderai la suite, Une fille de rêve.
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Imaginez qu'un jour vous découvrez dans les pages centrales d'un magazine dit «de charme» la photo d'une ancienne camarade classe. C'est ce qui arrive au narrateur du nouveau roman d'Eric Laurrent, né comme cette pin-up en juillet 1966 à Clermont-Ferrand. Avec lui, nous allons remonter la biographie de Nicky Soxy, qui s'appelle en fait Nicole Sauxilange.
L'ironie du sort fait que parmi les milliers de personnes qui ont choisi d'agrémenter leur décoration en affichant cette photo du magazine Dreamgirls d'octobre 1982 sur leur mur figure Robert Malbosse. « Pas un seul instant, cet homme de trente-six ans, qui achevait de purger dans la maison d'arrêt des Baumettes, à Marseille, une peine de réclusion pour trafic de stupéfiants, ne soupçonnerait que la jeune femme dont les généreux appas égayaient les murs décrépis de sa cellule pût être sa propre fille. Il ignorerait même jusqu'à la fin de sa vie qu'il en avait une. »
Car ce petit délinquant ne se voyait pas en chef de famille et aura préféré prendre la poudre d'escampette en apprenant que Suzy était enceinte. Mais ce n'est ici que l'un des épisodes de cette chronique de la misère sociale. Car Suzy est le fruit – défendu – d'un viol perpétré par son beau-père alors qu'elle était à peine pubère. Aussi est-ce davantage pour échapper à sa famille qu'elle se jette dans les bras de Bob, plus que par amour. Laissant sa fille aux bons soins de sa mère, elle prend aussi la clé des champs.
La petite Nicole apprendra bien vite que l'enfer est pavé de bonnes intentions. Fini l'alcool et les drogues, bonjour les principes stricts. Car après un soir de beuverie Max Turpin, en vomissant son alcool, entend une voix le menacer de damnation éternelle. « À l'instar de tous les repentis, l'homme déployait en effet la même ardeur à respecter, et surtout à faire respecter, les principes religieux qu'il avait mise pendant vingt à fouler aux pied. » Si Nicole veut tout d'abord être une sainte, elle va bien vite comprendre que cette vocation est très limitée, tout comme celle de prendre la place de Nadia Comaneci. « À la vérité, pour n'avoir de disposition ni d'inclination bien marquées pour aucune discipline, Nicole Sauxilange ne se sentait nulle vocation particulière : la célébrité seule l'intéressait– c'était un but en soi. Par conséquent, le domaine dans lequel le sort lui accorderait toute latitude de s'illustrer lui importait bien peu ; ses exigences étaient mêmes fort modestes en la matière : qu'un simple fait divers la révéla au monde la comblerait pleinement. » En partant pour Paris et en se faisant photographie rsous toutes les coutures par son petit ami, elle réussira dans son entreprise, deviendra Nicky Soxy. Durant près d'une dizaine d'années, elle sera à la une des magazines et arpentera les plateaux télé. Puis mourra sans faire de bruit.
L'auteur de Berceau et Les Découvertes réussit le tour de force de raconter ce drame avec un style néo-proustien fait de longues phrases, utilisant un vocabulaire soigné, recherchant quelques mots «compliqués» quand il ne les invente pas lui-même. Aussi le suit-on avec délectation dans ce récit qui allie l'élégance au sordide. Un contraste saisissant, un peu comme si Cosette partait à la recherche du temps perdu…

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Effectivement le début est bien, mais au final il n'en restera pas grand-chose. Des phrases longues, des parenthèses dans la parenthèse. Exemple de phrase page 196 : 'Bientôt elle n'en put mais.' Des familles glauques, une jeune fille qui veut devenir célèbre. Une fin à l'eau de rose.
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Longtemps, je me suis levé de bonne heure. Parfois, à peine ma la lampe allumée, mes yeux s'ouvraient et cherchaient le nouveau livre d'Eric Laurrent, si vite que je n'avais pas le temps de me dire : « Je suis éveillé. »... Ce beau début emprunté à Proust n'est là que pour signaler que l'un des auteurs les plus sous-estimés de ces quinze dernières années - au moins - a sorti un nouveau roman. Eric Laurrent avait déjà atteint des sommets dans l'autofiction avec Les Découvertes ; il nous avait aussi donné à lire un magnifique récit sur l'adoption - Berceau - il y a à peine un an et demi, et fut aussi responsable d'un très beau livre sur le décès de sa grand-mère (À la fin), pour ne citer que quelques exemples ; le voici revenu à une forme de roman plus classique, avec son penchant pour la grande phrase littéraire, harmonieuse, riche, musicale, une langue soignée à l'excès pour le plus grand plaisir du lecteur, et toujours court-circuitée par ce talent pour l'observation minutieuse des moeurs contemporaines (l'histoire se situant entre la fin des années 60 et le tout début des années 80), ce qui donne une tournure cocasse à certains chapitres. C'est qu'Eric Laurrent prend la littérature de vitesse tout en restant d'une concision rare et ce, probablement, grâce à un imaginaire fécond. S'il fallait le comparer (même si comparaison n'est pas raison, je sais), je dirais qu'il est dans la lignée directe de Jean Rouaud, De Balzac (pour ce roman en tout cas) ou même de Marcel Proust. Mais ce qui distingue particulièrement Eric Laurrent, c'est peut-être sa façon de décrire l'enfance, mais aussi l'adolescence et la découverte du corps (des corps parfois) et de la sexualité, avec un penchant pour la mélancolie post-coïtale peut-être ? Une fois la lecture terminée, on remarque cette ellipse parfaite, on reprend le premier chapitre, et on se surprend à relire Un beau début, entièrement - miracle ! c'est de la littérature, et de la grande.
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Comment une photo érotique de Nicole arrive-t-elle sous les yeux de son père ? Hasard, loi divine, coïncidence?
Ce roman s'ouvre ainsi : sur les pages arrachées à une revue de charme dont il a décoré les murs de la cellule, où il est enfermé pour trafic de stupéfiants, Robert Malbosse jamais ne saura que le corps dénudé qui s'offre aux regards est celui de sa propre fille.
le roman va se charger d'éclairer par quel enchaînement de faits et de circonstances ce corps de jeune fille s'est retrouvé là, punaisé au-dessus du lit du père.

Je n'ai pas réussi à prendre un vrai plaisir à lire ce récit. le sujet est certes intéressant mais l'écriture m'a agacée. Certains diront qu'il y a du Proust derrière, bien sûr, mais c'est too much. Personnellement, je n'ai pas envie de lire avec un dictionnaire sur la table de chevet, interrompre x fois ma lecture pour aller voir le sens d'un mot.
Et puis, je n'aime pas trop les écrits où la phrase fait un nombre important de lignes; où arrivée à la fin j'ai oublié le début; où de nombreuses parenthèses sont ouvertes en plein milieu du propos....

Et le narrateur qui surgit au beau milieu du livre, alors qu'on ne soupçonnait pas son existence ça m'a quelque peu déboussolée.

Je n'en garderai donc pas un grand souvenir, une impression que l'auteur a écrit à partir d'un sujet pour montrer son niveau de plume, de connaissances lexicale et syntaxique.
Lien : https://mesbullesdeplaisir.w..
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Sous un titre malicieux, on comprendra à la suite pourquoi, ce roman débute avec Robert Molosse surnommé Bob. Dans sa cellule de prison, cet homme de trente-six ans contemple une photo prise dans une revue d'une jeune fille dénudée. Il ignore qu'il s'agit de sa fille (et ne le saura d'ailleurs jamais). Nicole Sauxilange née en juillet 1966 à Clermont-Ferrand est la fille de Bob et de Suzy. Une mère adolescente abusée par son beau-père, déjà mère, qui prend la poudre d'escampette car Bob, petit voyou, à l'annonce de sa grossesse a filé. Suzy laisse Nicole à sa mère et à son beau-père devenus bigots sur le tard. Il faut dire qu'avant l'alcool et d'autres les vices comptaient plus pour eux. "Dès lors que Max Turpin s'installa chez sa femme, plus rien ne serait comme avant. À l'instar de tous les repentis, l'homme déployait en effet la même ardeur à respecter, et surtout à faire respecter, les principes religieux qu'il avait mise pendant vingt à fouler aux pied". Baignée dans une éducation religieuse, la petite Nicole rêve d'être une sainte. Mais son pépé Max tant aimé décède et sa mère Suzy revient pour s'occuper de sa fille et l'embarque.

Dans leur appartement, Suzy s'abandonne volontiers dans les bras de multiples amants. Et elle supporte très mal les chansons des Petits chanteurs à la croix de bois et les différentes bondieuseries de sa fille. A l'adolescence, la foi de Nicole se tourne vers le culte de l'image de soi. « À la vérité, pour n'avoir de disposition ni d'inclination bien marquées pour aucune discipline, Nicole Sauxilange ne se sentait nulle vocation particulière : la célébrité seule l'intéressait– c'était un but en soi. Par conséquent, le domaine dans lequel le sort lui accorderait toute latitude de s'illustrer lui importait bien peu ; ses exigences étaient mêmes fort modestes en la matière : qu'un simple fait divers la révéla au monde la comblerait pleinement. » Etre célèbre voilà à quoi rêve Nicole. Son petit ami la photographiera sous tous les angles et une fois la rupture amoureuse digérée, Nicole rejoint Paris en 1981 et envoie ses photos à des magazines. Elle devient alors Nicky Soxy.
On apprendra un peu par hasard au cours du récit sa mort après avoir vécu pendant quelques années de son physique (plateaux télé et magazines).

Il y aurait encore beaucoup à dire sur ce roman mais il ne faudrait pas oublier le style d'Eric Laurrent. de longues phrases amples où parfois s'enchâssent des parenthèses, un vocabulaire érudit alliant le sens des détails, les petites notes de l'auteur qui s'amuse à inventer un mot et à le référencer. L'ensemble est un mélange de sensualité et d'élégance. L'auteur ne tombe jamais dans les clichés même s'il n'est pas tendre avec ses personnages.
Avec des pointes d'ironie et de la sensibilité, c'est un roman diablement réussi que l'on a terriblement envie de relire une fois terminé !

Lien : http://claraetlesmots.blogsp..
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Une qualité d'écriture et une finesse psychologique à peu près incomparables à notre époque (pour le style, cependant, É. Chevillard est un rival sérieux, mais dans un tout autre genre), et l'on est d'autant plus abasourdi que l'auteur n'ait pas remporté de "grands" prix littéraires.

Dans le "Portrait souvenir" consacré à Proust, Paul Morand décrit la phrase de Proust comme "pleine d'incidentes qui soutenaient la phrase et l'empêchaient de retomber, qui soutenaient la phrase comme des ballonets d'oxygène et l'empêchaient de retomber", et je n'ai pu m'empêcher d'y songer en lisant se roman. À cela se combine en revanche une certaine économie dans l'intrigue, laquelle ne comporte que des faits qui concourent, d'une façon ou d'une autre, à sa progression (et l'on ne saurait en dire de "La Recherche").

Il serait trop long d'énumérer toutes les trouvailles de l'auteur, qui a le bon goût de les limiter à une ou deux occurrences: notes de bas de page fort drôles, révélation soudaine du point de vue du narrateur, concentration, un un ou deux paragraphes, de quatre ou cinq termes particulièrement rares - la langue est toujours précise, non précieuse, mais je pense que la succession des mots "vultueux", "paréidolie", "thérianthropes" aux p. 139-140 est voulue, car à moins d'avoir de bons souvenirs de grec et de latin, difficile de ne pas ouvrir son dictionnaire!

Je n'ai désormais qu'une hâte, qui est de lire: "Une fille de rêve", où l'on retrouvera l'héroïne de ce roman.
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Un très beau livre d'Eric Laurrent, d'une langue sophistiquée, proustienne, emplie de mots de rares, mais aussi parodique, donnant lieu à un décalage burlesque, souvent hilarant.
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Peinture sans pitié d'une frange de la société, de la classe inférieure, que l'on situe aujourd'hui dans les fameux - et méprisés - "territoires". Pas un seul des personnages n'est dépeint sous un jour positif. La jeune Nicole, qui a la chance d'avoir une belle paire de seins et les jambes bien tournées, en sera réduite à poser nue pour tenter de sortir de cette fange.

On pourrait croire à la énième histoire d'une célébrité qui est sortie de l'anonymat, mais le roman s'arrête justement à ce moment-là où toute biographie respectueuse d'un artiste commencerait: les débuts difficiles, la rencontre avec un dénicheur de talents, la gloire, les anecdotes croustillantes... Rien de tout cela ici.

On pense à Édouard Louis ou au Nicolas Mathieu de 'Leurs enfants après eux'. L'auteur n'éprouve aucune empathie pour ses personnages, il se contente de les observer comme un entomologiste regarderait un troupeau de fourmis, que dis-je, de mouches sur une bouse de vache.

Les phrases en sont longues, mais la lecture reste fluide. On peut certes en critiquer le style, le langage châtié, les termes peu usités employés par l'auteur. Mais il ne font que renforcer cette distance à laquelle il se tient, rendant par contraste l'existence de ces personnages, plus misérable encore. Qui sommes-nous pour juger?
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