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EAN : 9782251447797
432 pages
Les Belles Lettres (09/02/2018)
4.33/5   3 notes
Résumé :
Au IVe siècle, le monachisme fait une timide apparition en Occident, à la faveur des récits de pèlerins et d’évêques orientaux réfugiés en Europe. Quelques siècles plus tard, il occupe une place incontournable dans la société médiévale. L’ouvrage de C. H. Lawrence raconte le prodigieux essor de ce mouvement, ainsi que les nombreuses formes de vie religieuse auxquelles il a donné naissance.
Le moine, selon la célèbre Règle établie par saint Benoît au VIe siècl... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Livre reçu grâce à l'opération Masse Critique.

C'est à un mouvement d'une ampleur et d'une profondeur intellectuelle exceptionnelles que s'attaque C.H. Lawrence dans cet essai historique consacré au monachisme médiéval et aux formes de vie religieuse en Europe occidentale. La plage chronologique envisagée est donc large, depuis le Haut Moyen Âge jusqu'à l'apparition des ordres prêcheurs, Franciscains et Dominicains en tête, durant le 13ème siècle. Naturellement, restreindre le récit au début du 13ème siècle ne signifie pas que le phénomène monachique se termine à cette période : il demeure encore aujourd'hui et ses manifestations ont été nombreuses et importantes. Mais on a probablement là, après l'apparition des ordres prêcheurs, l'éventail complet des formes de vie religieuse que le christianisme a engendré.

Le monachisme naît d'un paradoxe : le moine étymologiquement seul vit en communauté. C'est que le cénobitisme - la vie en communauté d'hommes à la recherche d'une relation privilégiée avec le divin - a gagné idéologiquement contre l'érémitisme, bien que cette forme de vie religieuse extrême rencontrât encore des exemples jusque dans la période moderne, et au-delà. La vie en communauté appelle des règles de vie commune, de la même façon qu'une vie dédiée au divin nécessite un règlement précis des offices et de la liturgie : la Règle de saint Benoît s'impose lentement en Europe occidentale. Remaniée et rendue plus rigoriste par un autre saint Benoît, d'Aniane celui-là, la règle bénédictine profite des puissances politiques de l'époque : empire carolingien en tête.

La règle bénédictine survit à Cluny, qui devient rapidement le centre de l'un des plus importants réseaux de monastères dans l'Occident médiéval. C'est précisément en réaction au monachisme clunisien qu'apparaissent de nouveaux ordres, comme celui des Cisterciens ou celui des Chartreux. le faste de la liturgie clunisienne éloigne, selon saint Bernard, les moines de leur mission de prière. de la même façon, la liturgie collective empêche toute forme individuelle de prière, toute tentative d'introspection religieuse qui permettrait un dialogue avec Dieu. Plus encore, c'est un autre paradoxe de l'histoire du monachisme qui est ici en cause : celui du rapport à la pauvreté. Les monastères possèdent des terres, des forêts, des ruisseaux. Ils disposent de véritables empires fonciers, source de revenus importants. Cela se ressent jusque dans les églises aux chapiteaux finement sculptés et historiés. Les abbayes cisterciennes, elles, font montre d'austérité : rien ne doit dévier le moine de la prière. Cette exigence de dépouillement se rencontre jusqu'à saint François, qui se dépouille de ses biens avant d'aller prêcher.

L'histoire du monachisme occidental est décidément faite de paradoxes. En voilà un autre : celui du rapport au monde. Certaines règles prônent la réclusion totale. Et pourtant, des tâches bien banales doivent être menées au quotidien : vendre la production du monastère, accueillir les hôtes ... Sur certains points, les frères convers apporteront quelques solutions. Car la règle écrite par Benoît d'Aniane donne à la prière une place considérable dans les journées des moines, laissant peu de temps aux travaux manuels et à l'étude, pourtant prépondérants dans la règle de saint Benoît de Nursie. Mais le rapport au monde, c'est aussi le rapport au siècle, et notamment à la puissance politique. Les princes comprennent qu'ils ont avantage à favoriser l'installation et le développement d'un monastère : Salut du peuple chrétien, Salut personnel, surtout. Sans puissance politique, et donc guerrière, aucune installation n'est possible. Mais le rapport n'est pas nécessairement celui de dominants à dominés entre le monde politique et le monde religieux. Les abbés et les évêques conseillent parfois les princes et leurs avis sont recherchés.

Autre paradoxe : le rapport à l'Eglise, en tant qu'institution. Les moines, au Haut Moyen Âge, sont des laïcs. L'exercice des sacrements pose problème. de la même façon, faut-il que les monastères se placent sous la protection des épiscopats, ou en sont-ils indépendants ? La puissance financière et le rayonnement intellectuel d'un abbé surpasse parfois celle d'un évêque : on pense à Suger, abbé de Saint-Denis.

Du monachisme naissant des mouvements qui entretiennent avec le premier un lien évident mais ne lui appartiennent pas forcément. Les ordres mendiants, par exemple, dont les prêches se déroulent en ville, ont fait voeu de pauvreté mais ils vivent clairement dans le siècle. Les béguinages, en Flandre, recueillent des femmes à l'idéal monastique. Nul doute que les formes de vie religieuse au Moyen Âge ont été multiples, et qu'à l'exigence des uns répondait le pragmatisme des autres. La lecture du livre donne à voir et à comprendre les monachismes dans l'Occident médiéval. On regrette toutefois et très fortement, l'absence de cartes indiquant les emplacements des monastères cités mais aussi le découpage politique aux différentes époques. La présence d'un lexique est salutaire. Enfin, si le propos est, dans son ensemble, parfaitement clair, on observe quelques redites qui alourdissent, le cas échéant, le propos. Cette synthèse demeure d'un grand intérêt intellectuel et elle rappelle, si besoin était, le rôle essentiel des moines et des monastères dans l'histoire européenne.
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C'est un ouvrage sur la naissance du monachisme en Occident et son développement au Moyen Âge, ou comme le dit le sous-titre, sur les Formes de vie religieuse en Europe occidentale au Moyen Âge.

Il répond aux questions que le lecteur peut se poser sur l'apparition de ces formes de vies religieuse et comment elles ont pu évoluer, des ermites ou anachorètes partis chercher la solitude dans le désert d'Egypte dès le IIIe siècle, aux organisations cénobitiques, c'est-à-dire des moines vivant en communautés et dont un des exemple les plus connus est sans doute Cluny.

Ce qui rend cet ouvrage particulièrement intéressant, c'est qu'il permet autant la compréhension de l'évolution de ces communautés et des liens entres elles, que du contexte social et économique qui permit l'apparition de ces différents ordres. Il explique par exemple comment l'aristocratie, en particulier les Carolingiens, a promu le monachisme pour établir son propre pouvoir.

Ce livre fourmille d'informations qui soulignent la place du monachisme dans la société au Moyen Âge ; on y apprend par exemple que « la Règle de Saint Augustin […] fut l'une des grandes découvertes de la fin du XIe siècle. Dans la tradition monastique occidentale, son retentissement fut comparable à celui qu'eut dans la population, quelques siècles plus tard, la découverte de l'Amérique ».

Les femmes, moniales ou ayant adopté d'autres formes de vie religieuse comme les béguines, n'y sont pas oubliées.

Ce livre m'a apporté une meilleure compréhension des ordres et un éclairage sur les multiples contradictions du monachisme: contradiction entre la recherche d'une vie de solitude et les regroupements en communautés ; entre la recherche d'une vie simple et frugale et la richesse et le faste de certains ordres, et enfin entre le retrait des affaires du monde et les liens pourtant étroits des moines avec l'église et les souverains.

Enfin, plusieurs personnages historiques décrits dans ce livre ont été une grande source d'inspiration pour le Nom de la Rose d'Umberto Eco.
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Le monachisme s'est développé au cours du moyen-âge dans un élan de foi qui entraina les hommes et les femmes de l'époque à trouver les voies qui menaient à Dieu.

Une des plus anciennes forme de retrait de la vie ordinaire pour se consacrer à la foi, fut celle de l'ermite qui connut un franc succès en Egypte mais aussi en Occident. Cette forme interfèrera longtemps avec la forme "monastère", car elle est habillée par ses défenseurs d'une recherche de pureté, d'authenticité, d'absolu que la vie en communauté ne pourrait permettre d'atteindre.

Néanmoins, les premiers monastères se mettront en place, avec pour conséquence de devoir définir une règle de vie à ces lieux. Plusieurs règles cohabiteront suivant les régions et les époques mais la référence restera la règle de Saint Benoît qui définit assez précisément les devoirs et obligations de chacun.

Retraçant l'histoire de ces monastères au cours du moyen-âge, on découvre ainsi la place des nobles dans les monastères qui purent être abbé sans que ce soit forcément un choix religieux; la vie des monastères doubles, où l'abbesse gérait les deux monastères...jusqu'à ce que la femme ne soit ramenée qu'au rôle de simple tentatrice et n'ait plus aucune position de pouvoir !

L'usage des oblats, à savoir le don d'un enfant à un monastère à partir de l'âge de sept ans, a fourni un nombre considérable de moines aux différents ordres, assurant leur développement en âmes et en biens puisque chaque enfant venait avec une donation.

On suit ainsi la règle de Benoît , revue et corrigée au fil du temps, et l'apparition de nouveaux ordres, les cisterciens, les ordres mendiants : franciscains et dominicains, ainsi que les moines chevaliers : templiers et hospitaliers.

J'ai été touchée par les Béguines, communautés de femmes, qui ont tenté de trouver une place et une forme innovante pour vivre leur engagement spirituel dans un monde religieux où les femmes étaient malvenues.

Un livre savant mais abordable et comme je ne connaissais pas du tout le sujet, j'y ai appris beaucoup.

Merci à Babelio et Masse critique et aux éditions Les Belles Lettres .
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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