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3,72

sur 81 notes
un roman tout en équilibre, comme le funambule sur son fil, retour sur le passé avec des souvenirs de son père plus ou moins distant, absent.
son récit va donc en pas de deux, nous menant dans ce vagabondage du présent et du passé.
au fil de l'eau, elle fait des rencontres, savoure ces moments suspendu au temps. Elle finit son voyage en embarquant sur la péniche d'un couple de mariniers avec un chien qu'elle a rencontré sur son chemin.
Ce n'est qu'un long chemin ici ou là, d'hier à aujourd'hui, tout comme la vie, faite de rencontres, de souvenirs, et une illusion d'avenir.

Michèle Lesbre m'enchante de livre en livre plus ou moins fort, le canapé rouge reste pour l'heure le plus intense à mon goût.
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"La vie était ainsi, pleine de dangers, mais aussi de moments radieux qu'il fallait saluer comme tels."

La narratrice est entre deux maisons, errant dans un temps indéfini, entre passé et futur. Un homme lisant sous un reverbère la ramène des années en arrière vers son père, être insouciant à qui les aléas du couple ne convenait pas forcément. La jeune femme se souvient alors de loin en loin de scènes marquantes qui l'ont construite.

Elle se laisse porter par le rythme sporadique des souvenirs et avance doucettement dans cet espace temps vague, vivant au jour le jour.

"J'ai soulevé le chien dans mes bras, il était lourd, chaud, je le serrais en enfouissant mon visage dans sa fourrure, dans cet état d'exaltation qui parfois me transporte au-dessus des mots que je ne trouve pas pour exprimer ces moments radieux où le corps exulte, où il n'est plus dans la retenue, l'apparence, où une joie secrète se déploie dans le silence. Il n'y a pas de mots pour ces instants-là." p. 94

Cette ouverture au présent lui permet de faire des rencontres lumineuses comme cet éclusier, rencontré puis quitté au matin, parce qu'il faut continuer à avancer sur ce chemin de halage, vers on ne sait quel futur. La quête est avant tout une quête personnelle, alliance subtile entre passé mélancolique et présent suspendu. La perte du passé n'est pas un malheur bien au contraire :

"Je pensais que les tas de pierre et de gravats, le bâtiment encore debout et tristement poussiéreux, faisaient partie de mes petites ruines intimes, de mes petites fins, de tout ce qui a été et qui n'est plus, comme dans toute vie. Il n'y avait aucune tristesse dans cette pensée, bien au contraire, c'était le sentiment d'éprouver tout le chemin parcouru depuis ces années où ces murs étaient mon univers. Leur disparition ne changeait rien. Je me sentais pleine de cette mémoire, de toutes ces longues années qui me ramenaient là." p. 128

Le rythme lancinant, indécis permet de vivre des interstices temporels dans lesquels se glissent subrepticement la lumière. La prose poétique rayonnante de l'auteur suit avec une délicatesse infinie les errances paisibles de la narratrice qui suit ses chemins, pas après pas.
Lien : http://www.lecturissime.com/..
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belle écriture pour voyager dans la nostalgie de l'enfance
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Michèle Lesbre on l'avait découvert en 2014 à la bibliothèque avec Écoute la pluie. Pas vraiment un coup de coeur, nous nous étions un peu perdus dans le rideau de pluie… Depuis nous avons rencontré l'auteur à Vineuil, et puis surtout nous avons découverts tous ces autres romans.

« Chemins « c'est son dernier livre, c'est aussi celui que prend l'auteur dans ses écrits. Il y a souvent un fil conducteur, un élément déclencheur, des absences non comblées ( celle du père ), la trace d'une guerre et ses stigmates dans ses livres.

Dans ce dernier roman ce sera un livre lu par un homme élégant, étrangement assis sous un réverbère, qui lui donnera envie de s'engager dans un voyage. Ce livre elle l'avait vu dans le bureau de son père, ce souvenir la fera partir en voyage, là elle tentera de se réapproprier ce père si peu connu.

Le long d'un canal, dans un train…. les rencontres se font réminiscences. On la suit dans cette quête, retrouvée une maison, on se plaît à rencontrer une gardienne de vaches, l'éclusier, à s'installer dans une péniche avec ces mariniers si étonnants….L'auteur interpelle, parle, partage. On est spectateur d'une mélancolie douce, ou le paysage et le gris du canal se font chant d'amour.

Que de cheminsMichèle Lesbre a parcouru dans ses romans, que de rencontres elle nous a proposées, que l'histoire est douloureuse souvent.
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C'est un petit livre aux couleurs surannées, couverture crème, bordure marron glacé et nuances d'orange et de chocolat pour le titre: un parti pris années cinquante qui convient parfaitement à ces Chemins de Michèle Lesbre. Lacis de mémoire et de déambulations autour d'un canal, silhouettes imprécises ou improbables, aucune modernité dans ce livre, aucune intrigue; seulement un fil inlassablement tissé, un souffle ténu, la recherche impressionniste du père de la narratrice, cet « intime étranger ».

De ce qui n'est pas vraiment une rencontre (la narratrice ne parlera jamais à cet homme qui lit sous un réverbère) naît le roman de Michèle Lesbre, Chemins. L'inconnu lit Scènes de la vie de bohème d'Henri Murger, le livre de chevet du père de la narratrice. Un père énigmatique, peu présent dans la famille et quand il est à la maison le couple parental se déchire.

Tout est mis en place dès le départ : le livre que la narratrice n'a pas lu et qui va permettre la naissance de son propre livre, la maison qu'elle doit garder pour des amis et qui rappelle d'autres maisons, les personnages croisés le long du chemin évoquant d'autres personnages de son enfance.

Un éclusier menteur et séduisant auprès duquel il ne faut pas s'attarder, un vieux couple de mariniers lumineux et pleins de tendresse, l'ancienne maison des grands-parents devenue une sorte de musée, l'ancienne maison des amis qui n'est plus reconnaissable, un cahier égaré, un homme aimé… Un livre tout en tours et détours, finesse et sensibilité, une façon de se perdre pour mieux se retrouver.

Le père mort très tôt se dérobe sans cesse, comme la maison au bord du canal que la narratrice n'aime pas sans la connaître parce qu'elle était attachée à la précédente qui représentait sa jeunesse.

Le charme puissant de ce livre si simple, tout en retenue et en pudeur, tient en grande partie à l'écriture :

Dans la rumeur de la ville qui s'amplifiait soudain, et au moment où je me rapprochais de la rue où j'avais vécu plusieurs années, je pensais que nous n'avions su que nous égarer dans le mutisme et les cris.

Couple désuni, enfant témoin, enfant otage.

Au rebours de la vie chez les grands-parents :

Au Pommier, de ma chambre, je pouvais entendre les voix des adultes déjà levés, elles montaient jusqu'à moi comme un murmure. J'écoutais ce babil familier les yeux au plafond, où passaient l'ombre d'un oiseau en vol, la dérive d'un nuage, une silhouette imprécise qui traversait la cour. Puis je bondissais et surgissais dans la splendeur du matin comme une petite folle, portée par la même joie de vivre que celle qui rayonnait sur le visage des adultes. (…) Tant d'autres (matins) qui ont laissé des traces lumineuses dans la nuit opaque des chagrins et de la fuite du temps, et me guident lorsque je crois perdre mon chemin.

Superbe musique des mots qui coulent de source sans une virgule de trop, sans un adjectif superfétatoire. Une merveille poignante qui fait comprendre pourquoi on compare si souvent l'auteur à Modiano : même effilochement de riens, même atmosphère ambiguë où on peine à rejoindre ceux avec qui on n'avait déjà pas réussi à partager de l'intimité lorsqu'ils étaient présents.

Ces Chemins auxquels Michèle Lesbre nous convie, ce voyage dans la mémoire sur des eaux tranquilles traversées de trouées de lumière n'a de fiction que le nom. Ce « roman » si joliment édité par Sabine Wespieser ressemble à un cahier d'écolier ou plutôt à un journal. Cette recherche tenace et nécessairement vaine d'un père absent depuis toujours pourrait être la nôtre : il y a toujours quelqu'un qui nous échappe depuis l'enfance, quelqu'un d'important avec qui nous n'avons pas réussi à communiquer et cela nous déchire.

Un petit livre comme un chemin des écoliers et une douceur poignante d'enfance inachevée.
Lien : http://nicole-giroud.fr
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Une grande douceur émane de ce livre, promenade nostalgique que nous avons tous emprunté un jour. Pas de but particulier si ce n'est la recherche du père, plus exactement, la recherche de moments partagés avec lui, moments trop rares, définitivement disparus. Ces instants ont-ils vraiment existé ? L'unité du lieu nous renvoie à la pérennité de ces lieux sur lesquels le temps n'a pas de prise mais ne serait-ce pas le fruit d'un désir que rien ne doit changer. L'enfance n'est-elle pas la meilleure part de la vie, avec son cortège d'inconnu, de questions sans réponses.
Les trouver, ces réponses, semble être la quête essentielle de ce texte empreint d'une douceur enfantine.
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Sous la lumière d'un réverbère, assis sur le trottoir, un homme lit
"Scènes de la vie de bohème" de Murger.

Non loin de là, depuis la terrasse d'un café, une femme observe cette image de solitude et de bonheur évident.
Petit à petit, une autre silhouette vient se faufiler dans cette image, celle de son père disparu.
Un père qu'elle a si peu et mal connu.
Le livre de Murger était toute la jeunesse de ce père, "cet intime étranger".

Cette scène insolite déclenche alors chez cette femme, la narratrice, le besoin de percer enfin le mystère de son père, parti trop tôt.

Débute alors un voyage rythmé de paisibles étapes le long d'un canal, chemin qui l'entraîne en douceur vers une maison qu'elle doit garder mais aussi vers son père et les souvenirs d'enfance.

Les temps se côtoient, passé et présent se mêlent, un entre-deux qui jamais n'est loin.
L'imagination et la mémoire dérivent au fil de l'eau et des rencontres.
Tout devient objet de contemplation, de méditation.
Une ode à la rêverie, à l'évasion, à la flânerie...
Un enchaînement de paysages, de tableaux bucoliques, le calme, la douceur de vivre, les belles rencontres.
Une errance joyeuse et nostalgique.
Profiter de l'instant présent, ne pas se presser, laisser venir les émotions, les souvenirs en soi.
Ne pas brûler les étapes, ne pas brusquer les choses, s'imprégner doucement.
Pour parvenir au but, il est parfois essentiel d'emprunter des chemins plein de détours et progresser lentement.
Contraste avec des réminiscences d'enfant souvent douloureuses mais nécessaires pour avancer, résister et se construire.
Pour retrouver la paix et la sérénité.

"Chemins", sans doute le plus personnel de tous les livres de Michèle Lesbre.
Une écriture fine, limpide et poétique.
Admirable, tout simplement!


Lien : http://jeblogueunpeubeaucoup..
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Lecture agréable de ce court récit de Michèle Lesbre tout en douceur et en poésie.On plonge dans une atmosphère à la Modiano.Ce qui est intéressant dans Chemins c'est la mise en mots de ce que sont la mémoire et les souvenirs , souvenirs que la narratrice convoque sur les chemins des bords de la Loire,et qui la submergent.Nous, lecteurs ,partageons dans notre vie cette expérience,la littérature en montre la richesse.
La narratrice vagabonde sur les terres de son enfance en quête d'une "rencontre" avec son père disparu depuis longtemps.Une quête vaine d'un père "intime étranger".En chemin elle reste ouverte au présent , à la vie, aux rencontres lumineuses , elle est dans plusieurs temps à la fois.
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Si je croise un livre de Michèle Lesbre que je n'ai pas lu, je ne résiste pas. C'est le cas pour Chemins rencontré par hasard sur l'étal d'une librairie. Cette fois nous cheminons dans les souvenirs d'une femme dont nous ne connaissons que le surnom que son père lui a donné"goule pia". Il y a bien sûr le chemin physique, celui de la mémoire et au bout du bout celui de l'apaisant pardon. J'aurais aimé que la ville de son enfance ne soit pas nommée R, ce qui m'aurait sans doute permis de visualiser les lieux. j'ai découvert l'existence de Henry Murger et aimé rencontrer Jean-Claude Pirotte au détour du chemin.
Je suis sortie de ce livre, moi aussi apaisé.
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L'auteur a peu connu son père. Ce qui lui reste en mémoire, c'est une stature, le titre d'un livre en particulier, l'odeur du tabac...

Cela l'habite et elle trouve ses réminiscences, dans une silhouette.

Dès les premières pages, le style s'impose, ce qui est son intime peut aussi devenir notre.
L'auteur divague de souvenirs réels et bien ancrés à des images fugaces qui lui arrivent comme des papillons que l'on voit se poser sur des fleurs au détour de la mise en émoi de nos cinq sens.

En fond sonore, le bruit de l'eau qui chemine dans la nature, accentué par de jolies phrases longues et légères.

La narratrice si elle pérégrine à travers sa mémoire, n'en oublie pas le présent et son lot de beautés, de rencontres et d'instants joyeusement volés.

Cette lecture est comme les pensées qui peuvent traverser notre esprit lorsque l'on regarde le soleil se lever sur un beau paysage, avec les premiers parfums de la terre encore emmitouflée de rosée.

Le lecteur se laisse prendre à cette douce chanson, et l'auteur nous parle aussi de ses lectures et cite quelques ouvrages sur lesquels nous avons envie de nous précipiter.

C'est vraiment un intemporel.
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